Violet 2 doit le connaître.
Algérien d’origine, son père ancien combattant de la Grande Guerre, médaillé militaire, commande au Maroc un maghzen (groupement de supplétifs).
SMAIN (nom de guerre) jeune homme en 1955, passe le BAC avec brio, fils de famille nombreuse (cinq frère et sœurs). Un de ses frères aînés à disparu en Indochine, les autres militeront rapidement au FLN (Front de Libération National), ce sont eux qui endoctrinent le jeune homme.
Avant de rejoindre en 1956 le Camp de Larache (à coté de la frontière Espagno-Marocaine), il est au lycée responsable d’une cellule militaire. Au camp, il reçoit une instruction de guérilla,
pendant deux mois donné par des hommes qui eux-mêmes ont été formés en Chine et en Egypte.
Il a 17 ans et il est choisi pour suivre des cours de transmission, donné par des tirailleurs déserteurs (anciens s/off radio). Après trois mois d’une formation intensive, avec le grade de sous lieutenant, il rejoint le maquis et un camp dirigé par le commandant BOUMEDIENNE (futur chef d’état Algérien). C’est celui-ci qui lui donne son nom de guerre.
Le 20 Décembre 1957, il franchit la frontière avec sa petite colonne, après une marche exténuante. Arrimés à dos de chameau, son poste ANGRC 9, un fusil Mauser et ses deux cent cartouches, 6 grenades et deux bidons.
Sa colonne atteint enfin le point de ralliement, guidé par son tissal (estafette), à cet endroit, broute un troupeau d’ovin afin d’effacer les traces de leurs passage.
Par étape d’une cinquantaine de kilomètres chaque nuit, il gagne le PC Zonal ou il est chargé des liaisons radio avec le Maroc. Sa connaissance des codes, des ordres et des mouvements, ainsi que ses compétences, font de lui le second personnage de la zone. Afin de le protéger, son poste de radio est caché chaque jour à des endroits dont il ignore le lieu. Chaque soir le PC est déplacé d’une trentaine de kilomètres.
Les troupes Française essayent de pacifier les populations, mais la nuit venue, le FLN, les endoctrine, souvent contre leur grès, afin de gonfler leurs effectifs pour pouvoir paraître crédible à l’opinion internationale et surtout à l’ONU.
C’est en Octobre 1958, que leur tranquillité est mise à mal, après l’opération « jumelles » mise sur pied par le général GILLES, c’est l’arrivée du colonel BIGEARD à la tête du secteur Saïda, début 59, qui produira le plus d’effets.
Au Maroc, c’est l’affolement, si BRUNO (indicatif de BIGEARD) reste tout est foutu. SMAIN reçoit par radio « abattre BIGEARD à tout prix ». L’opération échoue, seul un ancien compagnon d’Indochine de BRUNO et fidèle garde du corps de celui-ci sera tué, ce qui rendra BRUNO plus dur. Parmi ses hommes, le lieutenant Georges GRILLOT, (indicatif GEORGES) ancien maquisard et para d’Extrême-Orient, qui avait réussi en Indochine à retourner un commissaire politique Viet.
Le capitaine GRILLOT "GEORGES" février 1962
photo Bail et Smet
En attendant il faut contrer l’adversaire dont on connaît la grande puissance qui le téléguide et le battre sur son propre terrain. Tel VANDENBERGHE, le lieutenant GRILLOT, visite la prison de Saïda, où sont détenus des fells, sur un regard ou après quelques mots, six son choisi, dont YOUSSEF un ancien tissal. Seul le lieutenant les emmène au dessus de Saïda, leur fait monter le camp puis leur dit «Voici six fusils, gardez moi, si demain matin je suis encore vivant, j’ai gagné ….. ». Trois jours plus tard, ils étaient quarante, une semaine après soixante quinze et très vite deux cent. Le COMMANDO GEORGES était né.
Le 3 Mars 1959, SMAIN et le capitaine de la zone 8 (Sahara) reviennent d’une tournée, ils font étape au Kredder, puis se séparent, ils refont jonction au point de ralliement à 4h00 du matin, après contact radio, le poste est dissimulé et tous s’endorment sous une hutte de fortune. A 5h00 un guetteur sonne l’alerte, un troupe progresse à moins d’un kilomètre, la quinzaine de fells montent sur la crête avec leur FM, là ils réalisent qu’ils sont totalement encerclés. Leur hôte de la veille, les ayant trahis.
La troupe est commandé par BIGEARD en personne, il a avec lui le 1/8 RIM et le Commando GEORGES, les rebelles essaye de trouver la faille afin de s’y glisser en arrosant les groupes qui progressent vers eux. Mais face à des professionnels formés à leurs techniques, ils sont coincés, SMAIN et un second radio arrivent à passer, mais sont repéré par un avion de reconnaissance, qui les marque avec un fumigène, une patrouille de T6 intervient alors et les « roquettent et les mitraillent ». SMAIN se sent perdu, l’autre radio a été déchiqueté par une rafale, il brûle ses cartes et ses codes, puis hurle «ne tirez pas, je me rend ». Un moment plus tard, le sous lieutenant radio est poussé dans une alouette pilotée par un marin, le célèbre commandant BABOT, qui le dépose au PC de BRUNO au sommet du mont Sidi Youssef.
BRUNO lui demande « Que faisais tu au maquis ? » SMAIN lui répond « Secrétaire zonal », mais un rallié le reconnaît « C’est SMAIN le radio », pris en défaut il le reconnaît, BRUNO lui demande alors « Quel était le premier message me concernant ? », réponse « Vous tuer à tout prix ! »
SMAIN est transféré sans brutalité au DOP (Détachement Opérationnel de Protection, contre espionnage militaire), où il va subir des interrogatoires musclés, même de la part de la DST qui désire tout connaître de l’implantation ennemi au Maroc. Il va rester captif cinq au fond d’une cellule mois, là on lui donne le choix, se rallier ou passer en justice, soit 15 ans de détention. Déchiré entre la parole de la France, son père, sa culture et les doctrine du FLN, il demande à rencontrer le commando GEORGES et le suivre pendant quelques temps, mais non armé, GEORGES accepte le défi et l’affecte comme son radio.
Lors de la venue à Saîda du président de la république, SMAIN, le rencontrera, ils parleront même ensemble, SMAIN décide alors de « jouer le jeu » tout en demandant de réformer certaines méthodes du commando : « Guerre totale au FLN, mais respect du combattant » seront ses objectifs.
Il s’impose très vite comme chef, la troupe compte maintenant quatre katibas (commando) composé d’une vingtaine de volontaire (20% sont d’anciens fells)
SMAIN, second à droite tête nu, interrogation d'un fell
A la tête de chaque Katibas de redoutables meneurs, aspirants ou adjudants, tous ou presque ancien rebelle, dont les noms vont faire trembler l’Algérie : YOUSSEF, BENDIDA, RIGUET, MOHAMMEDI……
En 1961, les dissensions gagne peut à peu l’armée, SMAIN préfère les ignorer, le président de la république ayant parlé d’auto détermination, les colons crient à la trahison, les militaires ressentent un nouvel abandon du gouvernement, l’OAS va voir le jour et faire parler la poudre. Pour le commando GEORGES, tout espoir d’une transition « douce » disparaît et avec elle la raison d’appartenir à celui-ci.
En Mars 1962, à la veille des accords d’Evian, un décret autorise les Harkis à souscrire un engagement dans l’Armée Française, un licenciement avec prime ou un statut d’agent contractuel sur place !......Et surtout les autorités n’accepteront d’embarquer que les soldats, oubliant les milliers de familles qui ont cru et soutenu notre cause. Quand connais les liens étroit qui lient les familles musulmanes, on comprend que les commandos aient refusé de telles situations.
Le 4 Avril 1962, RIGUET, BENDIDA, HABIB et SMAIN sont nommés sous lieutenant d’active au cours d’une émouvante cérémonie. On tente de forcer le destin, tout est fini, les hommes sont désarmés pour éviter toutes escalade.
Le 21, HABIB est enlevé puis exécuté.
Le 23, RIGUET et BENDIDA, rejoignent le FLN, on ne les reverra jamais, on chuchote dans les douars, qu’ils ont été dépecés vivants.
Le 24, SMAIN est convoyé en priorité absolue en hélicoptère, le soir même il est en France.
Le 28, GEORGES, directement menacé par le FLN et l’OAS décolle le dernier à bord d’une alouette. Entre temps le capitaine GREGOIRE a pu évacuer YOUSSEF.
L’indépendance proclamée, sur les 242 hommes que comptait le Commando GEORGES, 180 retourneront dans leurs foyers, la plus part finiront en prison ou exécutés, 8 seront incorporé au 8ème RI et 16 rapatrié en métropole. Au fils des années certains rescapés arriveront à rejoindre la France.
SMAIN quant à lui, reprend sa véritable identité. Malgré une dure réadaptation, il a poursuivi une belle carrière militaire dans diverse unité motorisé, puis affecté dans l’infanterie, le FLN retrouve sa trace et s’apprête à l’assassiner, il est alors muté au 8ème groupe de chasseurs.
Seul, totalement démuni, il va reconstruire sa vie et dès 1965, il essaye de retrouver et d’aider des anciens membres du commando.
Plusieurs stages et commandements au CNEC de Mont Louis et au CEC de Givet confirmeront ses talents d’homme de guerre.
Il terminera sa carrière avec le grade de capitaine.
Ces hommes ayant choisi de se battre pour notre drapeau.
N'attendaient aucune pitié de leurs anciens compagnons.
Toutefois notre pays a souvent abandonné ses soldats à une mort certaine.
Ceci est un épisode peu glorieux de notre histoire.