Juin 1956
1 Juin 1956:
Bilan des accrochages du sud Constantinois, 230 rebelles abattus, les pertes françaises ne sont pas signalées.
Vingt communistes expulsés d'algérie.
2 Juin 1956:
une synagogue d'Orleansville est l'objet d'une grenade suivie d'un incendie criminel.
Au cours de diverses opérations en Kabylie, 400 rebelles sont tués.
Une patrouille de police tombe dans une embuscade au sud de Nemours, 14 Morts.
Bombe à Philippeville.
4 Juin 1956:
Un soldat du contingent poignardé dans le dos à Alger.
Les secrétaires musulmans de trois mairies (Taguemoit, Azouz et Beni Hillil) pendus par les rebelles.
Un marin tué à Nemours.
Le 4 juin 1956 un petit convoi de tirailleurs retourne vers Slissen venant de Tedjemount. Au lieu-dit "Akba Beïda" il tombe dans une forte embuscade dressée par de nombreux Fellaghas. La surprise joue. Le bilan est lourd: une vingtaine d'hommes tués ou disparus dont deux officiers et un garde forestier européen qui avait volontairement accompagné le détachement pour effectuer une reconnaissance du terrain. C'est l'embuscade la plus tragique de la région; la seule, en fait, réussie par les rebelles dans ce secteur pendant toute la guerre d'Algérie.
Les doutes sont malheureusement levés. Il y a bien présence de rebelles qui s'infiltrent depuis la chaîne de montagnes des Beni Smiel de la région de Tlemcen-Maroc.
Les conséquences vont, hélas, être graves. L'armée faute d'effectifs suffisants, ne peut maintenir une unité complètement isolée au centre de la plaine de Tedjmout qui est tributaire pour son ravitaillement en eau, de liaisons à plus de vingt km! Elle décide, vers la mi-juin, de retirer la compagnie de Tirailleurs et, conséquence directe, la première SAS qui est implantée en plein djebel dans la maison forestière de Goubirat, à une dizaine de kilomètres de Tedjemout.
On replie donc l'unité militaire et la SAS, mais la population musulmane reste! Cette population, but essentiel de ce genre de guerre, se voit brutalement isolée, en pleine montagne, abandonnée à son triste sort. Les rebelles, eux, sont présents, surtout la nuit. Ils vont immédiatement accentuer leur pression. Ils exigent des recrues, s'appuyant sur une propagande, bien facilitée par ce qui vient de se passer! moins d'une vingtaine d'hommes partent avec les rebelles.
Le 5 juillet (1956) nouvelle manifestation spectaculaire des fellaghas: dans la nuit ils assassinent l'ancien garde champêtre du douar et sa femme, à coups de hache! Ils incendient le chantier de l'école en cours de construction qui était à un stade bien avancé de réalisation (deux classes et un logement d'instituteurs). La population musulmane vit dans une ambiance de crainte perpétuelle, prise entre les exigences des rebelles et les réactions des unités françaises qui effectuent des opérations de jour pour se manifester et tenter d'accrocher les bandes de Fellaghas. Les rebelles effectuent d'autres raids rapides dans la région, venant toujours de leurs bases du Tlemcenois, au cours des semaines suivantes.
Au cours de l'un d'eux, ils effectuent une attaque spectaculaire: l'incendie du car Télagh-Zegla en direction de Saïda. C'est une zone située à plusieurs dizaines de kilomètres à l'Est de Tedjemout. C'est à notre connaissance le premier attentat sur la population civile sérieux dans la région. Le véhicule de transport en commun assure à jours fixes la liaison commerciale sur la route de Telagh -Saïda qui parcourt une région peu peuplée, souvent boisée. Il part en début d'après-midi. A son bord, un chauffeur européen, aidé par le graisseur, un jeune Musulman qui effectue diverses tâches d'entretien et de contrôle. Les passagers sont tous musulman. Après Zegla, en direction du douar Tefessour, le chauffeur voit un barrage de gens armés qui paraissent être des militaires. Il stoppe. Il se trouve face à face avec plusieurs rebelles, d'autres étant camouflés sur les abords de la route. Ils font descendre les voyageurs, contrôlent leurs identités et fouillent rapidement le véhicule. Ils ordonnent aux Musulmans de s'éloigner et entraînent le chauffeur européen vers la forêt. Leur intention ne fait pas de doute: ils vont le tuer! Dès l'arrêt du car, le jeune Musulman, compagnon de travail du conducteur est intervenu verbalement auprès des assaillants pour leur demander de le ménager. Se rendant compte que, malgré ses efforts, ils veulent l'abattre, il n hésite pas: il se jette à leurs pieds et, en pleurant, les supplie de lui faire grâce. La scène dure plusieurs minutes. Après hésitations, ils finissent par le libérer. Le temps presse. Ils incendient le car et fuient dans la forêt toute proche.
Nous évoquons cette scène pathétique car si nous ne devons pas oublier les atrocités innombrables commises par les Fellaghas, sur des Européens et des Musulmans, nous ne pouvons passer sous silence l'attitude d'un nombre appréciable de Musulmans qui de manière directe ou indirecte, ont permis de sauver la vie de leurs concitoyens européens, tout au long de cette guerre, malgré les risques encourus !
La destruction du car de voyageurs, au delà de Zegla, marque un tournant dans l'évolution de la situation. Les Fellaghas ont, en plein jour, arrêté sur une route importante, un moyen de transport en commun et l'ont détruit. L'action a duré probablement moins dune demi-heure (par chance aucun véhicule n'a transité sur cette route à ce moment là). Elle prouve que des groupes de rebelles sillonnent la région, impunément. Cette succession de fait provoque un changement brutal dans l'ambiance de la région. On passe, en quelques semaines, de la relative tranquillité, où les nouvelles alarmantes étaient données par la radio et les journaux à l'inquiétude pour effectuer le moindre déplacement hors de son village ou de son lieu de travail!
D'après Guy Vincent Képi Bleu.
5 Juin 1956:
Le communiste déserteur Maillot et un autre communiste, l'instituteur Laban ainsi qu'un groupe de rebelle sont abattus prés du village de Lamartine par les hommesdu bachaga Boualem, agissant sur renseignement. C'est la fin des tentatives communistes de créer des maquis, les communistes se spécialiseront dans le terorisme urbain. ICI l'histoire racontée par le bachaga
6 Juin 1956:
rien.
7 juin 1956:
Un agriculteur assassiné prés de Médéa.
200 villages de petite Kabylie demandent la protection de la france et se mettent en unité d'autodéfense.
Trois gendarmes sont tués dans une embuscade près de Médéa.
Un membre du FLN, conseiller municipal indépendantiste abattu par la police à Bougie.
14 (premiers) hélicoptères américains sont livrés à Alger par le porte avion Dixmude.
Manifestation communiste au havre, 2.000 personnes essayent d'empêcher l'embarquement des rappelés, eux restent calmes et ne manifestent pas. Certains estiment que les actions de propagande menées par le gouvernement Mollet sur la barbarie FLN ont porté leurs fruits.
8 Juin 1956:
Opérations militaires en Kabylie.
Aussi sur la frontière marocaine.
Un inspecteur de police assassiné à la casbah d'Alger.
Grenade dans un café de Bône (son cimetière, l'envie de mourir il te donne) deux morts 16 blessés.
9 Juin 1956:
rien
10 Juin 1956:
Un gardien de la paix assassiné de deux balles dans la tête à Alger.
Une bombe à Constantine fait 37 blessés, de tous sexes, âges et religions.
Le grand muphti de Bougie, partisan de la france, assassiné par un terroriste.
11 Juin 1956:
Les dockers d'Alexandrie, en Egypte refusent de décharger un navire français.
Le lieutenant médecin militaire assassiné à Sétif.
Un sous brigadier de police, à Nemours, aussi.
12 Juin 956:
Une bande de rebelle surprend le village en auto défense de Tiguenitine et égorge 22 hommes lors de la prière.
13 juin 1956:
Trois soldats assassinés et deux enlevés prés de Collo.
Un autre à Marnia.
Deux autres à Eugène Etienne.
Maisonseul mis en liberté à Alger.( On saura plus tard que c'est sur intervention de Camus).
18 personnes blessées lors de l'explosion de deux grenades lancées sur la foule qui assistait aux obsèques d'un policier assassiné.
22 personnes assassinées dans une metcha du djebel bou andas.
7 autres assassinées en oranie.
Deux à Michelet.
Arrestation à Alger d'un journaliste, correspondant permanent d'un grand journal du soir parisien et de policiers complices du FLN.
Ferrât Abbas donne un interview à Stockholm, il demande l'indépendance sans conditions.
14 Juin 1956:
Conférence de travail à Alger du ministre (Lacoste) et de tous les chefs civils et militaires.
15 Juin 1956:
Grenades dans la foule à Bône et Duviviers, 14 blessés.
Un boulanger musulman, un agriculteur, un gérant de ferme (ce dernier avec soins artistiques) assassinés dans divers endroits de l'algérie.
Un capitaine et deux soldats tués dans une embuscade.
Sept terroristes condamnés à mort par le tribunal militaire.
Un dangereux chef terroriste arrêté à Alger, sur renseignements.
16 Juin 1956:
Rien
17 Juin 1956 :
Bombe au centre ville de Constantine, 18 blessés.
Massacre à Maginot d'une famille d'anciens combattants, le père, ses deux fils, leurs femmes, leurs petits enfants massacrés dans d'épouvantables conditions.
18 Juin 1956:
Au conseil de sécurité de l'ONU, treize pays africains portent plainte contre la france.
19 Juin 1956:
Le parlement vote par 470 voix pour contre 10 contre la loi cadre des territoires d'outre mer.
Une délégation des maires d'algérie, musulmans et chrétiens à paris.
Le F.L.N. fait savoir qu'il a exécuté Aurousseau et Serreau, les deux soldats qu'il a fait prisonnier en Mai lors de l'embuscade de Palestro. Il s'agit (disent-ils, mais sans doute les malheureux sont morts depuis longtemps) de venger les deux premières exécutions de terroristes Zabana et Ferradj, guillotinés la veille. A Alger, Ouamrane donne l'ordre d'assassiner tous les européens mâles agés de 18 à 54 ans.
Mollet casse le décret de Lacoste, expulsant du département d'Oran l'abbé Berenguer, pour aide au F.L.N. L'abbé ira comme ambassadeur du F.L.N. en Amérique latine récolter de l'argent pour payer les armes et les munitions, il rentrera en Algérie après l'indépendance, sera nommé député, démissionnera dès 63 quand l'assemblée votera la loi sur la nationalité algérienne qui définit la religion musulmane comme nécessaire à cette nationalité et rejoindra la france. Mais dit-il dans ses souvenirs, il ne regrette rien.
20 Juin 1956:
Reforme administrative en algérie, les trois départements sont coupés en 12 départements, les communes mixtes (maires nommés et non élus) sont supprimées et remplacées par des communes normales ("de plein exercice")..
Bombe à Bab El Oued, quatre morts, 16 blessés. (suivant des sources non publiques il y a eu en fait une dizaine d'attentats causant la mort de 49 personnes). Les terroristes laissent des tracts expliquant que s'ils tuent au hasard c'est pour venger les deux terroristes guillotinés l'avant veille, "justification" pieusement reprise par toutes les grandes consciences, qui approuvent ainsi qu'on frappe au hasard des dizaines de personnes pour venger la mort d'assassins démocratiquement condamnés.
On notera également qu'il n'aurait ainsi fallu que deux jours pour préparer les bombes…
21 Juin 1956 :
Embuscade au sud de Sidi-bel-Abbés dix militaires tués, dix blessés, sept disparus.
L'imam de la mosquée Hanéfite de Blida assassiné.
22 Juin 1956:
Attentats dans le sud algérien par des rebelles venant des Aurès
Guy Mollet affirme devant des représentants des pays d'Amérique latine "l'algérie ne sera ni un état islamique, ni une province française".
23 Juin 1956 :
Seize attentats à Alger font huit morts, (dont 4 pieds noirs) et 17 blessés (dont 9 européens).
24 Juin 1956:
Les cadavres atrocement mutilés de trois jeunes gens de Aïn Beda qui avaient disparus depuis plusieurs jours, retrouvés au fond d'un puits près de la localité.
Embuscade à Oued Slissen, deux officiers et 9 tirailleurs tués, ainsi qu'un civil, agent des eaux et forets.
25 Juin 1956:
Un assassinat à Alger.
Au Maroc, dans les environs de fez, un groupe de 13 soldats du 17 ème RA, qui gardait une ferme, est enlevé par des "dissidents" marocains,. Ils sont liberés le 5 juin.
26 Juin 1956:
Trois morts et quatre blessés (tous musulmans) à Aïn Temouchent.
Un agriculteur et son commis musulman égorgé suivant les rites à Sedrata.
27 Juin 1956:
Le rédacteur en chef de l'humanité, qui avait publié un article à la gloire de Maillot, l'aspirant déserteur avec son camion d'armements, inculpé d'atteinte à la sécurité de l'état.
La croix rouge internationale n'a pu obtenir du Caire, de Tunis ou de Tripoli aucunes précisions sur les français prisonniers du F.L.N. (et pour cause).
Lacoste affirme au congrès du parti socialiste "les musulmans n'ont pas perdu confiance en la france".
Ferrât Abbas est expulsé de Belgique, mais pas vers la france.
Debré, futur premier ministre d'évian écrit dans "Carrefour" du 27 juin 1956 : "Ce que ne veulent pas comprendre les falots personnages qui jouent avec les destinées de la France, en croyant les diriger, c'est qu'il n'y aura jamais de répit dans la guerre sainte qui nous a été déclarée. A une guerre sainte, on ne répond pas par des paroles d'apaisement ni par des conventions. Les paroles d'apaisement sont prises pour une capitulation et les conventions sont violées avant que sèche l'encre des signatures."
28 Juin 1956:
Parution au journal Officiel du decret créant des communes de plein exercice, avec collége unique, à la place des communes mixtes. Ce decret sera completé en juillet par des directives d'application.
Le projet politique de Robert Lacoste dépassait la simple retouche institutionnelle de 1956: une loi, le 16 mars 1956, avait étendu le régime des pouvoirs spéciaux. Deux décrets, le 28 juin 1956, avaient divisé le territoire en douze départements et trente-sept arrondissements. Les vieilles communes mixtes, propres aux régions à majorité musulmane, étaient supprimées, remplacées par des communes de "plein exercice".
Robert Lacoste n'avait cessé d'en expliquer les principes dans ses déclarations publiques. Peu de temps avant l'arrivée de Salan, dans la "réunion de commandement" du 5 novembre 1956, il avait exposé la volonté du gouvernement de "réaliser des réformes" dont la reforme communale serait la clef de voûte. Il connaissait les réticences des hauts fonctionnaires et des notables européens, affirmant "que c'est impossible, que c'est beaucoup trop tôt". Des élus démissionnaient même "les uns après les autres" pour bloquer l'application en empêchant que "personne de valable ne se découvre". Il voulait "ouvrir la voie à la coopération", car "si vous ne le faites pas, nous perdrons la partie quoi qu'il arrive". Quant aux fonctionnaires, "qui représentent la France dans le pays", ils ont le devoir de témoigner de "la volonté d'évoluer", et non de se comporter "d'une façon inactuelle". Il insistait sur deux risques:
o On devait se préparer à "faire face à l'éventualité d'une reconversion politique du FLN". Pour atteindre à "la maîtrise politique de l'Algérie", il pourrait récupérer le triptyque de Guy Mollet: cessez-le-feu, élections, négociations. Le FLN n'est pas "maître politiquement de l'Algérie { .. }, la partie est perdue sur le plan militaire". Le terrorisme, au contraire, servirait son dessein: "Les fellaghas agissent par la terreur dans les profondeurs du pays ... Nous les voyons s'implanter dans le pays, recueillir chaque jour une plus large audience dans la population sans emploi, commerçants, professions libérales ... cela nous impose une action ferme, réfléchie ..."
o La création de communes et de départements n'a pas été exploitée par les responsables français. Ils n'ont pas démontré que "c'est du nouveau qui va être institué", comme "on leur a tellement menti", il faut leur donner l'impression "que quelque chose va changer", et "nous aurons un mouvement d'enthousiasme qui peut nous surprendre" et qui "nous permettrait de déceler et de faire sortir des personnalités, que nous attendons avec impatience et qui ne veulent pas se révéler jusqu'à présent".
Lacoste envisage donc un changement complet appuyé par un enthousiasme général. Cela annonce le mouvement de l'intégration qui suivit le 13 mai 1958.
L'objectif était, évidemment, de rallier la population musulmane, en lui offrant de participer à la vie administrative de ses communautés. À la fin décembre 1957, Salan le rappelait: "Les musulmans tablent sur notre lassitude, l'incertitude dans laquelle se trouvent les milieux français, sur les tendances plus ou moins avouées d'abandon de certaines équipes usant d'une certaine presse, sur notre frayeur de l'ONU. Ils pensent ainsi que le temps travaille sûrement pour eux et qu'â la condition d'entretenir l'hostilité haineuse séparant les deux communautés, ils obtiendront de la France ce qu'ils voudront."
La première action en ce sens était, pour Lacoste, la reforme des collectivités territoriales. Des instructions de Lacoste avaient répété "l'importance que le gouvernement attachait à la mise en place des délégations spéciales, notamment dans les anciennes communes de plein exercice", délégations devant "servir de préface aux institutions de la loi-cadre" (La guerre d'algérie du général Salan, Valette, ISBN 978-2-915960-38-9)
Le 8 mai 1959, alors qu'il n'a plus aucun rapport avec la Délégation Générale, le colonel Schoen adresse à Lucien Paye une longue lettre, lui reprochant les décisions prises alors qu'il était Directeur des Réformes, puis Délégué Général au Plan en 1945-48, enfin Directeur Général des Affaires politiques en 1956-57.
De son poste au Service d'information et d'études, le colonel Schoen observe les séquelles du soulèvement de mai 1945 dans le Constantinois. Il regarde d'un oeil critique les réformes engagées par la Délégation générale au plan. Dans le cadre du nouveau Statut de l'Algérie, il estime que le projet d'une Algérie, province française à statut particulier, est une formule creuse si ne sont pas modifiées les méthodes de l'administration, et en particulier si ne sont pas mis en place des hommes capables.
Ainsi en est-il de la gestion du culte musulman, qui en dépit des maladresses du passé reste confiée à un "rond de cuir" incompétent, alors qu'il faudrait remettre en confiance les ministres du culte et reconnaître leur indépendance. La sanction absurde prononcée contre le mouderres Bouzouzou, homme de coeur et de talent, amènera celui-ci à militer contre la France à l'aumônerie des Scouts musulmans et à la rédaction de El Manar.
La suppression de la Direction des Réformes par son détenteur Lucien Paye se traduit par la décision catastrophique de suppression des Secrétaires généraux de Préfecture aux Affaires musulmanes, et s'accompagne d'un ostracisme croissant envers les islamisants et les connaisseurs de l'Algérie, et de la politisation des Services.
Le statut attribué en 1948 aux Administrateurs de Communes mixtes, dispensés d'apprendre l'arabe, entraîne la sclérose du recrutement. La sous-administration s'installe, le contact se perd. Cela risque de faire le lit de la révolte.
La création précipitée de dizaines de Centres municipaux et le rattachement d'une trentaine de douars à de nouvelles Communes de plein exercice sont adoptés au mépris de l'avis des connaisseurs du pays et des Musulmans eux-mêmes. Ils doivent être abandonnés.
La gravité de la situation en 1956 aurait exigé que l'on fasse effort sur le recrutement, la formation et l'amalgame des personnels administratifs, civils et militaires. Or la nouvelle organisation se révèle inefficace; les islamisants sont écartés des Directions et les mises en garde du SLNA sont transmises au Cabinet du Délégué avec des semaines de retard. On autorise le Congrès à Alger de l'Union syndicale des commerçants algériens, émanation du FLN destinée à recueillir des fonds et à préparer la grève de février 1957.
De telles erreurs, de telles carences ne pouvaient indéfiniment échapper à l'Armée, qui perdit toute confiance dans l'administration civile ... ni à la population civile européenne qui prétendit alors se défendre elle-même; les ratonnades se multiplièrent.
Mais la faute la plus grave, celle dont nous n'avons pas fini de porter le poids, ce fut la réforme communale. En quatre mois, 1.100 communes nouvelles furent créées; beaucoup étaient inviables parce que trop petites ou inaccessibles. Les administrateurs de Communes mixtes furent écartés au profit de fonctionnaires ignorant les réalités algériennes, des officiers SAS mis en place sans avoir été formés.
Nous ne voyons pas disparaître sans regrets ni craintes - dira le général Parlange - ces Administrateurs qui ont su ici, malgré les critiques et les calomnies, faire de la France. Le même idéal, la même formation, la même foi se retrouvaient dans le Corps des Affaires indigènes comme dans celui des Administrateurs ..
Les Communes mixtes, écrit un capitaine chef de SAS, étaient autrement valables que les communes de plein exercice ... Leur suppression a brisé l'armature administrative. En bref, conclut le colonel Schoen, ces huit mois ont été marqués par plus de fautes qu'on n'en avait commis depuis bien des années. Jamais nos moyens militaires et administratifs n'avaient été plus considérables, jamais on n'avait consacré de telles sommes à l'Algérie. Jamais non plus on n'assista à une telle dégradation de la situation politique: cette dégradation aboutit à "la bataille d'Alger" de février 1957, qui ne put être gagnée - par les seuls militaires, lancés sans préparation dans un métier qui n'était pas le leur - que par des méthodes d'urgence dont le souvenir sera long à s'effacer.
On trouvera ici http://www.miscellanees.com/b/bogros05.htm un interessant document sous la plume d'un capitaine Bogros, qui , islamisant , tout au contraire fait l'éloge de cette réforme,. (retour en fermant la page qui va s'ouvrir.)
29 Juin 1956:
C'est ce mois que le pétrole est decouvert à Hassi Messaoud.
30 Juin 1956:
Embuscade à Geryville, un car, son escorte militaire et un camion tombent entre les mains des rebelles.
Dix soldats français et deux civils assassinés, 27 militaires ont disparu.