Parachutistes d'Infanterie de marine (3e volet)
En se voyant attribuer le drapeau du 2e RCP-SAS
pour former la demi-brigade SAS d'Indochine qui
va donner naissance en 1947 aux parachutistes coloniaux,
ceux-ci se sont vu attribuer de façon indirecte la gloire
et les traditions des 2e et 3e RCP-SAS
pendant la Deuxième Guerre mondiale.
A la manière des amalgames qui créèrent les demi-brigades
de la Révolution et entraînèrent la rupture de la filiation
avec les régiments de l'Ancien Régime,
il s'agit bien de créer un ordre nouveau de guerriers
rassemblés, au-delà de la vaine appartenance à une arme,
à une caste militaire, de la couleur des boutons et des bérets,
autour d'un idéal et de la camaraderie,
s'appuyant sur des valeurs de courage,
d'audace, sur un entraînement intensif
et la mise en œuvre de nouveaux procédés de combat
à partir de la troisième dimension.
Ce sont ces origines mal définies que décrit le colonel Daubas,
acteur de cette époque, ancien conservateur et rénovateur
du musée des Parachutistes de Pau
, dans une correspondance adressée en 2000 au général Cann,
président de l'amicale des Anciens du 8e RPIMa
et que nous reproduisons avec son aimable autorisation :
''A la fin de la guerre, le pays et son armée
étaient dans un état de profond désarroi et de grande division.
Les rancœurs- pour ne pas dire les haines
– nées des heurts entre des conceptions opposées
du devoir face aux malheurs de la France,
voire les combats fratricides entre Français,
avaient entraîné de très violentes oppositions
qu'on ne peut imaginer si on ne les a pas vécues.
C'est dans cette ambiance, absolument délétère,
que sont nés les Parachutistes Coloniaux et qu'ils ont réussi
(avant beaucoup d'autres ) à rassembler des soldats qui, à l'époque,
n'avaient pas tellement tendance à se mélanger !
Il n'était pas évident que les parachutistes français de 1945,
divisés en deux ''chapelles '' opposées :
les FFL et l'armée d'Afrique,
parmi lesquels il n'y avait d'ailleurs aucun colonial,
allaient créer une nouvelle caste aéroportée :
les parachutistes coloniaux.
Il était encore moins évident,
dans les affrontements de l'époque entre FFL et non-FFL,
que les parachutistes coloniaux allaient quelque peu monopoliser
l'aura des SAS-FFL
( alors que tous les SAS ne devinrent pas des parachutistes coloniaux),
et attirer dans leurs rangs toutes sortes de coloniaux,
qui non seulement n'étaient pas parachutistes,
mais ne nourrissaient pas pour les FFL une tendresse particulière.
Certes, les régiments actuels ( 1er, 2e, 3e, et 8e RPIMa )
entretiennent avec ferveur la mémoire de ces grands anciens,
mais la véritable naissance des formations de parachutistes coloniaux
et la dominante historique est intimement liée
au début de la guerre d'Indochine et au besoin de disposer
de forces bien entraînées pour maintenir
la souveraineté française en Afrique et Madagascar.
On distingue là le rôle éminent des troupes coloniales outre-mer.
Ce nouveau conflit loin de la mère-patrie,
desservi par une opinion publique indifférente,
voire hostile à l'image du Parti Communiste,
sans grands moyens matériels, jouera un rôle considérable
dans la cohésion des troupes aéroportées
autour de quelques mythes et faits d'armes
et dans la réunification de l'armée avant la déchirure algérienne.
En revanche, l'héroïsme et le sacrifice des parachutistes réveilleront
– un peu tard – la conscience patriotique des Français
lorsque tout sera consommé dans l'enfer de Dien-Bien-Phu.
- En témoigne abondamment le carnet de chants des Troupes de Marine
où les chants consacrés aux formations de paras colo en Indochine
et, à un degré moindre en Algérie,
constituent l'essentiel de la liturgie des parachutistes
tandis qu'un seul chant est véritablement dédié aux SAS
et à la 2e guerre Mondiale ).