Durant la Guerre Froide, et pour des raisons politiques, la Suède et la Finlande restèrent à l’écart de l’Alliance atlantique. Puis, après l’implosion de l’Union soviétique au tournant des années 1990, les deux pays scandinaves amorcèrent un rapprochement avec l’Otan, en participant notamment à son « Partenariat pour la Paix » [PPP] et en rejoignant, plus tard, le Conseil de partenariat euro-atlantique. Pour autant, il n’était toujours pas question d’une adhésion.
Mais, à partir 2014, avec l’annexion de la Crimée par la Russie et l’accroissement de l’activité militaire russe dans leur environnement proche, Stockholm et Helsinki commencèrent s’interroger sur l’opportunité de rejoindre l’Otan. Évidemment, une telle perspective n’enchantait guère Moscou, où le ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, promit à la Suède des « mesures militaires et techniques » si un tel mouvement devait se produire.
En attendant, la Suède et la Finlande renforcèrent leur coopération militaire tout en se rapprochant des États-Unis. Ainsi, en mai dernier, les deux pays ont signé une déclaration d’intention trilatérale (juridiquement non contraignante) en vue d’accroître les liens de leurs forces armées respectives avec leurs homologues américaines.
En outre, les deux pays scandinaves ont participé à des manoeuvres de l’Otan (comme lors de l’exercice Arctic Challenge 2017) et rejoint une force expéditionnaire commune (Joint Expeditionary Force, JEF), créée par le Royaume-Uni et à laquelle participent la Norvège, le Danemark, les Pays-Bas et les trois pays baltes [tous membres de l’Otan, ndlr].
Ce qui explique, sans doute, les propos tenus par le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, dans un entretien donné à l’agence TASS, le 24 juillet dernier.
« Le fait que la Finlande et la Suède soient entraînées dans les structures de l’Otan est très préoccupant. Un accord a été signé en mai pour leur participation à part entière aux exercices de l’Otan, qui a obtenu un accès sans entrave à leur espace aérien et à leurs eaux territoriales », a en effet affirmé M. Choïgou. « Ces mesures prises par les collègues occidentaux ont conduit à la destruction du système de sécurité mondial existant, engendrent la méfiance et nous obligent à prendre des mesures d’intervention », a-t-il ajouté.
Sauf que les propos du ministre russe sont inexacts. Et son homologue suédois, Peter Hultqvist, qui a pris le temps de réagir, les a démentis le 3 août.
« Ce que le ministre russe de la Défense décrit est faux. L’Otan n’a pas un accès illimité aux eaux territoriales et à l’espace aérien de la Suède et de la Finlande », a corrigé M. Hultqvist. « Une autorisation spéciale est requise pour que tout navire et aéronef d’un État étranger puisse entrer sur notre territoire », a-t-il ajouté.
Une semaine plus tôt, Helsinki avait également démenti les affirmations de Sergueï Choïgou, en dénonçant « un certain nombre d’inexactitudes et d’erreurs factuelles ». En outre, la Finlande et la Suède ont aussi assuré ne pas avoir « pleinement accès au système de commandement de l’Otan ».
Cela étant, la pression monte, tant en Finlande qu’en Suède, en faveur d’une adhésion à l’Alliance atlantique. Fin juin, des personnalités politiques, des diplomates et des chercheurs appartenant aux deux pays ont lancé un appel allant dans ce sens. Leur texte a été publié par la presse suédoise et finlandaise.
« La Russie a ouvertement violé le droit international et les principes de l’OSCE qu’elle a négociés et acceptés » et elle « augmente son équipement et menace d’utiliser des armes nucléaires. Les petits pays voisins devront donc rechercher le soutien de partenaires plus forts afin d’avoir des capacités de défense contre l’éventuelle agression de la Russie », ont-ils fait valoir. Aussi, ont-ils estimé, « nous devons discuter et approfondir une analyse commune de la manière dont nous poursuivrons les progrès de notre pays vers une adhésion totale à l’Otan. »