Le 9 août, en réponse à un tir de missile en direction de Jizane, en Arabie Saoudite, la coalition arabe dirigée depuis Riyad a mené une frappe aérienne contre les rebelles Houthis, près de Dahyan, dans le nord de la province de Saada, au Yémen. Seulement, ce n’est pas le site de lancement de l’engin qui a visiblement été touché, mais un bus transportant des civils, dont des enfants.
Selon le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), au moins 29 enfants, âgés de moins de 15 ans, ont été tués alors que leur bus circulait près du marché très fréquenté de Dahyan. Et 48 blessés, dont 30 enfants, ont été admis dans un des hôpitaux gérés par l’organisation.
De son côté, le « ministre » de la Santé Houthi, Taha el-Moutawakel, a avancé le bilan de 51 tués, dont 40 enfants, et de 79 blessés (dont 56 mineurs). Mais ces chiffres ne sont pas encore définitifs étant donné que « de nombreuses personnes sont enconre portées disparues. »
Dans un premier temps, la coalition arabe a qualifié son raid aérien de « légitime ».
« L’attaque qui s’est produite aujourd’hui dans la province de Saada est une opération militaire légitime contre des éléments qui ont (…) tiré la nuit dernière un missile contre la ville de Jizane, faisant un mort et des blessés parmi les civils », a-t-elle affirmé dans un communiqué.
Et d’ajouter : « Cette opération a été menée dans le respect du droit humanitaire international ». Enfin, la coalition arabe a assuré de son intention de « prendre toutes les mesures pour faire face aux actes criminels des milices terroristes des Houthis inféodées à l’Iran », allant jusqu’à accuser ces dernières de recruter des enfants.
Les États-Unis, alliés des monarchies sunnites du golfe arabo-persique impliquées dans la coalition qui intervient au Yémen pour soutenir le président Abd Rabbo Mansour Hadi face aux rebelles Houthis (appuyés par l’Iran), ont fait part de leur préoccupation.
« Nous appelons la coalition dirigée par l’Arabie saoudite à mener une enquête approfondie et transparente sur cet incident », a ainsi déclaré Heather Nauert, la porte-parole de la diplomatie américaine. Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a également souhaité une enquête « rapide » mais « indépendante »…
À Paris, le ministère des Affaires étrangères a fait plus que d’exprimer ses « vivres préoccupations. » La « France condamne la frappe aérienne menée le 9 août qui a touché un bus à Saada » et « soutient l’appel du Secrétaire général des Nations unies à l’ouverture d’une enquête afin de faire la lumière sur les circonstances de ce drame », a indiqué le Quai d’Orsay. En même temps, il a souligné que la « France rappelle également sa condamnation des attaques houthies contre le territoire saoudien, qui ont fait un mort et des blessés parmi les civils dans la nuit du 7 au 8 août, selon la Coalition » et qu’elle « appelle toutes les parties au strict respect du droit international humanitaire. »
Cela étant, la coalition arabe a finalement annoncé, au lendemain des faits, « l’ouverture immédiate d’une enquête » à la suite d’informations concernant « une opération des forces de la coalition dans la province de Saada et d’un bus de passagers ayant subi des dommages collatéraux. » Autrement dit, elle sera juge et partie. Ce qui est insuffisant pour le Conseil de sécurité des Nations unies.
Lors d’une réunion à huis clos demandée par la Bolivie, le Pérou, la Pologne, la Suède et les Pays-Bas, le Conseil de sécurité a demandé que soit menée une enquête « crédible » et « transparente » sur ce raid aérien. Toutefois, il n’est pas allé jusqu’à lancer une enquête séparée qui, pour le coup, aurait été indépendante.
Toutefois, a assuré Karen Pierce, la représentante du Royaume-Uni auprès des Nations unies, le Conseil de sécurité « va maintenant discuter avec l’ONU et d’autres pour voir comment l’enquête peut avancer au mieux. »
Cette position a été critiquée par Human Rights Watch. « La triste vérité est que l’on a donné aux Saoudiens l’opportunité d’enquêter eux-mêmes et les résultats sont risibles », a en effet commenté Akshaya Kumar, directrice adjointe de cette ONG pour l’ONU.
Visiblement, le Conseil de sécurité a dû trouver un compromis… Car avant la réunion, les Pays-Bas avaient dit souhaiter une enquête « indépendante » sur ce raid aérien attribué à la coalition arabe.