Lieutenant-Colonel Chaudrut
Victor Jean Chaudrut est né, de parents commerçants, à Coutras, petite ville située à quarante kilomètres au Nord Est de Bordeaux, sur les rives de la Dronne, sous affluent de la Dordogne. Les résonances héroïques de la Première Guerre mondiale qui a juste éclaté lorsqu’il vient au monde, vont marquer son enfance et son adolescence, façonner sa vocation pour la carrière des armes et le mener à Saint-Cyr qu’il intègre en 1936 avec la promotion « Du Soldat Inconnu ».
En 1940, le lieutenant Chaudrut se porte volontaire pour le « Corps Franc » du 57ième d’Infanterie. Ce Corps Franc, qu’on appellerait aujourd’hui « commando », s’illustre par des actions audacieuses sur les arrières ennemis contre des P.C. Le lieutenant Chaudrut est cité deux fois à l’Ordre de l’Armée, ce qui, en 1940, constitue une double distinction hors du commun.
Mais un soir, l’opération tourne au tragique : les dix survivants sont capturés et alignés au mur pour être fusillés. L’exécution est annulée in extremis alors que déjà a retenti le commandement préparatoire.
Le voici en captivité ; pour lui, le prisonnier a le devoir absolu de s’évader. Il va s’y employer à trois reprises. En vain.
L’opprobre du vainqueur le qualifie officiellement d’« ennemi de la Grande Allemagne » et, à ce titre, il est enfermé dans la célèbre forteresse de Colditz, à trente kilomètres de Leipzig, où sont regroupés les officiers de toutes nationalités, les plus récalcitrants.
D’emblée, neuf officiers français, dont le lieutenant Chaudrut, imaginent une évasion rocambolesque dont la partie terminale consiste à creuser un tunnel de quarante quatre mètres. Cette idée sera illustrée, quelques années plus tard, dans le film « La grande Evasion » où les Anglais, à tort, se sont donné le beau rôle. Le projet échoue au dernier moment alors que les prisonniers sont déjà en enfilade, allongés dans le tunnel, prêts à bondir vers la liberté.
Le lieutenant Chaudrut va alors endurer les brimades de quatre camps disciplinaires. Il tente une dernière fois de s’évader. Cette fois, c’est en Autriche, il est déguisé en femme. Malheureusement, un soupirant trop entreprenant et particulièrement indésirable fait capoter la tentative.
Libéré à Lübeck par les troupes britanniques, il retrouve la mère patrie et ses parents cinq ans après les avoir quittés.
De 1946 à 1949, Victor Chaudrut effectue un séjour à Madagascar. Promu capitaine, il obtient son transfert dans les troupes coloniales, puis, il se porte volontaire pour les parachutistes qu'il rejoint en Bretagne au camp de Meucon, près de Vannes, et part pour l'Indochine en 1950, pendant l’exaltante période du « règne » du général Delattre. Il prend la tête du 10e bataillon parachutiste de chasseurs à pied dont il fait une unité allégée, unité qui devient particulièrement combative et mordante sous son commandement. Il restera à ce poste jusqu'en 1952 et y gagne trois magnifiques citations dont une à l’Ordre de l’Armée.
En 1954, le général Gilles envoie le commandant Chaudrut au Maroc pour transformer le 4e bataillon du 6e Régiment de Tirailleurs sénégalais en bataillon parachutiste à part entière, lequel bataillon devient le 2e Bataillon de parachutistes coloniaux qui donnera naissance, le 1er août 1955, au 6e Régiment de parachutistes coloniaux. La rébellion couve dans les montagnes. Le commandant Chaudrut y fait face avec un moral d‘acier qui se nourrit, sur le terrain, d’un sens inné de la manœuvre et d’une intuition sans faille.
Entre temps , il a épousé Janine qu’il a naguère connue à Coutras et avec qui il aura trois enfants.
Fin 1956, il est désigné pour Dakar afin d’y prendre le commandement du 4e Bataillon colonial de commandos parachutistes à la tête duquel il interviendra brillamment en Mauritanie à plusieurs reprises et en particulier au cours d’une opération aéroportée qui mettra fin aux exactions d’une bande de rebelles Reghibat.
En 1960 il est en Algérie où il devient le commandant en second du 8e R.P.I.Ma. Mais en avril 1961, les évènements politiques à Alger touchent de proche en proche les unités de l’Armée française. Le 8e R.P.I.Ma, désemparé par les absences répétées et les indécisions de son chef de corps, est pris en main de façon énergique par le commandant Chaudrut.
Si le « 8 » existe encore aujourd’hui, c’est grâce à lui : il a payé de sa carrière son abnégation à assumer, seul, toutes les responsabilités afin de sauver le Régiment d’une probable dissolution.
Il quitte l’armée en 1964 comme lieutenant-colonel. Ses enfants étant encore jeunes, il lui faut trouver un emploi : il devient inspecteur puis inspecteur principal du permis de conduire, notamment à Albi, fonction qu’il va exercer pendant une quinzaine d’années.
Mais il était aussi un Homme d’honneur qui défendit jusqu’au bout le 8e R.P.I.Ma qui le méritait bien et même son colonel qui ne le méritait pas.
Il n’a pas failli à la règle selon laquelle il n’y a pas de grands guerriers durables sans la « baraka ».
Il a traversé des nuées de balles et des explosions d’obus et de mines sans la moindre égratignure. Et pourtant, il a vu la mort de près, notamment en 1940 où il échappa de justesse au peloton d’exécution.
Commandeur de la Légion d’honneur aux huit citations dont trois à l’Ordre de l’Armée, il présentait l’exceptionnelle particularité d’avoir été chef de corps à six reprises ( 10e B.P.C.P., 6e B.P.C., 2e B.P.C, 4e B.C.C.P. et 6e R.P.C.), totalisant ainsi vingt-neuf mois de commandement dont dix-sept au combat auxquels il convient d’ajouter le commandement en zone opérationnelle, d’abord au Maroc puis en Algérie, de deux régiments où il assuma l’intérim de deux chefs de corps défaillants.
Victor Chaudrut est décédé au début de novembre 2007. Son éloge funèbre a été prononcé en l'église Saint Martin d'Albi, le 3 novembre 2007. Ce combattant volontaire, grande figure de la coloniale, qui sut faire preuve au combat d'une incroyable audace, fut le lieutenant le plus décoré de l'armée française. Il totalisait huit citations dont trois à l'ordre de l' Armée. Commandeur de la Légion d'honneur, le lieutenant-colonel Chaudrut était titulaire de la croix de guerre 1939-1945, de la Médaille des Evadés, de la croix de guerre des T.O.E.et de plusieurs autres décorations.
un Grand Soldat
QUE ST MICHEL VEILLE SUR LUI!!!
il a reussi sa dernière évasion!!!