Le 29 juillet, à l’occasion de la journée de la marine russe qui a réunit 39 navires cette année (contre une cinquantaine en 2017), le président Poutine a annoncé que la Russie allait mettre en service , cette année, « 26 nouveaux navires et vedettes », dont 4 seraient dotés de missiles de croisière Kalibr.
« Le bon rythme du réarmement et de la modernisation est une grande réussite des travailleurs de notre industrie de construction navale, le résultat de leur professionnalisme et de leur engagement à cet égard », a continué le chef du Kremlin.
« La préparation au combat et l’efficacité de la Marine sont un élément majeur pour assurer la défense du pays et la sécurité des ressortissants de notre État. Et bien sûr, nous continuerons à prendre des mesures pour renforcer et développer la flotte pour qu’elle soit. mieux équipée », a encore fait valoir M. Poutine.
Le chiffre de 26 nouveaux « navires et vedettes » a de quoi frapper les esprits. D’autant que la Chine, qui a fait du développement de ses forces navales une priorité, en fait pratiquement autant. Cependant, la réalité est sans doute un peu moins belle…
Tout d’abord, le nombre de navires que la Russie entend mettre en service cette année varie d’un interlocuteur à un autre. Ainsi, selon une dépêche de l’agence TASS diffusée au début de ce mois, le vice-amiral Alexander Fedotenkov, commandant adjoint de la marine russe, avait déclaré que 19 nouveaux bâtiments étaient attendus d’ici la fin de cette année et que 12 autres avaient déjà été livrés au cours du premier semestre.
« Les Russes comptent chaque navire commandé, y compris les patrouilleurs et les unités sortant de révision des chantiers navals », a expliqué, à CNN, Carl Schuster, ancien directeur des opérations du Joint Intelligence Center du Pentagone. « Cela donne l’impression d’une accumulation importante », a-t-il souligné.
Tel est le cas, par exemple, du sous-marin nucléaire lanceur de missiles de croisière K-266 « Orel », dont c’était la première participation à la parade navale organisée à l’occasion de la journée de la marine russe. Ce bâtiment de près de 24.000 tonnes (en plongée) n’est pas nouveau étant donné qu’il a été mis en service en 1995, avant d’être modernisé en 2014 et déclaré opérationnel trois ans plus tard.
Cela étant, il n’en reste pas moins que des bâtiments de conception récente sont régulièrement mis en service, à l’instar des sous-marins (nucléaires ou non), des corvettes du projet 21631 (classe Buyan), des corvettes du projet 22800 (classe Karakurt) ou encore du navire d’assaut amphibie Ivan Gren (projet 11711), capable d’emporter 13 chars de combat ou 36 véhicules blindés de combat d’infanterie.
Seulement, ces programmes d’armement ne vont pas aussi vite qu’espéré. Ainsi, la nouvelle frégate furtive « Amiral Gorshkov », qui est allée « titiller » la Royal Navy lors des fêtes de fin d’années, en 2017, à l’occasion de ses essais en mer, vient juste d’être déclarée pleinement opérationnelle. Le second navire de cette classe (projet 22350) aurait dû être livré cette année. Il le sera finalement l’an prochain en raison, selon l’agence TASS, de problèmes rencontrés au niveau du système de propulsion.
En outre, d’autres programmes subissent des reports, comme celui du destroyer de la classe « Leader » (projet 23560), capable de mettre en oeuvre 200 missiles. Désormais, l’on parle d’une « possible » mise en service dans les années 2020.
« Le gouvernement russe a mis du temps à composer avec les réalités économiques et reste incapable d’élaborer un plan d’acquisitions militaires réaliste pour remplacer le programme d’armement 2020. Certains projets […] sont prolongés ou reportés sine die mais ces économies ne peuvent pallier un sous-financement chronique. Les lobbies de l’industrie militaire poussent à maintenir la croissance des commandes d’armes de haut niveau […] mais le commandement en chef demeure incapable d’organiser la nécessaire révision des paramètres clés des acquisitions », juge le rapport « Ramses 2018 » publié par l’Institut français des relations internationales (IFRI).
Photo : frégate « Amiral Gorshkov » (c) ONI