Monique BÉGUIN
L'histoire
Il est né en Belgique en 1900. Dès 1943, dans le Perche ornais, Marcel Verhalle a participé à la victoire des Alliés, avec l'aide de sa femme Marthe. Il a reçu en 1983 la médaille d'argent de l'American Legion. Soixante-dix ans après la Libération, ses enfants se souviennent...
Il y a ceux dont le nom illumine les frontons des monuments et ceux, plus obscurs, que bon nombre de personnes ont oubliés mais qui n'en n'ont pas moins contribué à sauver des vies et fait en sorte que les Alliés remportent la victoire lors de la dernière guerre mondiale. Marcel Verhalle fait partie de ces derniers.
« Dès 14 ans »
Il a ainsi reçu la médaille d'argent de l'American Legion et des lettres de reconnaissance signées des plus hautes autorités militaires américaines et britanniques. Il a été, par ailleurs, décoré de la croix du combattant volontaire.
« Dès l'âge de 14 ans, dans sa Belgique natale, il a commencé à porter des plis au travers du front et à maîtriser la langue anglaise, ce qui lui permettait de rapporter aux officiers anglais et américains ce qu'il entendait ». Charles Verhalle, son fils, qui vit à Moulins-la-Marche, ne peut cacher son émotion en évoquant la vie intrépide de son père, dont il garde précieusement décorations et courriers, bracelet militaire américain et même chaussures d'armée et casque militaire.
Dans un petit moulin
Tout a donc débuté en 1914. Marcel avait 14 ans. Il vivait à Dranoutre, en Belgique, avec ses parents. Ses quatre frères et soeurs avaient été évacués en France par la Croix-Rouge. Très vite il a été sollicité par l'armée américaine pour porter des courriers en traversant les zones de combat.
« Qui pouvait se méfier d'un ado ? », commente son fils. Au lendemain de la Grande Guerre, la famille Verhalle émigre et, après avoir récupéré ses quatre autres enfants et perdu tous ses biens laissés en Belgique, s'installe définitivement dans le Perche.
Après son mariage en 1927 avec Marthe Larivière, Marcel Verhalle s'installe à Mahéru. Dans leur ferme, dès 1943, ils commencent à recueillir parachutistes et francs-tireurs et transportent sous les yeux des Allemands armes et explosifs, tout en participant au rapatriement des soldats américains. « Nous possédions, raconte Charles, un petit moulin perdu au fond d'un vallon. C'est là que nous cachions des postes émetteurs, des résistants, des Américains et des Anglais. Ma mère convoyait les militaires déguisés en paysans dans un sulky avec toujours le risque que l'on adresse la parole aux soldats étrangers ». Après le débarquement du 6 juin 1944, l'action s'intensifie encore. Grâce aux pigeons voyageurs envoyés par parachute et aux postes émetteurs, les informations circulent entre l'armée américaine et les habitants de la région.
Marcel l'éclaireur
C'est en août 1944 que Marcel Verhalle rejoint l'armée américaine. Incorporé comme « éclaireur », il voyage à ce titre dans la première jeep, précédant ainsi le corps d'armée.
« Il parlait parfaitement la langue anglaise avec toutefois un accent américain. Tout au long du chemin il pouvait traduire tout ce qu'il se disait autour d'eux ». L'éclaireur a ensuite été en Allemagne puis est revenu à Paris et à Rouen pour participer à la Military police. « Cela a duré six mois. Il nous a fallu, à ma mère et à moi, faire face aux travaux de la ferme durant ce temps ».
De toute cette période, il ne reste toutefois à Charles que fierté et reconnaissance pour les hauts faits de son père décédé en 1988. « Il n'a jamais perdu sa langue anglaise. Il écoutait chaque jour la BBC et, lorsqu'il rencontrait des Anglais ou des Américains, il les invitait à déjeuner à la maison ». Son épouse Marthe Verhalle a aussi reçu, de son côté, la croix du combattant volontaire. Elle faisait partie de l'Organisation civile et militaire et était qualifiée de « soldat sans uniforme ».