Durant la période soviétique, l’Armée Rouge comptait dan ses rangs des « politrouk » (commissaires politiques) et des « zampolit » (les adjoints des premiers), lesquels dépendaient d’une « direction politico-militaire », chargée veiller à l’adhésion des soldats aux principes marxistes-léninistes.
N’ayant pas bonne presse (notamment parce qu’ils étaient considérés comme des « planqués » en plus d’être des « délateurs »), pas grand monde ne pleura leur disparition en 1991, au moment de l’implosion de l’URSS.
Cela étant, les politrouk et autres zampolit pourraient bien faire leur retour au sein des forces russes. En effet, le 30 juillet, le président Poutine a signé un décret rétablissant cette direction politico-militaire, un siècle, jour pour jour, après sa création par le pouvoir bolchevik. Toute coïncidence n’est évidemment pas fortuite…
La réactivation de cette direction ne manque pas de susciter quelques interrogations. « La question principale est la suivante : à l’époque soviétique, la direction fonctionnait dans l’intérêt du comité central du Parti communiste. Il n’est pas tout à fait clair quel travail militaro-politique cette direction ressuscitée va faire », a ainsi demandé Vladimir Scherbakov, le spécialiste militaire du quotidien Nezavisimaya Gazeta, cité par l’agence Reuters.
D’autres se demandent si cette mesure ne vise pas plutôt à éviter l’influence occidentale auprès des soldats russes tout en mesurant leur degré de « patriotisme ». Des considérations liées à l’espionnage peuvent être avancées.
Ainsi, par exemple, le FSB, le renseignement intérieur russe, a récemment perquisitionné les bureaux de l’Institut central de recherche scientifique sur les constructions mécaniques [TsNIImach], dans le cadre d’une enquête de « haute trahison » concernant des employés soupçonnés de « coopération avec les services secrets occidentaux. »
En outre, le patron de cette direction sera le général Andrei Kartapolov, qui a dirigé les opérations russes en Syrie. Signe de l’importance accordée à cette structure qui vient de renaître de ses cendres, l’officier a été promu « vice-ministre de la Défense » et aura aussi à s’occuper du Mouvement national des jeunes cadets de l’Armée [Yunarmiya], une organisation de jeunesse « militaire patriotique », patronnée par le ministère russe de la Défense.
« Tout cela n’est pas sans rappeler un retour progressif en URSS », a résumé Dmitry Drize, rédacteur en chef adjoint du quotidien Kommersant.