Diesel, le double jeu de la France Mercredi, le représentant de la France à Bruxelles vote pour l’augmentation des niveaux de pollution ; jeudi, la ministre crie haro sur l’Europe…
En attendant, le diesel pollue toujours. "Royal , le 1er octobre, sur un banc de contrôle antipollution au centre d’homologation des véhicules de Linas-Montlhéry""Décidément, les Français ne sont pas fiables"! À Bruxelles, Paris a mauvaise réputation. Et cette semaine, les déclarations de Royal
n'ont fait que conforter les préjugés antifrançais.
La ministre de l'Écologie
a vivement critiqué la décision de l'Union européenne de relever les seuils d'émission de gaz polluants des véhicules diesel en compensation de tests plus contraignants.
Pourtant, la veille, l'expert français avait voté en faveur de ce compromis.
Or il tenait sa feuille de route du ministère de l'Écologie!
"Quand on lit les comptes rendus des discussions, on constate même qu'il a été particulièrement coopératif…", relève avec ironie un fonctionnaire européen, agacé par le courroux français.
"Il avait pour mandat de soutenir la position européenne, pas de délivrer des autorisations de polluer, corrige-t-on au cabinet de Royal . La dynamique de groupe a pu jouer…
" L'expert des Pays-Bas, lui, est resté droit dans ses bottes et a voté contre cet étrange accord, un autre s'est abstenu… La France peut difficilement soutenir qu'un sombre comité technique a contourné les États membres.
Le dossier avait été abordé au cours de trois conseils européens depuis le mois de septembre : un conseil compétitivité en présence de Macron
, un autre consacré aux questions de transport et enfin un troisième lundi dernier, où siégeait Royal
.
"Une escroquerie en bande organisée"Que s'est-il décidé au juste lors du comité technique de mercredi? Jusqu'à présent, les contrôles de pollution étaient effectués en laboratoire, ce qui permettait aux industriels de "préparer" les véhicules afin de réduire artificiellement les émissions de gaz.
Désormais, ils auront lieu sur route.
En contrepartie, les industriels ont obtenu un nouveau délai de trois ans avant de respecter le plafond de 80 mg d'oxyde d'azote émis par kilomètre (initialement fixé à 2017).
Du coup, jusqu'à 2019, ils pourront encore dépasser 2,1 fois ce seuil sans être inquiétés.
Et à partir de 2019, ils bénéficieront encore d'une tolérance de 50% au-delà des 80 mg.Ces nouvelles normes ont été fixées dans le cadre d'une procédure de 'comitologie', explique doctement un porte-parole de la Commission, c'est une formule qui permet de revoir les critères plus régulièrement que par la voie parlementaire.
Les plafonds seront modifiés en fonction des progrès techniques des constructeurs.
"C'est comme si, pour lutter contre l'insécurité routière, on remplaçait les panneaux de limitation de vitesse de 90 à 50 km/h, mais que les automobilistes avaient toujours le droit de rouler à 100 km/h… sans pénalités", s'insurge le député européen écologiste Yannick Jadot.
De quoi s'indigner en effet!«Royal joue les indignées, car elle a perçu la colère et l'incompréhension de l'opinion publique.»Quelques semaines après la révélation de l'affaire Volkswagen, l'accord européen fait figure de nouvelle allégeance aux lobbies de l'automobile.
Entre 2009 et 2015, le constructeur allemand a en effet équipé 11 millions de véhicules de ses différentes marques d'un logiciel réduisant les niveaux de pollution.
"Nous sommes face à une escroquerie en bande organisée, fustige Yannick Jadot, dans laquelle les États sont les complices des constructeurs automobiles truqueurs.
Les industriels vertueux sont pénalisés et les falsificateurs bénéficient de carottes fiscales alors que les normes ne sont jamais respectées.
Royal
joue les indignées car elle a perçu la colère et l'incompréhension de l'opinion publique."
La France a demandé que le sujet soit remis au menu du prochain conseil européen, le 9 novembre. Plusieurs parlementaires européens ont d'ores et déjà déclaré qu'ils feraient jouer leur droit d'objection.
Ils ont en effet trois mois pour contester la décision de "comitologie".
Sans le scandale Volkswagen, la réunion du 28 octobre serait passée totalement inaperçue. Elle avait été programmée au début du mois de septembre sans lien avec l'affaire du logiciel truqueur…