L'ESTONIE. A l'instar des deux autres pays frères, l'Estonie acquiert son indépendance en 1918. Suite aux accords du pacte germano-soviétique, son territoire est occupé par l'Union Soviétique en juin 1940. Un pacte « d'assistance mutuel » prévoit le stationnement de troupes en Estonie et l'occupation de bases militaires. Prétextant le non-respect de ce pacte, Staline fait occuper les trois pays baltes. Le NKVD va exercer une terreur rouge, pratiquant l'expropriation et la collectivisation des terre, la déportation de masse en Sibérie de 15 000 Estoniens remplacés par des colons russes. Entre août 1940 et juin 1941, 60 000 Estoniens sont liquidés dont 21 000 officiers et soldats de l'armée. Refusant l'enrôlement dans les milices communistes, des milliers de jeunes se cachent ou rejoignent la Finlande. Une petite troupe est créée, l'ERNA [url=#_ftn1]
[1][/url] et lors du déclenchement de Barbarossa, des commandos prennent pied en Estonie pour lutter contre l'occupant et renseigner la Wehrmacht. Une légion estonienne est mise sur pied (
eesti leegioni) futur noyau de la
20.Waffen-Grenadier-Division der SS (estnische Nr.1). Après la rupture du front de Leningrad, l'Estonie devient le théâtre de combats acharnés à Narva puis sur la
Tannenbergstellung lors de la bataille des SS européens. A partir de septembre 1944, l'OKH décide l'évacuation de l'Estonie (opération Aster) par Reval. La république estonienne est proclamée, elle sera éphémère, elle ne survit que trois jours seulement jusqu’à l’arrivée de l'Armée Rouge. Le gouvernement provisoire est arrêté. La découverte de documents de l'Abwehr avec les noms des responsables politiques et des chefs de l'armée clandestine permet au NKVD a procéder à des rafles décapitant ainsi la résistance.
Décidés à lutter contre l'oppresseur soviétique, 15 000 hommes ainsi que des femmes rejoignent les forêts qui constituent presque 50% de la surface du pays. Divisés en petites unités mobiles connaissant bien le terrain, les Frères de la Forêt se dissimulent dans des refuges souterrains reliés entre eux par des galeries. Ils mènent des actions contre les unités isolées de l'Armée Rouge en faisant des prisonniers. Les collaborateurs estoniens capturés sont jugés par des Tribunaux de la Forêt et exécutés. Les partisans parviennent à tuer le chef du contre-espionnage en Estonie Abrahimov.
Dans les centres urbains, il existe également de petites entités appelées Frères urbains opérant contre les soviétiques.
Un des chefs les plus prestigieux est Ants Kaljurand. Son nom de guerre est la fourmi terrible. Ayant rejoint la
20.Waffen-Grenadier-Division der SS, il déserte en septembre 1944 et part se cacher dans les bois où il est arrêté une première fois et parvient à s'échapper. Il est arrêté le 24 juin 1949 une nouvelle fois, jugé et condamné à mort, il est exécuté à Tallinn le 13 mars 1951.
Reprenant une méthode utilisée en Ukraine dans les années 1930, les soviétiques confisquent les denrées alimentaires, provoquant une grave disette dans les villages soupçonnés de cacher ou d'approvisionner les « bandits fascistes ». Les terres sont confisquées et collectivisées.
En novembre 1947, 8468 partisans avaient été tués ou capturés.
A partir de 1953, pas moins de 93 000 soldats, policiers et miliciens passent au peigne fin les forêts, raflant trois mille rebelles. Ils sont dénoncés par des indicateurs. Ils tombent parfois dans des pièges mortels, avalant de la vodka empoisonnée livrée par des renégats, collaborateurs de la police de sécurité.
En 1955, il ne restait plus que 900 combattants.
Le dernier Frère de la Forêt à tomber est August Sabbe, le 28 septembre 1978 découvert dans le sud du pays. Pour échapper aux agents du KGB à sa poursuite, il se jette et se noie dans le fleuve Vöhandu.
ANTS Kaljurand Casquette NKVD
SOURCESRoberto Rosselli,
La Résistance antisoviétique et anticommuniste en Europe de l'Est de 1944 à 1956. Akribeia. 2009.
Mathieu Chillaud,
Stratégies d'insurrection et résistance anti-soviétique. Les « Frères de la Forêt » dans les pays baltes.