Lors du soulèvement qui entraîna sa chute, le colonel Kadhafi avait enrôlé des combattants appartenant à des groupes rebelles soudanais et tchadiens. Depuis, ces derniers sont restés en Libye, plus précisément dans le sud. Et ils sont impliqués dans les combats qui opposent les deux gouvernement rivaux libyens, à savoir celui de Tripoli (GNA, reconnu par la communauté internationale) et celui de Baïda, soutenu par le maréchal Khalifa Haftar.
Ces combattants tchadiens sont répartis en plusieurs groupes, le plus important étant le « Front pour l’alternance et la concorde du Tchad » [FACT], créé en 2016 suite à une dissidence avec l’ex-Union des forces pour la démocratie et le développement [UFDD], qui fit parler d’elle en 2008 en lançant une offensive vers N’Djamena.
D’après un rapport d’experts des Nations unies, les combattants du FACT, surtout présents dans la localité de Sebhan [Fezzan], sont proches de la « Troisième force de Misrata », déployée dans le Sud Libyen. À ce titre, ils ont pris part aux combats contre la branche libyenne de l’État islamique à Syrte, ainsi que contre l’Armée nationale libyenne du maréchal Haftar à Juffrah.
Né d’une scission avec le FACT, le Conseil de commandement militaire pour le salut de la République [CCMSR] a fait son apparition en juillet 2016. Cette organisation, qui revendique « plusieurs milliers de combattants », a récemment été prise pour cible par l’aviation du maréchal Haftar.
En octobre 2017, trois de ses dirigeants, dont Mohamad Hassan Boulmaye, son secrétaire général, ont été arrêtés au Niger pour y être entrés illégalement, à bord de véhicules lourdement armés, et se livrer à des « activités illégales » dans la région d’Agadez, plaque tournante de trafics en tous genres. Depuis, on ignore ce qu’ils sont devenus.
Quoi qu’il en soit, selon le panel d’experts des Nations unies, rappelle un récent rapport du Sénat relatif à la situation libyenne, « l’intervention de toutes ces factions armées étrangères, qui pénètrent aussi les réseaux criminels de contrebande et de traite d’êtres humains, accroît la déstabilisation de la Libye. » Et désormais le Tchad…
En effet, le 11 août, jour du 58e anniversaire de l’indépendance du Tchad, le CCMSR a lancé une offensive en direction de la localité de Kouri Bourgri, dans le Tibesti, une région située dans l’extrême-nord du pays. Une source militaire tchadienne, sollicitée par l’AFP, a évoqué une « centaine de véhicules dont certains équipés de mitrailleuses 14,5 (*) et 12,7 mm ».
Dans une vidéo, le groupe rebelle a assuré avoir pris le contrôle de cette localité, connue pour des ressources aurifères, et « mis en déroute totale les forces de l’ennemi » [les troupes gouvernementales, ndlr]. D’après la même source militaire, un colonel, un officier du renseignement et un commissaire de police auraient été tués au cours de l’attaque.
De son côté, via un communiqué officiel, l’État-major des armées tchadien a affirmé que « l’ennemi » avait été « repoussé » et que le « poursuite continuait ». Sans plus de précision.
Cela étant, le seul bilan des combats disponible pour le moment a été donné par le porte-parole du CCMSR, Kingabé Ogouzeimi de Tapol. ֤Évidemment, il n’est pas possible de vérifier les chiffres qu’il a donnés, lesquels font état de 73 tués et de 45 prisonniers parmi les forces tchadiennes, ainsi que de la saisie de 47 véhicules tout terrain « équipés » et de la destruction de 53 autres.
(*) La 14,5 x 114 mm est une cartouche de mitrailleuse lourde produite par l’Union soviétique, puis par la Russie