Cela fait maintenant des années que l’on parle de remplacer les trois derniers Bâtiments de commandement et de ravitaillement (BCR) de la classe Durance, mis en oeuvre par la Marine nationale. Cinq navires de ce type, conçus dans les années 1970, ont été mis en service. Le premier de la série a été cédé à l’Argentine, en 1999, et un second, le Meuse, a été désarmé en 2015.
Outre leur vétusté, ces pétroliers-ravitailleurs ne sont plus aux normes étant donné qu’ils n’ont pas de double coque. « Si nos pétroliers étaient civils, ils n’auraient pas le droit de naviguer », relevait ainsi l’amiral Christophe Prazuck, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], lors d’une audition parlementaire, en juillet 2017.
Les études amont relatives au programme FLOTLOG [Flotte Logistique] commencèrent en 2012, après avoir été confiées à Naval Group [ex-DCNS], qui avait auparavant planché sur le « BRAVE » [Batiment RAvitailleur d’Escadre]. Et puis, avec les coupes et les contraintes budgétaires, ce dossier s’enlisa, tout comme le BATSIMAR [Bâtiment de surveillance et d’intervention maritime], un autre projet, tout aussi urgent, visant à remplacer les patrouilleurs hauturiers de la Marine.
Le rapport annexé de la Loi de Programmation militaire [LPM] 2019-25, promulguée en juillet, indique que le programme FLOTLOG « sera lancé afin de doter la Marine nationale de pétroliers modernes, conformes aux derniers standards de la réglementation internationale et garantissant une autonomie d’emploi et de déploiement notamment en soutien des groupes d’action navale. » Et d’ajouter : « Les 2 premières unités (pour une cible rehaussée à 4) auront été livrées en 2025. »
À noter que s’ils garantissent les déploiements lointains d’une force navale (groupe amphibie ou aéronaval), les pétroliers-ravitailleurs concourent aussi à la mise en oeuvre de la dissuasion nucléaire.
Présenté en Conseil des ministres le 24 septembre, le projet de loi de finances pour 2019 prévoit de porter le budget des Armées à 35,8 milliards [hors pensions], avec une hausse de 1,7 milliard d’euros, conformément à la LPM 2019-25. Ce qui donnera la marge de manoeuvre nécessaire pour passer plusieurs commandes attendues de longue date.
Ainsi, le FLOTLOG fera partie des programmes concernés puisque trois nouveaux pétroliers-ravitailleurs seront commandés en 2019. Comme annoncé, ces navires seront inspirés du LSS [logistic support ship] A5335 Vulcano, conçu par l’italien Fincantieri pour les besoins de la Marina Militare.
« Une coopération avec l’Italie est en préparation dans le cadre du programme Logistic Support Ship (LSS) confié à l’Organisation conjointe de coopération en matière d’armement (OCCAr). Une étude d’adaptation de l’architecture du navire, déjà commandée pour la marine italienne, est conduite pour répondre aux spécificités du besoin opérationnel français », explique le ministère des Armées, dans son dossier de présentation du projet de loi de finances 2019.
D’un déplacement de 26.000 tonnes environ, pour une longueur de 179 mètres et une largeur de 24 mètres, l’A5335 Vulcano peut emporter jusqu’à 11.200 m3 de liquides (carburant, eau douce), 220 tonnes de munitions, 15 tonnes d’huile lubrifiante, 30 000 rations alimentaires, 20 tonnes de pièces de rechange et 8 conteneurs de 28 tonnes. Il est en outre en mesure d’accueillir deux hélicoptères ainsi qu’un hôpital de rôle 2.
« La construction des navires sera confiée aux Chantiers de l’Atlantique et à Naval Group avec la participation du constructeur du navire italien, Fincantieri », précise le ministère des Armées. Aucune date pour la livraison de ces pétroliers-ravitailleurs n’a été avancée, si ce n’est que deux devront avoir été remis à la Marine nationale d’ici 2025.
Par ailleurs, le projet de loi de finances prévoit également la commande de six patrouilleurs destinés à l’outre-Mer. Là aussi, il s’agit d’un dossier devenu d’autant plus urgent qu’il fut constamment reporté à des jours meilleurs depuis maintenant une dizaine d’années.
Outre-Mer, « nous n’avons plus que 4 patrouilleurs au lieu de 8 et je sais qu’en 2021 je n’en aurai plus que 2 » alors que ces navires « servent à exercer notre souveraineté dans les zones économiques exclusives », avait aussi déploré l’amiral Prazuck, en juillet 2017.
Cependant, cette commande annoncée n’est pas une surprise puisqu’elle a fait l’objet d’un appel d’offres lancé par la Direction générale de l’armement [DGA] le 12 août dernier. Par rapport aux ambitions initiales du programme BATSIMAR, la Marine a dû se résoudre à une baisse « du niveau de spécification » de ses futurs patrouilleurs outre-Mer pour qu’ils soient moins coûteux et surtout livrés plus rapidement.