LETTRE À NICOLAS DUPONT-AIGNAN
« De tous temps, le mélange de l’idéologie et de la technocratie a abouti au pire.
L’idéologie de la mondialisation heureuse associée à la technocratie d’organisations non-élues ne déroge pas à la règle »
(Nicolas Dupont-Aignan)
En préambule, je demande pardon à tous les nommés Dupont de France et de Navarre. Leur patronyme est parmi les plus répandus chez nous, juste après les Martin. Je ne voudrais surtout pas être taxé de ségrégationnisme envers eux alors que je critique seulement ceux qui, n’assumant pas un nom qu’ils trouvent sans doute trop « prolo », le transforment en patronyme à tiroir en y ajoutant celui de leur mère. Je pense aux plus connus : Dupont-Moretti dit « Le Yéti » et Dupont-Aignan.
N’ayant, par principe, pas d’ennemi à droite, je me serais bien passé d’éreinter le second. Je vais donc essayer de le faire avec modération et surtout avec objectivité.
Pour moi, Monsieur Dupont-Variant, vous restez une énigme en raison, entre autres, de votre évolution politique sinusoïdale : un parcours commencé chez Jacques Chaban-Delmas, l’homme de la « nouvelle société », puis un virage à gauche vers Jean-Pierre Chevènement, puis barre à droite chez Pasqua et Villiers avant de claquer la porte de l’UMP pour créer votre propre mouvement. Vous me direz que « seuls les imbéciles ne changent pas d’avis » et, si vous avez un brin d’humour – ce qui ne semble pas être le cas – vous pourrez me citer Edgar Faure qui disait « Ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent ». Une énigme aussi que le financement de vos campagnes – présidentielles et européennes – où vos scores, toujours très inférieurs à 5% des suffrages, ne vous permettent pas d’être renfloué par l’État. Monsieur Dupont-Flambant, d’où vient l’argent qui vous finance ?
Etonnement aussi devant votre capacité à vous affirmer plus gaulliste que de Gaulle et à lui faire dire ce qu’il n’a jamais dit. Monsieur Dupont-Tifiant, vous pourriez nous citer Vercingétorix, qui était un vrai résistant, ou le Roi Louis XI, qui était un vrai organisateur du pays, ou Bonaparte qui était un vrai général (alors que l’autre ne l’a été que de mai à août 1940).
Mais j’ai été assez séduit quand, avec votre physique de bon élève ou de gendre idéal, vous êtes parti en bataille contre l’atteinte à nos libertés qu’étaient le confinement et le « Pass sanitaire » obligatoire. Vous aviez des accents de sincérité (et un certain courage), surtout quand vous fustigiez cette Europe technocratique, ce monstre froid, qui entendait régenter nos vies.
Et voilà qu’on vous retrouve porteur d’un projet de loi visant à interdire la consommation de viande de cheval, ce qui me fait bondir. Êtes-vous devenu complètement fou ou tout simplement démagogue ?
En effet, ce n’est pas la peine de (faire semblant de) lutter contre une Europe à la solde des Américains, une Europe incarnée par Ursula von der La Hyène ou Macron, pour singer une fois de plus, avec quelques années de retard, une mode qui nous vient des USA, à savoir l’interdiction de manger de la viande de cheval. Je précise, avant d’aller plus loin, que je déteste la viande de cheval pour qu’on ne me soupçonne pas de défendre égoïstement mon « horse-steak ».
Je vais vous exposer brièvement mon point de vue en faisant un peu d’histoire :
« L′hippophagie » – Le terme vient du grec ίππός (hippos), «cheval », et de φαγεῖν (phagein, « manger ») – désigne donc la consommation de viande de cheval. Sa première utilisation date du XIX° siècle (1832) mais cette pratique alimentaire est connue depuis la Préhistoire. Durant l’Antiquité, elle était associée à des rituels païens ce qui poussa l’Église catholique du Moyen Âge à la prohiber.
Sous la funeste Révolution, la consommation de viande de cheval a été encouragée dans un but…politique. Les chevaux, signe de prestige pour l’aristocratie, finissaient par servir à soulager la faim du vulgum pecus. Pendant les campagnes napoléoniennes, le chirurgien Larrey conseillait aux troupes de consommer la viande des chevaux. Larrey raconte dans ses Mémoires comment, à la bataille d’Aspern-Essling, en 1809, il nourrissait les blessés avec du bouillon de viande de cheval assaisonnée de… poudre à canon. L′hippophagie va gagner du terrain vers la fin du Second Empire. Les recommandations d’Émile Decroix, ex-vétérinaire militaire, et de Geoffroy Saint-Hilaire, zoologue, furent déterminantes.
Leurs arguments étaient que le peuple ouvrier ne mangeait pas à sa faim (le coût de la viande de bœuf ou de porc étant beaucoup trop élevé) et qu’on avait beaucoup trop de vieux chevaux. Ils encourageaient donc les propriétaires de chevaux âgés à les vendre aux abattoirs. A cette époque – bien moins sectaire que la nôtre – la « Société Protectrice des Animaux », fondée en 1845, soutient l’hippophagie. Malgré l’opposition des corporations de bouchers, ovins, bovins, porcins et caprins, les premières boucheries « chevalines » ouvrent (le 15 juin 1866 à Nancy, et le 9 juillet 1866 à Paris). Un grand « banquet hippophagique » est organisé à l’occasion de cette ouverture parisienne.
Pendant le siège de Paris en 1870, la viande de cheval est distribuée aux populations. Dans « L’Année terrible » Victor Hugo écrit : « Nous mangeons du cheval, du rat, de l’ours, de l’âne… ».
Beaucoup de Parisiens acquièrent un goût pour cette viande qui reste populaire après la fin de la guerre. Elle est réputée la moins grasse, sa haute teneur en fer lui vaut d’être prescrite par les médecins, et sa richesse en azote la rend populaire pour soigner la tuberculose. Elle donne des forces aux travailleurs manuels. Présentée comme un produit tonique, c’est, Monsieur Dupont-Feignant, une nourriture de prolos et de travailleurs, d’où l’expression « il a mangé du cheval » pour désigner les gens énergiques.
Et pourtant, à cette époque, on dit déjà que « le cheval est le meilleur ami de l’homme », mais on n’est pas assez stupide pour bouder sa viande. Pendant des décennies, la viande de cheval aura des partisans pour son faible coût, ainsi que chez les médecins et les professionnels de santé qui louent ses qualités alimentaires. Pendant longtemps elle restera une viande de pauvres.
Le XX° siècle marque la fin de l’utilisation militaire et agricole du cheval, et aboutit à une diminution du nombre de chevaux. Le cheval devient un animal de loisir ou de sport.
« Et en même temps », comme dirait l’avorton présidentiel, notre civilisation est devenue complètement cinglée : en France, la Loi Veil autorise l’Interruption Volontaire de Grossesse en 1975. L’avortement devient un droit alors que, depuis la plus haute antiquité, c’était un crime, mais on a des pudeurs de rosière dès qu’il s’agit de tuer un animal. Il y a quelques années, une jeune suédoise a subi une véritable tempête médiatique après avoir fait euthanasier sa jument, pourtant atteinte d’une maladie incurable, et l’avoir mangée pour ne pas gâcher ses 154 kg de viande. Mais il est vrai que notre civilisation d’enfants trop gâtés, narcissiques et egocentriques, ne sait plus ce que c’est que d’avoir faim. Elle pleurniche sur la faim dans le monde et le sort des migrants alors qu’en réalité, elle s’en fout éperdument puisqu’elle gravite égoïstement autour de son nombril !
Actuellement, les chevaux consommés chez nous sont réformés de la filière de l’équitation ou importés. Il s’agit souvent de bêtes aux mauvaises performances sportives, blessées, ou dont la carrière se termine du fait de l’âge. Les animaux de sport équestre et de clubs d’équitation peuvent être abattus, y compris des chevaux de particuliers. Plusieurs raisons poussent leurs propriétaires à les vendre aux abattoirs mais c’est souvent un impératif économique, les propriétaires n’ayant pas forcément les moyens pour assumer le coût de leur entretien sur la durée (un cheval vit en moyenne 25 ans). Les chevaux destinés à la consommation doivent être transportés vers un abattoir.
Le règlement CE 1/2005 impose un certain nombre de règles, comme l’obligation de les nourrir et de les abreuver, l’interdiction de transporter une bête malade ou blessée, ou encore l’interdiction d’utiliser des camions à double étage. Les conditions d’abattage des chevaux ont évolué au fil du temps, leur mise à mort est dorénavant similaire à celle des bovins.
Alors Monsieur Dupont-Geignant, scandalisez-vous plutôt du sort des moutons égorgés dans les baignoires des HLM de banlieues de non-droit, selon l’abattage rituel, pour l’Aïd al-Adha ( عيد الأضحى,) l’Aïd el-Kebir (عيد الكبير) ou l’Aïd al-Fitr ( عيد الفطر,) ça me semble plus urgent !
Et surtout, Monsieur Dupont-Savant, ne venez pas me parler de l’exemple américain, ce pays de faux-culs puritains. Certes l’hippophagie est extrêmement rare aux États-Unis, la Californie et l’Illinois l’ont même interdite. L’abattage de chevaux pour la consommation humaine est interdit dans tout le pays depuis 2007 mais les abattoirs américains exportent pour 42 millions de dollars de viande de cheval par an. De plus, la plupart des Américains ne sont pas au courant que leurs chevaux peuvent être abattus pour la consommation humaine dans d’autres pays.
Vous me direz qu’un peuple gavé au hamburger et au Coca-Cola, qui s’habille en rose pour aller voir un film sur « Barbie » (la poupée, pas Klaus !) a d’autres préoccupations que de savoir où on abat les vieux canassons et qui les mange.
Plus de 80 % de la viande consommée chez nous serait importée. La France importe 7 220 chevaux vivants (dont près de 2 000 en provenance de Pologne). C’est une filière certes en recul mais qui survit encore, mais pour combien de temps ?
Envoyer les chevaux réformés à la boucherie plutôt que leur « financer » une retraite est mal considéré depuis les années 1990. Quelques centres équestres communiquent sur la retraite de leurs bêtes pour être mieux vus, ou cachent l’envoi de leurs chevaux à l’abattoir pour la même raison.
L’idée – parfaitement stupide – de créer des cimetières pour chevaux commence à émerger. On préfère nourrir les asticots que les humains défavorisés avec leur viande. Un imbécile a osé écrire que « le recul de l’hippophagie témoigne d’un décalage entre les milieux professionnels du cheval, encore imprégnés de l’ancienne culture, et les nouveaux usagers du cheval, porteurs des sensibilités et des aspirations d’un large public non spécialiste ». Les pauvres chéris veulent bien monter à cheval le week-end, dans des clubs où se côtoient les parvenus et les vrais bourges, mais ils sont contre la chasse à courre et se pâment à l’idée qu’on puisse manger de la viande de canasson. Je leur souhaite d’avoir faim un jour, un seul jour, dans leur confortable vie de larves trop bien nourries.
Il est temps de conclure, Monsieur Dupont-Branlant, en vous disant que j’en ai marre de voir nos politicards s’ingénier à tuer le petit commerce (et les rares industries qui fonctionnent encore) pour complaire à Bruxelles. Ceci est à nuancer car la France a le chic pour anticiper les oukases de l’U.E. Dans de nombreux pays européens le petit commerce et l’artisanat se portent encore bien.
Quand il s’agit de politiciens de gauche, je peux aisément les comprendre : le commerçant, l’artisan et le petit industriel votent très majoritairement à droite, c’est donc un adversaire voire un ennemi (et même, pour beaucoup, un affreux « fasciste »).
Durant ma vie active, j’ai été inspecteur d’Assurances IARD (*) pour une société spécialisée dans le commerce alimentaire. J’ai vu disparaître des dizaines de magasins de marée, en Bretagne, à cause du « Plan Melik » réglementant la pêche ; j’ai vu mourir des centaines de commerçants sur marché soumis à des normes trop drastiques imposées par Bruxelles ; j’ai vu crever des boucheries dans des zones de non-droit ou d’autres remplacées par des boucheries « Halal » ; j’ai vu fermer, une à une, les épiceries des petits patelins de campagne. Ça ne s’arrêtera donc jamais ?
Alors, foutez-la paix aux gens qui aiment la viande de cheval (et à ceux qui en vivent) !
De grâce, Monsieur Dupont-Gnangnan, ne joignez pas votre voix à celles des écolos-gauchos, végans, végétariens, végétaliens, antispécistes et autres pisses-froids donneurs de leçons, dont le but est de détruire la France éternelle et non de sauver la planète. Ils veulent tout interdire : la corrida, la chasse à courre, la chasse tout court, le gavage des oies et maintenant la viande de cheval.
Et demain, pourquoi pas interdire la consommation d’escargots au motif qu’ils courent moins vite que leurs prédateurs ; de cuisses de grenouilles victimes d’une odieuse mutilation ; de crustacés qu’on ébouillante ; d’huîtres qu’on mange vivantes…etc…etc…
Cette capacité à emmerder les gens qui ne mangent pas comme eux n’a pas de limite.
Pour ma part, je me garde bien de condamner ceux qui martyrisent une carotte en la râpant ; ceux pour qui un bon gueuleton est composé de boulgour, de quinoa, ou de brocoli, le tout arrosé à l’eau minérale. Je suppose que ces gens-là doivent vouer un véritable culte à Adolf Hitler qui était un vrai végétarien qui ne buvait que de l’eau. Il donnait des conseils alimentaires à son entourage et, de surcroit, il aimait beaucoup les animaux ; il avait donc tout pour leur plaire, non ?
Éric de Verdelhan
*)- IARD : Incendie, Accidents et Risques Divers.
15/8/2023 I