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 Les visages d'un ennemi : la fabrication du Viêt-Minh, 1945-1946 .

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Commandoair40
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Les visages d'un ennemi : la fabrication du Viêt-Minh, 1945-1946 . Empty
MessageSujet: Les visages d'un ennemi : la fabrication du Viêt-Minh, 1945-1946 .   Les visages d'un ennemi : la fabrication du Viêt-Minh, 1945-1946 . Icon_minitimeDim Fév 08 2015, 19:25

Les visages d'un ennemi : la fabrication du Viêt-Minh, 1945-1946

Les visages d'un ennemi : la fabrication du Viêt-Minh, 1945-1946 . Indoch10

Évincées d’Indochine depuis le coup de force japonais du 9 mars 1945, les autorités françaises apprennent avec stupéfaction la nouvelle de la prise du pouvoir par le Viêt-Minh, en août 1945, et de la proclamation de l’indépendance du Viêt-Nam, le 2 septembre, par son chef Hô Chi Minh.

Elles sont alors sommées de réagir face à un mouvement dont elles ne connaissent pratiquement rien, et avec lequel s’engage une épreuve de force, dans la mesure où la France entend réinstaurer sa souveraineté dans toute la péninsule.

La France nouvelle, issue de la Résistance, est à la recherche de références pour légitimer son action et pour décrire un ennemi qu’elle ne connaît pas et dont l’image, qui se constitue pendant cette période où s’entremêlent combats et négociations, est à l’origine d’un mythe durable, autour de la figure de Hô Chi Minh notamment.

Face aux incertitudes planant sur l’identité du Viêt-Minh et de son chef, qui pouvait apparaître comme le champion de la libération des peuples et le héraut de la lutte contre le colonialisme, les autorités françaises ont dénoncé les effets d’une propagande vietnamienne redoutable, dont les Français auraient été dupes durant les prodromes du conflit indochinois, en 1945 et 1946.

Les propos de Georges Manue, dans La Revue de Paris, en 1949, en sont particulièrement révélateurs : selon lui, une équivoque s’est installée le jour où Hô Chi Minh s’est incliné sur la tombe du soldat inconnu, pendant son séjour en France à l’été 1946. Il aurait ainsi su plaire par sa grande simplicité d’allure et sa grâce fragile, occultant par là même son obédience communiste[1] .

Dans cette prise de conscience, il semble que l’insurrection de Hanoi, le 19 décembre 1946, ait joué un rôle de révélateur. De nombreux rapports, au moment du déclenchement du conflit, s’attachent à montrer comment les Français ont été trompés par la propagande du Viêt-Minh.

Le Viêt-Minh aurait façonné son propre masque et élaboré son image que les Français auraient reçue passivement. Ainsi, peu après l’insurrection, Jacques Patault écrit que le « Viêt-Minh s’est attaché depuis plus d’un an à dissimuler ses méthodes dictatoriales sous un voile démocratique », avec l’ « intention délibérée de tromper l’opinion mondiale elle-même »[2] .

Beaucoup pensent rétrospectivement que l’année précédente est celle d’un dévoilement progressif de la véritable nature du Viêt-Minh. D’autres rapports sur le système politique vietnamien sont rédigés sur le même mode de la révélation, et soulignent l’aveuglement des responsables politiques et de l’opinion pendant ces années face à la propagande vietnamienne. Tous les regards rétrospectifs portés sur la période 1945-1946 analysent désormais la situation au travers du prisme des notions de lucidité et d’aveuglement.

Il semble néanmoins que ces critères ne soient pas très pertinents pour étudier le système de représentations à l’œuvre avant le 19 décembre 1946.

En effet, la figure du Viêt-Minh et de son chef a largement été construite par les Français, par les autorités militaires, politiques, et par les intellectuels, même s’il ne faut pas surestimer l’investissement de ces derniers, qui se limite à des interventions ponctuelles : ils y projettent leurs souvenirs, et leurs peurs, dans un contexte international qui se dégrade. Dès septembre 1945, se mettent en place, selon Alain Ruscio, des « schémas de pensées qui vont se révéler catastrophiques pour l’orientation de la politique française » [3] .

C’est sur la base de malentendus que s’élabore une véritable construction du Viêt-Minh de la part des Français, destinée à arracher le mouvement de Hô Chi Minh à son exotisme et à son étrangeté, et organisée autour du souvenir de la Seconde Guerre mondiale. Mais c’est aussi à travers le prisme de ce conflit que la figure du Viêt-Minh comme ennemi se constitue : la convocation de la Seconde Guerre mondiale semble être un moyen stratégique de justifier la présence française en Indochine auprès d’Alliés qui ne cessent de manifester leur hostilité à ce retour.

Si les Français ne sont pas complètement dupes de la propagande du Viêt-Minh, qui se drape dans les idéaux de la Résistance et qui se targue d’être le digne héritier de la Révolution française, la difficulté de cerner sa nature, l’utilisation de critères inadéquats pour décrire une forme nouvelle de communisme, déconcertante, conduisent à recourir à d’autres modèles, facilitant une reconstruction, consciente, de l’ennemi.

LE VIÊT-MINH, CET INCONNU

Lorsque les Français apprennent la nouvelle de la proclamation de l’indépendance du Viêt-Nam par le parti de Hô Chi Minh, le 2 septembre 1945, ils doivent faire la redécouverte d’un ancien monde, dont les cadres administratifs et militaires ont été expulsés après le coup de force japonais du 9 mars 1945.

Les autorités sont absentes de l’Indochine, lors de la révolution vietnamienne d’août, et elles éprouvent de nombreuses difficultés pour se réimplanter, devant notamment affronter l’hostilité des Alliés[4] .

La réaction immédiate aux événements est caractérisée par la confusion et la précipitation. Il s’agit d’identifier le parti au pouvoir et surtout de connaître son chef Hô Chi Minh. Il est indéniable que les responsables politiques et militaires avaient des renseignements sur cette organisation : les services de la mission militaire française de Kunming, sous le commandement de Jean Sainteny depuis la mi-avril 1945, ont en effet essayé d’établir des contacts avec le Viêt-Minh dès avril 1945[5] .

Pourtant, dans le dernier trimestre de l’année 1945, tout se passe comme si l’on envisageait le Viêt-Minh sur le mode de la découverte. Tout l’enjeu des recherches sur ce mouvement est de savoir si son principal représentant, Hô Chi Minh, se confond ou non avec Nguyen Ai Quoc, l’un des agents les plus actifs de l’ex-Komintern et que les Français croient mort depuis 1932[6] .

Le rapprochement est certes fait rapidement, mais sous une forme conditionnelle, tant les incertitudes sont grandes, et beaucoup ont du mal à le concevoir : une note du secrétariat d’État aux Colonies, se demande ainsi « si [les] services de liaison en Indochine, en l’absence de renseignements absolument certains, ne se seraient pas trop hâtés pour annoncer que Hô Chi Minh s’identifiait avec le fameux Nguyen Ai Quoc »[7] .

Il ajoute que ce dernier étant mort de la tuberculose, il est préférable de s’orienter sur la piste d’un certain Buy Tan.

La question de la véritable identité de Hô Chi Minh se pose avec acuité tout au long du dernier trimestre de l’année 1945. Plusieurs biographies du chef du Viêt-Minh circulent. Deux portraits sont mis en concurrence dans un rapport de décembre 1945 : le premier met en valeur l’activité nationaliste de Hô Chi Minh depuis l’âge de 7 ans, mais l’auteur du rapport se demande s’il n’est pas préférable de « substituer à cette biographie précise mais terne, la vie beaucoup plus prestigieuse et déjà légendaire de Nguyen Ai Quoc »[8] .

À l’image des erreurs et des quiproquos qui sont faits à propos de Hô Chi Minh, l’incertitude règne un temps au sujet du parti qu’il dirige. La complexité de la situation en Indochine a engendré dès le mois d’août des confusions : un rédacteur anonyme de la DGER écrit ainsi, confondant tous les partis politiques, que le Viêt-Minh veut la liberté de l’Indochine et la « création d’un État démocratique non communiste »[9] .

Si cette erreur est corrigée assez rapidement durant le mois de septembre (plus personne ne doute de l’origine communiste du Viêt-Minh), le manque d’informations pèse lourdement sur la perception que les Français ont du Viêt-Minh.

Mais c’est aussi un regard neuf qui est porté sur les événements d’Indochine. En effet, les acteurs français sont nouveaux : ce sont des hommes de la France Libre, dont la mentalité a été façonnée par la Résistance, qui prennent en main les affaires d’Indochine et qui refusent catégoriquement de travailler avec le personnel compromis dans l’ancienne administration de l’amiral Decoux.

Les notes manuscrites que Sainteny rédige, montrent qu’il existe une réticence systématique à réemployer ces anciens cadres, que l’auteur fustige cependant : « Quels que soient les comptes qu’il y ait à leur demander sur leur attitude sous le régime Decoux, je crois qu’il serait sage d’user de leurs capacités professionnelles.

Eux seuls sont capables de renouer les relations avec les indicateurs et d’établir rapidement un réseau cohérent. »[10]  

Decoux est lui-même rapatrié en France avant même l’arrivée de Thierry d’Argenlieu, et il est accompagné de plusieurs autres personnalités dont Arnoux, directeur de la sûreté et dont les services étaient réputés pour leur efficacité[11] .

La réorganisation de tous les services, avec un personnel relativement nouveau, a des conséquences importantes pour les représentations de la situation, et il s’agit d’une entreprise de longue haleine : en mars 1946, le chef de la sûreté fédérale en Indochine, le chef d’escadron Buis, se plaint de l’insuffisance des moyens dont disposent ses service[12] .

Dépourvus d’un appareil de renseignements efficace – il est même quasiment inexistant en septembre 1945 –, les Français en sont réduits à faire des suppositions sur l’identité du Viêt-Minh, ce qui laisse largement la place aux malentendus.

Dans le dernier trimestre de l’année 1945, c’est donc véritablement une France nouvelle qui découvre une Indochine nouvelle. On ne saurait dès lors surestimer l’importance de rapports écrits avant août 1945 sur le Viêt-Minh, en particulier la note d’Arnoux « sur les activités subversives en Indochine (1940-1945) »[13] : Arnoux, en qualité d’intendant général de la police de Decoux, l’a en effet transmise à Kunming en février 1945 ; il y fait un exposé chronologique de l’activité des différents partis nationalistes et raconte la création du Viêt-Minh, en soulignant son origine communiste.

La note parvient à Paris en mai 1945. Philippe Devillers en conclut, avec forces nuances, que Paris était largement informée sur ce qu’était le Viêt-Minh et qu’elle n’a pu faire preuve de naïveté en ce qui concerne le communisme de Hô Chi Minh[14] .

En fait, il est probable que cette note n’ait jamais été lue, ou du moins prise en compte : Arnoux est tout d’abord un fidèle de l’amiral Decoux, ce qui peut délégitimer son action aux yeux de la France Libre ; mais le facteur décisif qui explique que ce rapport n’a peut-être pas été considéré comme il aurait dû l’être, est le fait qu’Arnoux attribue, à juste titre d’ailleurs, la paternité du Viêt-Minh à Nguyen Ai Quoc, que les autorités de métropole estiment mort depuis 1932 : le nom de Hô Chi Minh n’apparaît qu’une seule fois, dans une parenthèse.

Les incertitudes à l’égard de l’identité de Hô Chi Minh et du Viêt-Minh, ainsi que la nouveauté du personnel, le manque d’informations et de coordinations expliquent les nombreux malentendus, tenaces, qui se mettent en place dès l’annonce de la révolution vietnamienne, et qui se révèlent catastrophiques pour les représentations françaises du Viêt-Minh et donc pour l’élaboration d’une politique adéquate en Indochine.

Envisagé sur le mode de la découverte, le Viêt-Minh devient un objet, susceptible de toutes les constructions.

Ainsi les Français ont-ils le sentiment d’avoir affaire, en Cochinchine où ils essaient de reprendre pied militairement, à des terroristes, des pillards et à d’anciens bagnards de Poulo-Condore. Il est remarquable que la proclamation de l’indépendance par le Viêt-Minh, le 2 septembre 1945, passe à peu près inaperçue, alors que c’est un événement capital, qui remet en cause tous les projets politiques français vis-à-vis de l’Indochine.

Les Français ne retiennent de la journée du 2 septembre que les débordements populaires et les exactions dont les ressortissants français ont été les victimes. D’une manière générale, le regard se focalise sur les attentats, du reste très nombreux, qui sont perpétrés, en particulier le massacre de la cité Héraud, à Saigon, entre le 23 et le 25 septembre, qui fait suite au débarquement franco-anglais et aux combats qui délogent de la ville le comité révolutionnaire mis en place par Tran Van Giau. Dès lors, le ton est donné : Thierry d’Argenlieu dénonce des « bandes obscures en mal de pillages et de meurtres »[15] .

Cet argument permet de délégitimer le gouvernement de Hô Chi Minh, en lui reprochant son incapacité à tenir ses troupes.


D’autre part, le Viêt-Minh est présenté comme un parti d’incapables. Pour l’auteur du rapport B5, les seuls hommes de valeur sont le triumvirat formé par Hô Chi Minh, Vo Nguyen Giap et Tran Huy Lieu ; les autres « manquent de culture et d’intelligence » : Chu Van Tan, ministre de la Défense nationale est une « brute rustique et bornée » ; quant à Pham Van Dong, c’est un « hurluberlu »[16] .

Les difficultés, à l’automne 1945, du gouvernement vietnamien qui doit faire face au jeu politique mené par les troupes chinoises de Luhan, présentes au Tonkin en vertu des accords de Potsdam, sont autant d’arguments qui prouvent l’incurie du Viêt-Minh aux yeux des Français.

On considère, d’autre part, qu’il n’est pas représentatif de la population et l’on avance des chiffres imaginaires : 5 à 10 % de la population lui seraient favorables. Le dernier malentendu, plus fondateur encore, et qui est une constante pendant au moins deux ans, est le refus de voir dans le Viêt-Minh un mouvement autonome : du fait de ses difficultés et de la présence des Chinois qui veulent se saisir des rênes du pouvoir grâce aux partis qui leur sont inféodés, les Français pensent qu’il n’est pas maître de son destin et qu’il est soumis aux puissances étrangères.

Ils ne tardent pas en effet à dénoncer les Japonais, avant de condamner d’hypothétiques agissements soviétiques. Cependant, dans un contexte où les Français veulent recouvrer leurs droits sur l’Indochine, il s’agit de savoir si ces interprétations sont de simples malentendus.

Certes, les préjugés sur l’incapacité des populations colonisées à s’administrer elles-mêmes ont dû avoir un rôle. Mais reste à savoir si les jugements portés sur le Viêt-Minh ne participent pas plutôt d’un discours visant à délégitimer l’adversaire, d’une construction destinée à justifier le retour des Français aux yeux des Alliés.

INDOCHINE, ULTIME ÉTAPE DE LA LIBÉRATION

Il semble en effet que la construction du Viêt-Minh réponde à une nécessité stratégique. Les Alliés, en particulier les Américains, refusent de reconnaître les droits de la France sur l’Indochine. Celle-ci est exclue des dispositions de Potsdam qui ont confié aux Chinois la charge de recevoir la capitulation japonaise au nord du 16e parallèle, la même mission incombant aux Britanniques au sud de cette ligne.

Cependant, les troupes françaises, auxquelles les Britanniques laissent rapidement la place, reconquièrent militairement la Cochinchine contre la guérilla Viêt-Minh, tandis qu’au nord du 16e parallèle s’engagent des négociations avec les Chinois et avec Hô Chi Minh qui aboutissent à un accord le 6 mars 1946 : les troupes françaises peuvent alors revenir au Tonkin, et le Viêt-Nam est reconnu comme un État libre au sein de l’Union française.

La légitimation de l’action française en Indochine passe alors par l’identification de la lutte engagée à la continuation de la Seconde Guerre mondiale.

Il s’agit pour la France de se hisser au rang des puissances victorieuses, après l’humiliation de 1940 et du 9 mars 1945. La situation en Indochine n’est pas un nouveau conflit, car elle est vécue comme l’ultime bataille d’une guerre inachevée.

Ainsi Leclerc déclare-t-il, après le retour des troupes françaises dans le nord de l’Indochine, le 18 mars 1946 : « Hanoi, dernière étape de la Libération ».

L’identification est certes évidente pour des soldats qui sont des hommes de la France Libre : les soldats sont d’ailleurs persuadés qu’ils vont avoir à combattre les Japonais, à l’image de Henri Martin, d’après son témoignage de 1970[17] .

L’amiral Thierry d’Argenlieu le dit explicitement : c’est la « période de guerre mondiale, 1939-1945, qui se prolonge »[18] .

Néanmoins, ce système de représentation ne correspond pas uniquement à une déformation involontaire des événements, due à une mentalité fortement imprégnée des combats de la France Libre.

Il répond également à une nécessité et est construit sciemment : en effet, la Seconde Guerre mondiale a creusé le fossé qui séparait la métropole de la perle de ses colonies : le contact entre les deux mondes se renoue dans la commémoration des horreurs de la Seconde Guerre mondiale, directement importée de métropole.

Henri Estirac raconte ainsi que le lieu le plus couru de Saigon est le hall de l’information, où sont exposés des photographies des camps de concentration allemands[19] .

Mais la refondation de l’unité passe également par une relecture de l’histoire de l’Indochine pendant la guerre, qui doit répondre à une double exigence, la nécessité de reconstituer un passé commun, c’est-à-dire la volonté de présenter une France unie dans la résistance à l’oppression, en y faisant participer les Français d’Indochine, et l’aspiration de la France Libre à apparaître aux yeux des Alliés comme une grande puissance, c’est-à-dire la nécessité de considérer la situation en Indochine comme la poursuite de la Seconde Guerre mondiale et la lutte contre les Japonais.

Cette relecture de l’histoire n’est pas sans incidence sur les représentations que les Français ont de la révolution vietnamienne.

En effet, il s’agit de montrer que toute la situation découle du coup de force japonais du 9 mars 1945. Le 9 mars est la seule et unique rupture reconnue par les autorités françaises.

Partant, la révolution vietnamienne est englobée dans une histoire plus vaste et est considérée comme un simple événement dans la politique des Japonais visant à mettre définitivement à terre la souveraineté française, et non comme une rupture aussi profonde que celle du 9 mars.

De nombreux rapports sont consacrés à l’étude de la période pendant laquelle l’administration française était absente de l’Indochine.

Leurs titres sont à eux seuls révélateurs : l’un d’entre eux, par exemple, écrit pendant la conférence de Fontainebleau en juillet 1946, est intitulé « L’expérience de l’indépendance », et embrasse la période depuis le 9 mars 1945 jusqu’au 6 mars 1946[20]  : la révolution vietnamienne est comprise dans l’histoire globale de la libération de l’Indochine, dont la lutte contre les Japonais est l’aspect essentiel.

Aucune autonomie ne lui est attribuée, car elle participe d’une suite d’événements déclenchée le 9 mars.

Il est vrai que le Viêt-Minh a largement profité de la disparition de l’ordre français, mais il n’en reste pas moins que sa prise du pouvoir marque une véritable rupture. Ainsi l’histoire revisitée par les Français ne remonte-t-elle pas plus loin que le 9 mars 1945.

Il est d’ailleurs particulièrement étonnant qu’aucun des responsables militaires ne revienne sur l’ancienneté du mouvement nationaliste et indépendantiste et sur les abus de la colonisation française pour expliquer sa vigueur. Certes, les rapports évoquent la fondation du Viêt-Minh en 1941, et son activité avant le coup de force japonais. Mais tous concluent que l’ « assaut nippon allait être le tournant décisif de son action »[21] .

D’autre part, les représentations d’un combat pour la libération de l’Indochine, mené par les Français, ne peuvent être qu’incompatibles avec la reconnaissance d’un authentique mouvement national vietnamien : la poursuite de la Libération ne saurait admettre un troisième terme dans la lutte.

Le triangle d’affrontement entre la France, le Japon et le Viêt-Minh est réduit à un affrontement entre deux États rivaux, la France et le Japon. Cette exigence ne peut se réaliser qu’à une seule condition, faire du Viêt-Minh l’un des deux termes de l’équation, c’est-à-dire l’assimiler au fascisme nippon dont il ne serait que l’un des derniers avatars.

L’insistance avec laquelle les responsables militaires français soulignent la collusion entre les Japonais et le Viêt-Minh et la façon dont cette interprétation est répercutée en métropole semblent indiquer que les possibles malentendus initiaux sur l’identité du Viêt-Minh ont été exploités à des fins de propagande.

Ainsi, le service de presse du ministère des Affaires étrangères, dès le 17 septembre, recommande-t-il aux ambassadeurs de différentes capitales de « souligne[r] dans [leurs] commentaires que [le Viêt-Minh...] a reçu, après la capitulation du Japon, [...] une aide importante des occupants nippons »[22] .

La prétendue collusion doit donc servir d’argument pour justifier l’action française en Indochine.

Les Français ne cessent de ce fait de voir derrière le Viêt-Minh les agissements des Japonais. Le constat d’une complicité passive les amène à considérer que le parti de Hô Chi Minh n’est que l’instrument d’une politique impérialiste japonaise mûrie depuis longtemps.

C’est dans cette surinterprétation de quelques observations que l’on peut déceler, non plus un malentendu, mais une construction de l’ennemi par les milieux dirigeants français, fût-elle biaisée par le prisme de la mémoire de la Seconde Guerre mondiale. La description de la révolution d’août est à cet égard révélatrice : s’il est vrai que le Viêt-Minh a largement profité de la capitulation japonaise pour s’emparer du pouvoir, les Japonais n’ont pas été leurs complices. D’après Masaya Shiraishi, « leur attitude [est] alors celle du “laisser-faire” vis-à-vis des affaires politiques locales »[23] .

Pourtant, la passivité des Japonais est bientôt comprise comme une complicité active : « Un plan secret, perfide et habile, est en cours de réalisation au moment où débute cette période trouble.

Il s’exécute du côté des Nippons. »[24]

Les traits communistes et le caractère autonome du Viêt-Minh s’estompent aux yeux des Français, car il revêt désormais l’apparence d’une organisation au service des Japonais. Les télégrammes relèvent systématiquement des preuves de leur collusion, notamment à propos des déserteurs japonais.

Cependant, les Français ne se contentent pas de relever les formes d’une collaboration entre ces derniers et le Viêt-Minh. Le second niveau d’interprétation consiste à voir dans le Viêt-Minh, non pas une simple organisation en collusion avec les ennemis d’hier, mais un parti au service des Japonais qui leur permet de se réinstaller clandestinement en Indochine, afin de réaliser leur dessein impérialiste, la mise en place de la Grande Asie orientale : les déserteurs sont en fait en service commandé et sont « les plus irréductibles Japonais [qui] ont trouvé moyen de poursuivre leur programme panasiatique »
[25] .

Le Viêt-Minh devient ainsi une véritable marionnette aux mains de Tokyo.

On distingue deux pouvoirs dans le gouvernement, un pouvoir officiel qui feindrait de négocier avec la France, et un pouvoir occulte dirigé par les Japonais, par le biais de sociétés secrètes dont seraient membres tous les dirigeants vietnamiens[26] .

En affirmant l’existence d’un complot dont les Japonais seraient les instigateurs, il s’agit en fait de montrer que la Seconde Guerre mondiale n’est pas achevée et que la France a un rôle à jouer en Extrême-Orient. Le Viêt-Minh est partiellement évacué pour laisser la place, dans les esprits, à un conflit entre la France et le Japon.

Les études sur l’armée vietnamienne sont particulièrement révélatrices de cette représentation. L’informateur des services de renseignements français, à Hué, fait ainsi état d’une école de cadres à Ha Ting, où enseignent des instructeurs japonais et allemands. Puis, après avoir parlé d’un « état-major nippo-annamite pour le centre Annam », il mentionne un « assez important état-major nippo-allemand » à Hué, en juin 1946[27]  : il en vient donc au fur et à mesure à occulter la présence des principaux intéressés dans le conflit, les Vietnamiens et le Viêt-Minh eux-mêmes, pour construire la situation en Indochine comme la poursuite des luttes de la Libération.

D’après l’auteur de ce rapport, Hô Chi Minh « réalise les buts de guerre des Germains et des Nippons, tout en plongeant son propre pays dans la ruine ».

Le combat manichéen contre le fascisme ne laisse pas de place à un troisième terme, et la collusion observée au début se transforme en une identification : « Ainsi Viêt-Nam ou Viêt-Minh, ce ne sont là que les prolongements de l’autoritarisme japonais », explique l’auteur du document intitulé

« L’expérience de l’indépendance »[28] .

Assurément, cette interprétation est une construction française consciente, et pas seulement une accumulation de malentendus : les responsables militaires français savent que le Viêt-Minh est communiste. Toutefois, ils ne s’attardent pas, dans un premier temps, sur cet argument pour le dénoncer.

Ils cherchent avant tout à légitimer leur retour en Indochine auprès des Alliés qui semblent soutenir les revendications d’indépendance du Viêt-Nam : l’identification du Viêt-Minh aux Japonais permet d’obtenir d’eux la reconnaissance de la souveraineté française sur l’Indochine tout en faisant participer les Français aux combats d’Extrême-Orient.

Le visage de l’ennemi est donc façonné pour justifier la politique française sur la scène internationale.

À cet égard, ce n’est peut-être pas un hasard si cette construction est à nouveau mise à contribution après l’insurrection de Hanoi, le 19 décembre 1946. Cet événement est en effet explicitement comparé au 9 mars 1945 : « Le coup de force est pleinement déclenché à 20 heures.

Ce n’est que la réédition, platement imitée, du coup de force japonais du 9 mars 1945 et l’équipe Viêt-Minh hissée au pouvoir le 19 août 1945 par les Japonais n’a pas fait preuve d’imagination [...]. Des hordes se ruent à l’assaut des maisons françaises et de nos cantonnements avec des hurlements sauvages selon la méthode japonaise. »[29]  

On souligne la ressemblance des méthodes employées.

L’assimilation des deux événements permet ainsi, une fois de plus, de montrer la collusion entre le Viêt-Minh et les Japonais, et donc de justifier l’action militaire française aux yeux de l’opinion internationale.

La construction du Viêt-Minh résulte ainsi de la rencontre d’un imaginaire, celui de la Seconde Guerre mondiale, et d’un événement, le 9 mars 1945, qui a complètement occulté aux yeux des Français la réalité de la révolution vietnamienne.

Le conflit mondial devient ainsi le cadre de référence pour décrire le Viêt-Minh. Cependant, celui-ci conduit à penser le mouvement de Hô Chi Minh également en fonction de la référence à la résistance et à la révolution, un thème dont la propagande vietnamienne s’est emparée, mais qui est aussi une construction française parallèle, notamment en métropole.

Le visage du Viêt-Minh, dans le miroir français, est ainsi propre à réveiller les passions françaises, puisque les prodromes de la guerre d’Indochine sont un face-à-face entre la Résistance et une résistance qui n’hésite pas à se draper dans les idéaux de la première.

La fabrication de l’ennemi par les milieux dirigeants français consiste donc à déconstruire cette image qui devient de plus en plus prégnante à l’été 1946.

DE LA RÉSISTANCE À LA RÉVOL...BELLION

En effet, la description de la situation en Indochine est chargée du souvenir de l’expérience de l’occupation allemande. Le 18 février 1946, le général Leclerc, par exemple, explique la nécessité de parlementer avec le Viêt-Minh : il est persuadé que le gouvernement vietnamien, s’il ne reçoit pas satisfaction sur sa revendication d’indépendance, est prêt « à se rejeter dans une guerre de type résistance française qui peut durer plusieurs années »
[30] .

Mais la référence à l’Occupation est constante dans la presse métropolitaine, notamment dans la presse communiste ou sympathisante.

Le 22 décembre 1945, le journal Franc-Tireur publie la lettre d’un soldat qui compare l’action française à Saigon au massacre d’Oradour-sur-Glane.

La condamnation des opérations françaises inscrit ainsi le Viêt-Minh dans l’histoire nationale française, et par là même dans la mythologie résistante. Ainsi, pour Andrée Viollis, les combattants du Viêt-Minh sont les frères d’armes des antinazis français
[31] .

Les dirigeants vietnamiens recherchent d’ailleurs cette identification en soulignant leur résistance aux Japonais : dès sa première entrevue avec un Français, François Missoffe, collaborateur de Sainteny, le 3 septembre 1945, Hô Chi Minh lui demande :

« Racontez-nous la Résistance en France [...]. Nous aussi, nous sommes des résistants. »[32]  

De même, Giap se présente devant Leclerc, à la suite du retour des troupes françaises à Haiphong, le 9 mars 1946, comme le premier résistant du Viêt-Nam[33] .

Tran Van Giau, un autre homme fort du régime Viêt-Minh, n’hésite pas à lancer au journaliste André Blanchet qui vient l’interroger : « C’est vous les Allemands. »[34]

L’identification demeure néanmoins ambiguë aux yeux de nombreux Français, car assimiler le Viêt-Minh à la Résistance française, c’est comparer le corps expéditionnaire français à l’occupant nazi, alors qu’il est composé des soldats de la Libération.

Alfred Silbert, recueille des témoignages particulièrement éclairants : un soldat, désemparé, lui confie que « c’est autre chose de pratiquer la guerre du maquis ou de la subir [...] car nous ne sommes tout de même pas des SS »[35] .

De fait, l’identification est difficile à manipuler, même par la presse communiste. Le 9 août 1946, René Dussart publie, dans Les Lettres françaises, un article retentissant dans lequel il dénonce la barbarie française.

Il achève son article sur la description des locaux de la Sûreté française de Saigon : « Savez-vous comment les gens d’Angleterre appelaient la Sûreté saigonnaise ? Belsen... tout simplement. »[36]  

Il prend soin cependant de mettre cela au compte des responsables colonialistes et non des soldats, héros de la Libération.

Le souci des autorités militaires françaises est cependant de discréditer cette image : la construction du Viêt-Minh comme ennemi passe par la déconstruction de celle-ci et par la dissociation du mouvement de Hô Chi Minh de la Résistance : l’identification du Viêt-Minh aux Japonais est un outil de propagande efficace.

A fortiori, les milieux colonialistes, en particulier autour de la revue Indochine française, dirigée par Francis Fonfreide et Alexandre Varenne, qui relaient la politique de Thierry d’Argenlieu en métropole, soulignent que « la seule résistance des Annamites aux Japonais a été celle, héroïque, des éléments associés aux troupes françaises et placés sous le commandement de Sabattier »[37]  : c’est une façon de refuser au Viêt-Minh le titre de résistant qu’il s’arroge.

De même, la convocation du modèle nazi doit délégitimer les prétentions du Viêt-Minh à apparaître comme le parangon de l’organisation résistante : le massacre de la cité Héraud est l’occasion pour d’Argenlieu de comparer les exactions vietnamiennes aux crimes perpétrés par les Allemands pendant la guerre.

De même, il qualifie la convention du 6 mars 1946 de « petit Munich »[38] .

Mais c’est surtout à partir de l’été 1946 que l’enjeu de la déconstruction de la figure du Viêt-Minh comme résistant revêt toute son importance. Cette image devient prégnante en France et s’élabore, sous l’effet conjugué de la propagande vietnamienne et d’une mentalité française fascinée par sa propre histoire, comme le reflet des passions métropolitaines.

En effet, à la suite de la convention préliminaire du 6 mars 1946, plusieurs conférences sont organisées pour achever les négociations, dont l’une s’ouvre à Fontainebleau le 6 juillet.

Plusieurs délégations vietnamiennes sont ainsi envoyées en France, la première du 26 avril au 15 mai, la seconde arrivant en juin, pour la conférence de Fontainebleau, tandis que Hô Chi Minh, reçu dans le cadre d’un voyage officiel, fait un long séjour en France de juin à septembre.


Ainsi, à partir d’avril 1946, la métropole est en contact direct avec les affaires vietnamiennes, alors qu’elle était jusque-là en proie à l’incertitude, victime d’une pénurie d’informations. Le voyage des délégations est ainsi l’occasion de rétablir une synchronie dans la perception de la situation, mais c’est aussi un moment essentiel dans la construction de l’image du Viêt-Minh.

Il s’agit également pour les délégués de réinscrire le Viêt-Minh dans l’histoire française, dans la lignée de la Révolution française et de la Résistance.

Le président de la délégation, Pham Van Dong, salue, devant les députés français, le 26 avril 1946, « la France, championne des droits de la personne humaine, la France de la Renaissance et des encyclopédistes, la France de la Révolution de 1789 et de la Commune de Paris, mais qui représente surtout la France d’aujourd’hui, la France de la Résistance et de la Libération »
[39] .

Les différentes délégations, et ce malgré l’échec de la conférence de Fontainebleau, se construisent ainsi une respectabilité.

Toutefois, tandis que les négociateurs vietnamiens travaillent à Fontainebleau, Hô Chi Minh, pendant toute la durée de son séjour, s’attache à diffuser cette image au-delà des cercles officiels, et cristallise toutes les représentations françaises. Le Viêt-Minh, aux yeux des Français, finit par s’identifier à lui.

La question de l’image de Hô Chi Minh prend donc toute son acuité pendant cette période : son séjour est l’occasion d’un voyage de légitimation, mais son personnage est également créé par les Français, car il focalise l’attention de tous
[40] .

Aux visites symboliques, notamment à la tombe du soldat inconnu ou au mont Valérien, succèdent les manifestations d’amitié, par exemple au parc Bagatelle, le 28 juillet. Son attitude et ses discours maintiennent l’ambiguïté sur son affiliation au communisme et créent autour de lui un vaste courant de sympathie.

À l’hôtel de ville de Paris, le 4 juillet, ou à la Mutualité, le 15 juillet, il éveille la curiosité des Parisiens, qui s’attardent sur la tunique de drap ou la barbiche de celui qu’on appelle l’ « oncle Hô ».

Mais l’engagement d’un certain nombre d’intellectuels, communistes ou compagnons de route essentiellement, pour soutenir la cause du Viêt-Minh contribue également à la construction de l’image du Viêt-Minh.

Une association France - Viêt-Nam se constitue sous la présidence de Justin Godart. La liste de ses membres aligne des noms prestigieux comme Andrée Viollis, Emmanuel Mounier, Paul Rivet, Maurice Viollette, Benoît Frachon, Pierre Cot, Paul Langevin, Claude Morgan, Picasso ou encore Vercors : beaucoup voient en Hô Chi Minh et ses partisans des continuateurs de l’esprit de 1789.

Le mouvement s’élève contre ceux qui veulent le faire passer pour un mouvement projaponais, et essaie de saisir l’opinion en organisant une série de conférences. Son premier bulletin, publié le 24 juillet 1946, décrit Hô Chi Minh comme l’incarnation de l’esprit de la Résistance, le combattant de l’ombre et le sans grade.

Elle rapporte aussi les propos du président vietnamien dont « le vœu le plus cher [...] est de marcher sur les traces de la France de 1789, de la Résistance et de la Révolution »[41] .

L’action de l’association France - Viêt-Nam est importante, mais reste exceptionnelle dans un monde intellectuel que l’Indochine n’intéresse guère. Cependant, elle révèle que Hô Chi Minh devient un véritable symbole où convergent et fusionnent toutes les aspirations.

C’est face à la mythification du personnage, qui s’opère en métropole, que les autorités militaires françaises, en particulier, doivent réagir : elles y dénoncent au contraire une mystification.

Face à un Viêt-Minh qui se drape dans les idéaux de la Libération, les autorités militaires essaient de présenter un autre visage de la résistance vietnamienne, celui du sang et des larmes. Craignant les effets du voyage des délégations et de Hô Chi Minh en France, elles multiplient les mises en garde, en rédigeant de nombreux rapports sur les exactions commises par le Viêt-Minh.

Ainsi, le 6 juin 1946 est rédigé un livre blanc sur les « atrocités Viêt-Minh »[42]  : il reprend, en fait, un certain nombre de rapports antérieurs concernant le massacre de la cité Héraud notamment, et dénonce la responsabilité du gouvernement vietnamien dans ces exactions.

Le 1er août est encore rédigée une note qui fait directement suite au livre blanc, et qui recense tous les crimes commis depuis le début de l’été[43] .

Pendant l’été 1946, le Viêt-Minh a donc deux visages, celui de la Résistance et celui de la terreur.

La duplicité de Hô Chi Minh ne tarde donc pas à être dénoncée, notamment par l’amiral d’Argenlieu, et le personnage se charge d’ambiguïtés. La question de la terreur prend alors toute sa place dans le débat franco-français au sujet de la pertinence de la référence à la Résistance pour définir le parti de Hô Chi Minh.

La presse s’empare de ce débat avec virulence dans les derniers mois de 1946, marqués par la dégradation des relations franco-vietnamiennes, et ce particulièrement après le bombardement de Haiphong, le 22 novembre 1946.

Le visage du Viêt-Minh se constitue de nouveau à travers le prisme de cette référence, et à travers une grande campagne lancée par la presse communiste ou sympathisante, notamment Franc-Tireur, contre les agissements de l’amiral d’Argenlieu.

À travers ce débat, « c’est la guerre qui recommence », explique Franc-Tireur, le 28 novembre 1946 : les souvenirs de la résistance et de la collaboration ne cessent d’être convoqués. Ainsi Albert Bayet écrit, à propos des détracteurs du Viêt-Minh, qu’il « aperçoi[t] parmi eux des hommes qui, à l’époque de l’agression contre l’Espagne, envoyaient des épées d’honneur aux franquistes, qui, au moment de Munich, s’aplatissaient devant Hitler, qui, au moment de Montoire, s’aplatissaient devant Pétain.

Alors quoi ?

La Kollaboration va donner des leçons de patriotisme à la Résistance ? »[44] .

L’image du Viêt-Minh s’élabore donc dans le miroir français.

La constitution du Viêt-Minh comme un ennemi passe par la déconstruction de ces analogies à la Résistance française promues par la presse communiste. La mobilisation de la presse atteint son paroxysme après l’insurrection de Hanoi, le 19 décembre 1946 : l’identification est rejetée par de nombreux journaux.

Ainsi le général Bertin Chevance, ancien résistant et directeur du journal Climats, signe-t-il un article le 26 décembre, où il s’adresse à Hô Chi Minh en dénonçant sa propagande qui jouait de cette assimilation : « Vous avez déclenché la lutte car vous la vouliez. Et cette lutte, vous voulez lui donner le sens de notre lutte clandestine, de notre résistance. Eh bien ! Non, monsieur Hô Chi Minh. Vous n’avez pas le droit d’assimiler la lutte que vous menez à la Résistance que nous avons faite. »

Il lui reproche même d’être venu négocier à Paris, car lui, « résistant et ancien “terroriste”, jamais n’[a] discuté avec les Allemands »[45] .

Pour lui, le soulèvement de Hanoi discrédite à jamais Hô Chi Minh, en qui de nombreux Français avaient pourtant cru.

À la différence du massacre de la cité Héraud, en septembre 1945, auquel la presse n’avait pas beaucoup réagi, les atrocités commises à l’encontre des Français de Hanoi sont longuement décrites dans les journaux. Climats, le 23 janvier 1947, en vient à publier des photographies en faisant systématiquement le parallèle avec les crimes nazis :

« La Gestapo n’a pas fait mieux », écrit Pierre Mayère.

L’image d’un Viêt-Minh résistant est donc déconstruite et renversée : le parti de Hô Chi Minh est au contraire de nouveau construit comme un ennemi de la Seconde Guerre mondiale.

La persistance de ce schéma d’interprétation montre que la France n’est peut-être pas consciente de la nouveauté de la situation et qu’elle n’est pas prête à faire face à un conflit colonial, doublé d’un conflit contre le communisme, même si la question du communisme est de plus en plus présente à la fin de 1946.

UN ENNEMI À LA SOLDE DE MOSCOU ?

Déroutés par la nouveauté que représente le Viêt-Minh, les Français ont en effet cherché des modèles pour le qualifier et ont puisé leurs références dans un imaginaire, façonné par le souvenir de la Révolution française, mais profondément renouvelé par la Seconde Guerre mondiale, qui a légué des grilles d’interprétation : les références au fascisme et au nazisme sont constamment présentes, attisées à l’automne 1946 par la fin des procès de Nuremberg.

On applique ainsi au Viêt-Minh des schémas déjà éprouvés, afin de l’arracher à son exotisme.

Cependant, les représentations du Viêt-Minh ne doivent pas seulement être considérées en fonction d’un héritage, fût-il proche : sa construction est aussi le résultat d’angoisses et de peurs. À cet égard, l’été 1946 semble constituer une césure dans la perception du communisme vietnamien.

Certes, ce n’est pas à cette époque que l’on découvre que le Viêt-Minh est dirigé par d’anciens responsables du Parti communiste indochinois. Mais c’est à partir de l’été 1946 que l’anticommunisme commence à jouer un rôle dans les représentations, dans un contexte international qui se dégrade : la prise de conscience du danger communiste résulte de la situation générale en Chine notamment, où la guerre civile a repris à partir du mois de juillet.

Or, la majeure partie des troupes d’occupation chinoises de Luhan quitte le Tonkin au mois de juin, conformément aux dispositions prises lors des négociations franco-chinoises de février : le Guomindang craint que le Viêt-Minh ne s’installe en maître à la frontière méridionale de la Chine, et le fait savoir à la France.

Bouffanais, chargé du consulat général de France à Kunming, explique ainsi que « notre position en Indochine et singulièrement au Tonkin doit tenir compte de la conjoncture politique en Chine [...]. Si Yenan devait l’emporter, les communistes chinois donneraient immédiatement la main au Viêt-Minh, nous ne pourrions nous maintenir en Extrême-Orient »[46] .

La construction du Viêt-Minh comme ennemi s’élabore ainsi en fonction d’un futur imaginé.

L’anticommunisme est ainsi pour beaucoup dans l’échec des négociations de Fontainebleau, Max André, le président de la délégation française, ayant reçu des instructions de Bidault pour « obtenir toutes les garanties pour que, sur le plan extérieur, le Viêt-Nam ne p[uisse] pas devenir un nouveau pion du jeu soviétique, un nouveau satellite de Moscou »[47] .

Les derniers mois de 1946 sont marqués par une augmentation du nombre de notes au sujet du phénomène communiste en Indochine, suggérant que ce dernier est devenu une hantise pour les dirigeants français. Partant, on est loin de l’image, diffusée par les rapports postérieurs au 19 décembre 1946, de Français aveuglés par la propagande vietnamienne, même si celle-ci est importante.

En effet, pendant presque un an, le Viêt-Minh a tenté de dissimuler son identité communiste : le Parti communiste indochinois, dont sont issues les principales figures du Viêt-Minh, a ainsi proclamé son autodissolution le 11 novembre 1945.

Il s’agissait d’une manœuvre tactique, destinée à éviter les heurts avec les Chinois, mais les dirigeants français n’en sont pas dupes, pas plus qu’ils ne sont dupes de la façade démocratique que le Viêt-Minh présente à l’opinion internationale.

Mais selon les Français, les masques tombent véritablement à l’été 1946.

Le chef du deuxième bureau de l’état-major, Keller, rédige un long rapport sur les raisons de la visibilité beaucoup plus grande du communisme en Indochine[48]  : selon lui, elle résulte du départ des troupes de Luhan du nord du Viêt-Nam, du capital de sympathie gagné par Hô Chi Minh au cours de son voyage en France, du résultat des élections françaises qui font du PCF le premier parti de France, mais aussi d’un changement géopolitique régional, dans la mesure où la Thaïlande a aboli sa législation anticommuniste et noue des relations avec l’URSS.

De plus, l’activité du Viêt-Minh à la fin de 1946 est, aux yeux des autorités, révélatrice d’un désir d’expansionnisme idéologique.

D’après Keller, « il est certain que depuis deux mois la politique étrangère du gouvernement du Viêt-Nam est entrée dans une nouvelle phase qui a pour but d’étendre l’influence vietnamienne et communiste sur tout le Sud-Est asiatique »
[49] .

Le communisme est donc perçu comme une réelle menace, et deux figures retiennent l’attention, Vo Nguyen Giap et Tran Van Giau : depuis Bangkok, où il se rend à partir de mai 1946 et où il est l’un des correspondants de Giap, il se consacre à l’élaboration de l’union de l’Asie du Sud-Est, pour ranimer la flamme révolutionnaire dans la région.

Il est le principal animateur de deux organismes qui veulent promouvoir cette union, la Ligue du Sud-Est asiatique, fondée en 1946, et le Bureau du Pacifique (il en est le président), centrale communiste des mers du Sud.

C’est donc à travers le personnage de Tran Van Giau que le Viêt-Minh prend le visage de l’expansionnisme communiste. La perspective d’une Asie du Sud-Est communiste et les peurs qu’elle engendre, conduisent ainsi les dirigeants français à reconsidérer leur perception du Viêt-Minh.

Cependant, le Viêt-Minh ne saurait être, à leurs yeux, un mouvement autonome : après avoir stigmatisé l’obédience japonaise, les responsables français considèrent que la main de Moscou est derrière lui.

Les relations entre le Viêt-Minh et l’URSS sont d’ailleurs étroitement surveillées, depuis la fin de l’année 1945, mais c’est surtout l’arrivée d’une mission soviétique à Saigon, le 26 octobre 1946 composée de trois officiers, officiellement dépêchés pour rapatrier des prisonniers russes, qui inquiète les autorités françaises.

Retardée pendant près d’un an, elle fait l’objet, pendant son séjour, jusqu’au 13 janvier 1947 d’une étroite surveillance et d’interprétations divergentes : beaucoup considèrent qu’elle est révélatrice d’un important travail de propagande que l’URSS effectuerait dans toute l’Asie du Sud-Est[50] .

Le directeur de la police et de la sûreté fédérale, Perrier, signale que la mission soviétique a pris contact avec les membres du PCC de Cholon, dans la banlieue de Saigon, qui connaît d’ailleurs un regain d’activité à l’automne 1946 : le lieutenant Vichniak, lors d’une réunion, aurait évoqué l’ « installation ultérieure dans ce pays d’une représentation soviétique chargée d’y propager la doctrine marxiste »[51] .

Mais certains, comme Keller, sont plus nuancés et estiment que la présence des Soviétiques n’a aucune répercussion politique, et que son prétendu rôle subversif est largement surestimé
[52] .


Néanmoins, elle renforce la peur du péril rouge, et la perception du Viêt-Minh s’en trouve modifiée : il prend l’aspect de l’ennemi communiste.

Les autorités françaises ne sont donc pas aveugles face au Viêt-Minh.

Pourtant, pendant toute cette période, elles ont été désorientées par la nouveauté de ce qui se révèle être la première manifestation étatique d’un communisme asiatique. Certes, les Français essaient d’en analyser les ressorts, mais c’est avant tout le modèle soviétique qu’ils recherchent dans les réalisations du Viêt-Minh.

Le malaise vient de la confrontation avec le seul système éprouvé jusqu’alors, le communisme occidental et russe : le communisme vietnamien n’est en effet que le pâle reflet du modèle auquel on veut le faire correspondre (en fait, dans ses méthodes et ses discours, il est beaucoup plus proche du modèle chinois).

Il semble que la question nationale soit à l’origine de la difficulté que les Français ont à identifier le Viêt-Minh. L’attitude d’André Blanchet lors de son entretien avec Tran Van Giau est à cet égard révélatrice : il ne comprend pas que ce dernier puisse se réclamer de l’Internationale communiste tout en définissant le Viêt-Minh comme un parti national[53] .

C’est pour les Français une nouveauté déconcertante et de nombreuses personnalités en viennent, de ce fait, à mettre en doute le communisme du Viêt-Minh. C’est le cas de Paul Mus, qui est alors conseiller politique dans l’état-major du général Leclerc, et qui participe à la séance du Comité interministériel de l’Indochine du 12 janvier 1946 : selon lui, « le Viêt-Minh ne serait pas communiste, du moins pas au sens où nous l’entendons en France, et même pas au sens russe ».

Il pense « qu’en fait il n’y a pas de communisme réel en Extrême-Orient »
[54] .


Le Viêt-Minh présente ainsi des caractères originaux qui empêchent de l’assimiler à un communisme déjà connu. Bien avant la publication en 1952 de Viêt-Nam, sociologie d’une guerre, Paul Mus souligne que le Viêt-Minh est porté par un sentiment national très présent au sein de la population[55] .

Au sein des autorités militaires, seul le général Leclerc semble prendre la question nationale au sérieux. Elles ne saisissent pas bien l’identité du Viêt-Minh, car elles refusent de le reconnaître comme représentatif d’une partie des aspirations nationales de la population : de ce fait, elles peuvent faire de ses membres d’anciens bagnards de Poulo-Condore ou des agents de l’étranger.

Personne n’intègre, au cœur du communisme vietnamien, le nationalisme, qui ne constituerait qu’un artifice de propagande.

Ainsi, si les Français n’ont pas été complètement aveuglés par la propagande vietnamienne, il semble qu’ils aient été désorientés par la nouveauté que le Viêt-Minh représentait.

Celui-ci demeure, en effet, à son étrangeté, ce qui le rend susceptible de toutes les constructions. De la même manière que les milieux de la gauche française le construisent comme le digne héritier de l’histoire française et comme le parti qui est parvenu à passer de la Résistance à la révolution, les autorités militaires fabriquent le Viêt-Minh à l’image de leurs ambitions stratégiques et de leur volonté de légitimer leur action en Indochine : si les prodromes de la guerre froide sont à l’origine d’une prise de conscience plus forte du danger communiste en Asie du Sud-Est, c’est néanmoins comme un ennemi de la Seconde Guerre mondiale que le Viêt-Minh est de ce fait constitué, et c’est avec les critères que celle-ci leur a légués que les Français réagissent à la situation.

Notes

[1] Georges Manue, « Le Viêt-Minh, notre ennemi », La Revue de Paris, 1er novembre 1949.

[2] MAE, série États associés, section II, vol. 46, rapport de Jacques Patault, « Le Viêt-Minh, parti de la dictature ».

[3] Alain Ruscio, « Le monde politique français et la révolution vietnamienne », Charles-Robert Ageron et Philippe Devillers (dir.), Les chemins de la décolonisation de l’empire colonial français, 1936-1956, Paris, CNRS, 1986, p. 209-214.

[4] Voir Jean Sainteny, Histoire d’une paix manquée. Indochine, 1945-1947, Paris, Amiot-Dumont, 1952.

[5] Philippe Devillers, « Le choix de la voie négociée », Guy Pedroncini et Philippe Duplay (dir.), Leclerc et l’Indochine. 1945-1947, quand se noua le destin d’un empire, Paris, Albin Michel, 1992, p. 139-166.

[6] Pierre Brocheux, Hô Chi Minh, du révolutionnaire à l’icône, Paris, Payot, 2003.

[7] MAE, série Asie-Océanie, sous-série Indochine, vol. 138, note de la direction des affaires politiques du secrétariat d’État aux Colonies, 18 septembre 1945.

[8] Fondation nationale des sciences politiques (FNSP), 1 SA 2 dr 4, rapport B5, décembre 1945.

[9] Cité par Alain Ruscio, Les communistes français et la guerre d’Indochine (1944-1954), Paris, L’Harmattan, 1985, p. 59.

[10] FNSP, 1 SA 2 dr 1, « note pour le commandement Sainteny ».

[11] Thierry d’Argenlieu, Chronique d’Indochine, 1945-1947, Paris, Albin Michel, 1985, p. 62.

[12] MAE, série États associés, vol. 50, « Rapport mensuel de la direction de la police et de la sûreté fédérales pour février 1946 », en date du 9 mars 1946, signé par le chef d’escadron Buis.

[13] FNSP, 1 SA 2 dr 4, « Note sur les activités subversives en Indochine (1940-1945) ».

[14] Philippe Devillers, « Le choix de la voie négociée », art. cité, p. 143.

[15] Thierry d’Argenlieu, op. cit., p. 59.

[16] FNSP, 1 SA 2 dr 4, rapport B5.

[17] Léo Figuères (dir.), Hô Chi Minh notre camarade, Paris, Éditions Sociales, 1970, p. 142.

[18] Thierry d’Argenlieu, op. cit., p. 251.

[19] Henri Estirac, Je reviens d’Indochine, Paris, Les Œuvres françaises, 1946, p. 146.

[20] FNSP, 1 SA 3 dr 1, « L’expérience de l’indépendance », écrit au moment de la conférence de Fontainebleau.

[21] Ibid., 1 SA 2 dr 4, rapport B5.

[22] MAE, série Asie-Océanie, sous-série Indochine, vol. 138, télégramme du service d’information et de presse du ministère des Affaires étrangères, 17 septembre 1945.

[23] Masaya Shiraishi, « Présences japonaises : les troupes japonaises en Indochine de 1940 à 1946 », Guy Pedroncini et Philippe Duplay (dir.), op. cit., p. 45.

[24] FNSP, 1 SA 2 dr 4, rapport B5.

[25] MAE, série Asie-Océanie, sous-série Indochine, vol. 72, télégramme de D’Argenlieu, 1er août 1946.

[26] MAE, série États associés, vol. 50, rapport « Renseignements recueillis par un Français à Hué pendant le gouvernement Hô Chi Minh », auteur anonyme, juillet 1946.

[27] Ibid.

[28] FNSP, 1 SA 3 dr 1, « L’expérience de l’indépendance ».

[29] Ibid., 1 SA 4 dr 6, « Exposé chronologique des événements ayant amené l’éclatement du conflit franco-vietnamien », janvier 1947.

[30] Thierry d’Argenlieu, op. cit., p. 154.

[31] Andrée Viollis, Ce soir, 30 octobre 1945.

[32] François Missoffe, Duel rouge, Paris, Ramsay, 1977, p. 25.

[33] Jean Sainteny, op. cit., p. 189.

[34] André Blanchet, Au pays des ballila jaunes. Relations d’un correspondant de guerre en Indochine, Saint-Étienne, Dorian, 1947, p. 181-200.

[35] Alfred Silbert, Demain, l’océan Indien, Paris, La Nouvelle Édition, 1948, chap. V.

[36] René Dussart, « Conquête de l’Indochine », Les Lettres françaises, 9 août 1946.

[37] Indochine française, novembre 1945.

[38] Thierry d’Argenlieu, op. cit., p. 222.

[39] MAE, série Asie-Océanie, sous-série Indochine, vol. 69, communiqué à la presse de la ligue des ressortissants vietnamiens, 27 avril 1946.

[40] Voir notamment Pierre Brocheux, Hô Chi Minh, du révolutionnaire à l’icône, Paris, Payot, 2003.

[41] BDIC, 4P 4804 « Association France - Viêt-Nam. Bulletin d’information du 24 juillet 1946 ».

[42] Service historique de la Défense, section Terre, 10H602, « Atrocités Viêt-Minh ».

[43] Ibid., 10H602, note d’information non signée, 1er août 1946.

[44] Albert Bayet, « Rappelez d’Argenlieu ! », Franc-Tireur, 7 décembre 1946.

[45] Bertin-Chevance, « Guerre civile en Indochine », Climats, 26 décembre 1946.

[46] FNSP, 1 SA 4 dr 4, lettre de Bouffanais à Meyrier, ambassadeur de France à Nanjing, 15 juillet 1946.

[47] Cité par Henri Azeau, Hô Chi Minh, dernière chance. La conférence franco-vietnamienne de Fontainebleau, juillet 1946, Paris, Flammarion, 1968, p. 154 et s.

[48] MAE, série Asie-Océanie, sous-série Indochine, vol. 161, note de Keller, 13 novembre 1946.

[49] Ibid.

[50] MAE, série Asie-Océanie, sous-série Indochine, vol. 174, « Propagande communiste en Extrême-Orient », 6 novembre 1946.

[51] Ibid., note de Perrier, 14 novembre 1946.

[52] Ibid., note de Keller, 22 novembre 1946.

[53] André Blanchet, op. cit., p. 181-200.

[54] MAE, série Asie-Océanie, sous-série Indochine, vol. 69, compte rendu de la séance du Cominindo du 12 janvier 1946, signé par le commandant Revol.

[55] Paul Mus, Le Viêt-Nam chez lui, Paris, Hartmann, 1946.

Résumé

Confrontées à une situation complètement nouvelle en Indochine, où le Viêt-Minh communiste a pris le pouvoir en août 1945, les autorités françaises réagissent selon un système de pensée légué par la Seconde Guerre mondiale. Appliquant à un adversaire dont elles ont du mal à définir l’identité, mais dont elles ne sont pas dupes de la propagande, des modèles déjà éprouvés, afin de l’arracher à son étrangeté, elles en viennent à le construire comme un ennemi de la Seconde Guerre mondiale : cette construction, qui a pour but de justifier l’action française menée en Indochine auprès des Alliés hostiles à leur retour dans la péninsule, contribue à faire du Viêt-Minh le reflet des passions politiques françaises.
 

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« Je ne suis pas abattu, je n'ai pas perdu courage.
La vie est en nous et non dans ce qui nous entoure.
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Voilà le véritable sens de la vie ».

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