La diffusion, la semaine passée, d’une vidéo montrant un élève menacer son professeur avec une arme factice a libéré la parole des enseignants sur les réseaux sociaux, des milliers de messages dénonçant la violence scolaire ainsi que l’apathie de leur hiérarchie face à cette dernière ayant alimenté le fil de conversation #pasdevagues.
Depuis, le président Macron a demandé un plan d’action pour traiter cette question, pourtant ancienne. Le 26 octobre, les ministres de l’Intérieur [Christophe Castaner], de la Justice [Nicole Belloubet] et de l’Éducation nationale [Jean-Michel Blanquer] ont évoqué quelques mesures devant être présentées lors du prochain Conseil des ministres.
Il faut que « l’école soit un endroit sanctuarisé, protégé, que nos enseignants soient protégés et que nos élèves soient aussi protégés de ces violences inacceptables », a ainsi affirmé M. Castaner, qui n’exclut pas la « présence physique de forces de l’ordre » dans certains établissements scolaires ainsi que des « permanences de policiers ou de gendarmes » pour créer des lieux d’échanges « dans les quartiers les plus difficiles. »
Il est aussi question de signaler systèmatiquement les faits de violence, de donner des « sanctions proportionnées éducatives », de renforcer les « équipes mobiles de sécurité qui permettent de remettre de l’ordre dans un établissement » ou encore de « multiplier les travaux d’intérêt général », ce qui « aura une forte valeur éducative ».
Manquait plus que l’encadrement militaire des fauteurs de troubles recidivistes, maintes fois proposé par le passé par des élus de droite comme de gauche. En 2007 puis en 2011, Ségolène Royal (PS) avança une telle idée. De même qu’Éric Ciotti (LR), à l’origine d’une proposition de loi imposant aux délinquants âgés d’au moins 16 ans d’effectuer un « service citoyen », d’une durée de six à douze mois, au sein des Établissements publics d’insertion de la Défense (EPIDE).
Pour rappel, les dispositifs d’insertion faisant appel à un encadrement militaire (Service militaire volontaire, EPIDE, etc), qui, par ailleurs, obtiennent de très bons résultats, s’adressent aux jeunes adultes dits « décrocheurs » et reposent sur le volontariat.
Or, le 27 octobre, sur les ondes d’Europe1, M. Blanquer a également évoqué l’idée d’un encadrement militaire pour les élèves qui, âgés de 13 à 18 ans, sont régulièrement exclus de leur établissement pour des raisons disciplinaires.
« La question de ce l’on appelle les polyexclus est une question à laquelle il faut maintenant trouver une solution. […] L’élève va dans un autre établissement où il va semer le désordre et d’ailleurs […] il est indifférent au fait d’avoir été exclu. Donc, la sanction a une portée limitée. Donc, parfois, on est obligé de le faire [l’exclure, ndlr] parce qu’il n’y a plus aucune autre solution. Mais il faut évidemment réfléchir à ce qu’il se passe après. D’où une des grandes pistes de réflexion, qui sera précisée mardi [au Conseil des ministres du 30 octobre, ndlr] consistant à « avoir des structures dédiées plus importantes », a expliqué le ministre de l’Éducation nationale.
« Nous avons besoin, pour les 13-18 ans, de structures dédiées solides, encadrées par des personnes qui peuvent venir de différents corps de métiers, aussi bien de l’Éducation nationale que, par exemple, de l’armée et de la police. C’est quelque chose qui n’est pas exclu », a poursuivi M. Blanquer.
Pour autant, il n’est pas question de solliciter le ministère des Armées pour fournir des cadres à ces établissements spécialisés qu’il souhaite créer. « Vous avez notamment de jeunes retraités de l’armée qui sont tout à fait pertinents pour ce genre de structure. On a déjà ça dans les EPIDE, qui, au départ, ont été conçus dans le cadre de l’armée et qui maintenant relèvent plus du ministère du Travail pour les 18-25 ans », a précisé le ministre.
Le fonctionnement des EPIDE repose sur le volontariat. « Mais demain, a continué M. Blanquer, on peut imaginer que pour les 13-18 ans, on ait quelque chose qui soit obligatoire pour les élèves qui feraient l’objet de sanctions disciplinaires. »
Seulement, encadrer des jeunes adultes volontaires est une chose… Le faire pour des mineurs n’ayant qu’une vague idée de ce qu’est la discipline en est une autre. De quoi mettre ces « jeunes militaires retraités » dans des situations délicates…
En attendant, la proposition de M. Blanquer n’a pas été accueillie avec enthousiasme par le Syndicat des enseignants du 2nd degré. « La réponse sécuritaite est insuffisante. Qu’est-ce qu’on va faire de ces jeunes? Le but est, encore une fois, qu’ils puissent être réinsérés dans le système scolaire et dans la société en général. Et le fait de supprimer des postes dans l’Éducation nationale au budget 2019, c’est aussi une façon d’évacuer le problème », a réagi Frédérique Rolet, sa secrétaire nationale, à l’antenne de France Inter.