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milguerres
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Sujet: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:52
11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax, un événement emblématique SOURCE AERI
Le défilé de près de 130 maquisards le 11 novembre 1943 à Oyonnax est sans doute l'événement le plus emblématique de la Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura.
Lorsque l'Etat-major régional demande aux résistants de passer outre l'interdiction de Vichy et de l'occupant de commémorer la défaite allemande le 11 novembre 1918, le capitaine Romans-Petit, chef des maquis et de l'Armée secrète de l'Ain est à l'origine d'une action destinée à changer l'image des maquisards. Il s'agit de montrer qu'ils ne sont pas des "métèques", des "hors-la-loi", des "terroristes" comme les présente la propagande vichyste, mais des soldats encadrés, disciplinés et désireux de se battre pour libérer leur pays. Conjointement, d'autres manifestations du même type dans de nombreuses autres communes sont annoncées pour dérouter les autorités.
Ce coup médiatisé par la presse clandestine a un retentissement spectaculaire, et en février 1944, il est connu à Londres et à Alger. Il contribue à donner aux Alliés une image positive de la Résistance et conforte leur intention d'armer les maquis.
Auteur : Claude Morel Source : DVD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura, Département AERI de la Fondation de la Résistance, novembre 2013.
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:52
L’instigateur : le colonel Romans-Petit
Au printemps 1943, le colonel Romans-Petit prend le commandement des maquis de l’Ain. Au début de l'automne 1943, André Fornier, chef départemental de l’Armée secrète (AS), est arrêté par la Gestapo. Libéré faute de preuves deux mois plus tard, il se sait grillé et cède le commandement de l'AS de l'Ain à "Romans". C'est désormais une force importante, bien structurée que celui-ci commande.
Alors que le Gouvernement de Vichy interdit les commémorations du 11 novembre 1943, le comité directeur régional des MUR, sur recommandation du CNR, invite les responsables de la résistance locale à déposer une gerbe devant chaque monument aux morts. Romans-Petit saisit cette opportunité pour transformer ce simple dépôt de gerbe à la sauvette en une véritable manifestation publique. Il permettra de montrer à la population que les maquisards ne sont pas des "hors-la-loi", des "terroristes" comme les présente la propagande vichyste, mais des soldats encadrés, disciplinés et désireux de se battre pour libérer leur pays. L'idée sous-tendue de la démonstration de force et de discipline est de "frapper un grand coup".
Henri Romans-Petit porte son choix sur la ville d’Oyonnax. Outre le fait qu’Henri Girousse, dit "Chabot", chef du groupement Sud des maquis de l’Ain, et Elie Deschamps, dit "Ravignan", l'un des responsables locaux de l’AS, sont de cette commune, c’est une ville où l’esprit de collaboration est presque absent, où la population ouvrière s'inscrit dans une tradition républicaine de gauche, ce à quoi s’ajoute un maillage résistant important sur la ville et les communes environnantes, soutenu par de nombreux sympathisants. De plus, ni la Milice, ni les Allemands ne sont présents en ville et, détail qui a son importance, le commissaire de police de la ville, Thévenon, est membre de la Résistance.
Henri Romans-Petit, dont il ne faut pas oublier qu'il a été publiciste avant 1939, écrit lui-même comment lui est venue l'idée du "coup" du défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax dans son livre Les Obstinés :
"Notre force est réelle. Pouvoir la montrer au grand public... tel est le rêve qui me poursuit. Si tous ceux qui nous côtoient haussent les épaules quand on leur parle des méfaits des terroristes, j'ai la conviction que cette propagande éloigne de nous des jeunes et peut-être aussi des cadres... Je suis dans cette disposition d'esprit quand, à l'une de nos fréquentes réunions d'officiers, l'un d'eux me pose cette simple question : "Que faisons-nous pour le 11 novembre ?"... Je suggère de défiler dans une ville. Contre toute attente, l'accueil est vibrant. Nous décidons de rechercher le lieu où les réactions des habitants sont les plus chaleureuses et où les Allemands seront en petit nombre. "Chabot" et "Montréal" [NDLR : Noël Perrotot] sont chargés de faire des propositions. Quelques jours plus tard, je choisis Oyonnax...".
Auteur : Département AERI Source :
Claude Morel, in DVD-ROM La Résistance dans l’Ain et le Haut-Jura, Département AERI de la Fondation de la Résistance, novembre 2013. Patrick Veyret, Histoire secrète des Maquis de l’Ain, acteurs et enjeux, La Taillanderie, 2010. Henri Romans-Petit, Les obstinés, éditions Janicot, 1945. François Marcot, article « 11 novembre 1943 » in F. Marcot (dir.), Dictionnaire historique de la Résistance, Laffont, 2006. http://www.museedelaresistanceenligne.org
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La Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura (2013) Edité par la Fondation de la Résistance – département AERI, ce projet a été piloté par madame Claude Morel pour l’Association Résistance Ain/Haut-Jura. Il comprend plus de 2 000 fiches, un fonds exceptionnel de près de 4 000 documents (archives, tracts, affiches, journaux clandestins), 36 cartes dont 12 interactives, 70 vidéos, un recensement de plus de 2 400 résistants..
PRIX : 20 euros + frais de port à commander ici / http://www.museedelaresistanceenligne.org/pageDoc/pageDoc.php?id_expo=78&id_theme=&id_stheme=&id_sstheme=752
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:53
Carte de la région d'Oyonnax
La ville d'Oyonnax est située à 39 kilomètres de Saint-Claude (Jura) et à 91 kilomètres de Genève. C'est la seconde commune la plus peuplée du département de l'Ain, qui ne compte pas de très grandes villes. La ville est située dans le massif du Jura, à la porte du parc naturel régional du Haut-Jura.
Département AERI.
Ville de moins de 10 000 habitants en 1940, Oyonnax est néanmoins une des villes industrielles les plus dynamiques de l'Ain. De multiples artisans et petites entreprises y travaillent avec succès dans la tournerie et surtout la plasturgie.
Oyonnax est l'une des villes emblématiques de la Résistance dans l'Ain. Ville médaillée de la Résistance, elle s'est très vite mobilisée contre le régime de Vichy. Son maire, René Nicod, est l'un des quatre-vingt parlementaires à avoir refusé de voter les pleins pouvoirs au Maréchal.
Son AS (Armée secrète), code C6 (ou Cristal6), est l'une des plus efficaces du département avec à sa tête Gabriel Jeanjacquot et Raymond Boudet.
C'est à Oyonnax, que le chef des Maquis de l'Ain, le capitaine Romans-Petit, décide de faire une action spectaculaire afin de donner au Maquis une image à l'opposé de celle donnée par la propagande vichyste. Cette action est un défilé d'environ 130 hommes (sans compter les maquisards en protection), le 11 novembre 1943 en pleine ville ; un défilé impeccable, avec des représentants des autorités de R1, qui va déposer au monument aux morts une croix de Lorraine aux couleurs de la République avec la mention "Les vainqueurs de demain aux vainqueurs de 1914 - 1918". La population n'en croit pas ses yeux puis applaudit au passage des jeunes du Maquis qui démontrent par leur tenue qu'ils ne sont pas une équipe de voyous ou de terroristes. Ce défilé, largement médiatisé malgré la censure, a permis de valoriser l'action de la Résistance aux yeux des Français, mais aussi aux yeux des alliés.
Claude Morel, in DVD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura, Département AERI de la Fondation de la Résistance, 2013. http://www.museedelaresistanceenligne.org
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:53
Les préparatifs du défilé
Dans le but d'anticiper la pénurie en vivres et en équipement des maquisards à l'automne, le chef des maquis de l'Ain, Henri Romans-Petit, avait décidé dès août 1943 de monter, dans la nuit du 9 au 10 septembre 1943, un coup de main sur le chantier de jeunesse d'Artemare, l'un des mieux dôtés de la région, au sud-est de l'Ain. L'opération avait été confiée à Henri Girousse, dit "Chabot", qui reçoit la nouvelle mission de choisir et de préparer avec Pierre Marcault, chef du camp de Morez, les hommes qui participeront au défilé : remise des uniformes et des bérets de chantiers de jeunesse pris lors de l'attaque d'Artemare, armement, apprentissage de la marche au pas...
Afin de ne pas être reconnus et d'éviter des représailles contre les familles, les participants au défilé doivent être étrangers à la ville d'Oyonnax et ne rien savoir de leur destination. Les itinéraires d'aller et de retour depuis les camps de maquis sont minutieusement prévus ; les camions pour le transport des maquisards et l'approvisionnement en essence doivent être assurés sans failles possibles. Il a préalablement fallu trouver assez de véhicules pour transporter quelque 120 hommes, les quelques véhicules en possession des maquisards servant au ravitaillement des camps étant en bien trop petit nombre. Ce fut fait dans la nuit du 6 au 7 novembre précédente, par un coup de main réalisé dans un dépôt de la Régie des transports de l'Ain situé à Tenay, où sont entreposées sur cales des camionnettes U23 provenant de l'Armée de l'armistice et camouflées par le réseau Camouflage de Matériel (CDM). La nuit suivante, ce sont 130 litres d'essence qui sont subtilisés dans une station service avec la complicité de son propriétaire, alors que la pompe est tombée en panne.
Dans la nuit du 6 au 7 novembre, une avant-dernière réunion a lieu au domicile de Gabriel Jeanjacquot, 10 rue de la Paix à Oyonnax, pour une mise au point quasi-définitive. Sont présents autour de "Romans", les chefs de groupement, Noël Perrotot et Henri Girousse, mais également Elie Deschamps, Edouard Bourret (instructeur des maquisards au camp de Cize), Raymond Boudet, dit "Curty" (chef civil du secteur de l’AS du secteur d’Oyonnax "Cristal 6"), Jean Ritoux (l'un des responsables de la Résistance dans le secteur de La Cluse), Jean et Jeanne Moirod (agents de liaison), Maurice Thévenon (commissaire de police d'Oyonnax). Enfin, la dernière réunion a lieu dans la nuit du 7 au 8 novembre, toujours chez "Gaby" Jeanjacquot, en présence de "Montréal", "Brun", "Ravignan", "Gaby", "Ritoux", chargé des renseignements, "Curty", Maurice Thévenon, commissaire de police à Oyonnax, Jean et Jeanne Moirod et Louise Jeanjacquot, agents de liaison. Ils passent en revue le déroulement de la manifestation ; points d'arrivée des équipes de protection, installation d'armes automatiques sur les diverses routes d'accès à la ville, points de déarquement des camions transportant les hommes devant défiler, formation du cortège et itinéraire à suivre. Après entente avec "Curty", il est décidé que la résistance locale se charge de la protection invisible. Les 17 hommes qui en sont responsables devront surveiller la foule, empêcher d'éventuelles provocations et surveiller pas à pas les personnes suspectes (collaborateurs). L’itinéraire mis en place est reconnu une dernière fois le 10 au soir. Marc Jaboulay, fils de "Belleroche", propose de réaliser un film en 8m/m.
Afin d’éviter une éventuelle irruption de renforts de police ou d'Allemands - les plus proches se situant à La Cluse et Nantua, à une douzaine de kilomètres - les chefs du maquis annoncent une manifestation à Nantua, lancent des rumeurs sur d'autres villes : Bourg-en-Bresse, Ambérieu-en-Bugey, Belley... Les militants de l'Armée secrète d'Oyonnax sont chargés de surveiller discrètement les sympathisants avérés de la collaboration. Une équipe est prévue pour isoler le central téléphonique d'Oyonnax avec la complicité de Raymond Boudet et d'Emile Berrod, facteur.
Rendez-vous est pris pour le 11 novembre 1943 à 11 heures du matin approximativement. Une série de tracts sont imprimés clandestinement, qui invitent la population à célébrer cet anniversaire malgré l'interdiction du gouvernement.
L'organisation proprement dite du défilé est confiée à deux anciens élèves de l'école Saint-Cyr, les lieutenants Girousse et de Lassus Saint-Geniès. Il s'agit pour eux de préparer une compagnie d'environ 120 hommes qui doit défiler en trois sections de 40 hommes chacune. C'est le camp de Morez, commandé par Pierre Marcault, alias "Marco", qui fournit les trois quart des effectifs, auxquels s'ajoutent ceux de maquis de Corlier, commandés par Jean Vaudan.
Auteur : Département AERI Source : Claude Morel, in DVD-ROM La Résistance dans l’Ain et le Haut-Jura, Département AERI de la Fondation de la Résistance, novembre 2013. Patrick Veyret, Histoire secrète des Maquis de l’Ain, La Taillanderie, 2010. Jérome Croyet, article « Le défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax », Archives départementales de l’Ain, non publié. François Marcot, article « 11 novembre 1943 » in F. Marcot (dir.), Dictionnaire historique de la Résistance, Laffont, 2006.
Tract appelant à manifester le 11 novembre 1943
Ce tract fut distribué dans la ville les 9 et 10 novembre 1943. La population d'Oyonnax est invitée à célébrer le 11 novembre 1943 malgré l'interdiction du gouvernement. La même annonce est faite dans d'autres communes pour dérouter l'ennemi (Bourg-en-Bresse, Meximieux, etc.).
Deux appels allant dans le même sens avaient été lancés, l'un au niveau national, par le Conseil de la Résistance (CNR), l'autre, à l'échelle de la zone Sud, par les Mouvements Unis de Résistance (MUR).
Claude Morel et Département AERI. http://www.museedelaresistanceenligne.org
Tract des murs
Le Comité directeur des Mouvements unis de Résistance (MUR) appelle ici l'ensemble des Français à manifester "leur volonté de contribuer à l'affranchissement national" par une double action : commémorer les morts de la Grande guerre et ceux de la guerre en cours et en faisant preuve de générosité dans le cadre des collectes destinées à aider les familles des victimes. Le message véhiculé par cet appel se veut une continuité entre le recueillement sur les tombes des morts tombés pour la France et un signal fort donné dans le sens de la poursuite de la lutte en cessant le travail entre 11 heures et midi.
Le dernier paragraphe rappelle l'importance de ne pas laisser aux seuls alliés le bénéfice de la libération de la France, mais au contraire de mettre toutes ses forces au service de la lutte pour la liberté.Département AERI.
Contexte historique :
Les Mouvements Unis de Résistance (MUR) résultent de la fusion, décidée le 26 janvier 1943, des trois grands mouvements de résistance non communiste de zone Sud : Combat, Libération-Sud et Franc-Tireur.
Si la presse clandestine de chaque mouvement garde sa totale indépendance, tous les services doivent se fondre dans une organisation unique, mise en place durant l'été 1943.
D'après le Dictionnaire historique de la Résistance, sous la direction de François Marcot, Robert Laffont, 2006.
Plaque sur la maison de la famille Jeanjacquot
A partir du 7 novembre 1943 se tiennent trois réunions clandestines à Oyonnax pour fixer la répartition des tâches. La dernière a lieu dans la nuit du 9 au 10 novembre 1943 au domicile de Gaby Jeanjacquot au 10, rue de la Paix. Le capitaine Romans-Petit, les lieutenants Henri Girousse et Edouard Bourret y rencontrent le commissaire de police Maurice Thévenon pour mettre au point les dernières dispositions et le chronométrage du défilé. Le 10 novembre au soir, "Gaby" Jeanjacquot fait reconnaître à Pierre Chassé, dit "Ludo" l'itinéraire afin qu'il puisse conduire le cortège jusqu'au monument aux morts. Patrick Veyret, Histoire secrète des Maquis de l'Ain, Acteurs et enjeux, La Taillanderie, Châtillon-sur-Chalaronne, 2010. Le Crêt de Chalam n° 65 bis, spécial 50e anniversaire, Imprimeries Réunies de Bourg, octobre 1993.
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:54
La mise en oeuvre
http://www.museedelaresistanceenligne.org
Le 11 novembre à 9 heures, les hommes choisis pour défiler à Oyonnax embarquent dans huit véhicules. Le point de rassemblement et de départ du convoi se situe au Grand-Abergement, à une quarantaine de kilomètres au sud d’Oyonnax. A 11 h 55, soit avec presque une heure de retard, les véhicules arrivent à Oyonnax par la route d’Echallon.
Attirés par ce remue-ménage inhabituel, les gens commencent à arriver de toutes parts ; bientôt, c'est une véritable foule qui se masse sur les trottoirs. En formation impeccable, chaque section flanquée des cadres en tenue s'ébranle, et, pour les habitants, c'est un spectacle extraordinaire de voir, en pleine Occupation, un groupe de maquisards en uniformes et en armes se diriger au pas cadencé vers le monument.
Au pied du Monument aux morts du « Vieux François », Henri Romans-Petit dépose une gerbe en forme de croix de Lorraine, portant la mention "Les vainqueurs de demain à ceux de 1914-1918". Après avoir fait observer une minute de silence, il entonne la Marseillaise, puis le chant Vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine repris par la population. A l'issue de la manifestation patriotique, les chefs donnent le signal du départ. Les clandestins rejoignent alors les camions qui bientôt s'éloignent au chant de la Marseillaise.
Auteur : Département AERI Source : Claude Morel in DVD-ROM La Résistance dans l’Ain et le Haut-Jura, Fondation de la Résistance – Département AERI, 2013. Patrick Veyret, Histoire secrète des Maquis de l’Ain, La Tailla
Le départ pour Oyonnax et le défilé
Le 11 novembre à 9 heures, les hommes embarquent dans sept véhicules de l’armée d’armistice cachés à la régie des Transports de l’Ain de Tenay auxquels il faut ajouter celui de la Trappe des Dombes qui transporte la Garde d’honneur et la clique. Le point de rassemblement et de départ du convoi se situe au Grand-Abergement, à une quarantaine de kilomètres au sud d’Oyonnax.
A 11 h 55, soit avec presque une heure de retard, les véhicules arrivent à Oyonnax par la route d’Echallon. Les hommes du défilé, habillés en blouson de cuir et uniforme des chantiers de jeunesse descendent des camions. Attirés par ce remue-ménage inhabituel, les gens commencent à arriver de toutes parts ; bientôt, c'est une véritable foule qui se masse sur les trottoirs. Lorsque le chef départemental donne d'une voix forte l'ordre de départ : "Maquis de l'Ain, à mon commandement, en avant marche !", des applaudissements et des vivats éclatent. En formation impeccable, chaque section flanquée des cadres en tenue s'ébranle, et, pour les habitants, c'est un spectacle extraordinaire de voir, en pleine Occupation, un groupe de maquisards en uniformes et en armes se diriger au pas cadencé vers le monument.
Le maquisard Roger Tanton ouvre la marche, précédant le chef Romans-Petit, en uniforme de capitaine aviateur, escorté de responsables de la région R1, Henri Jaboulay, Lucien Bonnet et Charles Mohler, également vêtus de leur tenue d'officier. Ils sont protégés par un groupe franc de cinq hommes. Derrière eux marchent le porte-drapeau, Raymond Mulard, et sa garde d'honneur en gants blancs, eux-mêmes suivis des clairons et des porteurs de la gerbe. Viennent ensuite deux sections du camp de Morez entraînées par Pierre Marcault et commandées par Jean-Pierre de Lassus et Henri Girousse puis la section du camp de Corlier sous les ordres de Jean Vaudan. La marche est fermée par une voiture et deux hommes qui demandent à la foule de ne pas suivre le cortège.
Au pied du Monument aux morts du « Vieux François », Henri Romans-Petit dépose une gerbe en forme de croix de Lorraine, portant la mention "Les vainqueurs de demain à ceux de 1914-1918". Cette dernière fait 80 cm de haut. Elle est composée d’un montant en bois recouvert de mousse naturelle avec des violettes artificielles. Entre les deux branches de la croix de Lorraine est placé un nœud tricolore à 4 branches. Après avoir fait observer une minute de silence, Romans-Petit entonne la Marseillaise, puis le chant Vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine repris par la population. Dans son livre Les Obstinés, Romans-Petit évoque ce moment fort en émotion : « En deux mots, je demande à tous de rester calmes, de ne pas entraver notre départ. Mais filles, femmes, garçons, les yeux embués, la voix enrouée viennent vers nous, se jettent dans nos bras. On entend des exclamations qui remuent jusqu’aux entrailles : « Vous venez de venger mon fils ! - Je vis les plus beaux moments de ma vie ! - Ah ! On viendra me critiquer les terroristes ». Je n’arrive pas à prendre les billets de cinq et dix francs, les paquets de cigarettes entamés qui nous sont tendus. »
Mais la prudence est de règle et les chefs donnent les consignes de départ. S'arrachant aux mains qui les agrippent, les clandestins rejoignent les camions qui bientôt s'éloignent au chant de la Marseillaise. Aussitôt, les groupes de sécurité décrochent à leur tour.
Auteur : Département AERI Source : Claude Morel in DVD-ROM La Résistance dans l’Ain et le Haut-Jura, Fondation de la Résistance – Département AERI, 2013. Patrick Veyret, Histoire secrète des Maquis de l’Ain, La Taillanderie, 2010. Henri Romans-Petit, Les obstinés, éditions Janicot, 1945. Jérome Croyet, « Le défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax », Archives départementales de l’Ain, non publié. François Marcot, article « 11 novembre 1943 » in F. Marcot (dir.), Dictionnaire historique de la Résistance, Laffont, 2006.
A signaler : le montage du film est le montage d'époque, tel qu'effectué par son auteur, Raymond, dit "Marc", Jaboulay. Titre : Film de "Marc" Jaboulay du défilé d'Oyonnax Légende : Film du défilé d'Oyonnax, 11 novembre 1943 - réalisé par Raymond Jaboulay, dit "Marc", le fils d'Henri Jaboulay
Défilé d'Oyonnax - place de la Poste
Sous le commandement d'Henri Romans-Petit, quelque cent trente maquisards de l'Ain, vêtus d'uniformes dérobés aux Chantiers de la Jeunesse, défilent devant la population et déposent devant le monument aux morts une gerbe en forme de Croix de Lorraine portant l'inscription "Les vainqueurs de demain à ceux de 14-18". Il s'agit d'une véritable opération de contre-propagande, destinée à montrer que les maquisards ne sont ni les "bandits" ni les "terroristes" dénoncés par la presse officielle mais l'armée d'un contre-Etat clandestin. Cette première irruption au grand jour des maquisards dans une ville fait donc l'objet de véritables reportages ; Pierre Marcault, chef d'une des section des maquisards, photographie le trajet vers Oyonnax et un film est réalisé par Raymond "Marc" Jaboulay, le fils du chef régional des maquis Henri Jaboulay. Mais ce sont les photographies prises par André Jacquelin, responsable du journal clandestin Bir-Hakeim qui paraissent dès le mois suivant dans la presse de zone Sud. Le n°40 de Libération-Sud du 1er décembre 1943 en reproduit trois, en floutant les visages des principaux protagonistes pour des motifs évidents de sécurité. Les treize photographies reproduites ici proviennent des archives de François Morin-Forestier, responsable de la Délégation des Mouvements Unis de Résistance (MUR) à Londres. Il s'agit très vraisemblablement des tirages d'André Jacquelin, parvenus à Londres par courrier aérien tardivement (février 1944) car les liaisons aériennes clandestines ont été très perturbées par la météo durant l'hiver 1943-1944. La même légende figure au dos de toutes les photographies, celle de l'Office Français d'Information Cinématographique (ou OFIC, l'agence officielle de la France combattante). Le film de Raymond, "Marc" Jaboulay parviendra lui aussi à Londres. D'après Bruno Leroux, "Mobilisations" in Traces de Résistance, Fondation de la Résistance, Paris, 2011.
Défilé d'Oyonnax, vue plongeante sur le défilé
On remarque que seuls les maquisards composant les colonnes latérales sont armés, tout comme ceux qui entourent le porte-drapeau et ceux assurant la protection rapprochée du défilé. Ceci s'explique par le nombre insuffisant de fusils et de mitraillettes dont disposaient les maquisards. Département AERI.
:F: Défilé d'Oyonnax - les quatre officiels se recueillent
Cette photographie immortalise ce qui est sans doute, dans ce défilé en tous points "hors normes", le moment le plus solennel : les quatre officiels que sont le chef des maquis de l'Ain, le colonel Henri Romans-Petit en tête, le chef régional des maquis, le capitaine Henri Jaboulay, et leurs deux adjoints chefs régionaux Charles Molher et Lucien Bonnet se recueillent face au monument aux morts de la ville et marquent une minute de silence.
Défilé d'Oyonnax - le départ des maquisards
Quelques participants du défilé et du service d'ordre
Les hommes du lieutenant Bourret, chef du camp de Cize, contrôlent les accès de la ville et les points névralgiques, des groupes de maquisards neutralisent le commissariat, la poste, la gendarmerie, la mairie et la caserne des pompiers. Des maquisards des camps de Granges et de Cize gardent les abords de la ville et se tiennent prêts à diriger vers les bois ceux du défilé en cas d'irruption de l'ennemi à Oyonnax.
Le maquisard Roger Tanton ouvre la marche, précédant le chef Romans-Petit, en uniforme de capitaine aviateur, escorté de responsables de la région R1, Henri Jaboulay, Lucien Bonnet et Charles Mohler, également vêtus de leur tenue d'officier. Ils sont protégés par un groupe franc de cinq hommes.
Derrière eux marchent le porte-drapeau, Raymond Mulard, et sa garde d'honneur en gants blancs, eux-mêmes suivis des clairons et des porteurs de la gerbe.
Viennent ensuite deux sections du camp de Morez entraînées par Pierre Marcault et commandées par Jean-Pierre de Lassus et Henri Girousse puis la section du camp de Corlier sous les ordres de Jean Vaudan. La marche est fermée par une voiture et deux hommes qui demandent à la foule de ne pas suivre le cortège.
Auteur : Département AERI Source : Claude Morel in DVD-ROM La Résistance dans l’Ain et le Haut-Jura, Fondation de la Résistance – Département AERI, 2013. Patrick Veyret, Histoire secrète des Maquis de l’Ain, La Taillanderie, 2010. http://www.museedelaresistanceenligne.org
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:54
Organigramme du défilé d'Oyonnax
fourni par le site : http://www.museedelaresistanceenligne.org
Le document présente la composition des maquisards ayant défilé : nom et prénom, poste occupé et découpage par fonction ou appartenance à telle ou telle section. Il a été établi par Pierre Marcault, l'un des acteurs de cet événement, qui se trouvait en service de protection juste derrière le chien portant le blason de la Croix-Rouge, entre la queue de la 1ère section et la tête de la 2e (camp de Morez).
Département AERI.
CERTAINEMENT PLUS VISIBLE SUR : http://fr.calameo.com/read/002152756833e5e33bc11 à télécharger également
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:55
Composition du défilé d'Oyonnax tiré d'un document pdf :
Le document présente la composition des maquisards ayant défilé : nom et prénom, poste occupé et découpage par fonction ou appartenance à telle ou telle section. Il a été établi par Pierre Marcault, l'un des acteurs de cet événement, qui se trouvait en service de protection juste derrière le chien portant le blason de la Croix-Rouge, entre la queue de la 1ère section et la tête de la 2e (camp de Morez). Département AERI. http://www.museedelaresistanceenligne.org
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:55
Les retombées du défilé
L’écho donné au défilé par la presse clandestine et la propagande de la France combattante ne sont pas immédiats : il faut attendre le mois de décembre pour qu’il soit relayé régionalement par Bir-Hakeim ou le faux Nouvelliste, et nationalement par les journaux des grands mouvements. Dans l’édition de Libération du 1er décembre 1943 sont publiées des photos du défilé, où les visages des maquisards sont « floutés ». A Londres, ce n’est qu’en février 1944 qu’arrivent des informations précises sur le défilé, en raison des mauvaises conditions météorologiques qui entravent les liaisons avec la métropole. L’émission « Les Français parlent aux Français » de la BBC du 9 février 1944 s’en fait l’écho. Au-delà, le défilé a été l'un des éléments de l’argumentaire développé par la France combattante pour convaincre les Britanniques d’accroître les parachutages d’armes aux maquis français.
De l'avis des participants au défilé, le succès dépasse les espérances. En témoigne Henri Girousse : "Les objectifs immédiats que nous avions recherchés furent atteints très largement. Les maquisards revinrent d'Oyonnax avec un moral extraordinaire, et la population connaissait désormais le vrai visage de la Résistance, troupe disciplinée, conduite par de vrais officiers, à laquelle elle appartenait. Une aide volontaire, généreuse, courageuse, héroïque souvent. [...] Mais surtout, au-delà de nos frontières, l'événement eut un retentissement extraordinaire qu'aucun de nous n'avait prévu. Tous ceux qui, par le monde, nous aimaient encore avaient retrouvé la voix de la France, celle du NON opposé à la Force, possédant une puissance mystérieuse qui vient du fond des siècles. La France, profonde, submergée, bâillonnée, martyrisée, n'acceptait pas la soumission avec Pétain, elle avait choisi la révolte avec de Gaulle."
Si le défilé a un retentissement certain à l’extérieur parce qu’il a été conçu comme une opération de « contre-propagande », il est minimisé par les services administratifs de l’Etat Français Le 13 novembre, un rapport des Renseignements généraux au préfet de l’Ain présente le défilé seulement comme des « incidents d’Oyonnax ». L’administration note toutefois l’organisation minutée, la précision et la rapidité d’exécution de cette opération. Mais la raison principale de cette discrétion est que le 11 novembre 1943 a été le théâtre de manifestations résistantes un peu partout en France : dépôts de gerbes aux monuments aux morts, arrêts de travail… Dans l’Ain, Nantua et Bourg-en-Bresse ont notamment été concernés. Par ailleurs, dans plusieurs départements, pour la première fois des maquis ont défilé dans de petites villes ou des villages, comme à Marcilhac-sur-Célé dans le Lot. La manifestation d’Oyonnax a acquis une valeur de symbole fort de la Résistance intérieure.
Auteur : Département AERI Source :
Claude Morel in DVD-ROM La Résistance dans l’Ain et le Haut-Jura, Fondation de la Résistance – Département AERI, 2013. Patrick Veyret, Histoire secrète des Maquis de l’Ain, La Taillanderie, 2010. Jérome Croyet, « Le défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax », Archives départementales de l’Ain, non publié. http://www.museedelaresistanceenligne.org
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:55
On notera que la citation n'évoque pas directement le défilé du 11 novembre 1943 ; malgré cela, le dessin figurant dans le coin gauche du haut du document, montre bien les maquisards défilant près du "Vieux François", l'ancien monument aux morts.
Département AERI.
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:56
Message de remerciement de Romans-Petit
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:56
Rapport de police sur le défilé d'Oyonnax cliquez sur le lien ci-dessous pour visualiser et télécharger le doc http://www.museedelaresistanceenligne.org/doc/flash/texte/3933.pdf
Maurice Thévenon, l'un des plus jeunes docteurs en droit de France, est violemment hostile à l'occupant et à la politique collaborationniste de Vichy. Originaire d'Ussel, il est apparenté à Henri Queuille, ancien Président du Conseil. En 1942-1943, il est commissaire de police à Lyon et il s'engage dans la Résistance aux MUR (Mouvements unis de Résistance) puis au NAP (Noyautage des administrations publiques). Il est nommé spécialement par la Résistance au commissariat d'0yonnax pour faciliter les actions des maquis d'Henri Romans-Petit durant l'été 1943. Il prend contact dès son arrivée dans l'Ain à Bourg-en-Bresse avec Paul Pioda. Celui-ci lui présente Gabriel Jeanjacquot, engagé depuis longtemps dans la Résistance à Oyonnax. Outre les différents services qu'il peut apporter, il sait qu'il doit aussi rendre des comptes à sa hiérarchie. C'est ainsi que Maurice Thévenon se retrouve parmi les acteurs de la préparation du défilé du 11 novembre 1943. Son appui est primordial pour la sécurité des maquisards. Dans le compte-rendu de ce mémorable défilé, il explique que, compte tenu de l'anniversaire du 11 novembre 1918 qu'il est interdit de commémorer, il envoie des policiers dans la ville pour "prendre la température des citoyens". Ceux-ci rentrent en disant que toute la ville est calme. Ceci jusqu'à la nouvelle de l'arrivée d'hommes en armes qui, débarquant de camions, investissent la ville et en occupent les points sensibles. Le commissaire dit avoir renvoyé d'urgence son personnel aux renseignements. Il indique qu'un officier à trois galons conduit le défilé vers le monument aux morts de la ville. Le rapport, savoureux, se doit de veiller à ce qu'aucun mot ne trahisse la duplicité de son auteur et évite à la ville de subir des représailles. Le 8 juin 1944, la sous-préfecture de Nantua et tout un secteur sont momentanément "libérés" par les maquisards. Un tribunal du maquis y est constitué. Le commissaire Thévenon est nommé assistant du président. A la Libération, après un séjour dans les maquis, Maurice Thévenon revient à Lyon où il est nommé à la police judiciaire. Il rejoint plus tard le barreau des avocats lyonnais. Alban Vistel dans son livre La Nuit sans ombre écrit de lui qu'il était ouvertement le défenseur des personnes arrêtées pour menées dites "anti-nationales" de l'époque. C'était un patriote anti-nazi et avide de liberté.
Claude Morel, DVD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura, AERI, 2013.
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:56
Plaque en hommage au défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax
"Le 11 NOVEMBRE 1943, le gouvernement collaborationniste du maréchal PETAIN avait interdit toute commémoration du 25e anniversaire de la victoire de 1918 sur l'Allemagne. Bravant cette interdiction, le capitaine ROMANS, chef des maquis de l'AIN, a décidé que les maquisards défileraient à OYONNAX. Le rassemblement a eu lieu sur cette place. Le défilé, regroupant 120 hommes en uniformes et en armes, s'est dirigé vers le monument aux morts, où une croix de Lorraine a été déposée avec cette inscription : "Les vainqueurs de demain à ceux de 14-18."
Ce défilé eut des répercussions à LONDRES où le général DE GAULLE en informa Winston CHURCHILL. Ce dernier, au nom des alliés de la France, décida les parachutages d'armes et de munitions sur la prairie d'ECHALLON."
___________
Titre : Plaque en hommage au défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax Légende :
Oyonnax, plaque en hommage au défilé du 11 novembre 1943
Date document : Sans date Lieu : France - Rhône-Alpes - Ain - Oyonnax
http://www.museedelaresistanceenligne.org
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:57
La mémoire du défilé d'Oyonnax
Le département de l'Ain compte parmi les départements français les plus décorés en médailles et reconnaissances nationales et étrangères.
En effet, sur les dix-sept villes médaillées de la Résistance, trois se trouvent dans l'Ain : Oyonnax, Meximieux et Nantua. Deux lycées reçoivent aussi cette décoration prestigieuse : le lycée Lalande de Bourg-en-Bresse et l'Ecole militaire d'Autun réfugiée au camp de Thol dans l'Ain, qui a appartenu à la Compagnie Mazaud du groupement Sud des Maquis de l'Ain. Le département compte par ailleurs de nombreux titulaires de la Médaille de la Résistance et une dizaine de personnes sont honorées du titre prestigieux de "Compagnons de la Libération", ordre créé par le général de Gaulle et forclos depuis 1946.
Oyonnax est un haut lieu de la mémoire des maquis de la région. Le "Vieux François", le monument au pied duquel le colonel Henri Romans-Petit avait alors déposé la gerbe : "Aux vainqueurs d'hier, les vainqueurs de demain" a été transféré au centre du cimetière communal. Une plaque apposée sur son socle rappelle la force symbolique du défilé. A sa mort en 1979, le corps du chef des maquis de l'Ain était inhumé près du monument. Dix ans plus tard, c'est la façade de l'immeuble du 10 rue de la Paix, où la famille Jeanjacquot dans son ensemble avait accueilli Romans-Petit et ses officiers "pour une dernière réunion préparatoire au défilé des maquis de l'Ain du 11 novembre 1943", qui se voyait ornée d'une plaque. Une stèle et un square étaient encore dédiés à Romans-Petit en 1994.
Le défilé emblématique des Maquis de l'Ain a été honoré par deux présidents de la République, tout d'abord indirectement par le général de Gaulle, le 26 juin 1956, à l'occasion de l'inauguration du cimetière des maquisards du Val d'Enfer à Cerdon, puis, le 11 novembre 1983, par François Mitterrand, qui s'était rendu spécialement sur les lieux pour commémorer son 40e anniversaire.
Auteur : Département AERI Source : Claude Morel, in DVD
Inauguration du cimetière des maquisards du Val d'enfer
Le monument aux 700 morts des maquis de l'Ain et du Haut-Jura a été érigé au lieudit "Val d'enfer", dans un virage de la RN 84, au-dessus du village de Cerdon. Il est placé dans un cadre grandiose et sauvage, sorte d'amphithéâtre fait de rochers et de verdure. Une statue imposante haute de dix-sept mètres en pierre du Gard représente la France debout, se libérant de ses chaînes, sous les traits d'une femme qui semble jaillir de la montagne. Sur le flanc ouest du monument, inauguré le 29 juillet 1951, figure une phrase empruntée au poète Aragon : "Où je meurs renaît la patrie". Au pied de la statue est inhumé un maquisard inconnu, symbole des "Combattants de l'ombre". La cérémonie a lieu le 29 mai 1954 en présence de Monsieur Gaston Monnerville, président du Conseil de la République (futur Sénat).
A l'est du monument s'étend le cimetière où reposent quatre-vingt-neuf maquisards morts au combat, dont trente-six inconnus. Parmi les cinquante-trois autres tombes, on trouve trente-six Français, quelques noms de chefs : Albert Chambonnet, "Didier", Edouard Bourret, "Brun", Charles Blétel... et un certain nombre d'étrangers : sept Espagnols, deux Polonais, deux Italiens, un Russe, cinq Nord-Africains, venus combattre sur notre sol et reposant au pied du mât où flotte le drapeau tricolore. Le cimetière des maquisards est inauguré par le général de Gaulle le 24 juin 1956. Au cours de son discours, celui-ci évoque le défilé d'Oyonnax :
"Je n'oublierai jamais l'enchantement que me causèrent, à l'époque, les photos prises à Oyonnax le 11 novembre 1943 et que nos réseaux nous avaient fait parvenir à Alger. On y voyait les troupes de la Résistance défiler fièrement, en bon ordre, dans la ville surprise et ravie. Tout comme si les occupants et leurs collaborateurs n'étaient déjà plus que quantités négligeables. Mais ce que les photos n'ont pas reproduit, ce sont les embuscades tendues aux convois ennemis, les attaques de patrouilles ou de postes allemands, les enlèvements d'isolés, les destructions de voies ferrées et de lignes téléphoniques, les incendies de dépôts d'essence et de munitions, qui contribuèrent efficacement à l'usure de l'adversaire bien avant les débarquements."
Auteur : Département AERI Sources : Claude Morel, "Le monument du Val d'Enfer au Cerdon" in DVD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura, Fondation de la Résistance - Département AERI, 2013.
Discours du général de Gaulle communiqué par la Fondation de Gaulle. http://www.museedelaresistanceenligne.org
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milguerres
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mar Jan 14 2014, 22:58
Henri Petit dit Romans
La photographie de Romans-Petit comporte la dédicace suivante : "A Plutarque qui lui n'a jamais menti à la réputation et fut un chef de secteur avisé, courageux et un ami très sûr." "Plutarque" est le pseudonyme de Maurice Morrier, ingénieur des Travaux publics, qui a organisé la Résistance dans tout le Valromey et le bassin de Belley, qui avait fait la connaissance d'Henri Romans-Petit en juin 1943. Département AERI.
Capitaine de réserve dans l'aviation en 1939, il est mobilisé dans le sud de la France, où il est affecté à Fréjus. Après l'Armistice, il commande les bases aériennes de Cannes et de Nice. Le jour de l'armistice, s'adressant aux hommes sous ses ordres, il leur dit : "Je suis sûr que beaucoup d'entre vous comprennent aujourd'hui le sens du mot : PATRIE. Non, la guerre n'est pas finie !" Refusant la défaite, il tente à plusieurs reprises de rejoindre Londres, sans succès.
Démobilisé en août 1940, il retourne à Saint-Étienne où débute son activité de résistant (renseignements, parachutages) au sein du mouvement Espoir, créé en 1941 par Gaston Charron, alias "Jean Nocher", mouvement rattaché à Franc-Tireur. Henri Petit collabore aussi avec le réseau FFC (Forces françaises combattantes) Ali-Tyr.
Après le démembrement du réseau Espoir, Henri Petit, dont le pseudo est alors "Moulin", cherche de nouveaux contacts avec la Résistance. Il prospecte des terrains de parachutage pour le compte du BCRA (Bureau central de renseignement et d'action) et se préoccupe du sort des premiers réfractaires. A la fin de l'année 1942, il rencontre Marcel Démia d'Ambérieu-en-Bugey, un des pionniers de la Résistance dans l'Ain qui a déjà pris en charge des insoumis au régime de Vichy. Marcel Démia et Henri Petit partagent les mêmes idées de la Résistance. Marcel Démia l'introduit auprès des résistants locaux qui cherchent à s'organiser. C'est ainsi qu'Henri Petit crée à Montgriffon la première école de cadres et dès le printemps 1943 participe à la création des premiers camps du maquis avant d'en prendre le commandement durant l'été 1943 sous le pseudonyme de "Romans". Après l'arrestation de Bob Fornier, il devient également le chef de l'AS (Armée secrète) de l'Ain en septembre 1943.
A la fin de l'année, alors que les effectifs paramilitaires de l'Ain (AS et Maquis) atteignent 2 000 hommes, il prend en main les forces clandestines et l'AS de Haute-Savoie, à la demande de l'état-major de R1, en remplacement du commandant Vallette d'Osia arrêté. Il y applique les mêmes principes que dans l'Ain : école de formation des cadres entrainés à la guérilla, aux coups de main brefs avec replis rapides et aux sabotages. Il est en liaison avec Londres par le biais de la mission "Musc" composée de Jean Rosenthal "Cantinier", chargé de l'inspection des maquis, et de Richard Heslop "Xavier" du SOE (Special Operations Executive) britannique ainsi que de l'Américain Denis Owen Johnson "Paul". Pour répondre au besoin de parachutages d'armes, il choisit le plateau des Glières près d'Annecy. Après avoir confié le commandement des Glières à Tom Morel, il regagne précipitamment l'Ain lors de la première grande attaque allemande de février 1944.
Après l'exécution du commandant Jean Duhail, alias "Vallin", pendant l'attaque d'avril 1944, il prend également le commandement des maquis du Haut-Jura - Service Périclès. Il cumule alors les fonctions de chef de l'AS de l'Ain, chef des Maquis de l'Ain et du Haut-Jura - Service Périclès.
En juin 1944, il commande les FFI de l'Ain et du Haut-Jura, et participe à la libération provisoire d'une partie du département de l'Ain et du Haut-Jura, autour des villes de Nantua et Oyonnax, territoire qu'il contribue à administrer durant près de six semaines tout en poursuivant sa mission armée. La puissante contre-offensive allemande de juillet 1944 l'oblige à reprendre le maquis à Giron où il établit son poste de commandement. De fin août à début septembre 1944, l'ensemble des forces FFI contribue aux côtés des Alliés à la libération définitive du département de l'Ain et du Haut-Jura.
Dans la ville de Bourg-en-Bresse, abandonnée sans combat par les troupes allemandes dans la nuit du 4 au 5 septembre, le colonel Romans-Petit arrive à la préfecture accompagné de Richard Heslop vers 8 heures. Le préfet Léon Blanchard nommé par le GPRF (Gouvernement provisoire de la République française) venu toutes affaires cessantes de Paris, et qui a pris ses fonctions à l'aube, l'accueille courtoisement mais lui signifie que sa présence n'est pas indispensable et qu'il peut rejoindre ses troupes. Le pouvoir politique a repris ses droits et le démontre avec fracas dans les semaines qui suivent.
En effet, dans les jours qui suivent la Libération, l'opposition entre "Romans" et le CDL (Comité départemental de libération) éclate au grand jour lorsque "Romans" revenant de Londres est mis aux arrêts au Fort Lamothe à Lyon. Le CDL lui reproche d'avoir cumulé les pouvoirs en négligeant le pouvoir politique de l'Ain et d'avoir usurpé les fonctions de préfet lors de la constitution de la IVe république dans le Bugey. "Romans" reste sept semaines en prison au grand dam de "ses petits" qui ne comprennent pas cette injustice et menacent même de venir le libérer par la force s'il le faut. "Romans" est libéré sans jugement mais avec l'interdiction de revenir dans l'Ain, interdiction levée à la fin du mois de décembre 1944. "Xavier", son fidèle agent du SOE a été, lui, sommé de quitter l'Ain et de rentrer dans son pays.Cette "méchante affaire" ternit la joie de la Libération pour ceux qui ont combattu courageusement aux côtés de "Romans", chef charismatique et aimé par ses hommes.
Le colonel Henri Romans-Petit qui garde son pseudonyme après-guerre, continue le combat pour la reconnaissance de la Résistance Intérieure. Il dirige en 1945 la Maison du Maquis à Paris, fonde en 1946 l'association AMA ainsi que La Voix du Maquis, bulletin trimestriel de liaison entre les anciens résistants et maquisards qui parait encore de nos jours. Il est également président de l'ANRA (Association nationale des Résistants de l'Air) et membre du Comité directeur de la Licra (Ligue contre le racisme). En 1964, suite à une scission au sein de l'AMA, il fonde Le Groupement des Amicales de Résistants de l'Ain et du Haut-Jura qui possède son propre bulletin de liaison Le Crêt de Chalam. Cette association s'est éteinte avec la mort de son dernier président, Noël Fillardet en 2008.
Sur le plan professionnel, Henri Romans-Petit reprend son métier de publicitaire et crée la société d'import-export COMINOR. Il travaille également pour les sociétés SINTRA et SECRE qui construisent du matériel électronique.
Candidat malheureux aux élections législatives en 1958 sous l'étiquette gaulliste de gauche, il donne des conférences à l'Ecole de Guerre au château de Vincennes, particulièrement sur la guérilla, participe à de nombreuses émissions radiophoniques et télévisuelles et publie plusieurs livres et articles sur les maquis de l'Ain et des Glières, notamment Les Obstinés, Editions Janicot, Lille, 1945; L'Appel de l'aventure, Editions Dorian, Saint-Etienne 1947; Les Maquis de l'Ain, Hachette, Paris 1974
Le colonel Henri Romans-Petit s'éteint le 1er novembre 1980 dans sa propriété de Ceignes, petit village proche du monument du Val d'Enfer près de Cerdon dans l'Ain. Ses obsèques se sont déroulées devant ce monument qu'il a contribué à faire construire et qui est l'un des plus hauts et des plus majestueux dédiés à la mémoire de la Résistance. Il est inhumé au cimetière d'Oyonnax près du monument aux Morts dit "Le Vieux François" au pied duquel il avait déposé le 11 novembre 1943 une croix de Lorraine avec l'inscription "Les Vainqueurs de demain à ceux de 14-18".
Fait Compagnon de la Libération le 16 juin 1944, il est l'un des premiers résistants de l'Intérieur à recevoir cette haute distinction du général de Gaulle. Grand officier de la Légion d'honneur, il est aussi titulaire de la Distinguished Service Order décernée par le roi George VI d'Angleterre, et la Legion of Merit accordée par Harry Truman, président des USA. Il a également reçu de nombreuses autres décorations : Croix de Guerre 14/18 ; Croix de Guerre 39/45 ; Médaille de la Résistance ; Officier de l'Ordre de Léopold (Belgique) ; Croix de Guerre (Belgique) ; Grand Officier du Nicham Iftikhar ; Commandeur de l'Ordre du Mérite (Congo).
D'après Claude Morel, ""Romans-Petit Henri "Tor", "Moulin" puis "Romans"", extrait du DVD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut Jura, Département AERI de la Fondation de la Résistance, novembre 2013.
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Sujet: Re: 11 novembre 1943 : le défilé d'Oyonnax Mer Jan 15 2014, 17:29