1958: Quand Bigeard quittait "ses paras"
Par LEXPRESS.fr ,
Portrait du colonel Bigeard, au moment où il quitte le commandement de son régiment de parachutistes, en avril 1958, en Algérie.
Le colonel Bigeard a quitté le commandement du 3e régiment de Parachutistes Coloniaux pour prendre la direction, à l'État-major d'Alger, d'une nouvelle école de cadres consacrée à la " guerre révolutionnaire".
Le "Journal d'Alger" a publié, à cette occasion, les déclarations faites par le colonel Bigeard dans une interview accordée à notre confrère Fernand Carreras, sur l'évolution de la situation et la conduite des opérations en Algérie.
Le plus prestigieux des officiers parachutistes s'élève contre l'optimisme officiel avec une franchise brutale, confirmant ce que de rares journalistes écrivent depuis longtemps sur la conduite des opérations en Algérie. Accusera-t-on le colonel Bigeard, comme ceux qui l'ont devancé, de " démoralisation " de l'armée ?
Sur l'aérodrome de Tébessa, les officiers du 3e régiment de parachutistes coloniaux sont venus saluer leur chef, le colonel Marcel Bigeard, qui quitte l'unité, remplacé par le colonel Trinquier.
D'un ton paternellement bourru, le " patron les renvoie " : " F ; le camp, je vous ai assez vus depuis trois ans ! "
La veille, dans un ordre du jour, le colonel après avoir fait le bilan des joies et des peines du 3e R.C.P., disait " Je n'entendrai plus vos chants au lever du jour, je ne vous verrai plus défiler, conscients de votre force tranquille...
Je m'arrête. Vous allez me faire pleurer.
Que Dieu vous aide et vous garde ! "
Je sais quel arrachement ce départ a dû être pour les garçons de la 3e. Après avoir vécu une dizaine de jours, en leur compagnie, la vie exaltante du djebel, j'écrivais en septembre dernier: " Bigeard sait qu'un jour il devra quitter le régiment.
Il le fera avec peine.
Ses officiers et ses hommes envisagent avec angoisse cette éventualité. Ils ne doivent pas entretenir d'inquiétudes. L'idée est en marche..."
Ce moment est venu. Pour quelques jours seulement, le colonel a rejoint son P.C. de Sidi Ferruch.
Il est là, toujours le même dans son uniforme brûlé par le soleil de Timimoun, délavé par les neiges du djebel, le cheveu court, le visage hâlé, souriant, "en forme".
A ses côtés, un peu plus que son adjoint: son compagnon, le commandant Lenoir, qui ne peut demeurer où Bigeard n'est pas.
Le colonel est détendu: "J'ai quitté le régiment comme ça", sans cérémonie, j'en ai l'habitude.
Il en avait déjà été ainsi en Indochine.
Il faut savoir tourner la page, même si elle raconte l'histoire d'une épopée.
Ses projets ? Prendre un long congé en métropole avant d'être affecté à une autre fonction qu'il définit avec humour: "Je vais être le quatrième adjoint de la subdivision de l'état-major
Bigeard quittait "ses paras"