Dernier d'une famille de six enfants, Augustin Guillaume naît à Guillestre, dans les Hautes-Alpes, le 30 juillet 1895.
II intègre l'Ecole militaire de Saint-Cyr en 1913 avec la promotion de la "Croix du drapeau".
Le premier conflit mondial vient de se déclencher et les jeunes Saint-cyriens sont envoyés au feu alors qu'ils n'ont qu'un an d'Ecole.
Le sous-lieutenant Guillaume a alors dix neuf ans. Il est affecté au 16e bataillon de chasseurs à pied à Lille et se voit confier une compagnie de 200, puis 450 réservistes.
Sans avoir combattu, le bataillon se replie jusqu'au Havre, puis il est déplacé par voie-ferrée à Limoges où Guillaume est chargé de l'instruction de recrues.
Il harcele le commandement pour partir au front. Mis à la tête d'une compagnie en octobre 1914, dès le 4 novembre il est cité à l'ordre de la division et décoré de la Croix de guerre pour sa conduite et son courage au combat.
Fait prisonnier le 11 novembre, il est maintenu en captivité jusqu'à la fin de la guerre, malgré trois tentatives d'évasion qui le conduisent dans un camp de représailles. Il profitera de cette période d'inactivité forcée pour apprendre le russe et l'arabe.
De juin à septembre 1919, les survivants de cinq promotions, dont "la Croix du drapeau", sont rappelés à Saint-Cyr pour y terminer leur scolarité; la "Croix du drapeau" a perdu 297 des siens.
Affecté au Maroc à sa demande, Guillaume est promu capitaine le 25 septembre 1919. Sa connaissance de l'arabe lui permet d'intégrer le Service des Renseignements, amorce du futur "Service des Affaires Indigènes" marocain, sous les ordre du général Poeymirau à Meknès.
En mars 1921, le capitaine Guillaume est affecté au 12e Goum, dans une région peu sûre, au commandement du poste d'Oued Amassine.
Il apprendra les dialectes régionaux qui lui permettront de se rapprocher de ses hommes et d'apprivoiser les tribus de montagnards rustiques qu'il gère.
C'est dans ce poste qu'il rencontrera le capitaine de Lattre avec lequel il nouera une amitié qui durera toute leur vie.
En 1922, il fonde un nouveau poste à Arbalou n'Serdane et pacifie la région.
Il quitte une première fois le Maroc en 1924 , affecté comme adjoint à l'attaché militaire de l'ambassade de France à Belgrade puis, admis à l'Ecole de guerre, il est à Paris en 1926.
Guillaume retrouve le Maroc dès 1928 où le maréchal Lyautey à été remplacé par un fonctionnaire civil, monsieur Steeg.
Chef de bataillon, il est affecté comme chef d'Etat-major du groupement mobile, placé sous le commandement du colonel de Louisal, qui est chargé de la pacification du versant atlantique de l'Atlas central. Ce dernier bastion de tribus montagnardes dissidentes, refusant de se soumettre à l'autorité du Sultan et qui entravent le développement du Maroc, est enlevé en septembre 1933.
La guerre terminée, le chef de bataillon Guillaume occupe le poste de commandant du cercle d'Azilal jusqu'en 1936. II travaille à construire des pistes, des ponts et à faire vivre en bonne intelligence les Berbères, de droit coutumier, vivant dans la montagne, et les Chraa, arabisés, soumis à la loi coranique.
Après un bref séjour en France en 1936, à l'Etat-major du général Nogues au Conseil supérieur de la guerre, il le suit au Maroc lorsque le général est désigné comme Résident général. Guillaume est nommé lieutenant-colonel en mars 1939.
L'armistice demandée par la France en 1940 la soumet aux dispositions dictées par les allemands.
Dans cette période difficile, Guillaume contribue, sous les directives du général Nogues, à permettre à l'armée d'Afrique d'échapper, dans une large mesure, aux effets de la démobilisation et à préserver les moyens dont elle était dotée en les soustrayant au contrôle des commissions allemandes et italiennes.
Le colonel Guillaume est chargé, pour sa part, du camouflage des Goums marocains, conservés sous le nom de "méhallas chérifiennes".
En mars 1941, il devra tout de même se rendre à Vichy pour défendre ses méhallas ménacées de dissolution par la commission de contrôle allemande. Il parvient à maintenir l'effectif de ces formations à 16000, puis 26000 hommes en argumentant qu'elles étaient en mesure de prévenir tout soulèvement interne au Maroc qui aurait pour effet d'immobiliser sur ce territoire une part non négligeable de la Wermacht.
Dès le débarquement américain au Maroc, le colonel Guillaume est placé à la tête des Tabors marocains par le général Noguès. Nommé général de brigade par le général Giraud, commandant en chef en afrique du Nord, il prend le commandement des Tabors du corps expéditionnaire français qui débarquera en Italie aux ordres du général Juin.
Ce sont ces Goums qui, en exécutant le plan audacieux conçu par le général Juin, vont ouvrir aux Alliés la route de Rome en débordant l'ennemi par les monts Aurunci réputés impénétrables.
Après la prise de Sienne, les Tabors sont de retour au Maroc. Le Résident général souhaite les conserver sur place pour faire face à une poussée soudaine du nationalisme et le général de Gaulle ne tient pas voir débarquer ces "soudards" en France.
Malgré ces avis, le général Guillaume obtiendra que 6.000 goumiers soient autorisés à participer au combat. En fait, il ne tiendra pas compte de cette restriction officielle, et 12 900 goumiers feront la campagne de France, soit la totalité des effectifs des Tabors.
Au lendemain de la libération de Marseille, Guillaume est nommé général de division et commandant de la 3eDivision d'Infanterie Algérienne (DIA) tout en conservant les Goums sous son commandement.
C'est à la tête de ces formations que le général Guillaume terminera le combat; il assurera la défense de Strasbourg après l'offensive allemande dans les Ardennes, franchira le Rhin et poursuivra sa marche triomphale jusqu'à Stuttgart que sa division atteindra fin avril 1945.
Après l'armistice, le général Guillaume est nommé attaché militaire à Moscou et conservera ce poste jusqu'en 1947.
Il reçoit en août 1946 les rang et appellation de général de corps d'armée. En 1947, il est adjoint au général de Lattre, inspecteur général de l'armée de terre, puis prend le commandement des troupes françaises d'occupation en allemagne qui prennent le nom de "Forces Françaises en Allemagne" (FFA) en 1948.
Général d'armée en 1951, il est nommé Résident général au Maroc, sur recommandation du général Juin qui quitte ce poste.
Le Maroc a beaucoup changé depuis la guerre. Au plan politique, face au sultan Mohamed V, favorable au parti nationaliste de l'Istiqual qui s'est créé parmi la jeunesse intellectuelle marocaine, une majorité de notables traditionnels, rassemblés derrière "el Glaoui", le pacha de Marakech, demandent le maintien du protectorat.
L'affrontement entre les deux camps conduira la France à déposer le Sultan le 20 août 1953 et le remplacer par Sidi Mohamed Ben Arafa. Les évènements qui suivront permettront au Sultan Mohamed V de retrouver son trône le 16 novembre 1955.
Le gouvernement français finira par reprocher au général Guillaume cette destitution, qu'il avait pourtant décidée; le général Guillaume sera éloigné du Maroc et remplacé, en mai 1954, par Francis Lacoste.
Nommé Chef d'Etat-Major général des Armées (CEMA), le général Guillaume démissionnera de son poste le 28 février 1956.
Ayant présenté au ministre les mesures qu'il préconisait pour faire face à la situation qui s'aggravait en Tunisie et en Algérie, ses propositions ne seront pas retenues par le comité dont l'un des membres déplora même "qu'une fois de plus, l'armée n'avait rien prévu "!.
L'instabilité ministérielle du moment, qui avait provoqué sept changements de ministre de la défense en vingt et un mois, était évidemment la cause principale de l'impuissance du gouvernement dans la gestion de cette crise. Le général Guillaume donna sa démission sur le champ, salua le Président Coty qui présidait cette séance et se retira.
En 1957, le général Guillaume recevra la plus haute distinction des soldats et des généraux en étant décoré de la Médaille militaire.
Il se retire alors à Guillestre, d'où il préside l'association "Rhin et Danube". En 1959, il est élu maire de Guillestre, s'attache à moderniser sa commune et, en 1973, il ouvre à la circulation le col d'Agnel (2.746 mètres); la route construite sera baptisée "route du général Guillaume".
Sa santé se dégradant, il ne renouvelle pas son mandat municipal et accède, en 1971, à une retraite bien méritée.
Le général Guillaume s'éteint le 9 mars 1983, à Guillestre. C'est là que ses compagnons de guerre viennent lui rendre un ultime et émouvant adieu.
En hommage à ce grand soldat, la promotion de Saint-Cyr 1990-1993 a prit le nom de "Guillaume".
Ecrivain et historien de talent, le général Guillaume à écrit, outre diverses études militaires, sept ouvrages:
- Les berbères marocains et la pacification de l'Atlas central (1946)
- Pourquoi l'Armée Rouge a vaincu (1948)
- La guerre germano-soviétique 1941-1945 ( 1949)
- Guillestre, mon pays, histoire d'un bourg haut-alpin (1963)
- Annibal franchit les Alpes (1967)
- Les Queyras - Spendeurs et calvaire d'une haute vallée alpine (1968)
- un recueil de souvenirs intitulé "Homme de guerre" (1977)