Avril 1956
1 Avril 1956 :
Rien.
2 Avril 1956 :
Grenade dans un cinéma d'Alger, un enfant de 4 ans blessé.
Un commando de marine détruit une installation permanente du F.L.N., près de la frontière tunisienne.
3 Avril 1956 :
Rien.
4 Avril 1956 :
Attentat dans les Aurès, 3 policiers, 3 soldats blessés, 15 musulmans tués par les rebelles.
Debré, gaulliste de choc écrit Dans "Carrefour" du 4 avril 1956 .
N'oublions pas ( ...) qu'une Algérie qui ne serait plus française deviendrait une forteresse anti-française ! ( ...) Certains de nos dirigeants ne seraient-ils pas déjà , prêts à capituler ? ( ...) La fin de la présence française en Afrique du Nord sera le signal de convulsions profondes, où seront broyés des milliers de Français, notamment tous ceux qui auront leur part de responsabilité dans nos désastres !
5 Avril 1956 :
L'aspirant Maillot profite d'un transport d'armes pour menacer son chauffeur, le ligoter et l'abandonner au bord de la route, puis il rejoint un maquis communiste avec toutes ces armes.
Dénoncé par le FLN, le maquis communiste sera éradiqué près de Lamartine (Orléansville) en mai, et Maillot sera tué les armes à la main.
6 Avril 1956 :
Le gouvernement envoie en algérie la plus grande partie de l'aviation opérationnelle, en particulier avions d'observation et chasseurs bombardiers.
Le sous lieutenant rappelé Gherab Hamid, étudiant en médecine, communiste, déserte et rejoint le maquis de Maillot, dans l'ouarsenis, où il se heurtera aux harkis de Boualem. Endroit emblématique où des communistes pro FLN et pour la plupart métropolitains se battent contre des musulmans algériens pro français. Un des rares survivant de ce maquis, Ghearb sera arrêté à Oran le 4 septembre 56, condamné à mort le 11, de nouveau condamné à mort pour d'autres faits le 4 juillet 57 mais cette fois à Alger, gracié en 58, libéré en 62 il meurt à paris en 77.
Khiara, chef religieux traditionnel, égorgé à Takorab.
Violents accrochages dans les Aurès, 2 officiers et 22 soldats tués, les pertes rebelles sont très importantes.
7 Avril 1956 :
Opération dans la région de Medromah (sud Oranais).
Un père blanc assassiné à Aïn Sefra.
8 Avril 1956 :
Engagement dans les Aurès, lourdes pertes rebelles.
9 Avril 1956 :
Bataille dans les Aurès, autour de Djeurf Mezerba.
10 Avril 1956 :
Fermes incendiées dans tout le pays. Cette méthode est destiné à mouiller les fellahs qui doivent sous la menace de quelques terroristes commettre un acte qui les livre aux punitions des français et donc les pousse vers la rébellion.
En Kabylie, un car est arrêté, les voyageurs fouillés et dépouillés (quatre millions anciens) puis le car brûlé. C'est très certainement un chantage vis à vis du propriétaire, de façon à le convaincre de payer l'impôt révolutionnaire.
Un lieutenant du cinquième R.T.A., qui renseignait les rebelles sur les opérations prévues arrêté.
11 Avril 1956 :
A la demande de ses membres, qui sont assassinés s'ils ne démissionnent pas, l'assemblée algérienne est dissoute. Crée lors de la mise en place du statut de 1947, l'assemblée algérienne avait 120 membres, 60 FSNA et 60 FSE, elle avait des compétences en matière de budget, et devait entre autres problèmes qui lui étaient confiés décider du vote des femmes, ce qu'elle ne fit pas.
On trouvera ICI ce type d'action à Mostaganem.
Un agriculteur et son fils assassinés près de Jemmapes.
Depuis le début (premier novembre 1954) le bilan est de 5724 morts, dont 3724 rebelles, 672 membres des forces de l'ordre et 1.328 civils assassinés par les rebelles.
Guy Mollet décide le rappel des contingents 52-1, 52-2, 53-1 et des " disponibles " des classes 53-2 à 55-1.
Une reforme agraire est adoptée pour l'algérie, elle tend à faciliter l'acquisition des terres par les musulmans.
12 Avril 1956 :
Un représentant de Guy Mollet, utilisant le parti socialiste comme fusible, joseph Begarra, rencontre au Caire Mohamed Khider. Les conversations dureront jusqu'au 24, sans résultat, le F.L.N. maintient ses exigences: reconnaissance de lui seul comme représentant de la nation algérienne, départ de l'armée française avant toute consultation démocratique.
13 Avril 1956 :
Guy Mollet renouvelle son appel à un cessez le feu .
En écho, le FLN, depuis Tunis demande à l'ONU la permission de créer un gouvernement provisoire en exil.
Amirouche liquide les partisans du senateur Ourabah, au cours de ce que Courriere a appellé "la nuit rouge de la soumam". Il annonce plus de 800 assassinés, en fait il y en a eu 150, toujours la propagande. N'empeche que la terreur monte encore d'un cran. Et que les villages kabyles du Bou Sellam, érigés en auto defense depuis fin 1954 (depuis le début) sont rayés de la carte. L'armée se rend compte que l'importance des bandes tant en armement qu'en nombre ne permet plus aux auto defense de resister serieusement.
14 Avril 1956 :
Opération à l'est de Bône.
15 Avril 1956 :
La septième D.R.M., venant d'Allemagne, défile dans les rues d'Alger.
16 Avril 1956 :
Révolte dans la prison de Cherchell, les détenus massacrent la femme du gardien chef et prennent la fuite.
Grenade dans un café de Sétif, 4 blessés.
17 Avril 1956 :
Pour faire un exemple, le FLN assassine en pleine prière du vendredi, dans la grande mosquée d'Alger, son Taleb, trop modéré à leur goût.
Le frère du député Bendjelloul, gardé à vue dans une chambre de l'hôtel de France à Oued Zenatti, abattu par la sentinelle alors qu'il tentait de s'enfuir.
Antoine Argoud arrive à M'sila et décide d'utiliser des méthodes de choc La decadence, l'imposture et la tragédie, Fayard 1974, ISBN 2-213-00148-0
C'est à M'sila que je mets au point mes méthodes et, en particulier, que je fixe mon attitude à l'égard de la population.
Je m'inspire directement de l'exemple de Kemal Ataturk.
A notre arrivée, le 17 avril 1956, nous trouvons une région entièrement pourrie. Toutes les lignes téléphoniques convergeant sur M'sila sont coupées, sur des dizaines de kilomètres. De nombreux attentats ont eu lieu dans la ville ou aux environs. Aucun coupable n'a jamais été trouvé. Jamais on n'a pu trouver un témoin. La population musulmane est hostile. Tous les visages sont fermés. La raison en est simple. Ils ont à la fois sous les yeux des preuves quotidiennes de la faiblesse française et de la force des rebelles.
Il s'agit de modifier au plus vite cet état d'esprit, de le renverser en notre faveur .
Ces lignes téléphoniques qui jonchent le sol attestent notre défaite. Je décide par priorité de les faire rétablir par la population. Je la préviens qu'en cas de nouvelles coupures je m'en prendrai aux riverains. Trois coupures sont faites dans les jours suivants. Je procède instantanément, comme promis, à la destruction, au canon de 75, des mechtas environnantes, préalablement vidées de leurs habitants.
Pendant toute la durée de notre séjour à M'sila, les lignes demeureront intactes.
J'apprends, le 9 mai, qu'une école destinée aux musulmans (il n'y a pas un seul Européen dans le village) vient d'être sabotée dans la nuit à Mélouza (soixante-dix kilomètres à l'ouest de M'sila). Les rebelles ont tenté de détruire à coups de pioche les piliers de béton qui supportent l'édifice. Ils ont incendié les huisseries. Etant donné l'ampleur du travail effectué, la population y a certainement participé. Je me rends immédiatement à Mélouza. Je réunis tous les hommes (une cinquantaine) sur la place du marché (un rectangle de cinquante mètres sur vingt, bordé d'une murette en pierre sèche). Je leur pose encore une fois la question. Sont-ils prêts à me donner des renseignements sur les événements de la nuit?
Silence complet.
Je fais alors avancer une Auto Mitrailleuse et je fais coucher les cinquante hommes à plat ventre, devant l'engin blindé. Je détruis à coups de canon deux mechtas appartenant à des fellaghas notoires fichés par la gendarmerie. Les obus - une douzaine - passent à un mètre à peine au-dessus des têtes. L'opération terminée, je leur ordonne de se relever. Je les fais s'aligner sur un rang. Je les passe en revue et je leur fais crier " Vive la France!"
Le 21 mai, nous sommes alertés par radio. En début d'après-midi, un détachement du régiment est tombé dans une embuscade, dans la même région. Le capitaine de Roquefeuille et le lieutenant d'Ussel ont été tués. Les automitrailleuses, qui accompagnaient les jeeps des officiers, sont arrivées quelques minutes trop tard pour sauver les deux officiers. Mais leur intervention a été suffisamment rapide pour empêcher les rebelles (une quarantaine) de prendre du champ. Je propose au colonel des Courtils de me rendre immédiatement sur place. Une heure plus tard, je rejoins le détachement. Le terrain, bien qu'accidenté, est praticable aux A. M. Les chefs de voitures m'assurent que les fellagha n'ont pas décroché. Je lance les A. M. dans la hamada. Les fellagha, les voyant arriver, sortent de leurs abris rocheux et cherchent à s'enfuir. Mais ils sont mitraillés à bout portant par les canons de 75 et par l'aviation, qui, alertée, est intervenue. C'est une boucherie. Seuls quelques rebelles parviennent à s'en tirer.
Je prends alors, au grand étonnement de mes hommes, la décision de ramener les cadavres à Msila et de les exposer à la population. Je les fais empiler dans des sacs et emporter jusqu'à Mélouza, où nous arrivons dans la soirée. Le lendemain, je fais charger les sacs sur l'autocar qui fait le service entre Mélouza et M'sila. J'enjoins au conducteur de les décharger, à son arrivée à M'sila sur la grand-place. Dire que ma proposition l'enchante serait mentir. Mais il se rend compte, à mon attitude, que je ne suis pas d humeur à plaisanter, et il obtempère. Je regagne M'sila dans l'après-midi. J'apprends alors que, depuis une heure, le car tourne autour de la ville, sans avoir déchargé ni les passagers ni les corps. Je dépêche aussitôt un officier au conducteur pour le prévenir que, si mes ordres ne sont pas exécutés immédiatement, il rejoindra ses frères au paradis d'Allah. Il ne se le fait pas dire deux fois. Dix minutes plus tard, coup de téléphone de l'administrateur M. Muselli (M'sila est une commune mixte), pour lequel j'éprouve une violente antipathie.
Je décroche: " Des cadavres viennent d'être déposés devant l'immeuble de la commune mixte. Qui a donné l'ordre? C'est inadmissible. J'exige qu'ils soient enlevés immédiatement.
- C'est moi qui ai donné l'ordre et les corps resteront exposés pendant vingt-quatre heures. ~
- Votre geste est totalement illégal. Il me cite la référence de la loi.
- Je me moque de votre article de loi.
- Je vais me plaindre à Alger.
- A votre aise." "
Rien ne se passera. Je n'entendrai plus parler de M. Muselli. Les cadavres restent exposés pendant vingt-quatre heures sur la place avant d'être enterrés. J'apprendrai plus tard que les autorités avaient accueilli, avec un certain embarras la plainte de M. Muselli. Partagées entre le désir de donner satisfaction à l'administrateur et celui de ne pas me désavouer, elles avaient opté pour la passivité. Nous restons sept semaines à M'sila.
A notre départ, le climat a complètement changé. Plus d'attentats. La population, extrêmement fermée au début, s'est ouverte. Les renseignements commencent à arriver. Lorsque l'ordre de départ arrive, je fais des pieds et des mains pour que le régiment ne quitte pas la région, afin de parachever notre oeuvre. Peine perdue. La grande noria recommence à travers le Constantinois. A M'sila la situation se dégrade à nouveau.