Les Bombardements sur l'Allemagne
(1942-1945) Seule depuis la capitulation française, le Royaume-Uni reçoit un allié précieux le 7 décembre 1941 avec l'entrée en guerre des États-Unis à ses côtés. Outre le réconfort moral que cela lui apporte, c'est surtout le formidable potentiel industriel des États-Unis qui rentre dans la guerre.
Dès lors plus rien n'empêche les Alliés de se lancer à l'assaut de l'Europe, dans un premier temps avec le recours aux bombardements stratégiques, et dans un second temps par l'appui aérien apporté aux opérations de débarquement.
Après une période difficile à courber le dos, les Alliés décident de passer à l'offensive et de porter la guerre sur le sol allemand, peu touché jusqu'alors.
Or, seule l'aviation est capable de porter la guerre en territoire ennemi grâce aux bombardiers lourds de construction récente (Halifax, Lancaster pour les Britanniques, B-17 et B-24 pour les Américains).
(Lancaster a Gauche & B17 a Droite )Les Alliés reprennent donc à leur tour la doctrine de Douhet : ils souhaitent réduire le potentiel économico-militaire de l'Allemagne, en bombardant tous les sites stratégiques allemands ou travaillant au service de l'Allemagne.
Ainsi, les usines aéronautiques, sidérurgiques, les raffineries, les centres de recherche, les gares de triage, les aérodromes et autre sont pris pour cible.
Cette politique de bombardement stratégique a un triple avantage : elle satisfait l'opinion publique britannique avide de revanche après les bombardements qu'elle a subi, elle oblige les allemands à rapatrier des forces aériennes sur le front occidental, soulageant ainsi les forces soviétiques, et enfin, elle réduit les capacités militaires allemandes.
Pour mettre en œuvre ces bombardements, le Royaume-Uni met en place le Bomber Command à la fin de l'année 1941. Il est dirigé par le Maréchal Sir Arthur Harris qui va très vite gagner le surnom de « Bomber Harris ».
Fin décembre 1941, le Bomber Command reçoit ses premiers Lancaster, qu'elle met en œuvre immédiatement.
Pourtant, les premiers raids sont des échecs. En effet, les bombardiers volent de nuit, sans couverture de chasse (faute de chasseur à long rayon d'action), les objectifs sont mal définis et le radioguidage inexistant.
Il est donc fréquent que les bombardiers se perdent, et lorsqu'ils trouvent la cible, les bombes tombent souvent très loin de l'objectif.
Pourtant, très vite, les progrès techniques améliorent les attaques. Ainsi, à partir de 1942, les pilotes sont guidés sur l'objectif grâce à une sorte de radar, et des paillettes d'aluminium (les « windows ») sont larguées sur la cible pour brouiller les défenses allemandes.
windowsLe 30 mai 1942, le Bomber Command utilise une nouvelle méthode sur Cologne. Il s'agit d'attaquer un objectif important avec plus de 1.000 bombardiers.
Pour obtenir une précision suffisante, l'objectif est marqué par des bombes lumineuses (les « Pathfinder ») larguées par des Mosquito.
Le Mosquito est un chasseur-bombardier très rapide et très maniable, ce qui lui permet de voler à basse altitude et d'échapper à la chasse allemande.
Lorsque la cible est marquée, les bombardiers peuvent attaquer avec plus de précision.
Dès que les bombes sont larguées, une photographie est prise pour évaluer les dégâts causés par le raid, et accroître la précision pour le raid suivant.
Désormais, telle sera la méthode d'attaque du Bomber Command pour toute la durée de la guerre.
Les Américains ont une méthode de bombardement légèrement différente : ils bombardent à très haute altitude (entre 20.000 et 26.000 pieds en général), de jour, en s'appuyant sur des systèmes évolués, notamment le viseur Norden. Dans un premier temps, les Américains pensent que leurs bombardiers sont suffisamment armés pour se défendre seuls de la chasse allemande.
Mais après quelques raids désastreux, l'USAAF prend conscience de la nécessité de donner une escorte de chasse à ses formations de bombardiers.
Dès 1943, les chasseurs à long rayon d'action (P-38, P-47 et P-51) ont donc pour fonction principale d'escorter les B-17 et B-24 de la 8th USAAF sur le théâtre européen (ETO), et de la 15th USAAF lorsque celle-ci est activée sur le MTO (théâtre d'opération méditerranéen).
Quoi qu'il en soit, les Alliés adoptent le bombardement stratégique comme arme ultime, et ils vont ensevelir l'Allemagne sous un véritable « tapis de bombes » selon l'expression consacrée.
Les usines de la Ruhr sont leur objectif prioritaire, leur production militaire étant la plus importante d'Allemagne.
De 1942 à 1945, cette région est la plus visée de l'Europe allemande.
Mais ces raids sont meurtriers pour l'aviation alliée, les pertes avoisinant les 20 %.
En effet, l'Allemagne se défend avec force : les usines de la Ruhr, tout comme les sites stratégiques du Reich sont protégés par une puissante Flaks, à laquelle se joint la Luftwaffe pour intercepter les bombardiers avant l'attaque, et les traquer sur le chemin du retour.
FlaksMalgré cette défense acharnée, tous les sites stratégiques allemands (qu'ils soient en Allemagne ou en Europe occupée) sont bombardés, mais aussi toutes les villes allemandes. C'est la conséquence d'une décision des alliés qui souhaitent terroriser la population allemande, en lui montrant qu'elle n'est à l'abri nulle part, même dans les petites villes sans importance stratégique.
Parmi les raids les plus marquants de cette guerre, citons l'Opération Chastise, qui consiste en l'attaque des barrages de la Ruhr par le 617ème Squadron britannique (surnommé après coup les « Dam Busters ») dans la nuit du 16 au 17 mai 1943.
Le 6 mars 1944, c'est Berlin, la capitale du Reich qui est sous les bombes. Citons aussi le bombardement du centre de recherche de Peenemünde, qui endommage gravement les installations, faisant perdre un temps important dans la mise au point des fusées V1 et V2, mais qui met surtout un coup d'arrêt aux recherches sur l'eau lourde et une éventuelle bombe atomique.
D'autres objectifs sont passés à la postérité, tant les combats y ont été acharnés : les usines de roulement à bille de Schweinfurt, les raffineries de Ploesti, en Roumanie, Regensburg, Essen, Düsseldorf... Enfin, le 13 février 1945, un bombardement d'une violence inouïe touche la ville de Dresde.
C'est le pendant allié du bombardement de Coventry, en pire : 35.000 morts et une ville rayée de la carte.
Tout le monde garde en tête la photographie montrant une statue intacte entourée de champs de ruines que l'on trouve dans tous les manuels scolaires.
DresdeCe bombardement, un des plus terribles de l'histoire à ce jour, ne visait aucun objectif militaire.
Alors quel bilan tirer des bombardements stratégiques de la seconde guerre mondial ?