Rattachée au 2e Régiment d’Infanterie de la Garde républicaine, la Compagnie de sécurité de l’Hôtel de Matignon [CSHM] compte une centaine de gendarmes (officiers, sous-officiers, gendarmes adjoints volontaires). Et, les rythmes de travail y sont trop intenses, à en croire une lettre anonyme que certains membres de cette unité ont adressé à leur hierarchie.
« Un profond malaise règne au sein de la CSHM depuis maintenant plusieurs mois. Le quotidien des gardes républicains, notamment leurs rythmes de travail et leur vie de famille, a été fortement affecté par l’accroissement du temps de service consécutif à une modification en profondeur des différents plannings de garde, à la multiplication des missions liées à la primature, avec comme toile de fond la menace terroriste permanente », ont ainsi écrit les auteurs de cette lettre, dont l’existence a été révélée par L’Essor de la Gendarmerie.
« Les dernières mesures prises ces dernières années n’ont pas enrayé la dégradation continue des conditions de travail », ont-ils ajouté, avant de dénoncer le « manque d’effectifs toujours chronique » ainsi que « l’organisation et les méthodes de management [du] commandement depuis l’été 2017 », laquelle « ne permettent pas aux gardes républicains d’accomplir sereinement leurs missions en raison d’une trop grande fatigue morale et physique liée à une surcharge de travail sans cesse croissante. » Voilà ce qui va relancer le débat sur les différences entre « commandement » et « management »…
« Outre nos logements parfois insalubres (nous pensons à la caserne de Babylone), outre le manque de matériels, outre le manque de séance d’instruction, outre le manque de séance de sport, il s’agit surtout d’un manque de repos et de considération pour les hommes et les femmes qui arment la CSHM. […] Nous sommes en train de subir la mission qui nous a été confiée car nous ne sommes plus en mesure de l’assurer dans de bonnes conditions physiques et morales. Avec le rythme soutenu des services, le repos manque et notre hiérarchie fait la sourde oreille face à nos sollicitations », lit-on dans ce courrier.
En outre, les gendarmes de la CSHM mettent en cause le commandant militaire et le commandant de compagnie. « Le COMILI ne s’est pas privé de fustiger ouvertement devant plusieurs de ses subordonnés gendarmes que nous n’étions que des ‘miséreux’. Dans le même acabit le COMCIE stigmatise en ses termes les gendarmes qu’il ‘commande’ : ‘bons à rien’, « fainéants’… Compte tenu de notre engagement et de nos nombreux sacrifices déjà consentis à ce jour, nous ne méritons pas ce traitement désobligeant émanant d’officiers de gendarmerie qui prétendent apporter un souffle nouveau à l’unité afin d’améliorer le quotidien de tous et révolutionner le service dans une optique opérationnelle », dénoncent-ils.
« Nous sommes parfaitement conscients que notre démarche n’est pas conventionnelle », affirment les gendarmes de la CSHM qui ont signé ce courrier. Mais, malgré leur devoir de réserve, « nous sommes arrivés à point de non-retour », ont-ils avancé pour justifier leur démarche.
Ce n’est pas la première fois que des Gardes républicains alertent sur leurs conditions de travail. Cela avait le cas en 2009, année où une lettre, également anonyme, avait dénoncé la vetusté des locaux et les « moyens dérisoires » pour mener à bien les missions dévolues aux gendarmes affectés à l’Élysée. Le courrier avait aussi fait état de cas de gale et évoqué « la peur de la sanction » sans « aucune reconnaissance. »
Selon l’AFP, le courrier envoyé par les Gardes républicains de la CHSM a été pris en compte par la Direction générale de la Gendarmerie nationale [DGGN], laquelle a fait savoir qu’une « mission d’évaluation » avait été confiée à l’Inspection générale de la gendarmerie nationale [IGGN]. Ses conclusions sont attendues pour le 12 octobre.
La CHSM dispose de « sections de sécurité générale », dont la mission est d’assurer protection de l’hôtel de Matignon et de ses annexes en permanence. « Elles accueillent, contrôlent, renseignent et orientent les autorités, les visiteurs et les différents intervenants au quotidien. Elles maintiennent la liaison avec les forces de sécurité positionnées en périphérie du site et les différents services partenaires », explique la Gendarmerie nationale.
Ce dispositif est complété par un « groupe de protection », qui est chargé de la sécurité et de la protection des « plus hautes autorités à l’intérieur de l’hôtel de Matignon. »
Photo : Gendarmerie nationale