La Prison militaire de la Citadelle de Hanoi et l'attaque Japonaise A 20 heures précises le 09 Mars 1945, les Japonais lancent l'attaquent de la Citadelle.A un contre dix, ne disposant que de neuf canons de 75 et d'une pièce de 25, d'une cinquantaine d'armes automatiques et de quelques autos-mitrailleuses, les troupes européennes et indigènes de l'intérieur de la Citadelle opposeront pendant pendant près de vingt heures, sans discontinuité, une résistance farouche à l'agresseur ; se défendant bâtiment par bâtiment, étage par étage.
Les canons tireront 1 700 obus sur des cibles situées à moins de 200 mètres. Sur un effectif initial d'un millier d'hommes environ (dont 30 officiers et 420 soldats « français »), les pertes seront de 200 tués et 260 blessés, soit près de la moitié des effectifs.
Les troupes japonaises, pourtant démunies de sensibilité, présenteront leurs armes et rendront les honneurs militaires aux survivants, reconnaissant ainsi leur courageuse attitude.
Le chiffre exact des pertes japonaises n'est pas connu, mais est généralement estimé entre 1 500 et 2 000 hommes, dont plusieurs centaines de tués (certains annoncent le nombre de 400), sur un total de 5 000 à 6 000 assaillants.
A la Prison Militaire, sur ordre de l'adjudant-chef MAILLOT, les détenus européens désignés à l'avance pour participer à la défense de la Citadelle sont armés et conduits par leurs surveillants jusqu'aux postes de combat : trois détenus européens, sous les ordres du caporal-chef BRISSET, vont renforcer le blockhaus 19 situé à l'angle Nord-Est de la Prison Militaire (celui-ci a pour mission de battre avec son arme automatique les faces Nord et Nord-Est du chemin de ronde) ; les autres détenus, sous le commandement des sergents Julien CARO et Yves LINDER, prennent position aux faces Est et Sud de l'enceinte de la Prison Militaire.
Outre le Capitaine Georges FENAUTRIGUES, douze soldats du DML sont morts lors de la défense de la Citadelle, parmi lesquels l'adjudant Gaston LACROIX, le sergent Karl FRANK, le caporal-chef Wladislaw OLZENSKI, qui sera été tué alors qu'il combattait à pied après que son auto - mitrailleuse ait été mise hors service, le caporal Franz HERLET, les légionnaires Joseph JONDA et Maurice ROBIN
L'adjudant ROMAN signalera dans son rapport les plus braves parmi ses hommes : sergents WALTER, KOHLZ et KLUG, caporaux WELTER, MOLITOR, LE VAN QUANG et les légionnaires FORSTER, BERINGER, TARABURA, YBANEZ et ALDER.
Rapport de l'Adjudant-Chef MAILLOT sur les événements du 9 Mars 1945 L'alerte est donnée vers 20 heures au 9ème RIC.
Au même moment, des coups de feu sont entendus du coté de la Direction de l'Air, dont les bâtiments sont occupés presque aussitôt par les troupes japonaises.
Dispositions prises :Dès le signal d'alerte, les hommes au Poste de garde de la Prison Militaire prennent position à la face Sud de la Prison ; les surveillants s'occupent d'ouvrir les cellules des détenus européens désignés à l'avance pour participer, éventuellement, à la défense de la Citadelle, tandis que les armes sont distribuées par mes soins.
Ces détenus, sous les ordres des surveillants, rejoignent leur poste de combat :
Trois détenus européens, sous les ordres du caporal-chef BRISSET, vont renforcer le blockhaus 19 situé à l'angle Nord-Est de la Prison Militaire.
Celui-ci avait pour mission de battre avec son arme automatique les faces Nord et Nord-Est du chemin de ronde.
Les autres détenus, sous le commandement des sergents CARO et LINDER, prennent position aux faces Est et Sud de l'enceinte de la Prison Militaire.
Vers 20 heures 15, un tirailleur du poste de garde, à la porte d'entrée de la Prison, est blessé par balle dans la région du cou, et est évacué sur l'infirmerie de garnison du 9ème RIC.
Quelques minutes après, l'adjudant-chef LE DREN et l'une de ses fillettes sont grièvement blessés en face de l'entrée de la Prison Militaire en essayant de rejoindre le 4ème RAC.
Ils sont transportés par mes soins dans le bureau de l'Agent Principal, puis évacués sur l'infirmerie de garnison du 9ème RIC, sous la conduite du détenu DIAZ.
Vers 3 heures du matin, les détenus indochinois et le restant des détenus européens sont ouverts et rassemblés près du garage au 4ème RAC.
Vers 5 heures du matin, l'arme automatique du blockhaus 19 est enrayée ; je donne l'ordre au personnel de se replier au 4ème RAC.
Au lever du jour, le secteur du côté de la Direction de l'Air étant calme, tous les Européens armés sont employés à la défense de la citadelle, et, par suite, se trouvent dispersés vers les points les plus menacés, échappant ainsi, en partie, à mon contrôle.
Les détenus non armés participent aux diverses corvées (ravitaillement en munitions, transport de chevaux de frise, etc.).
Les Indochinois ne prennent pas part au combat et sont rassemblés dans les tranchées dans la cour du 4ème RAC.
Ils sont perdus de vue après la reddition.Le 10, vers 10 heures, en face de l'horloge du quartier Lizé, le caporal-chef DECLOS, surveillant, est blessé à la main.
Après avoir été pansé à l'infirmerie du 4ème RAC, il retourne à son poste de combat.
A la même heure, le légionnaire BILLOT est touché à la poitrine et évacué à l'infirmerie du 4ème RAC.
Vers 14 heures, le caporal-chef BRISSET, combattant aux environs du GAT est mortellement blessé à la poitrine et transporté à l'infirmerie du 9ème RIC.
Durant le combat, les légionnaires SZOKOLL, VAN RATTINGHE et MAERTENS, ainsi que les soldats GUILLAUME et GUIRAL sont blessés et évacués sur l'infirmerie du 9ème RIC.
Le caporal STEMPF du 10ème RMIC, combattant aux environs au bâtiment de la CP du 9ème RIC, est tué vers 10 heures. Les légionnaires HENNE et LAMM, combattant aux environs du GAT, sont également tués.
Au moment de la reddition, au coin du bâtiment de la coopérative du 9ème RIC, le légionnaire LOEB reçoit plusieurs coups de baïonnette et est évacué sur l'infirmerie au 9ème RIC.
La conduite des détenus, pendant le combat, a été satisfaisante dans l'ensemble, à l'exception de quelques-uns uns, entre autres PIN et HOAREAU qui ont abandonné le combat et sont retournés à la PM.
Ils sont soupçonnés d'avoir pillé dans le logement des surveillants et de l'Agent Principal, en compagnie de quelques détenus indochinois retournés également à la PM.
Le caporal DALAIS m'a certifié que le légionnaire PIN, Mle 74.550 et le soldat HOAREAU, Mle 2.540, sont retournés à la Prison Militaire après avoir rejoint le 4ème RAC et n'ont pas participé au combat.
Pour ceux-là, Je demande qu'une information soit ouverte en vue de leur traduction devant un tribunal militaire pour :
« Abandon de poste devant l'ennemi ».D'autre part, il m'a été signalé que les légionnaires : JOEL, KESSLER, LENTZEN, NEUHAUS, GROSSE et SCHMEER détenaient des sommes importantes quelques jours après les événements, alors qu'ils étaient partis de la PM, sans un sou en poche.
Par la suite, ces mêmes militaires ont pratiqué un vrai commerce d'effets, d'objets et d'ustensiles divers.
Par contre, les surveillants et plusieurs détenus se sont particulièrement distingués au cours du combat et méritent une récompense. Ce sont :Surveillants : CARO Julien Sergent 9ème RIC
LINDER Yves Sergent 9ème RIC
Mle 14.298 DECLOS Gabriel Caporal-Chef 9ème RIC Blessé
Mle 3.520 BRISSET Caporal-Chef 9ème RIC Tué
Détenus : LE LOUS Lieutenant Intendance
Mle 1.333 DIAZ Bernardo 2ème classe 19ème RMIC
Mle 5.552 BENSOUSSAN 2ème classe 19ème RMIC
Mle 14.264 GUIRAL Kléber 2ème classe 1er RTT Blessé
Mle 5.417 MORATI Antoine 2ème classe 1er RTT
Mle 14.156 BENZ Adolphe Sergent 10ème RMIC
STEMPF Caporal 10ème RMIC Tué
Mle 2.390 DEBES 2ème classe 9ème RIC
Mle 5.471 LAVENTURE Georges 2ème classe 9ème RIC
Mle 14.270 GUILLAUME Marius 2ème classe 9ème RIC Blessé
Mle 60.972 SCHINGEN Jean Sergent-Chef 5ème REI
Mle 67.357 BILLOT Louis 2ème classe 5ème REI Blessé
Mle 84.734 SZOKOLL Jean 2ème classe 5ème REI Blessé
Mle 7.518 LOEB Hans 2ème classe 5ème REI Blessé
MAERTENS 2ème classe 5ème REI Blessé
LAMM [Erwin] 2ème classe 5ème REI Tué
HENNE 2ème classe 5ème REI Tué
VAN RATTINGHE 2ème classe 5ème REI Blessé
Mle 63.603 KOCH Jean 2ème classe 5ème REI
Mle 6.774 ALBIN Caporal 5ème REI
Mle 80.196 WEIKERT Herbert 2ème classe 5ème REI
On notera que l'adjudant-chef MAILLOT ne fait pas mention du sergent-chef ACKERMANN du 5ème REI qui est parfois cité, cf. notamment l'ouvrage « 5ème Étranger. Historique du régiment du Tonkin. Tome 1 : Indochine 1883-1946 », comme ayant mis à la disposition de l'adjudant ROMAN les légionnaires dont il avait la garde à la prison militaire...
La bravoure de l'Adjudant ROMAN du Détachement Motorisé de la Légion (5ème REI), qui a été blessé quatre fois lors des combats dans la Citadelle, lui vaut d'être fait Chevalier de la Légion d'Honneur.