PUY MONTBRUN - UN HOMME DE COMMANDO(source HISTORIA - 1979)
Ce languedocien long et maigre à la sensibilité d’écorché, sombre, fier et solitaire comme le chevalier de Dürer, toujours en quête de perfection, c’est l’homme des commandos, de la contre guérilla et des missions spéciales. Plongeur, alpiniste, Déodat du PUY-MONTBRUN a manié toutes les armes y compris l’explosif, l’arme blanche, le déguisement et quelques petites merveilles conçues dans les laboratoires du contre espionnage.
Parachuté en FranceParticipant avec les SAS britanniques à une opération parachutée en jungle Malaise, en Novembre 1952, contre les guérillos communiste, il a reçu plus tard du colonel Sloane commandant le 2ème SAS, une lettre où l’on peut lire :
«
Vous nous avez grandement impressionnés. Nous vous considérons comme un soldat hors du commun (outstanding soldier) »
Il avait fait l’admiration des Anglais au cours d’une poursuite de 15 jours en pleine jungle (les parachutistes atterrissaient sur des arbres atteignant une hauteur de 60 mètres et plus. De ces cimes, les hommes se laissaient glisser au sol par une corde de « rappel »).
C’est qu’il avait déjà derrière lui une longue expérience.
En 1940 à 20 ans, il a connu le rude choc des panzers Allemand, et des bombardements des
stukas. Blessé le 24 Juin dans un combat pour l’honneur, il s’évade du lazaret Allemand où il est soigné. Repris il saute du camion qui le transporte vers l’Allemagne. Il est recueilli mourant par des fermiers. Dès qu’il le peut, il passe en zone libre. Volontaire pour la Syrie, il y est pris en mains par l’intelligence service et accepte de « travailler » en France pour son compte. Au moment de l’occupation de la zone libre, il prend contact avec le réseau C.N.D. de Rémy.
Passé aux Forces Françaises Combattantes, il porte le n° FFL 12881. Il est du groupe qui forme le FFC Andalousie, crée par François Bistos, où il assure en particulier les missions de protection et de sécurité. En situation trop dangereuse son « patron » l’envoie en Angleterre. Breveté parachutiste à Ringway, il reçoit l’instruction des SAS et des « Jedbjurghs ». parachuté, il accompli encore en France et hors de France, des missions de l’ombre jusqu'à l’armistice. Elles lui valent, à 25 ans la légion d’honneur.
Toujours se dépasserEn 1945, il entre au service action du contre-espionnage Français, participe à la création de centre de Cercottes, puis étant au 11ème choc se porte volontaire pour l’Indochine où il restera presque sans interruption de 1950 à 1955. Officier aux Troupes Aéroportées, le général de Lattre le prend comme aide de camp ce qui ne l’empêche pas de participer à plusieurs opérations et de monter des « coups » très particuliers.
«
puy-Montbrun, écrit Lucien Bodar dans l’Aventure, ne consent à demeurer à la cour « du roi jean » qu’a condition d’avoir de temps en temps une « permission » Alors, il monte sur une chaloupe d’une étrange armada, une flottille en embuscade sur les houles de la mer de Chine, là ou elles déferlent contre la côte de l’Annam rouge.
Soudain, quand il a un « tuyau » à exploiter, c’est le débarquement nocturne, le raid sanglant à travers les ténèbres. Leur marche d’approche, c’est celle du silence, celles d’ombres. Si tout va bien, il leur faut tuer et détruire en quelques minutes, avec une précision absolue. Et si le boulot a été fait sans accroc, il leur reste à s’enfuir au galop vers leurs canots. C’est cette fuite qui est la plus périlleuse. Souvent, il faut combattre pour « décrocher » Il y a des blessés, des tués à emporter. Chaque fois le réembarquement est un « miracle ».
GCMA débarquant en janvier 1953 sur une plage au sud de Qui-Non, sur la côte d'Annam, en pleine zone ennemie où des "sonnettes" débarqué de nuit ont préalablement éffacé les guetteurs.
Ce type d’opérations, il en est l’initiateur au sein du Groupe de Commandos Mixtes Aéroportés commandé au départ par le colonel Gral. Le GCMA a été institué à la fin de 1950 sur les directives du colonel Belleux, chef des services spéciaux (SDECE) à Saigon et du colonel Fille-Lambie, alias Morlane, qui dirige à Paris le service action de SDECE. Sa mission générale : créer l’insécurité en zone vietminh, s’infiltrer dans la jungle où ne s’aventure plus les bataillons, débarquer clandestinement sur les côtes, préparer par le renseignement et l’action les grandes opérations combinées, enfin implanter des maquis.
Puy-Montbrun est une des figures de proue du GCMA, formé de paras d’élite, sachant tout faire, capable de résister à la solitude, à l’horreur, à l’angoisse de la traîtrise, à la fatigue, à la maladie, à la peur dont nul n’est à l’abri. Durant trente trois mois, avec son groupe action, le capitaine du Puy-Montbrun multiplie les actions de contre-guérilla et de commando. Débarquement en zone rebelle (plus de 20 fois entre Juillet et décembre 1952), implantation d’agents, sabotages, destruction de jonques, recherche de prisonniers
Lucien Bodard l’a dépeint avec Gral et Claude Barrès comme « le représentant d’une nouvelle race d’hommes de sang, de curieux saints » Il l’ a vu « Méridional austère, puritain et même tout proche du mysticisme. S’il tue, et même le plus possible, c’est par « moralisme » Il se bourre la tête de tout un pathos philosophique qui sera celui des paras « défenseurs de l’Occident » Son ascétisme se retrouvera en eux, car ils ont toujours un côté moine, même mêlé à d’autre penchants bien différents.
Mais lui, Puy-Montbrun est en entier dans sa métaphysique, elle le ronge. Derrière sa force marquée par des traits réguliers, une noble stature et une voix grave, c’est toujours l’inquiétude : où est le devoir le plus grandiose, le sacrifice le plus parfait, le renoncement le plus total ? Chaque fois il lui faut trouver la solution digne du soldat, du héros, du chrétien un peu archange. Certes pour lui le sang versé ne compte pas. Celui des autres comme le sien. Il est en proie à un idéal qui l’oblige à constamment se surmonter, à s’engager dans des épreuves toujours plus audacieuses, qui ne peuvent finir qu’avec la mort. Mais il vit, il survit toujours…. »De 1951 à 1953, six citations (dont une vietnamienne) et la rosette de la légion d’honneur (« officier prestigieux d’un courage et d’une audace légendaire… ») lui rendent hommage.
Après trente trois mois de séjour, Puy-Montbrun rejoint la France, passe le brevet de moniteur parachutiste, retrouve le service Action de Cercottes. Mais un nouvel engin fait son apparition : l’hélicoptère. Il est pressenti pour former une unité de commando opérant à partir de ces engins. Il repart pour l’Indochine au printemps 1954.
Un pionnier des « hélicos » opérationnelsDans la nuit du 19 au 20 juin 1954 avec un commando vêtu de quequan noir à la mode vietminh, il effectue un saut opérationnel au milieu d’un orage tropical, avec le sergent chef Taxi, plus tard tué en Algérie. Une partie du commando est récupérée en hélicoptère par le commandant Crespin, le « père » de l’hélicoptère opérationnel. Une nouvelle forme d’action est ouverte. Elle sera mise au point en Algérie.
Puy-Montbrun reste en Algérie, sans interruption de 1955 à 1961. Au cours de ces six années, il n’oubliera pas ses anciennes attaches avec le service Action du SDECE et participera, à l’occasion, en dehors du service, à la lutte contre les trafiquants d’armes qui alimentent les rebelles.
Nommé chef d’escadron en 1956, il est chef des formations d’hélicoptères opérationnels (FHO) du groupe d’hélicoptère n°2 alors sous les ordres du lieutenant colonel Crespin. Au GH2 dont il deviendra plus tard le chef de corps, on effectue les premiers vols de nuit. Pour la première fois, on arme les hélicoptères. Avec ses pilotes, Puy-Montbrun découvre tout les jours le moyen de poser les appareils sur de « dropping zones » réputée impossible.
Les équipages sont presque tous des parachutistes. Transports opérationnels, évacuations sanitaires de jour, de nuit et par tout temps deviennent pour eux des missions sacrées. Seul un commando peut savoir ce que représente un l’arrivée d’un hélico pour une patrouille clouée au sol.
Inlassable, il accompli 3 000 heures de vols opérationnels et 45 E.V.S. de nuit. Le record. Chef de corps et pilote, il crée des commandos pour la propre protection de son unité. Le 29 Avril 1958, ayant largué son commando au plus près d’une importante résistance rebelle, il se fait lui-même déposer à terre pour redresser le dispositif dans une voie dangereuse. Il est gravement blessé au cours de l’action.
Il est fait commandeur de la légion d’honneur le 26 Septembre 1958, à 38 ans. La citation qui accompagne cette promotion le qualifie de « chevalier sans peur et sans reproches ». Il est encore quatre fois cité après cette distinction. Ce qui est rare.
Mis à la retraite d’officeIl est titulaire de 19 citations avec les croix de guerre 39-45 et TOE, de la valeur militaire et la croix de la vaillance vietnamienne. Il a reçu la médaille de l’aéronautique, la médaille des évadés, la rosette de la résistance, la médaille d’or du Service de Santé, la fourragère TOE à titre individuel, la King’medal, la Malayan medal. Blessé trois fois, il totalise 26 titres de guerre. Il est l’un des officiers les plus titré de sa génération.
En 1961-1962, commandant en second de la base école des Troupes Aéroportées, il est noté par son chef, le colonel Brothier, l’ancien patron de la Légion, un expert, qui le considère comme « l’un des plus brillants officiers supérieurs qu’il me fût donné d’avoir sous mes ordres » Et pourtant…cet officier classé « Elite » pratiquement partout est soudainement invité à demander sa mise à la retraite. Il refuse. Il est alors placé à la retraite d’office sans explication.
Puy-montbrun n’a pas appartenu à l’OAS. Mais à trois reprise, en grand uniforme, décorations pendantes, il est allé au tribunal témoigner en faveur d’anciens subordonnés ou des camarades, de l’adjudant Robin en particulier. Celui-ci défendu par Me Tixier-Vignacour risquait sa tête. A l’issue des déclarations de Puy-Montbrun, le fameux avocat s’est levé pour dire en substance : « Après un tel témoignage, ma plaidoirie devient inutile. »
Faut il voir là la cause de cette éviction prématurée d’une armée qu’il avait servie avec passion et même fanatisme ?---------------------------
Blibliographie de Déodat de Puy-Montbrun
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