Belligérants |
États-Unis | Japon |
Commandants |
Frank J. Fletcher, Raymond A. Spruance | Chuichi Nagumo, Isoroku Yamamoto, Kondo |
Forces en présence |
3 porte-avions, 4 croiseurs, environ 50 navires de soutien 359 avions dont 127 basés sur Midway | 4 porte-avions, 2 cuirassés, 3 croiseurs, 248 avions (Nagumo), 1 porte-avions, 3 cuirassés, 8 avions (Yamamoto), 1 porte-avions, 2 cuirassés, 10 croiseurs, 24 avions et 32 hydravions (Kondo), 2 porte-avions, 4 cuirassés, 8 croiseurs, 82 avions (diversion sur les Aléoutiennes), 100 navires de soutien, 196 avions basés à terre (ils n'intervinrent pas dans la bataille) |
Pertes |
1 porte-avions, 1 destroyer, 307 marins | 4 porte-avions, 1 croiseur, 2 500 marins |
Avant la bataille
Midway en elle-même n'avait pas un rôle stratégique notable dans le plan japonais : ils se concentraient sur les îles méridionales Samoa, Fidji et l'Australie qui représentaient l'extension naturelle de leurs conquêtes dans le Sud Est du Pacifique. De plus, étant la base américaine la plus proche du territoire japonais, sa possession ne pouvait qu'être défendue âprement.
Comme à l'accoutumée, le plan de l'amiral Isoroku Yamamoto était ingénieux et déterminé. Fidèle à la doctrine stratégique de la marine impériale japonaise, il voulait obliger la flotte américaine à combattre afin de la détruire. Les Américains seraient obligés d'intervenir en cas de débarquement à Midway. Ce plan avait probablement été compliqué par la nécessité de réagir rapidement au raid de Doolittle sur Tokyo en avril. Ce bombardement n'avait guère produit de dégâts, mais il avait démontré de manière frappante que le sol japonais n'était pas à l'abri de la guerre. Il s'était révélé d'une importance psychologique considérable.
Les forces destinées à l'opération étaient constituées de 11 navires de ligne, 8 porte-avions, 21 croiseurs et près de 200 bâtiments divers. La 1
re escadre de 4 porte-avions dirigée par l'amiral Nagumo constituait la première force de frappe. Elle était suivie à distance par l'escadre de Yamamoto qui s'attaquerait à tout support apporté à l'atoll de Midway
US intelligence
L'espionnage de la marine américaine (
US Naval Intelligence) avec l'aide des Britanniques et des Hollandais avait essentiellement percé une partie des codes utilisés par la marine japonaise (JN-25, un code de cryptage) depuis quelques temps déjà. Malgré la modification de ce code juste avant l'attaque contre Pearl Harbor, les progrès de son décryptage étaient réels, au point d'envisager d'utiliser les informations ainsi obtenues pour arrêter les opérations japonaises.
Toutefois, un élément du code (l'emplacement AF) restait inconnu. Certains pensaient qu'il s'agissait de Midway, mais il y avait controverse et il pouvait s'agir des îles Aléoutiennes. Il n'y avait malheureusement aucun moyen de clore le débat avec les seuls éléments cryptographiques. Un jeune officier, Jasper Holmes, à la station Hypo, fit une suggestion brillante pour lever le doute. Il demanda au commandant de la base de Midway d'annoncer —en clair— à la radio qu'il y avait une urgence sanitaire —l'eau potable venait à manquer à cause d'un accident à l'usine d'épuration. Un message codé japonais ne tarda pas à noter que "A.F." avait un problème d'eau potable et que les forces d'attaque devaient en tenir compte. La conclusion logique immédiate était donc qu'A.F. et Midway ne faisaient qu'un et que l'opération militaire à venir s'y déploierait.
Toutefois, le décodage de JN-25 était très lent et ce n'est qu'à la dernière minute que l'amiral Chester Nimitz eut assez d'éléments pour mettre en place un piège contre les forces qui allaient attaquer Midway. Il rappela les porte-avions de Fletcher du sud-ouest du Pacifique et les chantiers navals de Pearl Harbor réparèrent en temps record le
Yorktown—gravement endommagé pendant la bataille de la mer de Corail lui permettant de rejoindre la nouvelle bataille navale.
En 72 heures seulement, le
Yorktown fut transformé d'une épave à peine flottante en un porte-avions opérationnel (même s'il restait significativement affaibli). Son pont d'envol était rebouché plus que réparé, sa structure interne était étayée et ses avions étaient remplacés par ceux de la base navale. Il faut admettre que pour disposer de son troisième et dernier porte-avions, l'amiral Nimitz ignora totalement toutes les règles et procédures. Par exemple, les réparations n'étaient pas encore finies quand le navire appareilla au son de «
California, Here I Come » (
Californie, me voici).
Pendant ce temps, à Truk, le
Shokaku attendait un groupe d'avions pour remplacer ses pertes et le
Zuikaku, légèrement endommagé, attendait ses réparations. L'équilibre des forces eût été très différent si les États-Unis n'avaient aligné que l'
Enterprise et le
Hornet, sous les ordres de l'amiral Raymond A. Spruance, face aux
Soryu,
Hiryu,
Akagi et
Kaga.
Plan et prémices
Le plan japonais en lui-même est très complexe : 36 heures avant l’attaque sur Midway, une puissante flotte de 2 porte-avions et 4 cuirassés devait mener une attaque sur les Aléoutiennes, envahir les îles de Kiska et d’Attu et mener un raid sur Dutch Harbor, dans le but de faire diversion. Ensuite, le raid sur Midway devait se dérouler en plusieurs étapes : premièrement, une flotte de 4 porte-avions aux ordres de Nagumo devait réduire toute résistance sur l’atoll en lui-même. Peu après, une autre flotte aux ordres du contre amiral Kondo et puissante de 2 cuirassés et 10 croiseurs (lourds pour la plupart) devait soutenir un débarquement de 5 000 hommes pour la possession de l’atoll. Entre-temps, l’US Navy qui « devait » nécessairement sortir pour défendre Midway serait attaquée par la puissante flotte combinée de Yamamoto, restée jusque là plusieurs centaines de km en arrière et forte de 3 cuirassés, dont le flambant neuf
Yamato. De plus, si les combats avaient lieu au sud de Midway, les Japonais comptaient sur le soutien de leur 11
e flotte aérienne comprenant 180 avions. Un plan au final fort complexe, souffrant de plusieurs défauts :
– la dispersion des moyens, la flotte de Nagumo se trouvant bien seule pour affronter sans aide l’US Navy ; – le manque de souplesse (la puissante flotte combinée se trouvait trop loin pour porter assistance dans l’urgence à l’une ou l’autre des escadres avancées), – la diversité des objectifs : destruction de l’US Navy ET neutralisation de l’atoll. Au moment critique, Nagumo ne saura quel objectif « choisir » en priorité…
En face, les Américains étaient forcés de faire avec ce qu’ils avaient : l’atoll fut renforcé et accueillait pas moins de 127 avions. La flotte en elle-même était divisée en 2 task forces, la 16 autour des porte-avions
Enterprise et
Hornet, l’autre, la 17, autour du
Yorktown. De plus, leurs équipages manquent cruellement d’expérience (le
Hornet verra là son baptême du feu) et les appareils, bien que robustes, manquent eux de maniabilité face aux terribles Zéros. Les pertes, en avions torpilleurs TBD Devastator notamment, seront lourdes.
La bataille
Premiers déboires
Une première erreur japonaise est flagrante avant même la bataille proprement dite : la trop grande confiance en la réussite de leur mission, et le fait qu’ils sous-estimèrent l’ennemi. En effet, ils comptaient sur la présence de 2 porte-avions américains seulement, le
Yorktown « ayant été coulé » à la bataille de la mer de Corail. De plus, pour confirmer la situation de l’US Navy, une reconnaissance aérienne devait avoir lieu sur Pearl Harbour, et un cordon de sous-marins devait être mis en place à proximité des eaux hawaïennes, ce pour détecter les mouvements américains. Et là, premiers déboires : la reconnaissance en question fut annulée, ce qui n’inquiéta nullement le haut commandement qui ne prévint cependant pas Nagumo de ce fait. Quant aux sous-marins, ils traînèrent en route et parvinrent à leur lieu de patrouille avec 24h de retard… ce qui fit qu’ils ratèrent (de peu) la flotte américaine.
Premières passes d’armes
Dès le 3 juin au matin, le convoi des transports de troupes nippons faisant route vers Midway est repéré. Immédiatement, 15 B25 décollent et attaquent ledit convoi. Aucun navire n’est touché contrairement aux revendications, mais l’effet est désastreux sur les Japonais qui pensaient bénéficier de la surprise… au soir, des Catalina attaquent à leur tour, armés de torpilles, et mettent un coup au but sur un transport. Plus au nord ce même jour débutent les combats des Aléoutiennes sous une météo peu favorable. La diversion ne marchera évidemment pas, les Américains étant au courant des plans japonais.
L’assaut
Le 4 juin au matin, le décor est placé et les protagonistes sont prêts au combat. Vers 4-5h, des avions de reconnaissances décollent de part et d’autre, mais du côté japonais, un avion décolle en retard tandis qu’un autre doit faire demi-tour. Un premier tournant, même si aucun ne le sait à ce moment, car ces deux avions là auraient du suivre une trajectoire qui les aurait fait croiser la flotte américaine. Malchance ? Peut-être mais la négligence fut de ne pas les remplacer par d’autres… À 5h, 36 Zéros, 36 bombardiers en piqué et 36 bombardiers/torpilleurs japonais décollent. Après la détection du raid au radar, tous les avions présents sur l’atoll décollent : 6 Grumman TBF-1 Avenger et 4 Martin B-26 Marauder torpilleurs, 27 Douglas SBD-2 Dauntless et 12 Vought SB2U-3 Vindicator (bombardiers en piqué), 17 B-17 ainsi que 20 F2A3 Buffalo et 5 F4F-3 Wildcat (chasseurs chargés de la défense). Les chasseurs interceptent les japonais et revendiquent quelques succès mais au prix de lourdes pertes face aux zéros : 13 Buffalos et 2 Wildcats sont abattus, contre 3-4 avions japonais. Ceux-ci bombardent efficacement et causent de lourds dégâts à la base, mais une seconde vague s’annonce nécessaire.