6 AOÛT 1945 : HIROSHIMA…
Curtis LeMay
« Les Nippons doivent être brûlés, bouillis ou cuits à mort ».
(Général Curtis Lemay, après les bombardements de Tokyo).
Ce 6 août est un triste anniversaire dont peu de médias vous parleront, et, si par hasard ils en parlent, ce sera pour justifier, pour légitimer, une des pires horreurs de tous les temps ; l’élimination de plusieurs centaines de milliers de civils japonais à coups de bombes atomiques (et incendiaires).
Il suffit de voir comment la presse nous commente le conflit entre la Russie et l’Ukraine, pour comprendre que les dés sont pipés ; on se charge de nous dire qui sont les bons et qui sont les salauds :
Pour la presse, Poutine est le méchant, le seul responsable et le seul coupable. Dès le début de l’offensive, elle n’a rien dit sur les 30 années d’humiliation et de mépris à l’égard de la Russie, écartée de l’Europe. Elle n’a rien dit sur les promesses faites à Gorbatchev de ne pas élargir l’OTAN à l’Est. Rien sur la violation de la souveraineté de la Serbie bombardée par l’OTAN. Rien sur le dépeçage de ce pays en l’amputant du Kosovo. Rien sur le refus de Kiev de respecter les Accords de Minsk sur l’autonomie du Donbass. Rien sur les bombardements commis contre les populations pro-russes. Rien sur les crimes et les exactions de la sulfureuse « Brigade Azov » , etc…
Je pourrais continuer longtemps mais on me reprocherait immanquablement d’être pro-Poutine, ce qui n’est absolument pas le cas ; j’essaie simplement d’être objectif et de faire preuve d’un minimum d’honnêteté intellectuelle, un point c’est tout !
Mais venons-en au 6 août…1945, qui est la triste illustration du concept binaire entre le « camp du bien » et le « camp du mal ». Pour rester dans le logique simpliste des stratèges de Café du Commerce qui pérorent sur les plateaux-télé, retenons que le mal absolu c’est la Russie, et que le bien, ce sont les Etats-Unis. Ce pays allié et ami dont « un petit gars de Georgie… est venu mourir en Normandie » comme le chantait Michel Sardou, et qui a mis à bas le nazisme (1).
Hélas, depuis la guerre de Sécession, qui a traumatisé tout un peuple, les Américains ont pris la sale habitude d’aller porter la guerre chez les autres, à coup de Napalm, de défoliant (2) ou de bombes incendiaires – comme à Dresde – ou atomiques – comme à Hiroshima et Nagasaki (3).
Rappelons brièvement les faits, juste pour (tenter de) comprendre pourquoi certains crimes sont moins graves que d’autres. Personnellement je n’ai pas compris mais je dois être un imbécile :
Enola Gay
Le 6 août 1945, un bombardier B-29 piloté par Paul Tibbets, baptisé « Enola Gay » (du nom de sa mère, car les Américains sont de grands sentimentaux) décolle, avec à son bord une bombe atomique d’une puissance de 15 kilotonnes. À 8 h 16, la bombe explose à 587 mètres du sol, à la verticale de l’hôpital Shima, situé au cœur de l’agglomération. L’explosion, équivalant à… 15 000 tonnes de TNT, rase la ville ; 75 000 personnes sont tuées sur le coup. Il s’agit de civils, hommes, femmes, enfants, vieillards et malades au sein de l’hôpital Shima…
Boeing B-29 Superfortress > National Museum of the United States Air Force
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Trois jours plus tard, le 9 août, le B-29 « Bockscar », largue une autre bombe atomique sur Nagasaki. Cette seconde bombe est au plutonium, d’une puissance de 21 kilotonnes, différente de celle d’Hiroshima. Le scénario sera moins meurtrier mais 35 000 habitants de Nagasaki seront tués. Là encore il s’agissait d’une population civile et non d’objectifs militaires.
Préalablement, il y eut une longue série de raids sur Tokyo : le 24 mai 1945, 3 646 tonnes de bombes incendiaires furent larguées sur la ville. Le dernier bombardement nocturne, dans la nuit du 25 au 26 mai, fut mené par 502 avions qui larguent 3 252 tonnes de bombes incendiaires.
Le bilan de ces raids est d’environ 100 000 morts, civils pour la plupart. Ce qui permettra au général Curtis Lemay, un grand humaniste je suppose, de faire de l’humour en déclarant : « Les Nippons doivent être brûlés, bouillis ou cuits à mort ». Personnellement, je ne prise pas ce genre de plaisanterie ; le massacre de centaines de milliers d’innocents ne me fait pas rire.
Je sais pourtant que les troupes japonaises ont commis des atrocités à l’égard de Français d’Indochine en mars 1945. Faisons un bref rappel :
Le 9 mars précisément, entre 20 heures et 21 heures, après un ultimatum, les garnisons françaises ont été attaquées par surprise par l’armée japonaise. Plusieurs officiers et administrateurs français sont aussitôt exécutés.
À Lạng Sơn, le colonel Robert et le résident Auphelle, invités à dîner par leurs homologues japonais, sont arrêtés par surprise et décapités à coup de sabre, de même que le général Lemonnier qui refusait de donner l’ordre de capituler.
À Thakhek, l’administrateur Colin et l’inspecteur Grethen sont également tués. L’Empire du Japon prend, à partir du 9 mars, le contrôle total de l’Indochine française, que son armée occupait depuis 1940. Les Japonais détruisent notre administration coloniale et provoquent les proclamations d’indépendance du Viêt Nam, du Laos et du Cambodge.
Passionné d’histoire (et de vérité historique !), je ne comprends pas pourquoi on nous parle sans arrêt de la « barbarie nazie » et jamais de la barbarie nipponne ?
On ne condamne pas non plus la barbarie américaine. Tokyo, Hiroshima, Nagasaki, tout ceci a été programmé au nom de la démocratie et « pour la liberté » donc, vous aurez compris qu’il serait malvenu, presque incongru, d’oser condamner une telle boucherie.
Mais ne m’en veuillez pas si, lors des attentats du 11 septembre 2001 – quatre attentats-suicides perpétrés pour une fois sur le sol américain par Al-Qaïda – je n’ai pas donné à cette affaire plus d’importance qu’elle n’en méritait : ce quadruple attentat a fait 2 977 morts.
2 977 victimes innocentes, c’est beaucoup ! Surtout quand il s’agit d’Américains.
14 février 1945 - Dresde réduite en cendres
Rappelons-nous, juste pour mémoire, le bombardement de Dresde, du 13 au 15 février 1945.
Il détruisit presque entièrement la ville. Un « bombardement combiné » entre l’US Air Forces et la RAF, effectué avec des bombes incendiaires et des bombes classiques à retardement.
L’évaluation du nombre des victimes se situe autour de 35 000 morts (dont 25 000 corps formellement identifiés) mais certains historiens osent parler de « 2 à 3 000 victimes, à peine ».
Je me suis fait agonir, même par des amis, pour avoir osé écrire dans l’un de mes livres (4) que les bombardements anglo-américains et les purges des FTP communistes à la Libération ont tué plus de civils que les boches. C’est pourtant la vérité mais, chez nous, il est interdit de critiquer le « camp du bien » ; on vous traite aussitôt de fasciste ou pire, de nazi.
Tant pis, aujourd’hui j’aurai aussi une pensée pour d’autres victimes innocentes du « camp du bien » ; celles des bombardements de l’OTAN sur Belgrade, du 23 mars au 10 juin 1999. Une campagne aérienne de… 78 jours. Le nombre de sorties a été de 37 465 soit 480 par jour en moyenne.
Il y a 20 ans, l'OTAN bombardait la Yougoslavie : les formes nouvelles de l'impérialisme – ACTA
Le bilan est d’environ 3 000 morts ; des morts dont on ne parle jamais.
Pourquoi ?????
Éric de Verdelhan
6/8/2023
1)- le nazisme a été vaincu en Europe par 90 divisions anglo-américaines aidées par notre Armée d’Afrique, la division blindée de Leclerc, l’équivalent d’une ou deux divisions de résistants et… 360 divisions soviétiques à l’Est. Je suis un anticommuniste viscéral mais j’essaie d’être honnête.
2)- Le fameux « agent orange » utilisé massivement au Vietnam et qui faisait encore des ravages humains 50 ans plus tard.
3)- Hiroshima et Nagasaki : avec les « dommages collatéraux » on estime les dégâts humains à plus de 300 000 morts. Et à combien de malformations congénitales ? Je n’en sais rien !
4)- « Mythes et Légendes du Maquis » ; éditions Muller ; 2019.