QUELQUES MOTS SUR LA GUERRE D’ESPAGNE…
«…Les Socialistes espagnols, longtemps avant l’intervention militaire de Franco, avaient déjà poignardé la République. Dès 1933, leur leader, Largo Caballero, avait fait le choix de tourner le dos à la démocratie en prônant la « révolution socialiste et sanglante ; une révolution qui ne se fera que dans la violence ! » (…)
Dans une Espagne en paix, les Socialistes avaient fait distribuer des milliers d’armes pour préparer le grand soir ibérique… Chaque jour les milices socialistes faisaient abattre des ennemis de classe : ouvriers, paysans, bourgeois, catholiques, et des parlementaires de droite !
Tout cela relativise un peu le coup de force d’un Francisco Franco, général légaliste, qui avait déjà refusé par trois fois de tremper dans un coup d’état… »
(Eric Brunet)
Combien de fois me suis-je fait agonir pour avoir osé écrire que le général Franco avait sauvé le catholicisme espagnol de la « terreur rouge » ; c’est pourtant la vérité, mais il ne faut pas le dire.
Et voilà qu’en pleine chaleur estivale, un orage a éclaté au sein de la bien-pensance française.
Un livre, paru en Espagne en 2003, il y a presque 20 ans, vient d’être traduit en français (1).
Et un entretien avec l’auteur, Pio Moa, a été publié dans « Le Figaro Histoire », suivi d’une vidéo d’Isabelle Schmitz qui a déjà récolté… 1,2 million de vues.
« L’Humanité », torchon communiste, a réagi violemment. Puis « Libération » et « Le canard enchaîné » ont fait de même. Les révélations de Pio Moa ont surtout ébranlé la France de gauche.
La droite molle, elle, savait mais préférait raser les murs, comme elle le fait depuis 1945, pour ne pas se faire traiter de fasciste. A gauche, le choc peut se comprendre : on lui apprend que tout est faux, tout est mensonger, sur les enjeux de la guerre civile espagnole.
Celui qui en apporte la preuve n’est pas un odieux nostalgique de Franco, bien au contraire. Pio Moa a été jadis un combattant antifranquiste virulent. Et que dit cet historien dont les écrits soulèvent, en Espagne, autant d’enthousiasme (2) que de cris d’orfraie haineux ?
Il dit que Franco ne s’est pas soulevé contre la démocratie car la démocratie n’existait pas en Espagne. Comment aurait-elle pu exister après les élections remportées de façon frauduleuse par le « Fronte Crapular » en 1936 ? Elle n’existait pas parce que les socialistes s’étaient soulevés deux ans plus tôt pour faire triompher la révolution bolchevique (mais qui ne réussit que très brièvement dans les Asturies). Les leaders socialistes affirmaient constamment leurs buts révolutionnaires et Largo Caballero, le Lénine espagnol, déclarait en février 1936: « Aussitôt que le gouvernement Azaña sera tombé, il y aura en Espagne une république soviétique ». Au moins, c’était clair !
À la veille de la guerre civile, la révolution (communiste, soviétique, socialiste ?) était sur le point de s’abattre sur l’Espagne. Seul un soulèvement militaire a pu l’empêcher, certes au prix d’une terrible guerre civile où des crimes ont été commis des deux côtés, comme hélas dans toute guerre fratricide. Les historiens franquistes l’ont toujours affirmé mais personne ne voulait les croire.
À commencer par la droite libérale espagnole, aussi lâche, aussi veule, que la nôtre.
Elle a préféré tendre la joue à ses ennemis d’hier en tentant, sans succès, une réconciliation entre les deux Espagne. Elle est allée à Canossa par peur d’être jugée trop à droite, et elle a voté aux Cortès une déclaration condamnant le soulèvement militaire de Franco.
La gauche, de son côté, a toujours refusé toute tentative d’oubli ou de réconciliation.
La persécution idéologique qu’elle mène depuis la mort de Franco pour imposer SA vision du camp du mal, va très bientôt être doublée (dès l’entrée en vigueur d’une loi scélérate dite « de la mémoire démocratique ») d’une persécution juridique contre tous ceux qui oseraient dire du bien du régime franquiste honni. Je suppose que Pio Moa devra bientôt raser les murs ?
En France, on connaît ça depuis longtemps : il est fortement déconseillé de sortir de la doxa officielle pour parler de Franco, Pétain ou Pinochet. Eric Zemmour en a fait les frais !
Dans l’inconscient collectif des Français, intoxiqués et matraqués en permanence par une presse totalement acquise à la gauche, la guerre d’Espagne – de 1936 à 1939 – c’est l’escadrille de Malraux, c’est Hemingway, ce sont les républicains et démocrates de tous les pays qui s’enrôlaient massivement dans les « Brigades Internationales » pour lutter contre la « peste brune » incarnée par les troupes franquistes.
Les républicains étant le camp des justes et celui des nationalistes, le mal absolu car allié à l’Allemagne d’Hitler et à l’Italie de Mussolini. C’est l’éternelle vison binaire de l’histoire !
Je n’ai jamais pris le « Caudillo » pour un enfant de chœur, mais, que cela plaise ou non, la vérité sur la guerre d’Espagne est plus nuancée que le récit idéalisé qu’on nous sert depuis des décennies.
Au lendemain du 17 juillet 1936, les organisations dites « prolétariennes », (communistes et anarchistes) prennent le pouvoir dans les villes et dans les campagnes.
En Catalogne et en Aragon, malgré les consignes de la Confédération Nationale du Travail (CNT), l’économie est collectivisée par les militants de base. En Andalousie, des groupes anarchistes décrètent l’abolition de la propriété (et même l’abolition de la monnaie).
Des milices socialistes, anarchistes, communistes, apparaissent dans tous le pays.
Parmi les violences commises durant la guerre d’Espagne, les attaques contre le clergé ont causé un traumatisme dans ce pays très christianisé. Pour l’historien Guy Hermet (3), le massacre des prêtres espagnols représente « la plus grande hécatombe anticléricale avec celles de la France révolutionnaire puis du Mexique d’après 1911 ». Des groupes anarchistes s’en prennent à des prêtres et à des églises dès les premiers mois de la guerre civile.
L’historien Antony Beevor(4) cite le chiffre de 13 évêques, 41 814 prêtres, 2 365 membres d’ordres divers et 283 religieuses, pour la plupart tués au cours de l’été 1936.
Des exactions sont commises en Aragon, en Catalogne et à Valence, où des églises sont incendiées et vandalisées. Des prêtres sont brûlés vifs dans leurs églises, des religieuses violées dans leur couvent, et on signale des dizaines de cas de castration et d’éviscération.
Rapporté aux effectifs du clergé espagnol, le nombre de victimes représente 13 % des prêtres diocésains, 23 % des religieux et 3 à 4 % des religieuses. Ces pourcentages, qui comptabilisent l’ensemble du territoire espagnol, sont largement dépassés s’agissant de la seule zone « loyaliste » : les assassinats de prêtres concernent 87,8 % de ceux du diocèse de Barbastro et 63,5 % de ceux du diocèse de Lérida. D’autres diocèses perdent 30 à 50 % de leurs prêtres, parfois plus.
Autour de Barcelone, où les anarchistes sont maîtres de la rue, les massacres commencent dès le 19 juillet : des groupes de prêtres, parfois capturés dans leurs cachettes, sont fusillés jusqu’en mars 1937. Et des assassinats se produisent jusqu’en avril et mai.
Les incendies de bâtiments religieux se multiplient dans la région, et seule la cathédrale de Barcelone échappe au feu et aux déprédations. La « Sagrada Família » en cours de construction est endommagée par des vandales; les maquettes et plans de l’atelier de l’architecte Antonio Gaudi sont détruits. Dix mille volumes précieux de la bibliothèque des capucins de Sarria sont volés ou incendiés.
Mais la « terreur rouge » n’a pas concerné que des prêtres. Dans plusieurs grandes villes, où socialistes et communistes dominent, les partis et syndicats de gauche réquisitionnent des bâtiments et créent des « commissions d’enquêtes », connues sous le nom de « checas » (en référence à la tchéka soviétique) : des franquistes sont traînés devant des « tribunaux populaires », quand ils ne sont pas froidement abattus sans jugement.
« Mieux vaut condamner cent innocents que d’absoudre un seul coupable », déclarait Dolorès Ibarruri, la « pasionaria » communiste espagnole. Des monarchistes, des personnalités de droite, des officiers demeurés en zone républicaine après l’échec du coup d’état, sont tués sans jugement ou après des simulacres de procès : 1 500 officiers sont abattus sans jugement sur les arrières du front.
La liquidation en masse, sur une durée de deux mois, de tous les « suspects » emprisonnés à Madrid. Plusieurs dizaines de milliers d’Espagnols vont être arrachés à leurs cellules et dépouillés de leurs objets personnels : des hommes, des femmes, des enfants, des vieillards, des prêtres, des intellectuels… Tous des civils arrêtés quelques semaines plus tôt par les terribles tchékistes au motif qu’ils auraient caché un frère, ou parce qu’ils avaient été raflés dans une église.
Madrid connaît une vague de meurtres politiques ou supposés tels. Dans la nuit du 22 au 23 août, une foule prend d’assaut la prison Moledo : une quarantaine de prisonniers politiques, des notables de droite et d’anciens ministres, sont massacrés lors de « sacas de presos ».
Début novembre 1936, à l’approche de la conquête de Madrid, entre 2 500 et 2 750 détenus politiques sont fusillés lors du massacre de Paracuellos, qui représente l’apogée des « sacas » envers les prisonniers politiques.
Cet épisode sordide et peu connu mérite qu’on s’y attarde :
Le 7 novembre, la guerre est aux portes de Madrid. La capitale est remplie de journalistes et d’écrivains, anglais, américains, français. Le Komintern a compris tout l’intérêt qu’il pouvait tirer de la mise en scène de la chute de Madrid. Santiago Carrillo, conseiller à la sécurité intérieure, va planifier l’impensable :
Les prisons de Modelo, de Ventas, de Porlier, de San Anton, vont ainsi être « évacuées » selon la même procédure officielle, sur l’ordre d’un gouvernement soutenu par Léon Blum.
« On va lier les poignets des prisonniers avec du fil de fer. Les détenus, hommes, femmes et enfants, vont ensuite être embarqués dans les célèbres bus à impériale de Madrid… Chaque bus sera escorté par une vingtaine de miliciens. Destination : le village de Paracuellos. D’importantes fosses ont été préalablement creusées… Par groupe de 30, les détenus sont poussés au bord des fosses puis mitraillés par des volontaires… Au fond de la fosse, un milicien républicain les achève d’un coup de révolver dans la nuque. Lorsqu’une fosse est pleine (environ 1500 corps), elle est recouverte de chaux…On parle de 11 000 corps de civils dans ces charniers de Paracuellos… » (5).
D’autres villages vont connaître le même destin que Paracuellos : Bobadilla, Alarcon, etc…
Après cet épisode tragique, les violences politiques tendent à diminuer. Elles s’apparentent à une répression de type stalinien, avec tortures et assassinats commis par le « servicio de información militar », police politique de l’armée populaire. Les victimes n’en sont plus uniquement des hommes de droite : l’épuration vise aussi les factions minoritaires de l’extrême-gauche espagnole, qualifiées de « fascistes ». Parallèlement, une « guerre civile dans la guerre civile » se développe dès 1937, avec les conflits entre républicains. Des affrontements, meurtriers, entre communistes et anarchistes en Catalogne s’achèvent, en mai 1937, par la victoire des communistes.
Juste à la fin du conflit, aura lieu une deuxième guerre civile interne au camp républicain, durant des combats opposant, à Madrid, des communistes et des anarchistes. Les exactions commises durant la « terreur rouge » ont touché l’ensemble du territoire républicain, mais leur répartition fut inégale.
Les régions touchées par la crise économique sont celles qui ont connu le plus de violences, notamment en Vieille-Castille, où 2 000 personnes ont été tuées. Certaines régions d’Andalousie ont connu de véritables carnages. A Malaga, le bombardement d’un marché entraîne une vague de répression en juillet : des suspects sont traînés hors des prisons pour être massacrés. La plus grande partie de la Catalogne est affectée par la terreur : dans les derniers jours de juillet, le passage des colonnes anarchistes est accompagné d’exécutions dans plusieurs villages.
Des listes noires de notables, de prêtres et de franquistes sont dressées et des « brigades spéciales » s’emploient à les retrouver. Ils sont aussitôt passés par les armes.
A Figueras, patrie de Salvador Dali, les anarchistes font exécuter 14 personnes détenues dans la prison et incendient le couvent des religieuses françaises. 250 prisonniers transférés, par train, depuis la prison de Jaén – dont le doyen de la cathédrale – sont assassinées durant le trajet.
Le gouvernement de Largo Caballero, arrivé au pouvoir en septembre, prend des mesures fermes pour rétablir l’ordre et la loi, aboutissant à une diminution des pillages et des assassinats.
Les atrocités des républicains finissent par heurter une partie de l’opinion, espagnole mais aussi étrangère. En France, le gouvernement de Léon Blum réfrène et tempère ses sympathies pour les républicains et s’aligne sur la politique non-interventionniste du Royaume-Uni.
Ce n’est qu’à partir du bombardement de Guernica en avril 1937, et du battage médiatique fait autour, que l’opinion internationale bascule en faveur de la République espagnole.
Après la guerre, Franco fit construire un mémorial en hommage aux morts franquistes : « El Valle de los Caídos » (la vallée de ceux qui sont tombés) dans la vallée de Cuelgamuros. En 1958, le Caudillo décida d’en faire un mausolée dédié à l’ensemble des combattants morts y compris les républicains.
En octobre 2019, les socialistes exhumaient la dépouille de Franco d’« El Valle de los Caídos » : 80 ans après, les vaincus de 1939 se vengeaient sur la dépouille du vainqueur !
« La vengeance est un plat qui se mange froid », c’est bien connu…
Pour conclure, je voudrais dire mon mépris pour ces Français souvent aisés – ancêtres de nos « bobos » de la gauche-caviar – qui, du temps de Franco, rentraient bronzés de leurs vacances en Espagne et, à peine arrivés en France, décrivaient avec moult détails l’« enfer franquiste ». En 1975, année de la mort du « Caudillo », les mêmes salopards applaudissaient la « libération » du Vietnam et du Cambodge. Puis, quelques années plus tard, ils pleurnichaient sur les « Boat people ».
Mais, la nature fait bien les choses : ceux qui n’avaient rien à reprocher à Staline, Mao, Pol-Pot ou Castro, allaient avoir une nouvelle tête de turc : le 11 septembre 1973, au Chili, le Général Augusto Pinochet renversait le socialiste Salvador Allende…
Ouf ! On pouvait reparler de la « peste brune » pour faire oublier le « choléra rouge ».
Alors tant pis, je vais encore me faire engueuler mais je dis merci à Pio Moa. Je pense que son livre – que je n’ai pas lu – ne m’apprendra rien que je ne sache déjà. Je vais donc lever mon verre, fredonner « Cara al sol » (6), et lancer un vibrant « ¡ Arriba España ! », car j’aime autant l’Espagne que la vérité historique. Quand cette dernière est rétablie, je jubile.
Éric de Verdelhan
20 Août 2022
1)- « Les Mythes de la guerre d’Espagne » de Pio Moa, chez L’Artilleur/Toucan.
2)- Il a vendu 300 000 exemplaires de son livre.
3)-« La Guerre d’Espagne », de Guy Hermet ; Seuil ;
4)-« La Guerre d’Espagne », d’Antony Beevor ; Paris, Calmann-Lévy, 2006. Et « Antony Beevor, La Guerre d’Espagne », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 22 juin 2009.
5)-« Dans la tête d’un réac » d’Eric Brunet.
6)- Hymne de la Phalange. José Antonio Primo de Rivera est l’auteur des paroles de « Cara al sol », hymne composé en décembre 1935, sur une musique de Juan Tellería.