Éphéméride du 10 février
samedi 10 février 2024
Après la procession du 15 août dans les rues de Paris, renouvellement du Vœu de Louis XIII à Notre-Dame
1638 : Vœu de Louis XIII.
Louis XIII et Anne d’Autriche se marient en 1615. Vingt-deux ans plus tard, ils n’ont toujours pas d’enfant. Le couple royal multiplie pèlerinages et prières à cette intention [Illustration en page d’accueil : Philippe de Champaigne, Le Vœu de Louis XIII], mais il faudra attendre 1638 pour que l’on annonce une naissance prochaine : ce sera Louis-Dieudonné, le futur Louis XIV.
Celui-ci n’est pas encore né que Louis XIII prononce la consécration de sa personne et de son royaume à la Vierge Marie en action de grâce pour cet heureux événement et pour le secours constant de la Providence qui s’est manifesté dans plusieurs situations désespérées au cours de son règne (voir ci après, note I).
Le roi ordonne que tous les ans il se fasse une procession solennelle à Notre Dame de Paris pour renouveler cette consécration : c’est l’origine de la procession qui se déroule annuellement dans les églises le 15 Août, jour de l’Assomption.
Ingres, Le vœu de Louis XIII, Cathédrale de Montauban
Quant à la reine Anne d’Autriche, devenue veuve – et régente du royaume – en 1643, elle manifestera sa gratitude en édifiant le « temple magnifique » qu’elle avait fait le vœu d’édifier, si son désir de maternité était exaucé : ce sera le Val de Grâce (voir ci après, note II).
Finalement, le couple aura deux enfants (deux garçons) : Louis, le futur Louis XIV et Philippe, titré duc d’Orléans, aux origines de l’actuelle Maison de France (éphéméride du 21 septembre).
I – Le vœu de Louis XIII (texte intégral)
Louis, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre.
À tous ceux qui ces présentes lettres verront, Salut.
Dieu qui élève les rois au trône de leur grandeur, non content de nous avoir donné l’esprit qu’il départ à tous les princes de la terre pour la conduite de leurs peuples, a voulu prendre un soin si spécial et de notre personne et de notre État, que nous ne pouvons considérer le bonheur du cours de notre règne, sans y voir autant d’effets merveilleux de sa bonté, que d’accidents qui nous pouvaient perdre.
Lorsque nous sommes entré au gouvernement de cette couronne, la faiblesse de notre âge donna sujet à quelques mauvais esprits d’en troubler la tranquillité ; mais cette main divine soutint avec tant de force la justice de notre cause que l’on vit en même temps la naissance et la fin de ces pernicieux desseins. En divers autres temps, l’artifice des hommes et la malice du diable ayant suscité et fomenté des divisions non moins dangereuses pour notre couronne que préjudiciables au repos de notre maison, il lui a plu en détourner le mal avec autant de douceur que de justice.
La rébellion de l’hérésie ayant aussi formé un parti dans l’État, qui n’avait d’autre but que de partager notre autorité, il s’est servi de nous pour en abattre l’orgueil, et a permis que nous ayons relevé ses saints autels en tous les lieux où la violence de cet injuste parti en avait ôté les marques (illustration : le siège de La Rochelle, avec Richelieu).
Quand nous avons entrepris la protection de nos alliés, il a donné des succès si heureux à nos armes, qu’à la vue de toute l’Europe, contre l’espérance de tout le monde, nous les avons rétablis en la possession de leurs États dont ils avaient été dépouillés.
Si les plus grandes forces des ennemis de cette couronne, se sont ralliées pour conspirer sa ruine, il a confondu leurs ambitieux desseins pour faire voir à toutes les nations que, comme sa providence a fondé cet État, sa bonté le conserve et sa puissance le défend.
Tant de grâces si évidentes font que pour n’en différer pas la reconnaissance, sans attendre la paix, qui nous viendra sans doute de la même main dont nous les avons reçues, et que nous désirons avec ardeur pour en faire sentir les fruits aux peuples qui nous sont commis, nous avons cru être obligés, nous prosternant aux pieds de sa majesté divine que nous adorons en trois personnes, à ceux de la Sainte Vierge et de la sacrée croix, où nous vénérons l’accomplissement des mystères de notre Rédemption par la vie et la mort du fils de Dieu en notre chair, de nous consacrer à la grandeur de Dieu par son fils rabaissé jusqu’à nous, et à ce fils par sa mère élevée jusqu’à lui ; en la protection de laquelle nous mettons particulièrement notre personne, notre État, notre couronne et tous nos sujets pour obtenir par ce moyen celle de la Sainte-Trinité, par son intercession et de toute la cour céleste par son autorité et exemple, nos mains n’étant pas assez pures pour présenter nos offrandes à la pureté même, nous croyons que celles qui ont été dignes de le porter, les rendront hosties agréables et c’est chose bien raisonnable qu’ayant été médiatrice de ces bienfaits, elle le soit de nos actions de grâces.
À ces causes, nous avons déclaré et déclarons que prenant la très sainte et très glorieuse Vierge pour protectrice spéciale de notre royaume, [ci-contre, la Piéta du maître-autel de Notre-Dame] nous lui consacrons particulièrement notre personne, notre État, notre couronne et nos sujets, la suppliant de nous vouloir inspirer une sainte conduite et de défendre avec tant de soin ce royaume contre l’effort de tous ses ennemis, que, soit qu’il souffre du fléau de la guerre ou jouisse de la douceur de la paix que nous demandons à Dieu de tout notre cœur, il ne sorte point des voies de la grâce qui conduisent à celles de la gloire. Et afin que la postérité ne puisse manquer à suivre nos volontés en ce sujet, pour monument et marque immortelle de la consécration présente que nous faisons, nous ferons construire de nouveau le grand autel de la cathédrale de Paris (ci dessus, ndlr) avec une image de la Vierge qui tienne dans ses bras celle de son précieux Fils descendu de la Croix , et où nous serons représenté aux pieds du Fils et de la Mère comme leur offrant notre couronne et notre sceptre (ci dessous).
Nous admonestons le sieur Archevêque de Paris et néanmoins lui enjoignons que tous les ans le jour et fête de l’Assomption, il fasse faire commémoration de notre présente déclaration à la grand-messe qui se dira en son église cathédrale, et qu’après les vêpres du dit jour, il soit fait une procession en la dite église à laquelle assisteront toutes les compagnies souveraines et le corps de ville, avec pareille cérémonie que celle qui s’observe aux processions générales les plus solennelles ; ce que nous voulons aussi être fait en toutes les églises tant paroissiales que celles des monastères de la dite ville et faubourg, et en toutes les villes, bourgs et villages du dit diocèse de Paris.
Exhortons pareillement tous les archevêques et évêques de notre royaume et néanmoins leur enjoignons de faire célébrer la même solennité en leurs églises épiscopales et autres églises de leur diocèse; entendant qu’à la dite cérémonie les cours de Parlement et autres compagnies souveraines et les principaux officiers de la ville y soient présents; et d’autant qu’il y a plusieurs épiscopales qui ne sont pas dédiées à la Vierge, nous exhortons les dits archevêques et évêques en ce cas de lui dédier la principale chapelle des dites églises pour y être fait la dite cérémonie et d’y élever un autel avec un ornement convenable à une action si célèbre et d’admonester tous nos peuples d’avoir une dévotion particulière à la Vierge, d’implorer en ce jour sa protection afin que sous une si puissante patronne notre royaume soit à couvert de toutes les entreprises de ses ennemis, qu’il jouisse largement d’une bonne paix ; que Dieu y soit servi et révéré si saintement à la dernière fin pour laquelle nous avons été créés ; car tel est notre bon plaisir.
Donné à Saint-Germain-en-Laye, le dixième jour de février, l’an de grâce mil six cent trente-huit, et de notre règne le vingt-huit.
Vue d’ensemble du « nouveau » grand autel de la cathédrale Notre Dame de Paris. Louis XIII mourut sans avoir pu réaliser la seconde partie de son vœu. Ce fut Louis XIV qui se chargea de l’acquitter en s’associant à son père dans la réalisation de l’œuvre où l’on peut admirer les statues des deux Rois de part et d’autre du maître-autel, Louis XIV à genoux (à gauche) et Louis XIII (à droite) tendant sa couronne à la Vierge Marie, elle même tenant son fils mort sur ses genoux.
II – Le Val de Grâce
La fondatrice, la reine Anne d’Autriche, restée vingt cinq ans sans enfant, aime à se retirer au Val-de-Grâce, un monastère ayant une dévotion particulière a la Nativité. Anne d’Autriche donne enfin naissance à un héritier le 5 septembre 1638 : le dauphin Louis-Dieudonné, futur Louis XIV.
Le 4 décembre 1642, le cardinal de Richelieu meurt. Le 14 mai 1643, le roi Louis XIII meurt à son tour. Le dauphin n’ayant que 5 ans, Anne d’Autriche devient à 42 ans reine régente, en étroite collaboration avec le cardinal-ministre Mazarin. La régente peut dès lors réaliser son vœu d’élever un « temple magnifique » si Dieu lui donnait un fils, « de rebâtir entièrement l’église et le monastère du Val-de-Grâce et de n’y épargner aucune dépense pour y laisser des marques éternelles de sa piété ».
Pour remercier le ciel de lui avoir accordé un enfant, Anne d’Autriche fit de cette église un ex-voto en l’honneur de la Vierge Marie. La dédicace sur le fronton du porche est facilement compréhensible :
IESU NASCENTI VIRGINIOQ(UE) MATRI
À Jésus naissant et à sa Mère la Vierge
On remarque l’insistance sur le fait que Jésus est honoré comme enfant attendu qui est enfin né (comme Louis XIV) et Marie en tant que mère (comme Anne d’Autriche).
L’abbaye, qui reste un modèle de construction religieuse du XVIIe siècle, est désaffectée sous la Révolution et devient un hôpital militaire en 1796. L’abbaye abrite aujourd’hui le musée du service de santé des armées, la bibliothèque centrale du service de santé, l’école du Val-de-Grâce et comporte également des chambres pour certains personnels hospitaliers.
valdegrace
III – En Provence, Cotignac et Notre-Dame-des-Grâces.
Petit village, qui a joué un grand rôle dans le Vœu de Louis XIII, Cotignac, en Provence, est le seul endroit au monde où l’Église reconnaît deux apparitions de la Vierge Marie, et une de Saint Joseph.
1. La première apparition ne concerne pas le vœu de Louis XIII puisqu’elle eut lieu le 10 août 1519 (elle se renouvela le lendemain, 11 août) : la Vierge Marie, sur le mont Verdaille, demanda à Jean de La Baume la construction d’une église à Cotignac. Les travaux commencèrent dès le 14 septembre 1519 : c’est l’origine du sanctuaire de Notre-Dame-des-Grâces. Quant à l’apparition de Saint Joseph, elle eut lieu plus d’un siècle après, le 7 juin 1660 : Saint Joseph apparut sur le Mont Bessillon à un berger assoiffé, Gaspard Ricard, pour qui il fit jaillir une source d’eau vive : c’est l’origine de l’actuel monastère de Saint-Joseph du Bessillon.
La montée au sanctuaire Notre-Dame-des-Grâces par l’escalier de Louis XIV.
2. C’est la seconde apparition de la Vierge à Cotignac qui concerne directement la naissance de Louis XIV, et donc le Vœu de Louis XIII.
Le 27 octobre 1637, le frère Fiacre reçut une révélation pendant sa prière : la reine Anne d’Autriche devait demander publiquement trois neuvaines de prières à la Sainte Vierge; alors un fils lui serait donné. Une fois informée, la Reine s’associa aux neuvaines déjà commencées par frère Fiacre le 8 novembre, et qui se terminèrent le 5 décembre suivant. Neuf mois plus tard, le 5 septembre 1638, Louis XIV naissait à Saint-Germain en Laye…
C’est à la suite de la naissance de son fils, Dieudonné, que, le 10 février 1638, Louis XIII décida de consacrer le royaume tout entier à Notre-Dame, par le « Vœu de Louis XIII ».
La Régente Anne d’Autriche et le Roi Louis XIV, au début de son règne, vinrent à Cotignac, à l’occasion de la signature du Traité des Pyrénées, réconciliant en 1659 la France et l’Espagne. Ce fut le samedi 21 février que le cortège royal arriva à Cotignac.
Un seul chemin carrossable atteignait alors le Sanctuaire, depuis la route de Montfort. Il fallut l’élargir : ce chemin de Louis XIV permit au jeune roi Louis, à la Reine et à tout le cortège d’arriver à l’escalier qui reçut le même nom: l’escalier de Louis XIV. C’est le mois de juin suivant qu’eut lieu le 2ème grand événement surnaturel de Cotignac : l’apparition de Saint Joseph, dont on a parlé plus haut.
Lorsque la Reine Anne d’Autriche mourut, en 1666, Louis XIV fit apposer dans le sanctuaire de Cotignac une plaque à la mémoire de sa mère, rappelant qu’il fut donné à son peuple par les vœux qu’Anne d’Autriche avait faits dans cette église. Elle s’y trouve toujours, bien lisible.
1898 : Naissance de Joseph Kessel
« On peut toujours plus que ce que l’on croit pouvoir. »
Admirateur de « l’homme Maurras » et du journaliste talentueux qu’il était, et bien qu’il n’en partageât pas les idées, Joseph Kessel alla chez Charles Maurras, dans sa maison du Chemin de Paradis, à Martigues, au début de l’été 1926, pour l’interroger sur le retour de Poincaré aux affaires.
academie-francaise – les-immortels – joseph-kessel
Où Kessel raconte en 1’36 son voyage en Afghanistan qui a donné naissance à son meilleur roman (selon lui) Les Cavaliers et au superbe film qui en a été tiré.