Les événements de l’automne 1950, connus sous le terme générique de bataille de Cao Bang, montraient à la France que la guerre d’Indochine avait changé de nature. Sans un changement de stratégie et sans un effort militaire conséquent, il serait très difficile de conserver l’Indochine sous son influence.
Pour comprendre la bataille de la RC 4, pour route coloniale n° 4 - ou de « bataille de Cao Bang » - quand bien même cette petite localité ne fut le théâtre d’aucun combat, il convient de remonter au mois d’octobre 1947. Le général Salan commande alors les Forces terrestres du Nord-Vietnam. Il lance l’opération Léa qui vise à la destruction de l’appareil politico-militaire vietminh dans le Tonkin. Si les résultats de l’opération restent mitigés, celle-ci permet toutefois la réoccupation de la zone frontière du nord-est du Vietnam. Le commandement y décide l’implantation de dizaines de postes ravitaillés par une unique voie de communication : la RC 4. Le Vietminh ne s’y trompe pas et commence, dès la fin de l’année 1947, à monter des embuscades de plus en plus meurtrières sur les convois de ravitaillement, attaquant également les garnisons les plus faibles. Au printemps 1949 et dans un contexte d’enlisement des opérations et d’impasse politique en Indochine, le gouvernement décide de confier au général Revers – l’équivalent de l’actuel CEMAT - une mission d’inspection en Indochine. Aux termes de cette dernière, il préconise l’évacuation des postes de la Haute région tonkinoise trop exposés aux coups de l’adversaire. Ceux de Bac Khan et Nguyen Binh seraient abandonnés en priorité tandis que « Cao Bang serait réduit à une occupation allégée étant entendu que ce poste serait replié devant une menace sérieuse ».
Un poste de surveillance armé autour de Cao Bang tenu par la Légion et équipé d’un mortier de 120 mm – Juillet-août 1950 Légende photo 2 : Parachutage de matériel sur Cao -Bang
L’évacuation de Cao Bang Pour différentes raisons, le "rapport Revers", pourtant entériné par le gouvernement, n'est pas suivi. En effet, des oppositions existent. Elles sont liées à la conduite de la guerre et aux différentes appréciations de situation des échelons politico-militaires. Il faut attendre le mois de septembre 1950 pour que l’opération d’évacuation de Cao Bang soit – enfin – décidée. Sa conception paraît simple : une colonne, forte d’environ 2 700 hommes commandée par le lieutenant-colonel Le Page, partirait de That Khé et se porterait au-delà de Dong Khé (opération Thérèse) pour « tendre la main » à la colonne Charton (environ 2 200 hommes et 900 civils) qui aurait évacué Cao Bang (opération Orage). La planification et la conduite de l’opération souffrent cependant de graves défauts et d’importantes erreurs sont commises. Ainsi, la capture de Dong Khé par l’armée populaire vietnamienne, le 18 septembre, n’entraîne aucune modification du plan initial. Le Page, pense-t-on un peu vite, n’aura "simplement" qu’à reprendre le poste… Or, il n’y parviendra pas. Les colonnes Le Page et Charton feront leur jonction le 7 octobre et disparaîtront sous les coups répétés des bataillons de l’armée. En effet, le Vietminh, dont une partie du commandement français a largement sous-estimé les capacités manœuvrières et la nouvelle puissance de feu, a très vite réagi aux premiers signes de l’évacuation et vu l’occasion de remporter une grande victoire.
Parachutage de matériel sur Cao Bang depuis un avion Junkers Ju-52 – Juillet-août 1950 Parachutage de matériel sur Cao Bang depuis un avion Junkers Ju-52 – Juillet-août 1950 Au lendemain de la bataille Dans les jours qui suivent, des centaines d’hommes venus porter secours à leurs camarades disparaissent. Surestimant – cette fois – l’adversaire, le commandement local abandonne Langson le 17 octobre : des milliers de tonnes de nourriture et d’équipements divers tombent, intacts, aux mains du Vietminh. Aux lendemains de la bataille, le gouvernement français n’est pas encore prêt à lâcher l’Indochine et envoie un chef prestigieux, le général de Lattre de Tassigny, redresser la situation. Malgré son action, ce dernier écrira en septembre 1951 aux membres du gouvernement : « Il peut survenir une catastrophe en Indochine, il ne peut pas y surgir de miracle. » Trois ans plus tard, l’Histoire lui donnera raison…
« Je ne suis pas abattu, je n'ai pas perdu courage. La vie est en nous et non dans ce qui nous entoure. Être un homme et le demeurer toujours, Quelles que soient les circonstances, Ne pas faiblir, ne pas tomber, Voilà le véritable sens de la vie ».
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La bataille de Cao -Bang ou de la RC.4. ( texte inedit )