Le ministère britannique de la Défense [MoD] s’est fait épingler par le comité des comptes publics de la Chambre des communes qui, dans un rapport publié le 11 mai, a estimé qu’il « n’a tout simplement pas assez d’argent pour acquérir tout l’équipement dont il a besoin. »
Le MoD entend investir près de 180 milliards de livres sterling au cours des dix prochaines années dans différents programmes d’armement essentiels. La British Army attend de nouveaux véhicules blindés de combat d’infanterie dans le cadre du projet MIV [Mechanized infantry vehicle] et entend moderniser ses chars Challenger 2 [Life Extension Program]. Qui plus est, il faut (entre autres) également financer l’achat d’avions F-35, la mise en service de deux porte-avions, les frégates de type 26 et de type 31 ou encore continuer la construction des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] de la classe Dreadnought.
Or, le comité des comptes publics a mis en garde contre une déficit de financement « inquiétant », avec des écarts par rapport aux coûts de prévisionnels allant de 4,9 à 20,8 milliards de livres. En outre, cela laisserait aucune marge de manoeuvre pour financer la prise en compte d’autres menaces, comme le cyber, ou des innovations stratégiques, en particulier dans le domaine de l’intelligence artificielle.
Cela étant, le MoD se veut confiant, estimant que le rapport du comité mettait en avant un « scénario du pire des cas ». Et d’assurer qu’il atteindrait ses objectifs d’économies internes, étant donné qu’il a déjà réussi réaliser 7,9 milliards de livres d’économie sur les 16 milliards qui lui ont été demandés.
Quoi qu’il en soit, ce rapport n’a pas empêché le MoD d’attribuer deux nouveaux contrats d’un montant total de 2,4 milliards de livres (soit environ 2,7 milliards d’euros) à BAE Systems pour les programmes Astute et Dreadnought, à l’occasion d’une visite de Gavin Williamson, le ministre britannique de la Défense, au chantier naval de Barrow-in-Furness, ce 14 mai.
Dans le détail, un premier contrat de 1,5 milliard de livres vise à garantir la livraison du 7e sous-marin nucléaire d’attaque [SNA] du programme Astute. Actuellement, la Royal Navy met en oeuvre trois navires de cette classe (HMS Astute, HMS Ambush et HMS Artful). Un quatrième, le HMS Audacious, doit être entrer en service cette année. Et les cinquième et sixième sont en cours de construction.
À l’occasion de la notification de ce contrat, M. Williamson a indiqué que le 7e SNA de la classe Astute s’appellera « HMS Azincourt », ce qui ne fait pas très « Entente cordiale » puisque la fine fleur de la chevalerie française fut décimée lors de cette bataille de la guerre de Cent ans.
Le second contrat, d’un montant de 900 millions de livres, vise à lancer une nouvelle phase du programme Dreadnought, qui doit permettre de remplacer les 4 SNLE de la classe Vanguard. Ce projet est d’ailleurs celui qui suscite le plus d’inquiétudes au comité des comptes publics de la Chambre des communes.
Le coût de ce programme a été évalué, à son lancement, à 31 milliards de livres. Il doit impliquer 850 entreprises et assurer l’emploi de plus de 6.000 ingénieurs et techniciens. Le chantier du HMS Dreadnought, qui sera le premier des 4 SNLE de 17.200 tonnes attendus par la Royal Navy, a commencé en 2016.
« Cet investissement de plusieurs milliards de livres dans nos sous-marins nucléaires montre notre engagement sans faille pour assurer la sécurité du Royaume-Uni face à des menaces qui s’intensifient », fait valoir M. Williamson, lors de sa visite à Barrow-in-Furness, où il a inauguré le « Central Yard Facility », un centre de production « à la fine pointe de la technologie » destiné au programme Dreadnouoght.
« Obtenir ces derniers fonds pour nos programmes de sous-marins est une excellente nouvelle pour BAE Systems », s’est réjoui Cliff Robson, le directeur général de BAE Systems Submarines, en soulignant les retombées pour l’économie locale et l’emploi. « Nous continuons à faire des progrès sur ces programmes hautement complexes et techniques et les annonces d’aujourd’hui nous permettront d’aller de l’avant avec plus de certitude et de stabilité », a-t-il ajouté.