« Sur l’immigration, la Pologne n’a pas de leçon à recevoir de la France »
Correspondant à Paris pour la radio polonaise, Marek Gladysz a suivi de près la crise migratoire à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie. Le journaliste dénonce l’hypocrisie du gouvernement français et l’emprise néfaste de l’Union européenne sur la gestion d’un dossier explosif.
Cette semaine, le président du Rassemblement national Jordan Bardella a affirmé que la Pologne était victime d’une invasion migratoire. Est-ce une réalité que vous constatez sur le terrain ?
Marek Gladysz. On ne peut pas encore parler “d’invasion”. Heureusement d’ailleurs. Pour l’instant, le problème n’est pas tant migratoire que politique. Ces milliers de migrants sont utilisés comme de la chair à canon par la Biélorussie. La Pologne se retrouve dans la position de victime dans cette guerre hybride entre le régime de Loukachenko et l’Union européenne. Minsk veut à tout prix se venger des sanctions européennes infligées après les polémiques autour de la réélection contestée du président Loukachenko l’année dernière [L’UE refuse toujours de reconnaître la légitimité du scrutin, ndlr] ou de la répression des opposants au régime. Dès cet été, le chef d’État biélorusse avait averti Bruxelles qu’il n’hésiterait pas à contre-attaquer. Donc ces migrants ne sont pas venus de leur plein gré. S’ils veulent vraiment, comme ils le clament, se rendre en Allemagne, il y a des chemins beaucoup plus classiques. En réalité, les services spéciaux biélorusses les ont fait venir d’Irak et de Syrie en leur promettant un passage sûr et évident vers l’Union européenne. Sauf qu’en les dirigeant vers les frontières polonaises, le gouvernement biélorusse savait pertinemment que les migrants allaient créer des tensions. Contrairement à certains dans l’UE, la Pologne est encore très attachée à la notion de souveraineté.
La Pologne n’a pas de leçon à recevoir de la France