Lors d’une visite officielle au Brésil, en septembre 2009, le président Sarkozy surprit tout le monde en annonçait que la France allait acquérir une dizaine d’avions militaires de transport KC-390, alors en cours de développement chez Embraer, pour 500 millions d’euros. Et cela dans le cadre de l’acquisition de 36 Rafale pour la force aérienne brésilienne.
On connaît la suite : à la suite d’un feuilleton à rebondissements, Brasilia préféra finalement le Gripen E/F du constructeur suédois Saab (et, contrairement à M. Sarkozy, Stockholm écarta l’idée d’acquérir des KC-390 pour remplacer ses C-130 Hercules)… Actuellement, seul le Portugal a fait part de son intention de doter ses forces aériennes de l’avion de transport brésilien.
Mais, visiblement, ce dernier intéresse beaucoup Boeing…. En juillet, sans doute afin de contrer son concurrent Airbus, qui venait de reprendre le programme C-Series du canadien Bombardier, le constructeur américain prit le contrôle de la division « aviation civile » d’Embraer, via la création d’une co-entreprise dans laquelle il devait détenir 80% des parts, pour un montant de 3,8 milliards de dollars.
Selon les termes de l’accord, cette co-entreprise doit être implantée au Brésil, tout en étant rattachée à Dennis Muilenburg, le PDG de Boeing. « Cet important partenariat s’inscrit clairement dans le cadre de la stratégie à long terme de Boeing, qui consiste à investir dans la croissance organique et à redistribuer de la valeur à ses actionnaires, tout en concluant des accords stratégiques qui améliorent et accélèrent nos projets de croissance », expliqua alors ce dernier.
Seulement, Boeing lorgne aussi sur les activités militaires d’Embraer, qui produit aussi l’avion léger d’attaque A-29 Super Tucano (en lice pour équiper l’US Air Force, via un partenariat avec Sierra Nevada Corporation).
Ainsi, selon le quotidien brésilien Valor Economico, Boeing et Embraer auraient aussi l’intention de créer une co-entreprise dans le domaine de la défense. Et le KC-390 serait au centre de la manoeuvre, laquelle fut esquissée lors du dernier salon de l’aéronautique de Farnborough [Royaume-Uni], en juillet.
Déjà, via un accord signé en 2016, Boeing s’est engagé à assurer le soutien logistique du KC-390 pour les clients étrangers d’Embraer. Mais comme l’avait confién à Defense News, Jackson Schneider, le patron de la division « Défense et Sécurité » de l’industriel brésilien, la création d’une co-entreprise permettrait une « collaboration beaucoup plus large. »
« Boeing a une expérience fantastique et le KC-390 est un avion fantastique. Cela changerait la donne », fit valoir M. Schneider. « Cela élargira considérablement nos opportunités en termes de ventes », avait-il ajouté, alors que, justement, les commandes pour cet avion de transport peinent à décoller.
Dans le cadre de cette co-entreprise, il serait question d’installer une ligne de production du KC-390 aux États-Unis, ce qui permettrait à Boeing de concurrencer Lockheed-Martin et son C-130J Hercules.
« La décision de construire l’appareil aux États-Unis ne serait probablement prise que si le tandem Boeing / Embraer pouvait vendre le KC-390 à l’US Air Force, à la Navy ou à l’US Marine », a toutefois estimé Byron Callan, un analyste de Capital Alpha Partners, cité par Defense News. Ce qui est loin d’être évident au regard de l’expérience acquise avec le C-130 Hercules.
Doté de 2 turbofans IAE V2500, le KC-390 peut transporter jusqu’à 20/25 tonnes de fret sur une distance de 2.815 km, à la vitesse de croisière maximale de 850 km/h. Multi-rôle, il peut être utilisé pour le transport classique, la guerre électronique, le largage de 64 parachutistes ou encore le ravitaillement en vol.
En mai dernier, le numéro 001 a fait une sortie de piste, lors d’essais au sol à l’aéroport de Gavião Peixoto. Afin de ne pas retarder la certification de l’appareil, la force aérienne brésilienne a consenti à retarder la livraison de son premier exemplaire (n°003) afin de permettre à Embraer de continuer ses essais.