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 Le président Macron parle d’établir une « vraie armée européenne »

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Le président Macron parle d’établir une « vraie armée européenne » Empty
MessageSujet: Le président Macron parle d’établir une « vraie armée européenne »   Le président Macron parle d’établir une « vraie armée européenne » Icon_minitimeMar Nov 06 2018, 16:44

Le président Macron parle d’établir une « vraie armée européenne » Macron-20170703

Dans les années 1950, il fut question de créer une « armée européenne » dans le cadre d’une « Communauté européenne de défense » [CED], dotée d’institutions supranationales, supervisées par l’Otan (et donc, par extension, les États-Unis puisque le commandement militaire revient systématiquement à un officier général américain).

Ce projet suscita de vives oppositions et le traité instituant cette CED ne fut pas ratifié. « J’entends bien, enfin, qu’on évoque le projet d’une armée dite ‘européenne’, qui, par mélanges alchimiques, combinaisons algébriques et formules cabalistiques, résoudrait le problème de la sécurité de notre continent comme celui de son unité. Mais comment peut-on sérieusement concevoir l’armée de l’Europe quand cette Europe n’existe pas? Comment admettre que, pour défendre la France, il convienne, tout d’abord, de supprimer l’armée française? », avait objecté le général de Gaulle.

Depuis, cette idée de créer une armée européenne revient régulièrement dans le débat public. C’est ce que l’on appelle un « serpent de mer ». Or, en l’état actuel des choses, elle n’est qu’une illusion, tant les règles d’engagements et les modalités pour décider ou non d’intervenir militairement sont différentes d’un pays à l’autre. Et l’on ne parle pas non plus des différences culturelles, historiques, doctrinales et capacitaires…

Comme le firent récemment avant lui Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, et certains responsables politiques allemands (« notre avenir, en tant qu’Européens, passera un jour par une armée européenne », a déclaré Ursula von der Leyen, la ministre de la Défense d’outre-Rhin), le président Macron a remis ce sujet sur la table lors d’un entretien donné ce 6 novembre à Europe1.

« On ne protègera pas les Européens si on ne décide pas d’avoir une vraie armée européenne. Face à la Russie qui est à nos frontières et qui a montré qu’elle pouvait être menaçante […] on doit avoir une Europe qui se défend davantage seule, sans dépendre seulement des États-Unis et de manière plus souveraine », a en effet affirmé M. Macron, avant d’évoquer, sans les nommer, des « puissances autoritaires qui réémergent et se réarment aux confins de l’Europe. »

Il s’agit, a continué le président français, de « nous protéger à l’égard de la Chine, de la Russie et même des États-Unis d’Amérique », au sujet desquels il a critiqué leur décision de se retirer du Traité sur les Forces nucléaires intemédiaires [FNI], qu’ils signèrent en 1987 avec l’Union soviétique. Cette mesure est motivée par le fait que Moscou ne respecterait pas ses obligations fixées par ce texte et aussi parce que ce dernier ne concerne pas Pékin. En tout cas, pour M. Macron, « l’Europe et sa sécurité » en sont ses « victimes principales ».

Des précisions au sujet de cette « armée européenne » que le président appelle de ses voeux auraient été bienvenues… Ces derniers mois, M. Macron a proposé une « Initiative européenne d’intervention » (hors Union européenne) qui vise à « favoriser l’émergence d’une culture stratégique européenne commune et à créer les conditions préalables pour de futurs engagements coordonnés et préparés conjointement sur tout le spectre de crise » ainsi que doter l’article 42-7 du traité de l’UE d’une véritable clause de défense collective.

Seulement, le 16 octobre, Florence Parly, la ministre des Armées, a expliqué les intentions présidentielles au sujet de ce texte. « Attention, je ne souhaite aucune méprise. L’article 42-7 lui-même affirme que le socle de notre défense collective est l’Otan. Mais je le dis aussi, une Otan forte, c’est une Europe forte », a-t-elle dit.

Or, s’agissant de l’Otan, l’exercice Trident Juncture 18, qui se déroule actuellement en Norvège, démontre, s’il en était besoin, le poids des forces américaines en Europe… La mobilisation du seul porte-avions USS Harry S. Truman représente 12-14% environ des effectifs et 68 des 150 aéronefs engagés dans ces manoeuvres… Et à cela, il faut ajouter les choix capacitaires faits par certains pays européens, comme, par exemple, celui de la Belgique en faveur de l’avion américain F-35A, aux dépens d’une solution européenne.

Quant à l’Initiative européenne d’intervention, qui concerne actuellement 9 pays (dont le Royaume-Uni), le chemin risque d’être long. Fin septembre, lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Jean-Pierre Bosser, a soulevé des questions qui, pour le moment, sont sans réponses.

« Pendant toute la durée du forum des chefs d’état-major européens, il n’y a que moi qui ai prononcé le mot d’IEI et j’ai eu l’impression d’avoir en face de moi de vraies incompréhensions. Cela se comprend d’une certaine manière car il s’agit d’un concept récent. Les pays qui, depuis 60 ans, sont membres de l’Otan se sont organisés, équipés, architecturés, interopérabilisés au travers de cette organisation. Tout cela me fait dire qu’il sera difficile de tracer un chemin », a-t-il déclaré.

Quant à l’édification du culture stratégique européenne, ce ne sera pas simple non plus.

« En matière de dissuasion, comment construire une culture stratégique commune avec nos alliés européens qui ne disposent pas de l’arme nucléaire sans aborder la question du rôle des forces conventionnelles dans cette fonction stratégique? Il faut sans doute y réfléchir pour que notre discours national sur la dissuasion soit entendu et compris par nos alliés », a expliqué le général Bosser.

Et ce dernier de demander : « En matière de sécurité transatlantique, comment articuler notre investissement dans les structures de l’Otan avec notre volonté de renforcer la capacité de l’Europe à exercer collectivement ses responsabilités en matière de sécurité? Comment concilier le bon accomplissement des missions de protection du nord de l’Europe, liées aux alertes de la Force de réaction de l’OTAN et de la force opérationnelle interarmées à très haut niveau de préparation [VJTF] – et la préparation de l’initiative européenne d’intervention (IEI)? […] Et concernant nos équipements de défense : comment rapprocher nos ambitions nationales, en termes de coopération technologique et industrielle, avec celles de nos partenaires? »

Photo : Ministère des Armées
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