Le 21 octobre, s’appuyant sur des confidences faites par des « sources gouvernementales », l’agence de presse Belga a indiqué que l’avion de combat américain F-35A avait été retenu pour remplacer les F-16 actuellement en service au sein de la composante « Air » de la défense belge.
Ces sources ont en effet déclaré que la décision de choisir l’appareil de Lockheed-Martin a été « implicitement prise » et que « le gouvernement cherche encore la formule qui permette d’assumer un choix américain ».
Pour rappel, dans le cadre du programme ACCap [Air Combat Capability], Bruxelles a lancé un appel d’offres d’une valeur de 3,6 milliards d’euros afin de se procurer 34 nouveaux avions de combat. Plusieurs industriels (Boeing et Saab) ont décliné l’invitation à y participer. Restent seuls en lice le F-35A et l’Eurofighter Typhoon, dont la candidature est défendue par le Royaume-Uni.
Sans doute pour contrer le tropisme pro-américain d’une partie de la classe politique belge (certains responsables, notamment flamands, n’ayant pas caché leur préférence en faveur du F-35A), la France a fait le choix de proposer 34 Rafale dans le cadre d’un partenariat stratégique et industriel global, sans passer, donc, par la procédure de l’appel d’offres. Ce qui, outre-Quiévrain, a donné matière à des débats juridiques sur le bien fondé de cette démarche.
Normalement, la décision des autorités belges auraient dû être annoncée lors du dernier sommet de l’Otan, qui s’est tenu en juillet dernier à Bruxelles. Mais, la proposition française a probablement rendu le choix plus compliqué, certains membres du gouvernement, soucieux de la cause européenne, ayant fait part de leur volonté d’en étudier tous les ressorts.
« Cela concerne la politique européenne de la Défense, cela vaut la peine de regarder ce qui est concrètement proposé, mais cela doit pouvoir rentrer dans les conditions du marché. Si les obstacles juridiques sont trop importants, on restera dans le cadre de la procédure », avait ainsi expliqué Didier Reynders, vice-Premier ministre et chef de la diplomatie belge, en octobre 2017.
Un décision était donc attendue le 14 octobre dernier. Pourquoi cette date? Tout simplement parce que passé ce jour, l’offre faite par le Joint Programme Office, l’organisme du Pentagone qui défend la candidature du F-35A n’aurait plus été valable. Toutefois, rien n’a été annoncé, ni avant, ni après.
Aussi, les déclarations anonymes de ces sources gouvernementales auprès de l’agence Belga n’ont pas manqué de susciter un flot de réactions… Mais il y avait-il vraiment matière à s’enflammer?
Ce 23 octobre, en commission à la Chambre des députés, le Premier ministre belge, Charles Michel, a démenti qu’un quelconque choix a été fait par son gouvernement. « Nous avons interrogé l’agence [le JPO, ndlr] pour savoir jusque quand l’offre était valable » parce que l’autre offre [celle concernant l’Eurofighter Typhoon] était valable plus longtemps », a-t-il expliqué en répondant à des questions posées par des parlementaires.
« La date de validité de l’offre américaine est le 29 octobre » et des « questions complémentaires ont été posées », a ensuite ajouté M. Michel, selon qui le conseil restreint de son gouvernement [le Kern, ndlr] avait été pour le moment informé « sur les « mérites des différentes projets », tant d’un point de vue militaire qu’en ce qui concerne le « retour sociétal. »
Quoi qu’il en soit, ces rumeurs au sujet du choix du F-35A nourrissent la polémique et suscitent une levée de boucliers, notamment chez les élus wallons.
Une telle décision serait « une catastrophe pour la souveraineté stratégique de l’Union Européenne et pour l’industrie de la Défense européenne et wallonne », s’est emporté le député centriste Georges Dallemagne. « À la veille de la visite du président Macron en novembre, ce choix constituerait une gifle pour les relations franco-belges, et au-delà, pour tous ceux qui cherchent redonner du souffle à une Union Européenne ambitieuse », a-t-il affirmé, via un communiqué.
« Curieuse de voir comment le Premier Ministre et le MR vont se contorsionner pour justifier l’injustifiable avec le choix du F-35 qui est tout sauf celui de l’avenir européen et qui en sus pénalise notre économie belge », a enchéri, via Twitter, Catherine Fonck, qui appartient à la même formation politique que M. Dallemagne.