Rafale : y en aura-t-il assez pour tout le monde ?La signature très attendue d'un contrat portant sur la vente de 60 Rafale aux Emirats arabes unis (EAU) pourrait avoir des conséquences importantes sur le rythme de livraison de l'avion à ses deux "clients" français, l'armée de l'air et la marine nationale.
Le problème se pose en ces termes :
1- Stratégique, le contrat des EAU aura la priorité d'autant qu'il porte sur une version plus sophistiquée que les avions livrés à nos forces. Les EAU ne voudront pas attendre des années avant de renouveler leur armée de l'air. Les livraisons iront vite et s'étaleront sur quatre ou cinq ans, pour des premières réceptions vers 2013. L'usine Dassault de Mérignac (Gironde) devra donc produire environ 15 Rafale par an, soit une cadence supérieure à celle d'aujourd'hui.
2- Dans la Marine, les Super-Etendard arrivent, en principe, en fin de vie en 2015. A cette date, la Marine aimerait avoir en ligne une quarantaine de Rafale pour armer ses trois flottilles (11F, 12F, 17F).
Pour ce faire, il lui faudrait percevoir quatre avions tous les ans.
3- L'Armée de l'air, qui a reçu 42 Rafale, aimerait également un rythme de livraison plus soutenu afin de pouvoir former ses escadrons, équipés chacune d'une petite vingtaine d'avions. Pour l'instant, un seul escadron est opérationnel, le 1/7 Provence et un autre devrait l'être complètement (avec l'alerte nucléaire, en 2010), le 1/91 Gascogne. Chaque Rafale qui va à la marine est un avion de moins pour l'armée de l'air, ce qui retarde d'autant la mise en place des nouveaux escadrons. D'où les relations tendues entre les deux maisons.
4 - La capacité de production maximale de l'usine Dassault est, en l'état, de 30 avions par an. En théorie, les commandes françaises pourraient monter jusqu'à 15 avions par an, tout en respectant le contrat avec les EAU.
5 - Au vu de la situation des finances publiques, dès 2011, la tentation pour l'Etat sera de faire reposer le plan de charge industriel sur les commandes à l'export (si le contrat EAU est conclu, évidemment) et non sur les commandes françaises. En théorie, celles-ci pourraient être réduites à zéro pendant quatre ans, sans conséquences économiques sur l'industrie française, puisque, de toute façon, les cadences resteraient supérieures à ce qu'elles sont aujourd'hui.
La tentation sera grande de réduire les commandes publiques à portion congrue.
On parle déjà de 7 à 10 avions par an. Cela pourrait être moins. Ce qui est certain, c'est que l'Armée de l'air et la Marine devront se les partager. Et s'en contenter.
Source : secret défense