LEAU Ernest Georges
Ernest Georges LEAU naît en 1890 à Paris,
d'un père facteur d'orgues.
Dès son plus jeune âge, il est passionné de mécanique et,
bien que totalement autodidacte, il commence à construire des avions dans l'atelier
paternel, tout en exerçant une activité d'employé de commerce.
Lorsque la guerre de 1914 est déclarée, il demande à servir dans l'aviation.
Comme l'armée de l'air n'existe pas encore,
et que l'aviation de guerre en est à ses premiers balbutiements,
il faut tout inventer: d'abord créer des bases aériennes et des pistes de décollage et
d'atterrissage. Ernest LEAU est affecté à l'escadrille C 66.
Dépourvu de diplômes, il devient "casseur de cailloux" dans le fond d’une carrière du
plateau de Malzéville, au nord de l'agglomération nancéenne,
où il est chargé d'extraire des matériaux de remblaiement,
puis se voit confier la conduite d'un cylindre à vapeur.
Cet engin lourd de compactage ne volant évidemment pas très haut, Ernest doit ronger
son frein.
Compacteur à vapeur modèle 1906
Sa promotion s'accélérant, il devient armurier, puis caporal-mitrailleur,
le tout en deux mois à peine.
Ce qui lui permet d'accomplir un certain nombre de missions de guerre
en tant que mitrailleur embarqué, avec pour coéquipier le capitaine-pilote DE KERILLIS.
Ayant demandé à devenir lui-même pilote, et sa demande ayant été aussitôt agréée par
son capitaine, Ernest Léaud fait son apprentissage sur de vieux zincs réformés,
des Caudron G3 et G4 bi-moteurs bons pour la casse.
C'est lors de cet apprentissage de pilote, alors qu'il n'a pas encore obtenu son brevet,
qu'il va se signaler par un coup d'éclat, unique dans les annales de l'aviation de guerre.
Au cours d'un petit vol d'entraînement non autorisé,
il décide seul, à l'insu de ses supérieurs, de faire une escapade
en allant survoler les lignes ennemies.
Parvenu à l'altitude de 1.500 mètres,
alors qu'il n'est pas habilité à monter à plus de 200 mètres,
il rencontre, au dessus d'Essey,
un avion allemand croisant au dessus des lignes afin de guider les tirs de l'artillerie,
contre les positions de l'infanterie française.
Caudron bi-moteur G4
Ernest LEAUD se dirige dans sa direction tout en prenant de l'altitude,
et en restant le dos au soleil pour passer inaperçu de l'ennemi.
Arrivé au dessus de la forêt de Champnoux, il passe à l'attaque.
Le combat met en présence un avion de bombardement français Caudron G4 monoplace
piloté par un élève armé d'une mitrailleuse Colt ayant la fâcheuse particularité
de s'enrayer très souvent,
et un avion de chasse-reconnaissance biplace allemand dernier modèle,
équipé de deux mitrailleuses disposant de 1.000 cartouches chacune,
l'une, fixe actionnée par le pilote, et la seconde sur tourelle, servie par l'observateur.
Au terme de plusieurs passes ponctuées de rafales de mitrailleuses,
et bien que le combat soit tout à fait à son désavantage, Ernest LEAU finit par descendre
en flammes l'appareil ennemi qui s'abat dans les lignes.
Après son retour à la base,
Ernest LEAU se vit brandir les foudres du Conseil de guerre pour son acte de
désobéissance, mais compte tenu de son exploit qui fit la fierté de ses chefs
et l'admiration un peu jalouse de ses pairs,
il se vit comptabiliser cette victoire aérienne comme première épreuve réussie
valant pour l'obtention de son brevet de pilote en escadrille.
Il et ne fut pas traduit devant le Conseil de guerre,
et ne reçut aucune punition.. Il était difficile de faire moins...
Ernest LEAU reçut ainsi son brevet de pilote le 25 août 1916, sous le numéro 4345.
Il put ainsi poursuivre ses missions de pilote d'aviation, et voler vers de nouvelles
victoires. Après la fin des hostilités, il reprit la manufacture d'orgues laissée par son père
décédé en 1917, et devint par ailleurs l'un des tout premiers pilotes d'essais. Son brevet
porte le numéro 6.
Georges Léaud, lors d'un meeting aérien
Ernest LEAU est décédé à Paris le 19 octobre 1970 dans sa 81e année,
et ses obsèques furent célébrées en l'église Notre-Dame d'Auteuil.
Ses deux autres frères, Henri l’aîné adjudant-pilote, et Robert son mécanicien,
sont tous deux décédés à bord des CAUDRON G4, et n'ont pas eu de descendance.
Plein d'une extraordinaire volonté et d'une détermination farouche,
qu'il cachait sous une apparence d'homme discret et charmant,
ce combattant qui fut fait chevalier de la légion d'honneur,
était titulaire de nombreuses décorations,
notamment la médaille militaire,
la croix de guerre
et la médaille de l'aéronautique.