Cela fait quelque années que j'ai à coeur de retracer l'histoire de mon Père et de ma famille en Indochine.
Ma famille en est originaire (par l'arrivée de mon arrière Grand-Père avec les régiments de la Légion durant les années 1880...qui par la suite s'y est installé et marié avec une métisse). Il y bâtira une vie souvent difficile, il sera capitaine à bord d'un bateau transportant le courrier et des personnes pour le compte des Messageries Fluviales de Cochinchine et d'autres petits boulots.
L'un de ces Fils, mon Grand-Père fera son service dans le 22ème Régiment d'Infanterie Coloniale posté à Saigon. Il se mariera avec ma Grand-Mère et sera tour à tour journaliste puis passera les concours pour devenir agent de la Sureté et gravira les marches de la hiérarchie, il sera en poste au Cambodge (Kompong-Cham) mais aussi au Vietnam (Saigon-Cholon voire dans d'autres localités).
Mon Père naît en 1933 à Phnom-Penh (Cambodge), c'est un enfant quelque peu dissipé mais joyeux...la vie de la famille est calme est calme et heureuse dans l'ensemble grâce au confort qu'offre le poste de mon Grand-Père (commissaire de sûreté dont le sérieux est récompensé par nombre de médailles). Ils vivent dans les milieux aisés de Phnom-Penh et fréquentent la cours du Roi Norodom Sihanouk.
La Seconde Guerre mondiale fait rage, la France est sous contrôle allemand et le pouvoir de Pétain collabore mais l'Indochine est loin et vit un décalage quant à la guerre...Mais l'Invasion japonaise met en branle la vie de ma famille...mon Grand-Père est fait prisonnier, ainsi que ma Grand-Mère et quelques de ses enfants...la vie est rude surtout pour cette famille métisse suspectée de traîtrise (les métisses étant mal...). Mon Grand-Père s'évadera et se ralliera aux résistants, il y perdra de sa santé et développera un diabète suite à la malnutrition et aux carences.
La Guerre prend fin mais une autre prend sa suite, la première guerre de décolonisation...ma famille est l'objet autant que l'actrice de ce conflit...mon Grand-Père poursuit les civiles suspectés d'être Vietminh, mon Père est jeune, mais souhaite s'engager...grâce à l'un de ses cousins il parvient à devancer l'appel...
Ma famille est sportive, cela aura une importance dans le futur, mon Père est nageur, c'est un athlète né...lors d'une des sorties des enfants, les plus petits se retrouvent sur des jonques MAIS les cordages sont coupés, notre famille est connue, les tout petits se retrouvent à la dérive et c'est grâce aux dons de nageurs de Mon Père et de ses frères et sœurs qu'ils pourront les récupérer sur le bateau...La maison familiale jouxte le commissariat et les enfants entendent les prisonniers crier lors des interrogatoires...la guerre conduit à des actes que les temps de paix condamnent...
C'est durant cette période que mon Père décide d'aller à la chasse au Tigre avec son cousin, le même qui lui a permis de devancer l'appel. Mon Arrière-Grand Mère leur dit de ne pas y aller, la vieille Vietnamienne à rêver la nuit précédente d'une chouette...la chouette est signe de malheur au Vietnam...mais ils sont jeunes et n'y prêtent pas garde. Ils partent et s'enfoncent dans les forêts d'Hévéas, ils sont pris sous le feu nourri des Vietminhs, mon Père n'est pas touché ce qui n'est pas la cas de son cousin...trop blessé pour être transporté, mon Père doit partir chercher des secours...le laissant caché...cela lui prendra une journée de marche ! Arrivé chez son Père, il est prit en charge et conduit l'ensemble des hommes du commissariat sur place où ils retrouvent le cousin entre le vie et la mort...il mourra quelques jours après de septicémie à Phnom-Penh. Mon Père choisira de s'engager dans l'Armée de l'air, au Bataillon 1/191 de Tan Son Nhut à saigon.
[/url]
Ce bataillon change de nom et devient la B.R.C.S (Brigade de Renseignements et de Contre Sabotage). Cette Brigade est formée pour ces supérieurs de Français de souches et pour ses subalternes de Vietnamiens ou de métisses qui parlent couramment le Vietnamien Cette brigade a pour mission de protéger les alentours des bases aériennes (30 km qui sera agrandit par la suite) et de rechercher aussi des informations de première main. Ces brigades fonctionneront très bien durant l'ensemble de la guerre et surtout celle de Tan Son Nhut qui aura des résultats brillants. (Cf. "les services secrets en Indochine" de jean-marc LePage)
Mais la Chute de Bien Dien Phu sonne la défaite de la France en Extrême orient...Les Etats-unis prendront la suite et vivront le même calvaire...ma famille se doit de partir, les massacres de métisses avaient déjà vu le jours...alors qu'attendre lors de la défaite...une première partie s'en va en 1954-1955, mon Père, mon Grand-Père ainsi que mon Oncle s'en iront en 1956 dans le sud de la France.