Deux chasseurs à cheval audacieux
10 décembre 1914
Le sous-lieutenant Perrot vient d’arriver parmi nous comme observateur.
Maréchal des logis au début de la guerre,
il a gagné dans les chasseurs à cheval des galons,
des ordres du jour et la Légion d’honneur.
Lorsqu’il fut décoré,
il fut invité à déjeuner par le général commandant son armée.
Il a connu des dangers.
Il était en garnison à Lunéville au début de la guerre.
Il a fait tout le front jusqu’en Belgique.
Ses aventures sont fantastiques,
elles rappellent par de nombreux côtés celles de d’Artagnan.
Petit, vif, trépidant, alerte, et … méridional,
il donne l’impression d’un diable qui sort d’une boîte.
Ainsi, un jour, son commandant est blessé et fait prisonnier.
Au hasard d’une patrouille,
le sous-lieutenant Perrot approche du village occupé par les Allemands,
où se trouve, à l’ambulance, l’officier français.
Le chasseur n’hésite pas, il n’a que son ordonnance avec lui :
il décide d’aller faire une visite à son commandant.
Sans même se cacher, il entre dans la localité ;
des civils français lui indiquent l’ambulance
mais le conjurent de s’éloigner en hâte.
Rien ne peut modifier sa résolution.
Il va au chevet du blessé.
L’ordonnance – tué par la suite – garde le cheval dans la cour.
Un quart d’heure après, Perrot descend de l'ambulance et repart.
Des cyclistes allemands prévenus surgissent,
lui font la chasse et tirent :
aucun projectile n’atteint les deux cavaliers qui rentrent à leur régiment
et racontent l’incident.
Tout le monde rit, personne ne veut les croire.
Le soir, contre-attaque, nous prenons le village,
les blessés n’ont pu être emportés tant était grande la déroute allemande. Nous retrouvons le commandant.
Chacun épie le visage des deux héros croyant y voir de la déconvenue,
leur bluff allant être découvert.
Mais les premières paroles de l’officier sont les suivantes :
- Je suis bien content d’être de nouveau parmi vous.
- Ce matin, j’ai eu de vos nouvelles par le sous-lieutenant Perrot
- qui est venu passer un quart d’heure auprès de mon lit.
- Dites-moi s’il s’est échappé sans être tué,
- car j’ai entendu une terrible fusillade après son départ.
- Les rieurs devinrent admirateurs !
-
Jacques Mortane, engagé volontaire en 1914