Bataille de Guise - Saint-Quentin (29 août 1914)
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Circonstances
Après la bataille du Cateau, von Kluck perd le contact avec les Anglais. Comme il pense qu’ils vont opérer une retraite vers les ports de la Manche et qu’il espère les encercler, il oriente son armée vers le sud-ouest, en direction d’Amiens. En fait, les Britanniques continuent leur retraite vers le sud, vers Saint-Quentin. Comme l’armée de von Bülow continue, elle, à marcher vers le sud, il se crée une brèche entre les Ie et IIe armées allemandes.
C’est l’occasion que recherche Joffre pour disloquer l’aile marchante de l’adversaire tandis qu’il constitue la VIe armée.
En outre, Joffre est préoccupé par la situation de l’armée anglaise. Il décide de diminuer la pression que la Ie armée allemande exerce sur elle en opérant une contre-offensive au moyen de la Ve armée. Le G.Q.G. porte cette décision à la connaissance de French, en escomptant sa coopération.
Joffre donne l’ordre à Lanrezac d’attaquer vers l’ouest, mais à ce moment, la Ve armée est engagée dans une retraite très délicate et la contre-offensive est ajournée. Le 27 au soir, l’armée est déployée face au nord-est, derrière l’Oise supérieure et le Thon, sa gauche à Guise. Lanrezac doit faire face à une offensive débouchant entre Landrecies et Rocroi.
Avant de se lancer dans l’offensive vers Saint-Quentin, il faut effectuer une longue marche de flanc face à l’adversaire avec un changement de direction à angle droit. En outre, le resserrement de la Ve armée sur sa gauche accroîtra l’intervalle entre la Ve et la IVe armée.
Le mouvement absorbe toute la journée du 28 et l’offensive ne peut débuter que le 29.
28 août : les prémissesDouglas Haig s’aperçoit que des formations allemandes considérables traversent devant son front, offrant à l’armée anglaise et à la Ve armée une occasion très favorable pour attaquer et il fait cette suggestion à Lanrezac.
L’idée de Joffre est de frapper en direction de Saint-Quentin, sur le flanc de la Ie armée allemande, pour retarder son avance. Cela s’avère d’autant plus utile que l’armée de von Kluck a déjà pris contact avec les unités avancées de la VIe armée (Maunoury), risquant de l’assaillir en cours de rassemblement. Le Q.G. de la Ve armée est à Marle et Joffre s’y rend. Il est plein d’optimisme et attend de grands résultats de l’offensive sur Saint-Quentin.
La nuit n’est pas encore tombée que le canon tonne sur l’Oise. Le 10e C.A., chargé de garder la rivière est bousculé et les Allemands rentrent dans Guise. La division Exelmans du 18e C.A. se trouve à proximité, faisant mouvement vers l’ouest. Elle s’arrête et rejette les Allemands sur la rive nord, puis continue sa route vers l’ouest.
Bataille de Guise - Saint-Quentin
La grande guerre racontée par les combattants
Dispositif de la Ve armée françaiseVoici le dispositif adopté par Lanrezac :
- Le flanc nord est gardé par le 10e C.A., prolongé à l’est par la 51e D.R. et la 4e D.C. Il devra interdire le passage de l’Oise à l’armée allemande.
- Tout le reste de la Ve armée, 3e et 18e C.A. ainsi que les 53e et 68e divisions de réserve doivent se porter à l’attaque à l’ouest de l’Oise entre Origny et Moy.
- Le 18e C.A. doit attaquer vers Ribémont, la 35e division à Villers-le-Sec, la 36e à Pleine-Selve et la 38e à La Ferté-Chévresis, direction générale de Saint Quentin.
- Le 3e C.A. doit préparer une offensive vers Saint-Quentin. La 5e division est à Puisieux, la 6e vers Courjumelles, Landifay. Par décision de Joffre, Sauret est remplacé par Hache à la tête du C.A.
- Au centre du dispositif, à Sains-Richaumont, le 1e C.A. constitue la réserve, et sera prêt à se porter soit vers Guise, soit vers Saint-Quentin selon les nécessités.
- La D.C. Abonneau doit occuper la région de Vervins et surveiller les directions d’Avesnes, Fourmies, Hirson et Rocroi. Elle doit couvrir l’armée contre une manœuvre débordante probable de von Hausen contre le flanc droite du 10e C.A.
La réalisation de ce dispositif s’effectue pendant la journée du 28.
29 aoûtLanrezac doit faire pivoter son armée pour la placer face au nord-ouest au lieu du nord-est. Il amène le gros de son armée face à Saint-Quentin et pousse la gauche et le centre au-delà de l’Oise dans les premières heures de la matinée. Le flanc de son armée est protégé vers le nord par le 10e C.A., établi sur les hauteurs au sud de l’Oise.
10h :Le général Hache, qui vient de prendre le commandement du 3e C.A., franchira l’Oise et au lieu de marcher sur Saint-Quentin, obliquera à droite pour attaquer Guise par l’ouest. Le 10e C.A. attaquera la ville par le sud ; le 1e C.A. appuiera le 10e. Mais devant l’écrasante supériorité numérique des Allemands, le 10e C.A. ne peut pas maintenir ses positions ; il recule et dès 10h du matin, la IIe armée allemande est maître des ponts. Très en confiance, les bataillons allemands franchissent les ponts de l’Oise mais l’artillerie française prend à partie les troupes d’assaut, les ponts et les renforts. Le 10e C.A. allemand, qui mène l’attaque, s’arrête puis ne progresse plus qu’avec prudence. La cavalerie Abonneau neutralise toute manœuvre enveloppante.
11h30 :Les Français progressent par le nord-ouest vers les flancs-gardes de la Ie armée, mais peu avant midi, les 3e et 10e C.A. sont attaqués par la Garde et le 10e C.A. allemand, qui se sont emparés la veille des passages de l’Oise entre Guise et Etréaupont et sont bien placées pour prendre de flanc la Ve armée française. Le 10e C.A. résiste mais perd du terrain et son recul expose le flanc du gros de l’armée, en marche vers l’ouest. La 51e division de réserve, qui fait face au nord, recule aussi et perd Voulpaix. La situation est grave.
Il faut à tout prix rétablir la situation à Guise. Lanrezac rappelle le 3e C.A., dont les avant-gardes ont déjà dépassé l’Oise et le lance avec sa réserve, le 1e C.A., au secours du 10e C.A. Ces forces rejettent les Allemands dans la vallée. L’attaque vers Guise est le premier succès offensif de l’armée française depuis le début de la campagne. Le 18e C.A., renforcé par une division d’Afrique, demeure seul chargé de l’offensive sur Saint-Quentin. Le groupe Valabrègue (59 et 69e divisions) étaiera sa gauche.
Le 18e C.A. et les deux divisions de réserve, privés de la coopération du 3e C.A., ont assailli de flanc les colonnes allemandes en marche vers le sud. Celles-ci, un moment décontenancées, font face vers l’est et contre-attaquent avec succès. Von Bülow est très impressionné de la réaction de la Ve armée, à laquelle il ne s’attendait pas.
Il demande à la IIIe armée de marcher vers Vervins et à la Ie de se rabattre vers Essigny-le-Grand, mais ces deux armées tournent le dos aux objectifs qu’on leur propose. A la Ie armée, le 9e C.A. n’est pas loin de Saint-Quentin. Von Bülow s’adresse directement à von Moltke et finit par obtenir qu’une de ses divisions déboîte vers l’est, sur Origny. Le 18e C.A. parvient jusqu’aux faubourgs de Saint-Quentin mais il doit se replier pour ne pas être pris de flanc.
15h30 :Franchet d’Esperey jette ses régiments en avant, après une forte préparation d’artillerie. De Jonqueuse à Vervins, sur un front de 20 km, l’attaque se développe. Les Allemands, décontenancés, reculent.
Le 1e C.A. enlève Jonqueuse, Bertaignemont, Chanlieu, Puisieux et refoule le 10e C.A. allemand sur Guise.
Defforges, à la tête du 10e C.A., reprend à la Garde Sains-Richaumont, Colonfay et le Sourd. Les réservistes s’emparent de Voulpaix et les cavaliers d’Abonneau se jettent hardiment sur les flancs de la IIe armée.
Les C.A. allemands se hâtent de repasser la rivière et battent en retraite vers le nord.
Il en résulte que von Kluck, alors lancé sur Amiens, fait accomplir à son armée une conversion de 90 degrés vers le sud-est pour répondre à l’appel au secours de von Bülow. Ce mouvement marque l’abandon du plan Schlieffen.
Cette manœuvre donne à la VIe armée le temps de se constituer et rend impossible une éventuelle retraite des Anglais vers l’ouest. Joffre pourra tendre une nasse dans laquelle les armées allemandes vont s’engouffrer. Sans la bataille de Guise, la victoire de la Marne n’aurait pas été possible.
La ligne de combat
Collection privée
30 aoûtAu matin, Lanrezac est autorisé à reprendre son mouvement de retraite et se replie sur Laon.
Conséquences de la bataille
Von Kluck interrompt son mouvement vers l’ouest et il renonce à marcher sur Paris dès le 31 août. C’est l’abandon définitif du plan Schlieffen. La masse des armées allemandes s’avance dans l’espace compris entre les places de Paris et de Verdun.
Cette modification du plan allemand permettra quelques jours plus tard à Joffre d’entamer la bataille de la Marne en prenant à son tour l’armée allemande de flanc.
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