En 2007, la Russie et l’Inde s’engagèrent à développer conjointement un avion de combat de 5e génération sur la base du projet T-50 PAK FA [Perspektivny Aviatsionny Kompleks Frontovoy Aviatsii, ou Futur Système Aéronautique de l’Aviation du Front] alors confié à Sukhoï.
Dans le cadre de ce programme, appelé FGFA [Fifth Generation Fighter Aircraft], l’Inde devait initialement acquérir 244 exemplaires. Puis, la hausse significative des coûts de développement obligea New Delhi à revoir ses besoins à seulement 144 appareils.
Par rapport au T-50 PAK FA (dont le Su-57 russe est un développement), le FGFA comporte une quarantaine de modifications, exigées pour répondre aux besoins de l’Indian Air Force. Biplace, cet appareil doit ainsi disposer d’une motorisation plus puissante par rapport aux performances des réacteurs AL-41F1 prévus, d’une électronique embarquée devant permettre le combat en réseau ainsi que d’ailes et de gouvernes censées améliorer sa furtivité.
Seulement, ces modifications ont alourdi la note, la Russie ayant réclamé, en juillet dernier, 7 milliards de dollars à New Delhi. « L’Inde n’est pas en mesure de payer, ce projet d’avion semble perdu », avait alors commenté, à l’époque, une source du ministère indien de la Défense.
Par ailleurs, le gouvernement indien fit part, à plusieurs reprises, de son mécontentement au sujet de la coopération avec la Russie, cette dernière ayant refusé, par exemple, de partager les données techniques relatives aux ordinateurs de bord et aux logiciels de mission du PAK FA. En outre, l’IAF n’avait pas obtenu satisfaction pour doter le FGFA de moteurs modulaires, plus simples à entretenir, et donc moins coûteux.
Cependant, en août 2017, une commission présidée par l’Air Marshal Simhakutty Varthaman, défendit cette coopération avec la Russie, estimant que l’Inde « tirerait un avantage significatif » grâce aux « transferts de technologies de pointe », notamment au regard du programme d’avion furtif « Medium Combat Aircraft », confié au constructeur indien HAL.
Une position contredite par l’Indian Air Force, pour qui le FGFA ne « répond pas aux caractéristiques de furtivité […] souhaitées par rapport à un chasseur comme le F-35 », de sorte que « des changements structurels majeurs, ne pouvant pas être obtenus à partir des prototypes russes existants, sont nécessaires. »
Aussi, le sort du FGFA allait se jouer au niveau politique. Le 19 avril, le quotidien indien Business Standard a révélé que ce programme avait été « officiellement enterré » en février et que la décision avait été notifiée à la partie russe par Ajit Doval, le conseiller à la sécurité nationale, et Sanjay Mitra, le sécrétaire indien à la Défense. Cette information a été confirmée le lendemain par IHS Janes.
Plus précisément, les responsables indiens ont indiqué à leurs interlocuteurs russes que l’India Air Force pourrait « réexaminer » le programme FGFA à une « date ultérieure » ou acquérir le Su-57 une fois qu’il aura été mis en service au sein des forces aérospatiales russes. En attendant, New Delhi aura dépensé en pure perte 295 millions de dollars, cette somme correpondant au financmeent de la « phase de conception préliminaire », menée entre 2010 et 2013.
Cela étant, l’Inde a besoin d’améliorer significativement ses capacités en matière d’aviation de combat dans la mesure où la Chine conduit deux programmes d’avions de 5e génération (le J-20 et le J-31) ainsi qu’un troisième en coopération avec le Pakistan (Projet « Azm »). À l’heure où le projet HAL Tejas se poursuit et où l’appel d’offres MMRCA (Medium Multi-Role Combat Aircraft) vient de renaître de ses cendres, la décison d’abandonner le FGFA pourrait ouvrir la voie au F-35 de Lockheed-Martin, d’autant plus que la version navale (F-35C) pour concourir au programme Multi Role Carrier Borne Fighters [MRCBF] de l’Indian Navy.