En décembre dernier, 25 pays membres de l’Union européenne (UE) ont convenu d’établir une « coopération structurée permanente » (CSP ou PESCO) en matière de politique de sécurité et de défense, conformément à une disposition du Traité de Lisbonne. En clair, il s’agit de permettre aux participants de « développer conjointement des capacités de défense, d’investir dans des projets communs et de renforcer l’état de préparation opérationnelle et la contribution de leurs forces armées. »
Dans le même temps, la Commission européenne a lancé un « Fonds européen de défense » comprenant un volet « recherche » doté de 90 millions d’euros par an jusqu’en 2019 (puis de 500 millions à partir de 2020) ainsi qu’un volet « développement », qui prévoit un cofinancement à hauteur de 500 millions/an jusqu’en 2020 (puis plus d’un milliard/an par la suite) afin d’encourager les coopérations entre les États membres pour la mise au point en commun d’équipements militaires.
Évidemment, ces sommes, relativement importantes, intéressent les industriels de l’armement d’outre-Atlantique. Cependant, comme l’a indiqué, en décembre, la commissaire européenne Eilzabeth Bienkowska, en charge du marché intérieur et de l’industrie, « c’est de l’argent européen pour les compagnies européennes. »
Pour l’Otan, ces deux initiatives européennes donnent lieu à quelques préoccupations, en particulier américaines. « Oui, il y a des divergences de points de vue », a admis Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Alliance atlantique, ce 13 février, soit à la veille d’une réunion des ministres de la Défense des pays membres, à laquelle assistera James Mattis, le chef du Pentagone.
« Nous soutenons l’initiative européenne, à condition qu’elle soit complémentaire et n’enlève pas des activités et des besoins de l’Otan », a résumé Katie Wheelbarger, chargée de la sécurité internationale au Pentagone. « Nous ne voulons pas que l’UE enlève des moyens à l’Otan », a-t-elle insisté.
Sur ce point, M. Stoltenberg a fait valoir que « plus de dépenses et plus de capacités peuvent renforcer l’Otan. » Mais, a-t-il prévenu, il « doit s’agir d’un complément, pas de remplacer l’Otan. » Et d’insister : « Cela n’aurait aucun sens pour l’UE et l’Otan d’entrer en concurrence. »
Pour rappel, M. Stoltenberg est un ancien Premier ministre de la Norvège, pays qui ne fait pas partie de l’Union européenne.
« L’UE ne doit pas se substituer à ce que fait l’Otan », a encore poursuivi M. Stoltenberg. « Il n’est pas question d’avoir une liste de besoins en capacité pour l’Otan et une autre pour l’UE. Il n’est pas question de dédoubler », a-t-il averti.
Par ailleurs, s’agissant du Fonds européen de Défense, le secrétaire général de l’Otan a estimé qu’il ne devrait pas être se traduire par une fermeture des marchés européens aux pays non membres de l’UE (à commencer par les États-Unis). « Il faut éviter de créer de nouvelles barrières au sein de l’Otan. Nous souhaitons voir une industrie de la défense européenne plus compétitive. C’est dans l’intérêt de tous les alliés de l’Otan », a-t-il affirmé.
« J’espère que l’UE, grâce a la Coopération structurée permanente et au Fonds européen de Défense, va avoir la possibilité de s’attaquer au problème posé par la fragmentation de l’industrie de défense européenne », a cependant estimé M. Stoltenberg, pour qui la « force de l’Otan, quelles que soient les divergences, est d’être toujours d’accord sur les tâches fondamentales que sont la protection et la défense des uns et des autres. »