Le 12 mars, Mme le Premier ministre britannique, Theresa May, a indiqué que le colonel Sergueï Skripal, un ancien officier du renseignement russe « retourné » par le MI-6 et réfugié au Royaume-Uni, sa fille Ioulia ainsi qu’un policier, avaient été empoisonnés une semaine plus tôt, à Salisbury, par un gaz innervant de « qualité militaire », appartenant au groupe des agents « Novichok », développés par l’Union soviétique dans les années 1970.
Aussi, Mme May a demandé des explications à Moscou au sujet de cette nouvelle affaire, qui rappelle celle d’Alexandre Litvinenko, un ancien agent du FSB victime d’une exposition au polonium 210, en 2006. La Russie a soit mené « une attaque directe dans notre pays », soit « perdu le contrôle d’un agent chimique aux effets potentiellement catastrophiques », a-t-elle déclaré, avant d’exiger, de la part des autorités russes, une « réponse crédible » dans les 24 heures.
Faute de quoi, « nous en conclurons que cette action constitue un usage illégal de la force par l’État russe contre le Royaume-Uni », a ajouté Mme May.
Dans un premier temps, Moscou a qualifié le discours de Mme May de « numéro de cirque à destination du parlement britannique ». Puis, la diplomatie russe a répondu que la Russie « ne répondra pas à l’ultimatum de Londres tant qu’elle n’aura pas reçu d’échantillons de la substance chimique » en cause. Et Sergueï Lavrov, le ministre des Affaires étrangères russe, a demandé l’ouverture d’une « enquête conjointe ».
Par la suite, l’Otan a sommé la Russie de répondre aux questions posées par le Royaume-Uni, lequel a par ailleurs reçu le soutien de ses proches alliés, dont la France et les États-Unis. Ainsi, la Maison Blanche a estimé que Moscou devait apporter des réponses « sans ambiguïté » sur cette affaire.
À l’issue d’un entretien téléphonique entre Donald Trump et Theresa May, la présidence américaine a fait savoir que les « deux dirigeants estiment qu’il doit y avoir des conséquences pour ceux qui usent de ces armes odieuses en violation flagrante des normes internationales. »
Enfin, le président du Conseil européen, Donald Tusk, a estimé que la Russie était « très probablement » derrière cette « attaque brutale », avant d’annoncer que cette affaire serait mise à l’agende du prochain sommet de l’Union européenne.
Finalement, faute de réponse de la part de Moscou, Mme May est revenue à la charge, ce 14 mars. Il n’y a pas d’autre conclusion que celle selon laquelle l’État russe est coupable de la tentative de meurtre » ayant visé Sergueï et Ioulia Skripal, a-t-elle déclaré devant le Parlement britannique. « Cela constitue un usage illégal de la force par l’État russe contre le Royaume-Uni », a-t-elle avancé.
« Il était juste d’offrir à la Russie l’opportunité de fournir une explication mais sa réaction trahit un mépris total pour la gravité de ces événements », a encore fait valoir Mme May. Mais « ils [les Russes] n’ont fourni aucune explication crédible. […] Au lieu de cela, ils ont traité l’utilisation d’un agent neurotoxique militaire en Europe avec sarcasme, mépris et défiance », a-t-elle dénoncé.
En conséquence, Londres a décidé d’expulser 23 diplomates russes, dont les services britanniques considèrent qu’ils sont en réalité des « des agents du renseignement non déclarés ». Et « ils ont une semaine pour partir », a précisé Mme May. Une décision identique avait été prise après la mort d’Alexandre Litvinenko. Sauf que 4 « diplomates » russes avaient été priés de faire leurs bagages.
« Nous allons donc suspendre tous les contacts bilatéraux de haut niveau prévus entre le Royaume-Uni et la Russie », a aussi annoncé Mme May. Cela concerne également une visite que devait bientôt faire M. Lavrov à Londre. Enfin, « il n’y aura pas de participation des ministres – ou des membres de la famille royale – à la Coupe du monde de football cet été en Russie », a-t-elle ajouté.
« Beaucoup d’entre nous ont tourné leurs regards avec espoir vers la Russie post-soviétique. Nous voulions une meilleure relation et il est tragique que le président Poutine ait choisi de suivre cette voie », a par ailleurs déploré Mme May.
Ces annonces ont été faites alors que le cadavre d’un opposant à M. Poutine a été retrouvé à Londres. Lié à l’ex-oligarque Boris Berezovksi, qui n’était pas en odeur de sainteté au Kremlin au moment de mort mystérieuse, en 2013, Nikolaï Glouchkov, 68 ans, avait reçu l’asile politique au Royaume-Uni en 2010. L’enquête a été confiée à la police anti-terroriste britannique, « par précaution et à cause des relations qu’avait cet homme. »