Commandoair40 Admin
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| Sujet: Les Bat d'AF ( Pour notre Amie Zou77 ) Sam Jan 19 2019, 22:23 | |
| Les Bat d'AF
L'INFANTERIE LÉGÈRE D'AFRIQUE
Le financement de la présence française en Algérie se fit assez durement sentir dès les premières années du règne de Louis-Philippe qui avait hérité cette conquête déclenchée sous le signe du drapeau blanc.
Certains le pressaient de l'abandonner, mais il tint bon.
Par ailleurs, à une époque où des complications européennes étaient à craindre, il importait que les forces vives de l'armée française n'aillent pas se perdre trop loin de la métropole.
Des conseillers militaires avisés s'efforcèrent de trouver des "forces de remplacement" et de maintenir la présence française à Alger tout en rapatriant massivement les régiments dont nos garnisons s'étaient dégarnies.
On "inventa" ainsi les zouaves, on forma des bataillons de "turcs" naguère à la solde des beys, et, en 1832, le 13 juin, une ordonnance royale autorisa la création de deux bataillons d'infanterie légère d'Afrique, chacun à huit compagnies.
Ils devaient être composés :
1° Des militaires qui à leur sortie des compagnies de discipline devaient achever leur temps de service dans l'armée.
2° De ceux qui, condamnés pour des délits par les chambres correctionnelles, devaient à leur sortie de prison, satisfaire aux obligations militaires prévues par la loi.
3° D'engagés volontaires.
Ce n'étaient donc point précisément des unités disciplinaires, mais des corps d'épreuve, éprouvés par toutes les fatigues et toutes les misères des actions de guerre ou de pacification auxquelles on les soumettait.
De ces longues et épuisantes colonnes dans le bled, les "bataillons" revenaient éreintés, les vêtements en lambeaux, pieds nus ou presque.
Mais on les voyait passer la gouaille aux lèvres, joyeux dans ces haillons et les loustics de caserne les surnommèrent "zéphyrs à poils".
Puis on les appela tout simplement "les joyeux" :
Des têtes à l'envers, des écervelés, mais comptant dans leurs rangs beaucoup de braves gens.
Partout où ils sont allés, on a rendu justice à leur courage.
Leur nom réglementaire est "chasseur des bataillons d'infanterie légère d'Afrique".
On a souvent confondu les bataillons d'Afrique avec les formations appelées "compagnies disciplinaires" ou "sections d'exclus".
Les "disciplinaires" étaient de mauvais soldats pour lesquels les sanctions ordinaires avaient été reconnues inopérantes.
Les "exclus" étaient des condamnés à une peine infamante, considérés comme indignes de porter les armes.
Les chasseurs des bataillons d'Afrique étaient ceux qui avaient un "casier judiciaire" portant mention d'une condamnation avant l'entrée au service, mais pour une faute relativement peu grave.
Il n'y avait aucune raison pour qu'ils ne fassent pas de bons soldats, mais on avait créé pour eux un corps spécial, dont le régime était d'ailleurs le même que celui des autres corps de troupe de l'armée française, mais...
En Algérie, ils prirent part à toutes les affaires qui marquèrent les étapes de la conquête.
Le 10 novembre 1835, à Bougie, ils s'emparent de la position de Darnassar occupée par les Mesayas.
Le lendemain, sortis des lignes de Bougie pour enterrer leurs camarades tombés au dernier combat, ils doivent lutter contre 4000 Kabyles qu'ils repoussent à la baïonnette.
Le 24 novembre 1836, le général Trézel, grièvement blessé au cours des opérations du premier siège de Constantine, est sauvé par le caporal Rouard, du 2e bataillon, qui le charge sur ses épaules.
Au deuxième siège, une compagnie franche fait partie de l'une des trois colonnes d'assaut et pénètre de vive force dans la place, laissant sur le rempart son capitaine et 75 hommes tués, 2 officiers et 30 chasseurs blessés.
A Cherchell en mai 1840, le bataillon du commandant Cavaignac lutte furieusement pendant cinq jours.
L'autre bataillon, le 1er, guerroie en Oranie et se couvre de gloire à l'affaire de Mazagran.
La défense de Mazagran par les Bat' d'Af'.
C'est au début de février, lorsque Abd-el-Kader, ayant dénoncé le traité de la Tafna, attaque brusquement.
Son lieutenant, Mustapha ben Tami, à la tête d'une harka de 12000 Arabes, se porte sur Mazagran qu'il essaie d'enlever de vive force.
Le 3 février, il encercle la kasbah, faible réduit en pierre sèche défendu par 123 chasseurs de la 10e compagnie du 1er bataillon, sous les ordres du capitaine Lelièvre.
Deux canons battent en brèche le bâtiment, puis les Arabes donnent l'assaut.
Ils le donneront pendant quatre jours, sans cesse repoussés.
Le 7 février au matin, les défenseurs sont dégagés par une partie de la garnison de Mostaganem, accourue sous les ordres du colonel du Brail.
La petite troupe fut ramenée à Mostaganem, dix-sept citations lui furent accordées et la compagnie du capitaine Lelièvre reçut en garde le drapeau, troué par les balles, qui avait flotté sur les murs de la kasbah de Mazagran.
Jusqu'après la guerre de 1914-1918, le 1er bataillon conserva précieusement cette relique.
Puis elle fut versée au musée de l'Armée.
Vingt, trente combats, ont marqué la part que prirent les bataillons d'infanterie légère d'Afrique à la pacification de l'Algérie.
Ils peuvent revendiquer une grande part des succès remportés à Laghouat, à Trebissa et au col de Tirourda.
Puis ils reprirent l'œuvre des légionnaires de Rome, construisirent des routes, des postes.
L'une de leurs réalisations originales fut le jardin du Kreider.
Le Kreider, où rien n'existait avant l'arrivée des Français, est un point des Hauts Plateaux qui commande le seul passage existant entre le chott Ech Cherqui, et permet de se rendre par Bou-Ktoub, d'une part sur Géryville, d'autre part sur Mecheria et Aïn-Sefra.
Le 1er bataillon d'Afrique, utilisant une source d'eau douce située à proximité de son bivouac, réussit à transformer une portion du sol magnésien et mouvant du chott, en un parc magnifique, comprenant une ferme modèle entourée de prairies nourrissant un troupeau de bovidés, des vergers et des potagers produisant les fruits et les légumes de France.
Le Kreider, à partir de 1913, fut passé à la Légion, lorsque le 1er bataillon d'Afrique fut transféré au Maroc.
En février 1864, le 2e bataillon d'Afrique fut envoyé au Mexique; sous les ordres du commandant Colonna d'Ornano, il prit part à plusieurs combats.
Avec le commandant Chopin, il effectua la dure colonne de Vittoria et fut cité à l'ordre.
Il resta l'un des derniers sur le territoire évacué pour couvrir la retraite et livra un ultime combat à Chalco.
Au Tonkin, en 1884, un bataillon, capitaine Servière, combattit à Bac-Lé, Lang-Son, Kao-Niat, Ha-Hoa, Dong-Sun.
Un bataillon de marche opéra pendant deux ans au Dahomey, contre Behanzin (1893).
Les trois bataillons qui existaient en 1907 furent engagés au Maroc.
En France, les chasseurs des bataillons d'Afrique étaient venus en 1870, formant un régiment de marche sous les ordres du lieutenant-colonel Grateaud.
A Beaune-la-Rolande, une seule compagnie eut 80 tués, dont son chef le capitaine Dupeyron.
Le lendemain, à l'affaire de Mézière, elle perdait encore 70 hommes sur la centaine à laquelle elle était réduite.
Le régiment passa à l'armée de l'Est à la fin de l'année 1870, combattit à Villersexel, à Héricourt, livra enfin le combat d'Oye, le 1er février 1871.
En 1914, il existait cinq bataillons d'infanterie légère d'Afrique :
Le 1er à Oran (dépôt à Marnia),
Le 2e en opérations au Maroc (dépôt à Mcheyda et EI-Hadjeb),
Le 3e au Maroc (dépôt à Casablanca),
Le 4e en Tunisie (dépôt à Gabès),
Le 5e également en Tunisie (dépôt au Kef).
A la mobilisation, on regroupa divers éléments pour constituer des bataillons de marche.
Le 1er bataillon de marche fut formé le 29 octobre 1914 avec des compagnies du 2e et du 1er;
le 2e bataillon de marche avec le 3e bataillon et une compagnie du 1er au Maroc en novembre 1914;
le 3e bataillon de marche avec les 4e et 5e bataillons, également en novembre 1914.
Le "groupe des bataillons de marche d'infanterie légère d'Afrique" fut constitué le 2 janvier 1918.
Le 3e bataillon de marche obtint six citations à l'ordre de l'armée et se couvrit tout particulièrement de gloire au cours de l'affaire héroïque de "la Maison du Passeur" en Belgique, il porta la fourragère rouge.
Le 1er bataillon de marche obtint la fourragère aux couleurs de la médaille militaire et le 2e celle aux couleurs de la croix de guerre.
Reformés après la guerre, les cinq bataillons reprirent leurs garnisons traditionnelles.
Le 5e (formé en 1889) fut dissous en 1925.
Le 2e et le 4e furent dissous en 1927, le 3e en 1935.
Le 1er disparut en 1940, il était en garnison à Tatahouine.
Il fut reformé en 1944 et fut en Indochine jusqu'en 1951.
Le 3e fut reformé en 1951 et subsista jusqu'à la disparition de l'armée d'Afrique.
Les bataillons d'Afrique reçurent un drapeau en 1950.
Ses inscriptions furent les suivantes :
Mazagran 1840, Maison du Passeur 1914, Verdun 1916, Reims 1918, La Suippe 1918.
L'uniforme était sensiblement, avant 1914, le même que celui de la Légion étrangère, avec la ceinture bleue et le col de la tunique jonquille.
Les galons de laine étaient jonquille, le passepoil du képi également.
L'insigne distinctif était le cor de chasse (au lieu de la grenade à sept branches).
Les épaulettes avaient le corps rouge et les franges vertes.
Les officiers, même uniforme que ceux de la Légion, avec boutons et galons d'argent, plumet vert comme aux chasseurs à pied.
Écussons de col du drap de fond et chiffres violets (pour la troupe).
Cette distinctive violette, les bataillons la conservèrent entre les deux guerres.
Ils furent chantés par quelques poètes de faubourgs comme Aristide Bruant qui avait mis à la mode les couplets fredonnés à Montmartre ;
C'est nous, les Joyeux
Les petits Joyeux
Les petits marlous qui n'ont pas froid aux châsses
C'est nous les Joyeux,
Les petits Joyeux,
Les petits marlous qui n'ont pas froid aux yeux.
Leur départ pour "les bataillons" en octobre de chaque année nécessitait un service d'ordre assez rigoureux, car toutes les filles venaient accompagner à la gare "leurs hommes" qui partait pour l'Afrique.
Francis Carco, Pierre Mac Orlan les ont célébrés, sur le mode nostalgique.
Le refrain du 1er bataillon ; "Joyeux, fais ton fourbi, pas vu, pas pris, mais vu, rousti. Bat d'Af !" est bien connu, comme leur chant de misère :
II est sur la terre africaine
Un bataillon dont les soldats
Sont tous des gars qu'ont pas eu d' veine
C'est le Bat d'Af et nous voilà...
Pour être joyeux chose spéciale
II faut sortir de la rue de Poissy
Ou bien sortir d'une centrale.
C'est d'ailleurs là qu'on nous choisit
Mais après tout, qué qu'ça fout, on s'en fout...
En marchant sur la grand-route
Souviens-toi
Les anciens l'ont fait sans doute
Avant toi
De Gabès à Tatahouine
De Gafsa à Médenine
Sac au dos dans la poussière
Marche, bataillonnaire...
Il fallait entendre Carco lancer les notes de cette chanson.
Marc Orlan rapporte que l'on désigna les trois premiers bataillons d'Afrique par les sobriquets respectifs de Chacals, Zéphyrs et Chardonnerets.
Ce qui est peut-être exact.
Les réservistes appelés à la mobilisation de 1914, que l'on appelait les "Groupards", avaient bâti une église en briques à Tatahouine, face au camp Dutertre où subsistait le 1er B.I.L.A. en 1939.
La défense de Mazagran en 1840 était le Camerone des Joyeux.
Mac Orlan avait entendu, dans les cantonnements de l'Artois, en 1915. une chanson dont le refrain disait :
J'ai dans le cœur une chanson nouvelle,
Mes vieux copains, retenez la chanson,
II vaudrait mieux finir à la Nouvelle
Que de servir au troisième bataillon.
La Nouvelle, c'est-à-dire la Nouvelle-Calédonie, l'ancien bagne.
Et un jeune chasseur lui avait copié, avant l'attaque de Rancourt et de Bouchavesnes, en 1916, les paroles d'une autre chanson que chantait aussi Carco et dont le refrain est le suivant :
Plan, rataplan, au r'voir à tous les parents,
Aux frangins, aux goss's affranchis
A la môme Chochotte qui fait des chichis
A la Louise, à la grande Clara
A la Rouquine, excetera
Et toi, la bell'goss' qu'est-ce que tu prendras
Quand on r'viendra !
On n'en finirait plus de vouloir citer toutes ces chansons...
Ce ne sont plus que des souvenirs.
Les Joyeux, c'est terminé .
Les unités de répression pour les militaires de mauvaise conduite existaient déjà sous la Royauté, l’Empire et la Restauration, mais ce n’est qu’en 1832 qu’apparurent les unités de discipline, sous leur nom définitif .
En réalité il exista trois types de corps de discipline militaire.
Il y avait les Bat’ d’Af’ dont les soldats appelés Zéphyrs puis Joyeux, avaient purgé une peine d’emprisonnement avant leur incorporation.
Il y avait les Exclus qui, ayant subi une peine infamante et ayant été jugés indignes de porter les armes, effectuaient leur service sous la forme de travaux forcés : essentiellement terrassements et construction de routes.
Et enfin il y avait les Camisards qui, pour avoir commis des fautes graves et répétées, étaient regroupés dans des compagnies spéciales de discipline ; ce sont à ces véritables pénitenciers, célèbres par leurs sévices, que l’on a donné le nom de Biribi, en référence sans doute au jeu de roulette italien :
Les Camisards avaient perdu à la roulette de la vie.
Dans l’imagerie populaire, Biribi, lieu de souffrance, fut associé à l’ensemble des Bat’ d’Af’.
Lorsque les bataillons restaient dans leurs garnisons d’Algérie ou de Tunisie, situées dans des régions très inhospitalières- dont la célèbre Tataouine- l’ambiance était toute différente, par suite du régime, parfois inhumain infligé aux Joyeux :
On peut citer les sévices du tombeau où on enfouissait le puni dans le sable la tête seule sortant du trou sous un soleil ardent, ou celui de la crapaudière où le puni était attaché à plat ventre, pieds et mains fixés ensemble derrière le dos.
Il s’ensuivit des décès dont la presse s’empara.
Et c’est ainsi que des auteurs comme Albert Londres, Pierre Mac Orlan, Georges Darien ou Jean Genet firent paraître des récits hauts en couleur où l’imaginaire trouvait à satisfaire toutes les pulsions émotives, romanesques ou morbides.
Le dernier bataillon, le 3° BILA, avait quitté Tataouine en 1956, après l’indépendance de la Tunisie, pour rejoindre Tindouf dans l’ouest saharien, puis Fort Flatters en 1960.
Réduit à une compagnie, il fut en 1967 à la base de Mers el Kébir, puis à Obock en territoire de Djibouti où il sera dissous.
3eme BILA
___________________________________ ____________________________________Sicut-Aquila « Je ne suis pas abattu, je n'ai pas perdu courage. La vie est en nous et non dans ce qui nous entoure. Être un homme et le demeurer toujours, Quelles que soient les circonstances, Ne pas faiblir, ne pas tomber, Voilà le véritable sens de la vie ». | |
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