Depuis 2015, l’action de la Force multinationale mixte (FMM), composée de troupes fournies par le Nigéria, le Tchad, le Niger et le Cameroun, a permis de faire reculer le groupe jihadiste Boko Haram, lequel s’est scindé en deux factions, l’une étant toujours dirigée par son chef historique, Abubakar Shekau, l’autre étant commandée par Abou Mosab al-Barnaoui, adoubé l’État islamique (EI ou Daesh).
Seulement, la lutte contre la mouvance jihadiste ne souffre d’aucune faiblesse. Le retrait des soldats tchadiens de la FMM, les allégations de violations des droits de l’homme qui finissent par compromettre le recueil de renseignements, l’absence de stratégie globale contre Boko Haram ou encore la corruption au sein des forces armées nigérianes, dont le moral n’est d’ailleurs pas au beau fixe, font que les jihadistes ont repris de la vigueur, en particulier ceux se réclamant de l’EI.
Pour les Nations unies, la faction de Boko Haram dirigée par al-Barnaoui, appelée « Province d’Afrique de l’Ouest de l’État islamique » (ISWAP), passe désormais pour la « principale menace de l’EI en Afrique de l’Ouest », étant donné sa « taille » et ses « ressources financières. » Qui plus est, cette organisation, très bien armée, met en application des tactiques nouvelles auxquelles les forces nigérianes n’ont à présent pas su apporter de réponses.
Ces dernières semaines, l’ISWAP a multiplié les attaques contre les bases tenues par l’armée nigériane, infligeant à ces dernières de lourdes pertes. Et, le 8 septembre, selon des responsables locaux et des sources sécuritaires citées par l’AFP, ce groupe jihadiste s’est emparé de la ville de Gudumbali, située dans la région de Guzamala (État de Borno, ndlr), après s’être attaqué à une base censée défendre cette dernière.
« Il est vrai que Boko Haram a pris Gudumbali ce matin (08/9) après avoir expulsé les soldats des facilités militaires de la ville », a en effet confirmé un responsable local de Guzamala. « Ils contrôlent complètement la ville et les facilités militaires », a-t-il insisté.
« Les terroristes ont attaqué la base vers 19h50 (le 07/09) et ont livré bataille intensément juqu’aux première heures de samedi, quand les soldats ont été forcés de se retirer », a indiqué une source militaire.
Un milicien a raconté à l’agence Reuters que les assaillant étaient « arrivés sur des motos et des pick-up équipés d’armes antiaériennes » tandis que d’autres ont tiré des roquettes. « Ils sont arrivés en ville en tirant des coups de feu de manière sporadique. Ils ont dit que les personnes innocentes pouvaient quitter la ville si elles le voulaient ou qu’elles pouvaient rester parce qu’elles n’étaient pas leurs cibles », a-t-il témoigné.
La semaine passée, l’ISWAP avait attaqué la base de Zari, située entre la frontière du Niger et le bassin du lac Tchad. Selon un bilan officieux, au moins 48 soldats nigérians auraient été tués. En réponse, la force aérienne nigériane a effectué plusieurs frappes aériennes contre des sites logistiques présumés de « Boko Haram » [Abuja ne fait pas la distinction entre les deux factions, ndlr], dans la forêt de Sambisa, avec des Alphajet et deux hélicoptères de combat Mi-35M.
S’agissant de la situation à Gudumbali, l’état-major nigérian a assuré, ce 9 septembre, que tout était rentré dans l’ordre, après l’envoi de troupes appartenant à une brigade de la 82e division et à un « bataillon de la force d’intervention. » Cependant, cette information n’a pas été confirmée de manière indépendante.
« Les membres de la communauté de Gudumbali et les autorités locales de Guzamala en général sont invités à rester calmes et résilients alors que les troupes de l’opération Lafiya Dole luttent inlassablement contre les terroristes. Ils leur est également demandé de maintenir un haut niveau de vigilance et de surveiller les visages étranges pour empêcher les terroristes de Boko Haram de s’infiltrer dans leurs communautés », a fait valoir l’armée nigériane, via un communiqué.
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas la première fois que la ville de Gudumbali tombe aux mains des jihadistes. Cela avait en effet été le cas en 2014… Il avait fallu deux ans à la Force multinationale mixte pour les en déloger.