des contrats obtenus auprès du gouvernement américain, le concept de lanceurs réutilisables développé par l’entreprise SpaceX risque fort de mettre en péril la filière spatiales américaine, dans la mesure où il sera compliqué de tenir la distance en matière du coût des lancements de satellites. Tel est l’enjeu résumé par Éric Trappier, le Pdg de Dassault Aviation, quand il a brièvement pris sa casquette de président du GIFAS [Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales], lors de sa dernière audition par les députés de la commission de la Défense nationale.
Généralement, Dassault Aviation est connu pour développer et fabriquer des avions de combat (Rafale) et d’affaires (gamme Falcon). Or, ses activités dans le domaine spatial sont plus confidentielles.
Pourtant, l’avionneur a quelques compétences en la matière. Dans les années 1980, le CNES lui avait confié le soin de mener des études préliminaires pour le projet STAR-H, qui consistait à développer un système spatial à décollage et à atterrissage horizontal.
Depuis, Dassault Aviation a développé kits pyrotechniques pour les lanceurs européens Ariane et Vega ainsi que pour l’une des versions de la fusée américaine Atlas V. Il a également fourni une « cisaille 7CCD15 » pour sécuriser le système de séparation entre la sonde Rosetta et l’atterrisseur Philae, pour permettre à ce dernier de se poser sur la comète « Chury ». En outre, il développe aussi du matériel pyrotechnique pouvant être utilisé pour les satellite.
Par ailleurs, Dassault Aviation a été impliqué la conception de la forme et l’aéro/thermodynamique du démonstrateur IXV [Intermediate eXperimental Vehicle], conduit par Thales Alenia Space Italie pour le compte de l’Agence spatiale européenne [ESA]. Le 11 février 2015, placé sur une trajectoire suborbitale par une fusée Vega lancée depuis la base de Kourou, après avoir atteint l’altitude de 420 km, cet engin spatial a entamé une rentrée atmosphérique contrôlée par des gouvernes aérodynamiques.
Mais d’après M. Trappier, le domaine des mini-lanceurs intéresse plus particulièrement Dassault Aviation. « On a une certaine capacité à le faire », a-t-il dit. L’on sait que le constructeur a déjà développé le MLA (Mini-Lanceur aéroporté), destiné à équiper un Rafale.
« Deux versions, utilisant un Rafale opérationnel comme avion porteur, ont été étudiées », précise l’industriel. La première, dite « monocorps linéaire », et constituée d’un étage propergol solide et d’un étage à ergols liquides, permettrait de placer une charge de 75 kg en orbite basse. La seconde, appelée « tricorps » aurait une capacité plus importante puisqu’elle serait en mesure de mettre en orbite héliosynchrone (à 800 km d’altitude) des microsatellites de 150 kg.
Mais le Rafale ne serait pas le seul à mettre en oeuvre ce MLA. Lors de son audition, M. Trappier a en effet indiqué qu’un avion Falcon pourrait également en être équipé. Pour rappel, aux États-Unis, il est aussi question d’utiliser une telle technologie, dans le cadre du programme ALASA (Airborne Launch Assist Space Access).
« On s’intéresse aussi au suborbital », a encore confié le Pdg de Dassault Aviation. Là, l’idée est de « lancer un petit engin suborbital, à partir, par exemple, d’un Airbus, qui lui-même peut ensuite lancer des micro-satellites, ou mieux, récupérer un certain nombre d’objets dans l’espace », a-t-il expliqué. Un tel projet permettrait de « faire le ménage » en orbite, voire d’avoir un intérêt opérationnel et militaire. « À mon avis, c’est un point fondamental de la préparation du futur dans le domaine spatial », a-t-il estimé.
Les projets liés au « suborbital » évoqués par M. Trappier font déjà l’objet d’études chez Dassault Aviation. En effet, l’industriel planche sur un système de transport spatial réutilisable pour lancer des satellites en orbite basse, appelé VEHRA (VéHicule Hypersonique RéUtilisable AéRoporté).
« Il se compose d’un véhicule hypersonique aéroporté et d’un avion gros porteur subsonique. Le recours à la technique du lancement aéroporté offre un gain de performance et permet de s’affranchir des contraintes les plus lourdes liées aux infrastructures de lancement », explique Dassault Aviation, sur son site Internet.
Trois versions du véhicules VEHRA sont envisagées : « Light » (10 tonnes), « Medium » (30 tonnes, pour placer des satellites de 250 kg en orbite basse) et « Heavy » (200 tonnes, pour mettre une charge utile de 7 tonnes sur une orbite basse). « Une version habitée est aussi proposée pour transporter six personnes jusqu’à 100 km d’altitude », précise-t-il.
Pour le moment, ces « VéHicules Hypersoniques RéUtilisables AéRoportés » n’existent que sur le papier, alors qu’ils devaient servir à développer de mini-navettes pour le compte de la société Swiss Space System Holding SA (S3) qui, en 2013, avait conclu un partenariat avec Dassault Aviation pour justement proposer des lancements suborbitaux avec de tels engins.
« Swiss Space Systems bénéficiera du savoir-faire de notre société dans le domaine de la conception de véhicules aérospatiaux et de l’intégration de systèmes complexes », avait expliqué, à l’époque, l’industriel français.
Seulement, la société suisse, confrontée à des problèmes de trésorerie, a été placée en liquidation en janvier 2017. Quant à son ex-Pdg, Pascal Jaussi, il est doit maintenant faire face à des poursuites judiciaires.
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