Les Taxis de la Marnesource image : http://jmtr.voila.net/guer14/taxi.html
Taxis de la Marnesource : Wikipedia
Les taxis de la Marne ont été au centre d’un épisode historique qui eut lieu lors de la Première bataille de la Marne, à la fin de l’été 1914.
Aux premiers jours de septembre 1914, les troupes allemandes parviennent au nord-est de Paris, notamment dans le département de Seine-et-Marne. Les Allemands ont bivouaqué le 3 au Plessis-Belleville et des détachements d’Uhlans allemands sont signalés à quelques dizaines de kilomètres de Paris seulement.
L’état-major français doit trouver une solution rapide pour envoyer des troupes fraîches, afin de réaliser un mouvement tournant pour contenir et détruire les avant-gardes des troupes allemandes. L’idée de l’opération revient conjointement au général Galliéni, gouverneur militaire de Paris, au général Clergerie et à André Walewski, fondateur de la Compagnie française des automobiles de place (aussi appelée « Autoplaces » ou « G7 »).
Déroulement
Les 6 et 7 septembre 1914, sur ordre du général Galliéni, environ 600 taxis parisiens sont réquisitionnés pour servir de moyen de transport aux fantassins de la 7e division d’infanterie. Les véhicules sont en majorité des Renault AG1 Landaulet roulant à une vitesse moyenne de 25 km/h.
Rassemblés aux Invalides, ces 600 véhicules partent au cours de la nuit en deux groupes, direction Tremblay-lès-Gonesse, (aujourd’hui Tremblay-en-France) puis Le Mesnil-Amelot. Dans la journée du 7, pour des questions de logistique, ce convoi redescend sur Sevran-Livry tandis qu’un second convoi de 700 véhicules quitte les Invalides pour rejoindre Gagny.
Les taxis sont rassemblés à Gagny et Livry-Gargan pour charger les troupes et organiser les convois. Les deux convois partent dans la nuit du 7 au 8 et sont à pied d’œuvre le 8 au matin aux portes de Nanteuil-le-Haudouin et de Silly-le-Long. Après avoir déposé les soldats, les chauffeurs de taxi rentrent à Paris et sont payés d’après les indications portées au compteur, comme pour n’importe quelle course.
Le dernier Taxi de la Marne, Kléber Berrier1, disparait en 1985.
La portée de l’évènement
Cette opération permit d’acheminer rapidement environ 5 000 hommes, mais aucunement de renverser le cours de la Première bataille de la Marne contrairement à une idée reçue. En effet, le nombre de soldats transportés paraît dérisoire par rapport aux effectifs mobilisés pour la bataille2.
Toutefois, cette manœuvre inédite dans son ampleur eut une réelle portée psychologique. Sur les soldats français ainsi que sur le commandement allemand mais surtout sur la population, l’épopée devenant rapidement un symbole d’unité et de solidarité nationale.
De tous ces taxis mythiques, certains furent achetés par des associations d’anciens combattants américains (dont le n°4449E2 partit en septembre 1935, acheté par la société 40 hommes 8 chevaux de l’Orégon, pour être installé dans son musée de la guerre), et deux « Renault G7 » ont été offerts en 1922 au musée de l’Armée (situé dans l’Hôtel des Invalides à Paris) et en 2011 au musée de la Grande Guerre (situé à Meaux). Ces véhicules sont aujourd’hui très rares : un accord industriel entre Renault et la Compagnie française des automobiles de place stipulait que les taxis déclassés ne pouvaient être vendus avec leur carrosserie, le châssis étant le plus souvent remonté avec une carrosserie de camionnette.
Quelques particuliers collectionneurs contribuent également au devoir de mémoire français en participant aux commémorations du 11 novembre, aux reconstitutions historiques (Bataille de Villeroy), ou encore aux inaugurations (musée de la Grande Guerre).
Ces deux jours d’opérations, la distance parcourue varie entre 120 et 200 kilomètres, la somme au compteur pouvait atteindre 130 francs de l’époque, les chauffeurs touchèrent réglementairement 27 % du montant. L’opération coûta 70 000 francs au Trésor public3.
Notes et références
↑ Vidéo Ina – Les Taxis de la Marne [archive]
↑ cependant l’impact psychologique sur les Allemands n’a pas du être négligeable, ce qui était surement l’effet recherché!!
↑ Les secrets de la grande guerre, Rémy Porte, la librairie Vuibert, 2012, page 79.
source : http://fra.1september.ru/article.php?ID=200801507
Le plan français se fixe d’abord pour objectif de récupérer l’Alsace et la Moselle, les provinces perdues en 1870, et néglige la frontière du Nord. Monstrueuse erreur ! Pénétrant en Belgique, les Allemands pensent encercler les Français, lancent une violente offensive et menacent Paris. Le 2 septembre 1914, ils sont déjà à Senlis (la capitale n’est plus qu’à 45 kilomètres !). Mais le général Joffre1 organise la retraite, et lance une contre-offensive : c’est la bataille de la Marne. Gallieni, nommé gouverneur de Paris, imagine alors un moyen pour conduire au plus vite 10 000 soldats sur le front : le transport par taxi ! C’est ainsi que les taxis parisiens transportent les troupes fraîches qui, avec les Britanniques, contribueront à la victoire de la Marne2.
Les Allemands reculent, mais leur objectif est de s’emparer des ports du Pas-de-Calais. C’est aussi l’objectif des Français. Une course à la mer s’engage alors, du 18 septembre au 15 novembre. Malgré des batailles meurtrières, aucune armée ne peut prendre l’avantage. Une double ligne de tranchées naît alors sur 700 km, de la mer du Nord à la Suisse. Le but est d’anéantir l’ennemi par d’incessants bombardements et d’épuiser ses forces offensives. Cette guerre durera plus de trois ans et demi !
La guerre de mouvement se transforme en guerre de position : les deux armées se font face et creusent des tranchées pour se protéger. Le mot même de « tranchée » renvoie à toute la souffrance des soldats de la Première Guerre mondiale. Souffrance dont certains ont voulu donner un témoignage : « On couche dans les trous ; la paille qui est dedans y est depuis un mois, c’est là qu’on prend la vermine. Le froid m’a gelé la pointe des pieds ». Ce récit d’un soldat en décembre 1914 illustre bien ce qui sera pour beaucoup la vie dans les tranchées : l’enfer permanent ! Plus de coup décisif, plus de charge héroïque, mais la boue, l’ennui, la peur, et le chaos.
Les tranchées – ce sont d’abord de simples trous, où les soldats se terrent, puis les galeries. On creuse deux lignes de tranchées : la première face à l’ennemi, la seconde servant de soutien et abritant les forces de réserve, en vue d’une future attaque. Le but de la tranchée est double : défendre les positions occupées et préparer la percée du front adverse par des charges rapides et nombreuses. Les tranchées sont reliées par des boyaux3, bordées de refuges précaires éclairés de lampes à pétrole. Le soldat y vit dans une insécurité constante : les sapeurs ennemis creusent parfois sous les tranchées des galeries où sont disposées des mines qui explosent ! La peur, le froid, la faim, des rats, des cadavres qui se décomposent – l’existence des poilus est terrible.
En toute saison, la vie du soldat est rythmée par le bruit du canon et de la mitraille, au point que le silence paraît suspect. L’attente est en effet la principale activité de ces soldats, menacés d’une attaque-surprise, ou appelés à sortir des tranchées pour attaquer l’adversaire. Pour des raisons de sécurité, la nouvelle n’est connue qu’au dernier moment. Les soldats vivent ainsi dans l’angoisse et l’attente du combat. L’univers du soldat des tranchées, c’est d’abord la terre, qui se transforme en boue dès les premières pluies. Le combattant finit par faire corps avec cette terre qui lui colle à la peau.
L’eau est rare. La vermine est l’hôte privilégié de ces corps sans soin, tandis que les rats grouillent dans cet univers. Manger abondamment est une obsession. En deuxième ligne, on peut obtenir une ration chaude grâce aux cuisines roulantes. Au feu, c’est impossible. Alors, les « hommes-soupe » vont au ravitaillement. Ils parcourent des kilomètres pour ramener des bouteillons (récipients) de soupe et de viande, des boules de pain, des bidons d’eau. De son sac, l’homme-soupe tire aussi le plus précieux des colis : le courrier, les journaux, les nouvelles du pays et de la famille. Ceux qui ne sont pas mariés ont toujours une « marraine de guerre4 » qui leur écrit régulièrement
La mort est le principal compagnon du soldat. Il la côtoie à tout moment. Un jour un obus tue son voisin, le lendemain une sortie laisse plusieurs de ses camarades morts dans le no man’s land, situé entre les lignes allemande et française. Mais dans cette zone, si la mort n’est pas immédiate, l’agonie peut durer des jours, sous le regard impuissant des soldats revenus à l’abri. L’utilisation massive de l’artillerie provoque des blessures atroces, un obus peut déchiqueter un homme sans qu’il en reste rien. Les soldats vivent un vrai enfer des tranchées.
1 Joseph Jacques Césaire Joffre (1852-1931), était un officier militaire français pendant la Première Guerre mondiale, responsable de la bataille de la Marne et de la stabilisation du front nord au début de la guerre. Il a été nommé maréchal de France en 1916.
2 Le 29 août, sur le front de l’est, les Russes sont vaincus à Tannenberg.
3 Fossé en zigzag reliant des tranchées.
4 Soutenir le moral des soldats : telle est la mission des marraines de guerre. Cette institution populaire née durant la Première Guerre mondiale a laissé un souvenir marquant.