7 Mai 1954.... Une date à jamais gravée dans la mémoire de ceux qui en furent témoins, de près ou de loin !..... .
les viets chercheront en premier les parachutistes et les légionnaires, mais il n'y en a presque plus, ils sont morts sur leurs positions ou croupissent
blessés au détour d'une tranchée.
depuis 11 heures ce matin du 07 mai 1954, aucune des positions françaises à l’est de la NAM YOUM n’est tenue, leurs garnisons ont été submergées , elles ne ce sont pas rendues ;
ELIANE 10 est tombée à l’aube, il n’y avait plus que deux officiers retranchés sur le toit d’un abri, le lieutenant BAILLY du 8° Choc et le lieutenant LE BOUDEC du 6° de BIGEARD , tous les deux blessés.
Pourtant la résistance acharnée de BRECHIGNAC et de BOTELLA permettait d’espérer un miracle malgré les pertes effrayantes de la nuit .
ELIANE 4 a résisté jusqu’à 10 heures, BRECHIGNAC espérait en l’accalmie de l’aurore mais le répit ne s’est pas produit .
Et les bo-doïs sont parvenus jusqu’au trou où vivait BRECHIGNAC et BOTELLA en compagnie du lieutenant LECOUR-GRANDMAISON du 2° B.E.P qui avait participé à l’ultime contre-attaque et avait décidé de rester là pour le dernier baroud d’honneur .
Dans la plaine, ELIANE 3 , la cour des miracles, a été investi casemate après casemate par des Viêts circonspects qui nettoyaient le terrain à la grenade sans égards pour les légionnaires et les paras blessés .
Les derniers combattants, une poignée de légionnaires et de tirailleurs ont pu passer la rivière sous la protections des mitrailleuses quadruples du lieutenant REDON .
ALLAIRE ? ici BRUNO , ne tenter rien, le cessez le feu sera fixé bientôt . La voix de BIGEARD trahit sa lassitude , sa tristesse aussi .
Il y a quelques minutes il a vu surgir dans son PC une silhouette méconnaissable, gainée de boue et de sang.
C’était le capitaine LEPAGE qui s’était battu comme un simple voltigeur tirant lui même ses dernières cartouches .
Quelques minutes plus tard une estafette venu du PC remettra au Lieutenant ALLAIRE l’ordre de cessez le feu .
Cessez le feu à 17h30 . Ne tirez plus . Pas de drapeau blanc. A tout à l’heure . Bruno, Pauvre 6 ! pauvres paras !
Le sort est scellé , les combattants de DIEN BIEN PHU plantent leurs armes dans les parois des tranchées et appuient sur les détentes. Les fusils ont un dernier hoquet , les mitraillettes un ultime aboiement et les culasses frappent le vide , les canons éclatent.
Au milieu du camp les équipages de chars vidangent l’huile des moteurs qu’ils emballent pour les détruire, les artilleurs font glisser dans les tubes des grenades au phosphore pour souder les culasses . c’est FINI ! les Viêts n’auront rien .
De partout surgissent les bo-doïs, on dirait une horde de gamins en liesse . Di , di ! Lên ……………….
Dans son PC sur ISABELLE , le colonel LALANDE a vainement tenté d’interroger un DAKOTA inutile et sourd . Quoi faire ? Mais déjà la nuit tombe, refermant sur le dernier point d’appui le piège ennemi .
" … trois hommes vêtus de boue, hagards, le visage noir de barbe et de fumée, arrivent en titubant et se laissent tomber sur le sol.
Bigeard se penche sur l’un d’eux, lui prend la main. Pleure-t-il ? Cela n’a pas d’importance à ce moment où tout est dépassé, où la grandeur de l’épreuve donne le vertige à ceux qu’elle frappe, où les mots ne peuvent servir qu’à ceux qui observent, de loin, l’agonie de Dien Bien Phu…
- Mon pauvre Lepage… mon pauvre Lepage…
C’est toute une chevalerie massacrée vainement… il se doute vaguement que le désastre en devoir d’accomplissement n’aura servi qu’à un crucifiement dont tant d’anciens hauts-commissaires, secrétaires d’état ou présidents du conseil se lavent déjà les mains avec une délicatesse affectée… les hommes à cause de qui les batailles sont perdues ne sont pas ceux qu’elles tuent…"
- BRUNO de BRECHE , Ne matraquez plus, ne matraquez plus… hurle BRECHIGNAC… il y a trop de blessés ………- "Bruno" de "Dédé"… "Bruno" de "Dédé"…- "Bruno" écoute…
- "Bruno" de "Dédé"… c’est fini… ils sont au PC… dis au gars "Pierre" qu’on l’aimait bien… je fais sauter le poste… »
- puis la voix du lieutenant ARMANDY , je fais sauter le poste ………..
Eliane 4 est investi et les PC de Botella et de Bréchignac cessent d'émettre. Les Viets peuvent tourner Eliane 2 qui est attaqué par sa face Est à 5 heures.
Les défenseurs n'ont plus de munitions. A 10 heures, Eliane 10 (Eliane "bas") est conquis à son tour. Excepté quelques résistances au bord de la rivière, la totalité des points d'appui de l'est est aux mains des viets. A l'ouest, Huguette 4 est également tombé.
PC du général de CASTRIES : Le Colonel LANGLAIS rend compte au général de CASTRIES de la situation . Le général de CASTRIES appel HANOÏ , mon général, l’ennemi borde la NAM YOUM , toute sortie est condamnée à l’échec , un nouveau combat de nuit équivaudrait au massacre des milliers de blessés entassés dans les abris, il faut cesser le combat .
L'ordre de cessez-le-feu tombe à 17 heures. Après destruction de tout le matériel et de tout le ravitaillement, le PC de Diên Biên Phu adresse son ultime message à Hanoi à 17 H 50:
"On fait tout sauter. Adieu".Quelques minutes plus tard, les viets font irruption dans le PC du général de CASTRIES et occupent les tranchées environnantes.
Un drapeau rouge à étoile d'or est planté sur le PC français.
Diên Biên Phu est tombé mais n'a pas capitulé.Pendant ce temps sur Isabelle, à 6 Kms au sud, on se bat encore. On entend le grondement de l'artillerie viet qui continue à pilonner la position dont le calvaire durera quelques heures de plus.
Son responsable, le Lieutenant-colonel LALANDE hésite à tenter l'opération "Albatros" dont on lui a laissé l'initiative : une sortie en force vers le sud pour tenter de rallier les lignes françaises avec ce qui lui reste d'hommes valides.
La sortie est tentée dans la nuit du 7 au 8 mai. Elle échoue de peu. La plupart des éléments qui la tentent sont interceptés. Seuls quelques isolés réussiront à franchir les lignes vietminh et à rallier des postes français au prix d'une marche harassante, qui durera des semaines à travers une jungle hostile occupée par les viets.
Le 8 mai à 1h00 du matin, le PA ISABELLE cesse le feu à son tour.
Et DIEN BIEN PHU s’ensevelit dans le linceul des 60.000 parachutes largués en son ciel pendant la bataille .Allo, allo Castries ? Allo Castries ? Mon Général ? Dites-moi mon vieux, il faut finir maintenant bien sûr.
Tout ce que vous avez fait est magnifique jusqu’à présent. Euh… Bien, mon Général. Seulement, je voulais préserver les blessés. Oui, c’est bien. Alors, faites ça au mieux en laissant mourir l’affaire d’elle même, en sérénité. Ce que vous avez fait est trop beau pour qu’on fasse ça. Vous comprenez mon vieux ? Bien, mon Général. Allez, au revoir mon vieux. A bientôt. Mon Général ? Allo oui ? Vous serez gentil de voir ma femme . Oui mon vieux. Merci. Au revoir mon vieux.
A Genève ont discutait ; Mendès France voulait en finir dans les délais qu’il s’était fixés, c’est pourquoi sans doute il avait renoncé à évoquer le sort futur de ces dizaines de milliers d’hommes qui attestaient l’arme à la main dans les hautes vallées d’Indochine leur refus d’être livrés pieds et poings liés à ces tonkinois qu’ils avaient toujours combattus.
Il ne faut pas créer de difficultés supplémentaires à nos négociateurs, avait-il dit au Général ELY qui avait plaidé la cause des minorités montagnardes .
La France fermait les yeux, bouchait ses oreilles, taisait sa voix .
TOUT COMME ELLE DEVAIT RESTER A JAMAIS MUETTE lorsque le Cessez le Feu en Indochine fut signé , elle put faire le décompte des prisonniers de DIEN BIEN PHU rendus par le viet-minh .
Elle aurait pu demander : A DIEN BIEN PHU vous avez capturé 11721 soldats de l’Union Française , valides ou blessés ! Vous en avez rendu 3290 , il en manque 7801 ! que sont-ils devenus ? Mais jamais cette question n’a été posée .