La ville de Trèbes a été particulièrement touchée par les inondations.
ERIC CABANIS AFP
Après la rapide montée des eaux dans l’Aude, un géographe, spécialiste de la gestion des catastrophes, livre ses pistes d’amélioration pour l’avenir.
Entretenir au mieux les rivières, adapter les bâtiments construits en zone inondable, former les populations au risque : des pistes existent pour limiter les pertes en cas de crues brutales, comme celles survenues dans l’Aude, des phénomènes qui risquent de s’amplifier.
Quelles sont les mesures de prévention existantes ?
Au gré des catastrophes successives, l’État a cherché à apporter des réponses, entraînant une juxtaposition de "plans", plus ou moins bien respectés et mis en œuvre. Depuis le milieu des années 1990, il existe des "plans de prévention du risque inondation" (PPRI), déclinés à l’échelle communale. Ils dressent une cartographie des zones à risque et peuvent conduire à des interdictions de construire sur les terrains les plus exposés ou à des restrictions, comme l’impossibilité de doter sa maison d’un sous-sol. Ont suivi les programmes d’actions de prévention des inondations (PAPI) pour une gestion plus globale du risque et les plans communaux de sauvegarde (PCS).
En 2017 et 2018, le gouvernement a mené des campagnes d’information sur les comportements à adopter en cas d’épisodes méditerranéens, ces orages localisés et très violents, accompagnés de pluies intenses: ne pas prendre sa voiture, se réfugier en hauteur, prévoir un kit d’urgence… Dans l’Aude, après les crues de 1999 qui avaient fait 26 morts dans ce seul département, il y avait "eu une prise de conscience sur la nécessité de gérer les inondations" avec plus de communes dotées d’un PPRI et "d’une cohérence à l’échelle des bassins pour la gestion des cours d’eau", raconte Freddy Vinet, professeur à l’université de Montpellier, spécialiste de la gestion des catastrophes et des risques naturels.
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Quelles sont les pistes d’amélioration ?
Au niveau des cours d’eau, il est possible de procéder à des "coupes ciblées" d’arbres fragiles en bordure pour éviter que les crues les emportent et qu’ils s’accumulent sous les ponts, ou encore d’aménager des zones d’étalement des crues, explique le géographe. Concernant le bâti, il faudrait privilégier des habitations "où on peut se réfugier à l’étage et sortir par le toit", estime Freddy Vinet. "On peut également adapter les bâtiments pour limiter les dommages": remplacer le parquet en bois par du carrelage, installer un système électrique en hauteur avec des prises surélevées, éviter le plâtre ou la laine de verre…
La culture de la prévention n’est pas la même dans toutes les villes dotées d’un plan communal de sauvegarde : il existe "de fortes inégalités entre des communes très conscientes, où les élus sont très entraînés, et d’autres où le PCS est un document laissé dans un tiroir", juge le géographe.
En 2017, le gouvernement a lancé le dispositif "vigicrues flash" pour les mairies. Les 10 000 communes éligibles en France, peuvent recevoir – par sms notamment – des avertissements sur l’arrivée de crues soudaines, plus précis que les habituelles vigilances départementales. Un an plus tard, seules 869 communes étaient abonnées, selon un document du ministère de la Transition écologique.
Un plan de remise en état des sirènes pour alerter les habitants en cas d’urgence a été lancé. Pour Freddy Vinet, la meilleure solution est de "multiplier les moyens d’alerte, SMS, réseaux sociaux, porte-à-porte, sirènes" avec des consignes claires pour la population."Il faut installer la culture du risque", expliquait en 2017 Marc Mortureux, alors directeur général de la prévention des risques au ministère de la Transition écologique.
Les épisodes méditerranéens vont-ils s’amplifier ?
Une récente étude avertit qu’"à l’avenir, les pluies intenses devraient être plus fortes dans le sud de l’Europe, et donc de la France". "Suivant les zones, on obtient des augmentations qui peuvent être à 5% ou 20% d’intensité" en 2100, indique un des auteurs de l’étude, Samuel Somot, chercheur au Centre national de recherches météorologiques (CNRM).