L’avion de combat de 5e génération F-22 Raptor, développé par Lockheed-Martin et mis en service en 2005, est précieux. Pas seulement pour son prix (près de 400 millions de dollars l’unité) mais aussi et surtout pour ses capacités au combat. Capacités que l’US Air Force évite d’ailleurs de dévoiler lors d’exercices internationaux…
Avion de supériorité aérienne, et grâce à sa signature radar équivalente à celle d’une bille en acier, le F-22 Raptor est en mesure d’abattre simultanément plusieurs cibles au-delà de la portée visuelle (« Beyond Visual Range ») sans être détecté.
Au Levant, où il a été engagé dans le cadre de l’opération anti-jihadiste « Inherent Resolve », il a effectué des missions de frappes au sol tout en fournissant, grâce à ses capteurs, « une conscience situationnelle accrue pour les autres avions de la coalition. » Selon un récent communiqué de l’US Air Force, les appareils de ce type déployés lors de ces six derniers mois sur ce théâtre ont ainsi pris part à l’opération Hamilton [avril 2018, contre le programme chimique syrien, ndlr] et « dissuadé 587 avions ennemis ».
En outre, le F-22A Raptor est d’autant plus précieux que l’US Air Force n’en compte que 187 exemplaires et que les lignes d’assemblage ont été démantelées, la priorité étant allée au F-35 Lightning II. En clair, en perdre n’en serait qu’un seul serait une très mauvaise nouvelle pour l’aviation américaine puisqu’elle ne pourrait pas remplacer l’appareil détruit.
Or, l’ouragan Michael, qui a ravagé la Floride cette semaine, faisant au moins 17 tués, a porté un rude coup à l’US Air Force, la base aérienne de Tyndall ayant été quasiment détruite par des vents mesurés à près de 250 km/h. Selon un de ses responsables, 100% des logements abritant les familles des aviateurs sont désormais inhabitables. Mais c’est au niveau des avions que les dégâts sont les plus considérables, en terme de coûts.
La base de Tyndall abrite 55 F-22A Raptor. Avant l’arrivée de l’ouragan sur les côtes de Floride, 33 appareils ont été évacués en direction de la base de Wright-Patterson (Ohio). Les autres, alors en maintenance, n’ont pas pu être transférés ailleurs à temps. Or, des hangars où ils avaient été placés ont été soufflés par l’ouragan, dont la force a arraché de ses fondations et retourné un F-15 mis en exposition à l’entrée de la base.
« Nous estimons que les avions placés à l’intérieur des hangars pourraient être endommagés. Mais nous ne saurons pas dans quelle mesure tant que l’on ne pourra pas y pénétrer en toute sécurité et procéder à une évalution », a indiqué une porte-parole de l’US Air Force.
Des photographies publiées sur les réseaux sociaux suggèrent que plusieurs F-22 Raptor ont subi des dégâts. Une source militaire sollicitée par Defense News a estimé qu’au moins dix appareils ont été endommagés et qu’il faudrait des réparations « coûteuses » pour les remettre en état de vol. Qui plus est, les pièces de rechange sont rares : il faut parfois attendre 30 semaines pour remplacer un composant défectueux, selon un récent rapport du Congrès.
Pour le moment, l’US Air Force se garde d’avancer officiellement le moindre bilan, à un moment où, justement, le chef du Pentagone, James Mattis, a revu à la hausse les objectifs de disponibilité technique opérationnelle (DTO) des F-22A Raptor (qui a été de 50% en 2016).
La maintenance de ces avions est, en temps ordinaire, compliquée. Leur revêtement spécial qui absorne les ondes radars exigent des hangars climatisés, ce qui ne facilite pas leur déploiement à l’étranger. En outre, chaque heure de vol demande une dizaine d’heures d’entretien.
Si l’on ignore encore l’étendue des dégâts à Tyndall, on sait en revanche avec certitude qu’un F-22A Raptor ne devrait pas reprendre les airs de sitôt : le 10 octobre, il a effet dû faire un atterrissage forcé sur la base aérienne Elmendorf [Alaska], en raison d’un dysfonctionnement de son train d’atterrissage. Son aile gauche et la partie inférieure de son fuselage ont été endommagées.
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas la première fois qu’un ouragan ravage une base aérienne en Floride. En 1992, celle d’Homestead avait été balayée par des rafale de 240 km/h. Et ses F-16, ainsi que ses avions de transport C-130 Hercules avaient également été évacués vers Wright-Patterson. Au regard des dégâts, il avait été envisagé de la fermer. Finalement, elle a repris ses activités deux ans plus tard.