L'entrainement des parachutistes
Les bases de la formation militaire ayant été acquises,
le futur parachutiste quitte Saint- Brieuc ou Quimper pour Meucon où il entame son instruction
parachutiste après avoir subi les tests médicaux
qui le qualifient ou non pour ce stage.
Car l'instruction des BCCP se fait partie à Saint-Brieuc, Quimper,
ou Vannes pour tout ce qui concerne la remise en forme physique,
l'école du soldat et l'apprentissage du tir, partie à Meucon en ce qui concerne la formation
technique et la préparation parachutiste.
Il est à noter toutefois, que les premiers éléments des BCCP ont effectué leur stage parachutiste à
l'ETAP de Pau-Idron.
A partir du mois d'octobre 1948, le brevet se passe directement à Meucon.
Les avions du GMMTA viennent en mission à Vannes et les recrues sont brevetées directement sur place.
L'entrainement au sol s'effectue grâce aux toboggans,
à la maquette d'une carlingue de JU 52 reconstituée et au trolley,
sorte de roulette installée au milieu des pins à 12 mètres de hauteur sur un câble
d'une centaine de mètres de long
Officialisé, le centre d'entrainement au saut de Meucon sera équipé
d'une tour de descente en 1950 Il sera doté d'une tour de contrôle érigée
sur un blockhaus allemand désaffecté.
Après deux semaines de sortie d'avion (une vieille carlingue de JU52),
de roulé-boulé et de réceptions dans différentes positions,
l'élève exécute ses six sauts de brevet
Les sauts d'entrainements se font sans armes, puis avec armes
, de jour comme de nuit Le saut de manœuvre s'exécute avec l'armement,
un chargement de 30 kilos, un parachute dorsal et un ventral de secours.
Une partie du paquetage se trouve dans une musette fixée à la jambe droite.
Une fois le brevet obtenu, le stick de parachutistes rejoint son bataillon
où il bénéficie d'une permission bien méritée.
L'ambiance en Bretagne n'engendre pas la mélancolie.
C'est toute une jeunesse dure au mal, riche de la vitalité de ses vingt ans,
parfois désabusée, qui, parfois se révolte contre les inégalités et les injustices
du nouvel ordre social issu de la guerre et qui, dans bien des cas,
n'est pas celui qu'ils auraient souhaité. Fier d'un brevet parachutiste tout neuf,
on "dégage", on vit à fond l'instant présent, que ce soit à l'exercice ou en quartier libre.
Au bout du chemin, il y a souvent "un rendez-vous avec la mort"
sur une piste de la Haute-Région ou dans la boue d'une rizière.
A l'heure du départ, rarement une femme, mais toujours un copain pour les dernières
confidences avant l'aventure. Le stage commando se déroule également
à Meucon dans la meilleure tradition de l'école parachutiste SAS de Ringway.
Au fur et à mesure qu'un commando est formé et breveté, il rejoint le camp.
Le stage dure deux mois à l'issu duquel les paras-colos poursuivent leur entraînement
dans leurs garnisons. Tir instinctif, marche commando à 10 ou 12 kilomètres à l'heure,
parcours d'obstacles, "close-combat", pièges et explosifs sont au programme des
commandos parachutistes.
Les premiers brevets parachutistes de la DBCCP sont décernés le 15 novembre 1947 à
Pau-Idron.
L'entrainement commando en 1948
Dans un même dossier, un journaliste breton demeuré anonyme traitait du recrutement
des paras-colos en 1948.
Poursuivant son étude, il évoque maintenant l'entraînement commando
à Vannes-Meucon.
"Nous avons parcouru au camp de Meucon, sous la conduite du sous-lieutenant R...,
la piste d'entraînement, et nous nous sommes rendu compte de l'effort physique
qui est demandé à ces jeunes gens et de la volonté qu'il faut déployer
pour aborder toutes les épreuves qui leurs sont imposées.
Ponts de singes analogues aux ponts de lianes qu'on voit dans les revues missionnaires
ou les publications coloniales, lègers et branlants sur lesquels on surplombe
des précipices de 80 mètres, cordes qui se balancent entre les sapins au-dessus du sol
naturel sur lequel le débutant qui lâche prise se recevra durement
à la force des poignets, d'un pied, d'un vide....
Passage dans les arbres, de branche en branche,
à l'aide de cordes à grappins ou en s'entraidant sur l'obstacle
Grimper le long d'échelles de cordes ou en bois, de cordes à nœuds,
de cordes lisses pour atteindre à 20 mètres d'étroites plateformes triangulaire
d'où ils enchainent avec une descente, suspendus à un guidon qui les amène à 35 kmh
dans une sorte de sautoir où ils boulent cul par-dessus tête.
Ils enchainent avec la plate-forme du "saut de Tarzan" d'une amplitude de 18 mètres;
un câble accroché à un haut sapin auquel ils s'agrippent, fait balancier et,
prenant sur une sorte d'estrade, les dépose, un peu rudement, sur un monticule,
en passant par-dessus un fossé.
C'est ensuite la descente d'une tour sur un câble d'au moins 40 mètres de longueur,
suspendus par les mains à un guidon, avec un saut de plusieurs mètres à l'arrivée.
Puis se sont des maquettes de carlingue avec la porte de sortie latérale
d'où on leur apprend à se projeter dans le vide de toutes leurs forces,
pour éviter que le parachute et son haubanage ne s'accrochent
dans les ailerons de la queue de l'avion, soit, suivant le système anglais,
avec le trou au bord duquel on s'assoit avant de se laisser glisser dans le vide.
C'est aussi le "toboggan" qui déverse, sans douceur,
son homme dans un trou parfois bâché, où il apprend à faire le "roulé-boulé",
c'est à dire à se grouper en crispant ses muscles et en se "rassemblant"
comme pour un saut périlleux, se qui atténuera la rudesse du contact avec le sol.
Plus loin, ce sont les obstacles classiques," palanques"
( est un mur de retranchement fait de tronc d'arbres et de gros pieux joints
plantés verticalement), "ramping" mur d'assaut, fosses, poutres, haies, espaliers ..
Le parachutiste s'entraîne à marcher d'un pas souple et allongé, à accomplir à des allure
vive des parcours de plus en plus longs avec un fourniment se rapprochant
progressivement du chargement de combat.
Il arrivera à faire 10/12 km/h, en cross, avec son barda.
Le jour où nous étions eux, le détachement figurant l'ennemi qui allait être
attaqué à Sarzeau par des unités parachutées avait avalé,
en une heure, les dix kilomètres qui séparent le camp de Meucon à Vannes.
La nage n'est pas non plus négligée. Il arrivera que les parachutistes
seront débarqué de sous-marins et que le retour se fasse de même.
Le navire immergé à quelques encablures de la côte fera,
suivant un code convenu de siganux clignotants, vers lesquels il faudra nager pour
rejoindre les canots pneumatiques détachés à leur recherche.
L'apprenti parachutiste apprend à discipliner ses nerfs,
à durcir ses muscles en même temps qu'à se servir de son armement
et à s'orienter.
Il y a mieux, on va lui apprendre à se battre et à tuer.
Le sous-lieutenant R....m'a conduit sous deux hangars: des "punching ball"
où les hommes s'exercent à donner des coups terribles du coupant de la main
qui, portés à la gorge abattent pour le compte un colosse de 80 kg.
D'épaisses nattes de jute recouvrent le sol pour la lutte, le catch ou le jiu jitsu.
Ici, le "fair play" n'est pas de mise.
Il s'agit de se débarrasser de son adversaire par tous les moyens,
car, lui, ne vous épargnera pas.
On enseignera donc aux jeunes gens l'approche sournoise de la sentinelle
qu'on veut supprimer sans bruit pour remplir la mission,
l'uppercut qui soulève la mâchoire et le coup de poignard qui,
dans un éclair, tranche la gorge.
Loin de la charge à la baïonnette, c'est le combat dans l'ombre,
sans gloire, la vistoire de la surprise et de la rapidité,
de la brutalité sans illusion en cas d'échec.
Le dressage moral individuel qui discipline et qui durcit se double
d'une culture intensive de l'esprit d'équipe.
L'émulation habilement utilisée crée entre équipiers d'un même stick,
d'un commando et, finalement, dans toute la brigade, une solidarité,
une camaraderie qui trouvera toute sa valeur au moment de l'épreuve du combat
Fin du 8ème chapitre
Tiré du livre de Pierre Dufour1947/2007 Paras-ColoParchutistes d'Infanterie de Marine Préface du général Bigeard introduction du colonel Jean Daubas